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tous a peu près doivent avoir des débordemens
réguliers répondans à la faifon des pluies en
Abiflinie. Cette faifon commence au mois de juin ,
& finit au mois de feptembre ; &' c’eft exactement
là l’époque de l’accroiffement & du décroiflement
des eaux du Nil. C ’eft aufli l ’époque des débordemens
du Niger , qu’on nomme le N il des
nègres, & du fleuve du Sénégal. Quelques-uns ont
conclu , d’après cela ,. i° . que ces deux derniers
fleuves n’en font au’un ; i° . qu’ils prennent leurs
fources avec le N il dans les montagnes d’Abi-f-
finie. Cependant, comme cette régularité de débordemens
appartient à tous les fleuves dont la
fource eft fituée entre les tropiques, & que par
une lo i, dont il ferarparlé plus bas „ ceux qui
font au nord de l ’équateur doivent avoir leurs
débordemens dans le temps de nos mois d’été ,
comme le N i l , le rapport du même phénomène
, dans ces trois fleuves T ne feroit pas une
raifon fuffifante de- les confondre , ni- d’en réunir
les fources , fi. d’ailleurs on n’alléguoit pas en
faveur de cette opinion le témoignage des peuples
voifins du N il & de fés fources, qu’on dit
s’accorder fiir ce point.
Quoi qu’il en foii , le Nil. , raflemblant exactement
toutes, les eaux de l ’Abiflînie & de la
Nubie dans un feul canal creufé par la nature entre
de hautes montagnes, qui le bordent de part &
d’autre , & coulant foui dans un efpace de deux
cents lieues environ r. depuis Syenne jufqu’à la mer ,
a néceflairement une crue plus régulière que tous
les autres fleuves dix. même continent j, & cette
crue doit être la mefure exaéte des eaux tombées
dans la Nubie & l ’Abiffinie pendant toute la lai-
fon des pluies. Cette exaétitude ,. déterminée par
la Conformation des lieux ,. eft encore une des
raifons qui ont dû fixer davantage fur ce fleuve
l ’attention des. obfervateurs „ & l ’on fait que
les Nilometres , très - multipliés, dans l ’ancienne
Egypte , font encore obforvés de nos jours avec
le foin le plus forupuleux & le plus religieux
dans l ’Egypte moderne. Mais j’aurai occafion. de
parler encore de ces crues , en confidérant leurs
rapports avec les vents , les faifons , & la falu.-
brité de l ’Egypte- Je parlerai aufli du limon, du
N i l & dé la formation du. Delta, qui tout entier
eft évidemment fon ouvrage. Ainfi, je ne m’y arrêterai
pas ici plus long-temps».
Le mont A t la s , depuis fon origine jûfqu’à fa
fin au cap Bojador, fournit ,. du côté du nord ,
toutes les rivières qui- arrofont le baflîn de Barbarie.
Leur cours n’eft pas très-étendu y elles, fe
jettent dans la Méditerranée j'ufqu’a Céuta, & dèr-
puis Ceuta jufqu’au cap Bojador ; elles fe perdent
dans l ’Océan. Comme leurs fources font beaucoup
en. deçà dii tropique, leurs débordemens n’ont rien
de fixe ni de remarquable & n’arrivent y, comme
en Europe , que vers le temps dé la fonte dés
»eiges , ou dans celui des grandes pluies qui fiir-
viennent d’abord en a v r ilm a is plus abondamment
encore en feptembre , oélobre & novembte, temps-
où ceflent au contraire les débordemens du Nil;
Le mont Atlas ne donne au fud ,. vers le Sahra,,
qu’un très-petit nombre de rivières peu connues ,
qui font bientôt abforbées par les fables , ou.
perdues dans des lacs qui font focs une partie de
Tannée.
