
communiquer cette maladie & d’en délivrer les
campagnes , eft de jeter un ou plufîeurs moutons
atteints de ce mal dans les lieux qu’ils ravagent
; Y a ir y porte la contagion de toutes parts,
& celle -ci en a bientôt purgé les champs qu’ils
dévaftoient. Feu M. de Bienville, officier très-
eftimé, tué à la tête du régiment de Bretagne-infanterie
, dont il étoit lieutenant - colonel, n’en
délivra fa terre de Louviers , fituée en Dauphiné ,
que par ce moyen qui eft indiqué par M. B o u r -
g e l a t , dans fon T r a i t é d u c la v e a u , 8c. dont plusieurs
autres perfonnes fe font fervies auffi avanta-
geufement.
Les agriculteurs & les vétérinaires qui habitent
des pays à moutons, ont fouvent obfervé encore
u’il {uffifoit du paflage dans le vôifïnage d^une
ergerie, d’un pajsc% bu ‘ l ’un cantonnement' qui
recèle des moutons claveleux, fur-tout au deffous
du vent, pour communiquer cette' maladie a un
troupeau parfaitement fain (i). Ces faits ne prouvent
ils pas, quoi que puiffe dire un auteur moderne
qui cherche à difculper Y air de tous les reproches
qu’on lui fait relativement à la propagation
& à la confervation de la contagion , qu’il
luffit de refpirer celui qui eft empreint de mialmes
varioliques , pour prendre la petite vérole > fans aucune
communication médiate ou immédiate. ( V .
C laveau. ) M. H uzard.
A i r . Hygiène.
Partie il . Matière de 'Vhygiène *, ou chofes
appelées improprement non naturelles.
Claffe I; Circumfufa , chofes envi rouan tes.
Ordre I. Atmofphère ; i°. air atmofphéri-
que y &c.
* La première clafle des chofes appelées par les
anciens n o n n a tu r e lle s , comprenoit Y a ir . Dans
l ’ordre que fai adopté, &_d'ont on verra le plan
dans le difcours préliminaire, je fubftituè au nom
impropre dz c h o fe s n on n a tu r e lle s , celui de matière
d e l ’h y g iè n e : 8c dans cette partie de l’hygiène qui
traite des chofes dites n o n n a tu r e lle s , & dont je
fais la fécondé de tout ce travail, la première
claffe que j’admets eft défignée par le titre de c ir c
um fu fa , ou c h o fe s en v iro n n a n te s ; dénominaf
tion déjà adoptée par Boërhaave , plus étendue, &
qui comprend un plus grand nombre de chofes que
la fimple dénomination d'a ir . L’a i r , tel que je
le corifidère ic i, & Y a tm ofph ère même , dont Y a ir
proprement dit n’eft que la principale portion,
ne font que des parties de cette claffe générale des
chofes qui nous environnent.
J J a ir eft pour le médecin ce fluide élaftique,
(i) Voyez un rapport très-bien fait fur le claveau, par
M . Barder, vétérinaire à Chartres, inféré dans la Bibliothèque
phyjico-économique, année 1786 , tome premier,
page 1^7.
invifible par fa tranfparence , qui nous environneÿ
dans lequel nous vivons, & qui fert à entretenir
la refpiration 8c la vie des animaux qui en font
entourés.
On peut confldérer Y air de deux manières ou
comme faifant la bafe de ce mélange d'a ir , de
fluide électrique , de chaleur folaire , de lumière ,
d’émanations de différentes efpèces, que nous nommons
atmofphère , & étant par conféquent l ’intermède
de toutes les révolutions qui fe font autour
de la furface du globe j fous ce point de vue,
il en fera traité.à l ’article A tmosphère ; ou bien
on peut Tenvifager indépendamment de ces grandes
combinaifons, de ces grahds mouvemens excités
par la nature, & feulement comme agiffant immédiatement
fur nous & au dedans de nous par fes
qualités inhérentes & individuelles. C’eft là l ’objet
de l’article dont, il s’agit actuellement.
L ’action de Y air fur nous peut être confédérée
fous différens rapports. U air atmofphérique preffe
de tous côtés la furface de notre corps ; il pénètre
dans nos poumons pour fervir à-nôtre refpiration j
il s’introduit encore par les organes de la déglutition,
& exifte fous fa forme élaftique dans les voies
inteftinales , dans lefquèlles il' eft mêlé avec Je
fluide élaftique dégagé de nos alimens pendant la
digeftlon. Sous ces différens rapports Y air nous
offrira différentes claffes d’effets. .
