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l ’idée fijperftitieufe que les plaies qu’ ils fe font font
agréables aux Dieux. Les maniaques de ee dernier
genre font honnêtes & -modelées dans le relie
de leurs a étions. Arétée die ( l. z , de caufes &
figtiis diuturn. affect. , ç. i ), en traitant de
JL’anafarque , que les malades affeétés de ce mal
font.très-occupés des plus petites chofës., ont un
grand défir de vivre , .une tolérance à fouffrir tout
çe qu’on peut imaginer, & qu’ils ne doivent .cette
docilité qu’à la nature de la maladie , dont les
effets extraordinaires méritent de fixer notre attention.
Cet auteur eû le feul de l ’antiquité , & peut-
être des modernes , qui ait traité des pallions de
l ’ame propres à chaque infirmité. On peut conclure
de ce que nous venons de rapporter d’après
Arétée , que les différons états de notre
corps font naître des inclinations- ou averfions
différentes de celles que nous avons en parfaite
•fanté.
Nous avons .dit plus haut que le fentiraent uni-
verfel réfide dans la moelle alongée, & qu’il
étoit le terme & le fiége de toutes les fenfations,
foit qu’elles procèdent des cinq fèns, ou du fen-
îiment de la faim, de la foif , de la douleur,
4e l’angoifle , de l ’inquiétude. Nous avons dit auffi
qu’iL y a des nerfs deftinés à certaines fenfations ,
comme les nerfs optiques' qui fervent à porter au
fenforium commune les fenfations de la vue, &
•non celles de l ’ouïe , & ainfî des autres. Nous
avons dit que les nerfs deftinés aux. yifcêres, tels
que le coeur, le diaphragme, le cardia., le pancréas
, le foie , la rate , le méfentère , ne portent
pas au fenforium commune le fentiment de
la douleur, mais feulement la fenfation agréable
ou défagréable que nous appelons fatlsfacUon ,
plaifir, contentement, ou ango'iffe, anxiété., in-'
quiétude.
Nous avons dit enfin que les nerfs ne fentent
pas ou .ne jouiffent pas de leurs,fonctions tant
qu’ils ont avec eux la pie & la dure-mère, qui
les recouvrent comme des gaînes à leur fortîe du
çerveau; & qu’aufli-tôt qu’ils arrivent à la partie
ou ils finiffent & fe terminent , ces enveloppes
s’épanoüiffent dans ces parties ou dans les vifeères
, en fe changeant en tuniques , & -que le
nerf s’étend & s’épanouit par les mêmes partiesj
& que de cette manière i l fenf 6c exerce les fonctions
, en communiquant la fenfation imprimée
dans le fenforium commune.
Confidérons quelles variétés; de fenfations agréables
ou défagréabl.es peuvent être produites par
la diverfité des -humeurs qui s’engendrent dans le
corps par les infirmités , principalement dans les
cerfs qui fe diftribuent dans les vifeères.
De plus , quelle -variété immenfe ne trouve-1-on
pas dans les cadavres , tant dans l’organifation dés
parties, que dans leur nombre , leur fit-uation ,
3c les autres accidens ?
Salmuth ( cent, i , obf. ) rapporte que dans
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la diffe&ion qu’il fit de deux cadavres, H trouv*
dans le premier trois veines féminales du côté
droit ; que toutes fortoient du tronc de la veine-
cave , & fe terminoient dans le tefticule ; que dans
le fécond , les reins étoient d’un volume fi extraordinaire,
qu’ils paroiffoient de la grandeur de l ’ef-
tomac. Ces deux hommes avoient mené une vie
très-débauchée, & ’avoient été enclins à tous les
défordres de la luxure. Bellini , tract, de reni-
bus , rapporte une obfervation à peu près fem-
blable.
Dans les tranfaétions philofophiques, n°. 491,
on voit que dans le cadavre d’une femme on trouva
la veine fpermatique gauche extrêmement dilatée ,
& la veine-cave dans cet endroit, entre les iliaques
, extrêmement étroite. L ’auteur de cette' obfervation
ne dit pas fi cette femme a été auffi lafeive
que fa conformation l ’annonçoit.