C’eft dans la chaîne qui communique de l ’Atlas
au Sierra Léona , que quelques- uns fixent vers le
point de cette communication les fources du
Sénégal. Ils . donnent au Sénégal & au Niger des
fources aflez voifines , mais font couler le premier
dé l ’éft à l ’oueft dans l ’Océan; au contraire, ils
paroifîent indiquer le cours du Niger de l ’oueft au
l ’eft, & le font difparoître dans le lac de Bour-
nou. Cette idée n’eft pas conforme à l ’opinion-
dès habitans dé TEgypte & dès abiflîns , ainfi que
je l’ai déjà dit ; ces peuples croient qu’il feroit pofli-
ble de verfer le Niger d'ans- le N i l , & réciproquement
le N il dans le Niger. Ce qu’il y a
de vrai, c’eft que l’iin & l ’autre fleuve ont à la
vérité leurs, débordemens réguliers & fixes dans la
même faifon-; mais que cette faifon eft dans ce
pays même , comme en Abiflinie , la faifon des
pluies. Il faut encore confîdérer que les débordemens
dii Sénégal, fi l’on confulte le voyage dë-
M. Adanfon y fe font au mois de juillet, c’eft-
â-dire , un mois plus tard' que ceux- du Nil j ce
qui n’èft pas- non plus favorable à l ’opinion qui
réunit ces deux fleuves à leur fource , à moins*
qu’on ne veuille attribuer ce retard dans le Sénégal
à la; longueur prodigieufe de fon cours , dans;
l ’hypothèfe dont il eft queftion. Ce fyftême né
peut pas non plus fubfifter avec l ’opinion des
géographes , qui tracent le cours de la rivière
Blanche depuis le plateau des montagnes de la
Lune jufqu’au N i l , auquel elle fe réunit dans la
Nubie , au-deffous du Sennaar, à moins qu’on ne
fafle, comme je l’ai dit, de la rivière Blanche:
le N i l , & du N il d’Abiflinie VAbawi.
Quoi qu’il en foit, fuivant l ’opinion la plus:
commune parmr nos géographes , la chaîne com^-
muniquante de l ’Atlas &' du Sierra Léona fournit
à l’oueft le Sénégal, & à l ’eft le Niger.
Le fleuve- de Gambie prend-il fâ fource dans le
Sierra Léona ? ou eft-ce un bras du Sénégal ?
On l ’ignore. On connoît peu les autres rivières
qui, du fud de l ’Amédède, & du nord du Sierra
Léona, coulent dans le baflîn dé la Nigritie , &
fe jettent dans le Niger. Mais on fait que du nord
au fud la partie du Sierra Léona qui termine au
nord l'a côte de Guinée , fournit à ce pays un
grand nombre de fleuves, jufqu’à l’angle rentrant
que cette côte fait avec celle du Congo, parallèlement
à1 Tàngle pareil formé- par ht chaîne de
Léona, & les monts Lupata.
Ce font ceux-ci qui. fourniflént à l ’occident *
dans le quatrième baflîn , les fleuves Z a ïr e - ,
Coan\a, Cune ni , & une multitude d’autres; ce
font, eux auffi qui à l’orient^ verfent dans la
mer des Indes les fleuves du Saint-Efprit & de
Zambe\é, & ceux de la côte de Zanguebar jufqu’à
Mombaza. Tous ces fleuves ont leurs fources
entre les tropiques ; & les pays qu’ils arrofont
font fertilifés par leurs débordemens réguliers , mais
dans une faifon oppofée à celle où le N il fe déborde;
& cette faifon, au delà de l ’équateur, eft
encore la faifon des pluies»
On connoît peu en général les lacs de Y A fr ique.
On connoît celui de Moeris, autrement lac
de Caroun ou de Ke rn, en Egypte; on parle de
celui de JDambea en Abiflinie , traverfé par le N i l ,
ou, fi l ’on veut, YAbawi. ShaW nous parle de
quelques lacs ou fibkahs dans la Barbarie ou le
Sahra * la plupart falés, & quelques-uns focs
une partie de l’année ; celui de Maberia , d’où
quelques - uns prétendent que fort le Sénégal ;
ceux que traverfe le Niger, & celui dé Bournou,
où plufieurs croient que ce fleuve fe termine ;
enfin le grand lac Marawi , qu’on croit être
placé au milieu des monts Lupata , ne font connus
que par des defcriptions peu exaétes y 8c fur des
rapports peu certains.,
Mais quoique nos connoiflances fur les montagnes
& les fleuves de Y Afrique foient loin d’être
précifes & complètes -, elles nous fourniront cependant
des moyens fuflifans pour nous aider à la di-
vifer en différentes régions qui nous offriront un
théâtre également varié par la nature des lieux
& le caractère phyfique de leurs habitans.
Mais avant de faire cette divifion , il faut jeter
un coup-d’oeil fur les câufes générales de la température
dans/-cette partie du globe.
§. I I I ,
Troifième bafe de divijîons dans le continent
de /’Afrique. Latitudes & longitudes ; première
■ eaufe des températures & des faifons propres à
cette partie du monde. Saifons agronomiques.
