
médicamens, que lorfque ces derniers la confer-
vent dans l’eftomac ; ce qui n'a jamais lieu que
quand ils font infolubles dans nos humeurs $ que, dans
ce dernier cas , le féjour qu’ils font dans les pre-'
mières voies eft fouventplusnuifiblequ’utile}-qu’ils
peuvent obftruer les inteftins , boucher le pyfore ,
comme il y en a eu des exemples; que la lurface
raboteufe ou polie , les extrémités' acérées ou ob-
tufes doivent aufli entrer pour beaucoup dans ces con-
fidérations, puifque c’eft en raifon de la furface que
la forme peut agir d’une manière fort différente fur
l ’économie animale ; enfin que , comme on ne fe
fert prefque plus aujourd’hui des fubftances parfaitement
infolubles dans nos humeurs, la figure des
matières médicamenteufes ne joue prefque aucun
rôle - dans leur action.
§. IL D e la pefanteur conjidérée comme caufe
^’aftions mg'diçamenteufes.
Les effets de la gravitation font trop généraux
& trop fenfibles dans tous les phénomènes de la
nature , pour ne les point confidérer dans les médica-
m'ens ; àuçun auteur de matière médicale n’a cependant
encore traité cet objet, fur lequel l ’obfer-
vation clinique de tous les praticiens fournit de
grandes lumières. En effet , fi l ’on remarque les
différencës qui fe préfentent dans les médicamens,
relativement à cette propriété, on ne pourra s’empêcher
ae reconnoître une diverfité néceffaire dans
leur action, d’après leur pefanteur.
Pour bien concevoir les effets des remèdes dé-
peodans de la pefanteur , fuppofons des médicamens
qui n’agifient que par cette feule propriété ,
& regardons comme milles toutes celles dont ils
jouifient en même temps. Un corps très-pefant,
reçu dans l ’eftomac, y exerce une preffîon dont
l ’individu fe reffent bientôt : ce vflcêrè eft tiraillé ;
11 femble que tous les efforts de la vie s’y accumulent
& s’y réunifient; le fujet éprouve bientôt
un accablement général ; les fonctions des autres
vifcères font affoiblies ; la nature paroît réunir toutes
fes forcés dans un feul point, la région épigaf-
trique , pour fe d.ébarrafier du fardeau qui Pacca--
ble ; bientôt le corps pefant eft entraîné dans le
duodénum; il ne fé jo urne pas long-temps dans le
même lieu ; s’il ne trouve point d’obftacle dans fon
chemin, il parcourra le canal inteftinal, en profita
n t cependant, dans tous les points de fon trajet
ou il s?arrête, les effets généraux que je viens de
tracer pour l’eftomae, avec d’autant moins d’énergie
& d’influence fur les autres fon ôtions, qu’il
w s’éloigne davantage du centre épigaftrique. Souvent,
fi de légers obftacles s’oppofent à fa marche,
i l leur oppofe l ’effort de fa maffé, & il vient à bout
de lès vaincre. T e lle étoit la raifon pour laquelle
on employoit autrefois de balles des plomb & du
mercure cru dans les coliques que l ’on croyoit
être produites par dès efpeces de noeuds dans les
inteftans*
Mais ces effets primitifs ne font pas les feuls de
la pefanteur ; ils font fuivis de plufieurs autres,
qu’il eft tout aufli important de bien connoître.
Toutes les fondrions animales ayant.entre elles un
rapport, une réadrion réciproque, prouvées par un
grand nombre de phénomènes, la première im-
preffion de la gravitation des médicamens fur, l’eftomac
, fe propage dans les yifcères voifins ; elle
s’étend dans le lyftême nerveux, dont l ’épigàftre
peut être regardé comme un des principaux centres,
& elle exerce _dans les départemens des organes les
plus éloignés , une adrion qui influe fur toute l ’économie
animale. Il réfulte de cette réadrion une forte
d’orgafme ou de tenfion dans les fibres des mufcles
& dans les parois vafculaires, qui remonte , pour
ainfî dire , le ton de la machine , qui donne à l ’individu
une vigueur- momentanée, & qui, fi elle eft
portée à l’extrême * eft bientôt remplacée par un
affaiffement plus ou moins confidérable. Quelques
phyfîciens qui ont entrevu cette action fympa-
thique de la pefanteur des corps reçus dans l ’eftomac
, l ’ont comparée, avec affez de vraifem-
blanee & de juftene, au left ou au contrepoids qui
entretiennent Féquilibre dans les machinés. Tous
les effets fecondaires s’obfervent facilement dans un
homme qui, après une diète affez longue, remplit
fon eftomac d’alimens. Avant que la digeftion.ait
.pu s’opérer-, & même peu de fécondés -après avoir
avalé quelques morceaux , fes forces font rétablies,
& les mufcles exécutent leurs mouvem'ens avec plus
de facilité. On a vu plufieurs fois des fubftances
nullement alimentaires, telles que de la terre végétale
, du bois fec, de la craie , du charbon, pro-c
curer ce bien être inftantanné, en rempliffant fu-*
bitement l’eftomac, & en leftant, pour ai a fi dire,
ce viïcere. On fait qu’on calme Fardeur & la vivacité
de l’appétit, en buvant une certaine quantité
d’eau ; & des voyageurs malheureux fe font
plufieurs fois fervis avec fuccès de ce fecours momentané,
pour tromper la fenfation dou]k>ureufe &
preffante ae la faim. Qui peut méçonnoître ici les
effets de la pefanteur fur les parois de Feftomae?