Une hiftoire très-remarquable eft celle que rapporte
le favant médecin Naudé , dans fon traité
intitulé coups d’état. Il dit qu’un médecin , s’apercevant
de l’infidélité de fa femme , & que la
Force de fon tempérament étoit la caufe de fes
amours illicites , s’avifa du moyen fuivant , pour
lui faire changer de vie. Une nuit' qu’il étoit
couché avec elle , il fe leva en furfaiit, en criant
qu’i l y avoit des voleurs dans la chambre; i l fe
jette fur le champ fur fes armes , tire deux ou
trois coups de piftolet, frappe de fon épée fur
les tables & les chenets , & met la terreur &
l ’épouvante dans fa maifon. Le matin , lorfque
tout fut tranquille , il va tâter le pouls de fa
femme , lui annonce qu’elle a une fièvre confidé-
rable, qui peut devenir mortelle, fi on ne la fai-
gne fur le champ. Il fait répéter la faignée fept
ou huit fois , lui fait appliquer les ventoufes , lui
donne de fréquentes purgations, & continue ainfî
de feindre qu’il la croit malade , & la tient
au lit pendant fix mois. Par ce moyen, i l refroidit
tellement fon tempérament , & la rendit fi
maigre, fi pâle , fi exténuée , qu’il éteignit en
cette pauvre femme le feu de l’amour.
On trouve dans les obfervatiôns chirurgicales de
Saviard , la relation de l ’ouverture du cadavre
d’un foldat, où on trouva une inverfion de plusieurs
vifeères & grands vaiffeaux , du côté droit
au côté gauche , la veine ombilicale couchée le
long de la ligne blanche, au lieu de fe détourner
du côté droit pour entrer dans la feiffure du foie ,
feportantau contraire vers le côté gauche, où le
foie fe trouvoit effectivement placé, ainfî que la
rate au côté droit. Le grand lobe du foie occupoit
entièrement l’ hypocondre gauche, & la feiffure
regardoit le derrière du cartilage xiphoïde*
Le petit lobe occupoit une partie de la région
épigaftrique, & décîinoit vers l ’hypocondre droit;
l ’-oeLophage entroit dans la poitrine par le côté
droit, & paffoit au devant de l ’aorte, puis , descendant
en fe gliflant de ce même côté droit , il
perçoit le diaphragme, & fe gliffoit enfuite entre
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le foie & la rate , pour entrer dans le bas
ventre.
Le fond de l ’eftomâc étoit'fitué du côté droit ,
entre le-foie & la rate'; le pylore & l ’inteftin
duodénum fe trouvoient au deflus du foie ; & cet
inteftin , paflant par-deflus la veine & l’artère mé-
fentérique fupérieure ., puis faifant fa courbure,
fe gliff oit du côté droit -, vers/la partié lombaire ,
& formoit le jéjunum.
Tous les inteffins grêles avoient auffi changé'de
Situation ; le cæcum & -le -.commencement du
•colon étoient placés dans la région iliaque gauche
, & le contour de ce dernier inteftin paffoit à
l ’ordinaire , mais de gauche à droite, lùr l ’extrémité
du foie,, du ventricule , & de Ta rate, defeendant
enfuite: dans la région iliaque droite , pour produire
le reétum.
La même tranlpofition s’étôit faite aux reins &
aux parties génitales. La veine fpermatique droite
fçrtoit de l’emuigente , & la gauche du tronc de
la veine-cave.
Le rein , qui étoit du côté droit , étoit plus
élevé que celui du côté gauche ; deux artères fbr-
toient du rein droit ; l’une du baffinet , ,à l ’ordinaire;
& l’autre , de la partie inférieure.
Les capfules atrabilaires avoient auffi paffé d’un
côté à l ’autre, ce qu’on reconnut par les veines,
la capfule gauche recevant la tienne du tronc de
la cave, & la droite de l ’émulgente.
Le coeur .lui-même prenoit part à ce changement
, fa bafe' étant fituée au milieu de la poitrine,
; mais fa pointe , inclinant du côté droit ,
contre l ’ordinaire , qui eft de fe porter du côté
gauche , de manière que le ventricule droit regardoit
le côté gauche de la poitrine; & la veine-
caVe, qui en for-toit du même côté , produifoit
deux troncs à l’ordinaire ; l ’inférieur perçoit le
diaphragme au .côté gauche , puis, entrant dans
le bas ventre , il fe gliffoit le long du côté gauche
du corps des vertèbres, & l ’àrtère du poumon
fortoitde ce même ventricule, fe gliflant du côté
droit , & là elle fe partageoit en deux branches à
l ’ordinaire.