La première caufè dès températures- dépend de
Tordre dés faifons ; & Tordre aftronomique des
faifons dépend des latitudes. Je dis Vordre afho-
nomique, parce qu’on verra que les faifons , déterminées
par les phénomènes phyfiques qui partagent
l’année, font quelquefois bien différentes
des faifons aftronomiques, comme il arrive en
Egypte & au cap de Bonne-Efpérance. Je m’en
tiens, en ce moment, à la divifion aftronomique
fixée par le cours du foleil.
A cet égard, Il faut faire dans Y Afrique 0^x2.^
divifîons; 1 une comprendra toutes les terres qui font
en deçà du tropique du cancer ;• la féconde , toutes
celles qui font au delà, jufqu’à l’équateur : la troifième
, toutes celles qui s’étendent de l’équateur à
l ’autre tropique ; & enfin la quatrième renferme
celles qui font au delà du tropique du- capricorne ,
jufqu’au cap de Bonne-Efpérançe.
La première de ces divifions a les mêmes fâi-
Jfons aJlrQiiomiqiies que nous fo répondantes aux
mêmes poiats de l ’année , & renferme l’Egypte ,
le Sahra, l ’Atlas, & la Barbarie. Elle eft terminée
au fud par le mont Amedede : 1 été y eft
brûlant; mais cette laiton eft tempérée en Egypte
par les débordemens du Nil ; en Barbarie, p a r le
voifinage de la mer '& le grand nombre des montagnes
: l ’Atlas eft, comme les pays montagneux,
plus froid que les plaines; & le, Sahra eft b rû - .
lan t, fablonneux, & en grande partie inhabitable;
Ainfi, en général, l ’hiver aftronomique,, marçjué
en Egypte par un refroidiuement modéré de l ’at-
mofphère , eh Barbarie quelquefois par de la neijge,
rarement par la gelée , dans te Sahra, par l ’eau
qui remplit les fibkahs ou les lacs, répond.dans toutes
çes contrées, au temps qui fuit le folftice aufi-
tral , c’eft-à-dire , le plus grand éloignement du
foleil de l’hémifphêre boréal. Le printemps &
Vautomne , marqués en Barbarie par les pluies ,
y -répondent aux temps qui- fument les équinoxes
de mats & de feptembre ; mais les lignes phyfiques
du printemps ont moins de durée dans- ce pays
qu’en Europe. lLété y eft suffi plus long ; fi 1 ou
en calcule là durée d’après fes fignes phyfiques;
mais aftronomiquement i l répond au tems qui fuit
le folftice. boréal. Ce qu’il y a 'd’ailleurs de particulier
à chaque pays, relativement à fa température
, fe trouvera dans d’antres parties de cet article.
U ne s’agit aâuellemeut, comme- je l ’aî
dit, que du partage de Bannée par les époques af-
tro nojsni ques.
La féconde divifion aftronomique de YAfrique
contient le Sénégal & la Guinée, la Nigritie*
& une partie du grand plateau des montagnes de
la Lune, la Nubie & l ’Abiflinie y une partie de
la côte de Zanguebar depuis Jubo , les côtes d’Ajarx
& d’Abex. L ’ordre des faifons y dépend des quatre
époques agronomiques propres à ces pays , qui
font, i°. l ’éloignement du foleil de l ’équateur au
tropique dans l ’hemifphère auftral ; z°f. le rapprochement
dé cetaftre du tropique à l ’équateur ; 30. font
paflage , au-deflus de ces contrées,. dé l ’équateur
au tropique dans l ’hémifphère boréal ; 40. fon retour
au-deflus des mêmes pays , du tropique: à Téqua-
teur. Ainfi, le foleil paffe deux fois l ’année fur
ces climats. Du mois de mars- au mois de- juin , i l
va de l’équateur au tropique boréal ; & du mois
de juin à celui de feptembre , il revient du tro^-
pique boréal à l ’équateur. Malgré ces quatre époques
aftronomiques, on ne compte que deux faifons
dans toute cette étendue de pays, la faifon
fèche & la faifon des pluies : c’eft- du mois de juin-
au mois de feptembre, dans le temps du retour du
foleil du tropique boréal à l'équateur, que commence
la faifon des pluies & des débordemens j.
elle dure plus de cinq mois. A cet égard , la plu^
part dès voyageurs & des géographes ont commis-
une erreur relevée avec raifon par M. Adanfon j
c’eft dé regarder la faifon des pluies comme l ’hiver
de ce pays, tandis que c’eft juftement le: temps
de Tannée dans lequel la chaleur eft. déaontréela