Les uns dépendent de fe s combinaifons d;ans
le corps animal, & ,des changemens qu’il, y '
éprouve. 1
Les autres dépendent de fes qualités phyfiques ,
fo it çjfentielles, telles que fon élaftiçité & fa pe-
fanteur ; fo it accidentelles. & variables, telles que
fes différens degrés de chaleur 8c d’humidité.
D ’autres font produits par le mélange des fubf-
tances qu’i l eft ftfceptible de dijfoudre, ou des
autres fluides élaftique s .auxquels i l fe mêle y <$■
qui lui font étrangers. ..
D’autres enfin font occafionnés par-les divers
mouvemens qui font imprimés à ce fluide f l mobile.,
& qui y établijfent des courans plus ou moins
rapides.
C H A P I T R E F R E M I E R .
De s effets de Vair dépendans de fe s combinai-
fons & des changemens qu’i l éprouve dans
le corps animal.
. On ne peut nier que les derniers travaux des
chimiftes , depuis Prieftley, & particulièrement
ceux de MM. Lavoifier 8c de Laplace , n’aient
. jetc une grande lumière , & fur la corinoiffance
de Y air en lui-même, & fur le rôlp qu’il joue dans
l ’économie animale. Cette carrière avoit déjà été
ouverte avant eux avec gloire par Boyle & par Haies.
Cependant, en cette matière comme en beaucoup
d’autres, il faut bien prendre garde de confondre
des théories fatisfaifantes & même.très-probables,
avéc des vérités démontrées ; car il ÿ a encore
beaucoup d’obfervations à faire avant de compléter
une théorie prouvée de Y air 8c de fon action fur
nous. Auffi , -un des premiers foins de ceux qui
traitent'ces matières , s’ils ne veulent point induire
en erreur, doit être de mettre à part les.faits & à
part les théories, de diftinguer avec foin les démonf-
trations des conjectures,les probabilités descertitudes.
Dans l ’étude des effets de Yair fur nôs corps
il y a toujours deux chofes à confidérer j les changemens
que Y air éprouve de notre part & ceux
qu’il nous fait éprouver j & cette double confidé-
ration doit avoir lieu, foit qu’dn examine i ’tf/V
qui fert à notre refpiration, ou celui; qui touche
la furface de notre corps, ou enfin celui qui pénètre
dans le canal alimentaire.
A rt. Ier. Effets 'dépendans des combinaifons
de l’ air dans la refpiration.
§. Ier. Changemens démontrés que l’air éprouve
dans la refpiration.
{ i°. jEtat de l’air atmofphérique. ) Il eft connu
& prouvé que Vair que nous refpirons & dans lequel
nous vivons, eft un mélange de r^^ parties
d’un gaz non refpirable qu’on a nommé mofette (1 ),
& de 27 parties de véritable air refpirable, qu’on
appelle air pur ou air -vital. La petite quantité
de gaz acide crayeux , ou , comme plufîeurs le nomment
aujourd’hui, de gaz acide carbonique (2) qui
s’y trouve, eft prefque Huile en comparaifon des deux
(1) C’eft ce que M. Prieftley a nommé air phlogiftique,
8c ce que depuis peu oh a nommé ga\ azotique, de a pri-
Vatif & de Çwrjxoî, vitalïs, vivificus , qui entretient la vie j
"parce que ce gaz, mêlé dans l’atmofphère avec l’air vital
ou celui qui entretient la vie & qui. en eft l’aliment , der
vient très-pernicieux quand il. eft feul, & afphyxie en un
inftanc les animaux.
(2) C*eft-à-dire, fuivant M. Lavoifier, l’élément- du
charbon, le carbone de la nouvelle nomenclature, uni à la
bafe de l’air vital, autrement nommée oxygyne , ou mieux
encore oxygène( c’elî-à- dire i qui fa it les acides). Le fait
eft, que dans l’air vital le charbon parfait fe confume
rapidement & prefque entièrement , c’eft-à-dire , eh laif-
fant très-peu de réndu , & que tout l’air qui a fervi à la
combuftion eft remplacé par lucide crayeux, en moindre
volume , mais avec une augmentation de poids proportionnelle
à la perte que le charbon a faite ; ce qui annonce
une combinaifon dans laquelle il n’a pu entrer d’un
cote que l’air vital qui n’exifte, plus comme tel , & de
l’autre, ce principe du charbon, qui eft difparu de même.