Le tronc de l ’aorte fortant du ventricule gauche
, & fe trouvant placé au côté droit de la
poitrine, fe courboit du même côté , contre fon
ordinaire , puis, perçant le diaphragme au côté
droit, & defeendant vers l ’os facrum, il occupoit
toujours le côté droit du corps des vertèbres ; la
veine du poumon , fortant du même ventricule, fe
courboit auffi un peu du côté droit. Enfin la veine
azigos fe trouvoit au côté dtoit du corps des vertèbres
; en forte que la diftribution des vaiffeaux
fouffroit un changement conforme à celui qui étoit
arrivé aux vifeères.
On trouve dans les auteurs plusieurs obferva-
tions de ces inverfions de vifeères; mais je ne me
rappelle pas qu’aucun ait fait mention des inclinations
particulières & des vices de l ’efprit qu’avoient
les perfonnes ainfî .conftituées».
M é d e c i n e Tome 1 .
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Nous accufons un enfant gaucher detre maL
élevé, mais fouvent mal à propos. J ai vu un enfant
auquel on avoit attaché le bras gauche , pour
l ’àècoutumer'a- fè fervir du bras droit : mais cette
gêne fut inutile. Je l ’ai vu , dans fa jeuneffe, fe
fervir difficilement du bras droit; peut-être que dans
ces fujets il ^y a tranfpofition de vaiffeaux.
Nous donnons les noms de poltrons , de.-ffupi-
des , de pareffeùx affez légèrement, ne confidé-
rant pas que l ’organifàtion eft la caufe de ces effets.
Tulpius rapporte (/. 1 r-C. >7 ) quun homme
peureux & ftupide étant mort fubitement d apoplexie
,, on ouvrit fon cadavre , qu on trouva l e
cerveau très-mou , & "fes membranes fi remplies
d’une férofité pituiteufe , qu’on fut oblige de 1 enlever
avec une éponge ; que les veines & les fin-us
étoient remplis de la même férofité pituiteufe ,
mais fi glutineufe, qu’on auroit pu la tirer fort loin en
forme de fil. Les ventricules & la moelle de 1 ep-ine
étoient remplis de-férofité. Ces fymptômes lui firent
foupçonner un polype; mais on ne le trouva pas dans
le cerveau. Ayant examiné le coeur' , on trouva
dans le ventricule gauche un grand polype qui
remplifloit la moitié de la capacité de 1 aorte &.
de l ’artère pulmonaire.
Théophile Bonnet ( liv. 1 , fecî. 9 , obf. 31)
rapporte qu’un homme de condition , qui avoit
perdu fon bien., fut attaqué d’une triftefle & d’uiie
mélancolie profonde. 11 qtoit penfif , & gemif-
foit continuellement ; il étoit devenu d une économie
fordide , pour réparer les pertes qu’il avoit
.faites. Il craignoit les èfprits & les revenans.
Enfin la maladie augmentant , comme on n’àvoit
plus d’efpérance de le guérir , on le mit en pen-
fion chez des religieux, chez lefquels il vécut pendant
près de vingt ans , toujours accablé de fa
maladie. Au bout de ce temps, fes forces diminuèrent
; il eut du dégofic-pour la nourriture &
la boiffon , dont il prenoit cependant fans appétit
; il n’avoit pas de fièvre, n’étoit pas altéré,
fe plaignoit de froid dans tout le corps. Ses pieds
devinrent oedémateux, & fes urines , qui étoient rouges
, n’éprouvoientaucun changement pari air ni par
le froid. Le dégoût pour la nourriture devint enfin
fi grand, qu’il ne prenoit qu’une petite quantité
de bouillon par jour. Il mourut en quelque forte
d’inanition. On troava dans fon cadavre le foie
oedémateux , ayant des fçifîùres dans quelques endroits
, & plus noir qu’il n’a coutume de l ’être,
mais cependant moins que la fubftance du poumon,
qui étoit fphacélée. '
On ouvrit le cadavre d’un homme qui avoit
été fou toute fa vie , on trouva la dure - mère
offeufe (Hijl. deVacad. des fdette, avant 1699,
t. z , p . z 5 f ). Le cerveau étoit mou & rempli
d’eau chez un autre fou ( académ. des fciences,
1704) chez un homme qui avoit perdu lamé-
moire , Henri ab Heers trouva le cerveau jaune
& dur ( Obf. med. 111 ).
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