Ces deux corps n’ont pu former, en s’uniffant, que l’acide
crayeux ou carbonique , qui fe trouve être le feul produit
exiftant de cette combinaifon. ; car la terre réfulrante
eft peu de chofe, & la lumière ainlî que la chaleur qui
fe font; dégagées pendant la combinaifon , n’ont aucun poids
fenfible. La chaleur & la.lumière étoient, comme beaucoup,
d’autres expériences paroiffent le prouver , combinées
avec 1 oxygène dans l’air vital i mais la lumière eft .'peut-
être autant due à la décompoiition du charbon qu’à celle
de l’air vital , comme" il me femble que plufîeurs faits
peuvent le faite préfuraer, J’ai cru cette note néeeffaire
autrès, 8i d’après lés expériences les plus exa&es
n’excède guère une partie ou 730 Ç*u total. Cette
quantité luffit cependant pour produire dans différentes
opérations chimiques, des phénomènes qu’on
ne peut attribuer qu’à cette, portion de Y air atmofphérique.
Mais elle eft trop petite pour avoir
des effets remarquables fur l ’économie animale.
( i ° . jEtat de l’air atmofphérique refpiré. ) i l
eft connu que Y air qui a fervi à la refpiration,
mais qui, n’ayant point été -épuifé;, eft encore relpi-
rable , contient trois, efpèces de fluides élaftiques.
L ’un eft de la mofette, l ’autre eft un refte d’air
, vital \ le troifîème eft une porliçn .de ga\ acide
carbonique , qui d’abord n’y étoit pas , ou au
moins qui n’y étoit pas dans une auffi grande proportion.
Voilà ce que nous ont appris jufqu’i cette
heure les'travaux des chimiftes, qui.fe font d’ail-?
leurs trop peu occupés de l ’examen de l ’humidité
qui accompagne Y air qui fort du poumon , & de
lanalyfe du peu de principes, ^»it fixes foit volatils
, qu’elle contient.
Mais un chimifte médecin (3) (M. Jurine, chirurgien
de l ’hôpital de Genève-);vient de nous donner,
par des. expériences très-précifes-, très-exaftes, & dirigées
ver-s l ’étude phyfiolog-iqùe de 1 homme d’une
manière-plus fpéciale que celles, qui avoient été
faites jufqu’à cette heure , une analyfe prefque
complète de Y air refpiré , dans laquelle cependant
il omet, comme les autres, l ’examende l ’humidité
qui s’évapore avec lui. Il y démontre ce qu’a-,
voit déjà démontré Prieftley dans d’autres termes,
I mais non pas auffi précifément que lu i, & ce que
les nouvelles découvertes avoient prefque fait, oublier
y il démontre , dis-je, que la quantité de mofette
qui exifte dans Y air atmofphérique y eft notablement
augmentée après la refpiration (4). IF démontre
que ,1a quantité d’acide. aérien ou. acide
ici, parce que , comme on va le voir , fhiftoire de ia.com-,
buftion .n'eft pas auffi étrangère qu’on le " crbîroit bien à
celle de là refpiration. Cependant je crois qu’on ne peut
pas ^identifier ces deux: opérations auffi complètement que
quelques chimiftes l’ont voulu,
( 3 ) Je dis médecin , parce que je n’ai jamais conçu
qu’on pût regarder, dans l’état a&uel des chofes , un mç-
decin & un chirurgien inftruit, comme des hommes attachés
à-des profeffions différentes. Ils exercent deux parties
d’une même profeffion, qui eft l’art de guérir, ou la médecine.
L’ouvrage de M. Jurine, qui eft ici cité, eft un mémoire
qui a remporté le prix propofé par la fociété royale
de Médecine , fur l’utilité médicale de l’Eudiométrie.
(4) Je dis mofette , autrement ga\ [azotique , quoique M.
Jurine ne défigne pas conftamment fous ce nom cette portion
de l’air rel'piré.. Mais je la nomme ainfi, parce qu’elle
n’eft ni abforbable par l’eau, ni fufceptible d’être combinée
au gaz nitreux, ni inflammable, comme le démon-»
tre M. Jurine j & que par conféquent elle n’eft ni de l’acide
crayeux ou carbonique , ni de.-l’air vital, ni du gaz
inflammable , femblable en cela à la mofette atmofphérique.
Mais la mofette atmofphérique eft-elle exactement
la même que cette mofette mêlée à l’air dans la refpiration
des animaux ? C’eft ce qui n’eft pas encore pleinement
décidé.