Le même exemple, pris des alimens, pourra prouver
encore que le ton excité par la pefanteur des
corps ‘reçus dans le ventricule, fe termine fréquemment
par un relâchement & une foibleffe plus ou
moins marqués , fuivant l ’énergie avec laquelle
cette propriété a agi fur ce viïcere. Examinez un
grand mangeur ; tout en lui indique l ’effet d?une
gravitation trop confidérable , d?un left trop fort :
l ’épigaftre , chargé à l ’excès, réagit fur tout fon
individu; fa tête eft lourde & fe foutient avec peine;
i l eft plus foible qu’il n’étoit avant le repas ; tous
fes mufelés n’obéiffent que lentement aux ordres
de fa volonté ; il ne fe meut qffavec difficulté ; fà
démarche eft pefante ; fa refpiration eft gênée ; fa
poitrine ne peut foulever la maffe qui gravite fur
l ’extrémité du levier thorachique ; le coeur , preffé
par cette furcharge. générale , cherche à vaincre cette
réfiftance, & n’a qug des pulfations. profondes. &
comme
•comme étouffées, quoiqu’elles foient redoublées ;
fon pouls- eft fouvent intermittent par fuite de l ’or?
gafine abdominal; le fang s’arrête/dans les extrér
mités veineufes, & colore fortement l’a peau , fur-
tout au vifage; fes paupières appefanties tombent
& couvrent le globe de l’oeil; les fonctions animales
font affoupies , & un fommeil accablant eft
prefque toujours la fin de cette fcène qui ne fe pré-
fente que trop fouvent aux obfervateurs.
Je fais que tous les phyfiologiftes expliquent cës
phénomènes par la compreflion de- 1 aorte placée
derrière -l’eftomac ; mais je n’ai jamais pu avoir une
grande confiance dans cette explication; car outre qu il
n’eft pas démontré que cette preflion du principal vaif
feau artériel par l’eftomac rempli, ait'réellement lieu
après les repas, je penfe qu’une pareille gêne don-
neroit prefque cohftamment naiffance à des apoplexies
mortelles , ou au moins à un engorgement
languin dans les poumons, qui feroit bientôt fuivi
d’une hémopthyfie par rupture des vaiffeaux.
Il eft encore une autre claffe d’effets fecondaires
de la pefanteur des médicamëns, auxquels les médecins
n’ont pas fait plus d’attention qu’aux pré-
cédens, ou qu’ils n’ont aperçus que dans, quelques
fubftances particulières. Ce font ceux qui ont lieu
lorfque les remèdes ont paffé dans les vaiffeaux
& circulent avec les humeurs. On ne peut douter
qu’en raifon de cette propriété, les matières médicamenteufes
n’agiffent fur les folides & fur les fluides.
C’eft ainfi qu’on a particulièrement expliqué les
effets du mercure par la pefanteur de Ce métal l i quide
; orna regardé la gravitation confidérable de fes
globules, comme la caufe de la divifion & de l ’atténuation
qu’il donne au fang & à la lymphe, & de
l ’a&ibn tonique qu’il excke avec beaucoup de force
dans les fibres irritables des animaux : d’après cette
explication, qui eft bien d’accord avec tous les phénomènes
connus fur le? maladies & leur curation ,
on a propofé cette fubftance métallique dans tous
les cas d’épaiffiffèment & d’engorgement lymphatique
, tels que les maladies de la peau , le vice
écrouelleux , les obftru&ions , les hydropifies, &c ;
& la pratique a confirmé les vues que la théorie avoit
fournies. N’eft-il pas permis d’avancer que l ’effet
de la pefanteur n’eft pas borné aux préparations mercurielles,
que tous les médicamens doivent agir en
partie par cette propriété, & que plus elle fera énergique
dans ces matières , plus aufli elle aura d’influence
fur leurs qualités médicamenteufes ? Lu appliquant
ce principe aux fubftances métalliques en
général, il eft aifé de concevoir pourquoi elles ont
beaucoup plus d’énergie dans leur aHion , que la
plupart des autres corps qu’on emploie pour la gué-
rifon des maladies, & pourquoi leurs effets font beaucoup
plus prompts. On peut aufli trouver dans la
même théorie la raifon de la qualité vénéneufe de
plufieurs d’entre elles, & particulièrement du plomb,
un des plus pefans des métaux. La douleur qui conftitue
la colique des peintres , & qui eft d’abord profonde &
obfcure , femble accufer la pefanteur de ce métal d’en
M é d e c in e . Tome 1.
être la Caufe; lapaualyfie, qui en eft fouvent la fuite,
paroît dépendre de la preflion & de 1 engourdiffe-
ment produit par les. molécules faturnines dans le s quelles
la faveur & toutes les autres propriétés dont
ils jouiflent, n’indiquent d’ailleurs rien dè corrofif.
Cette maladie n’étant produite que lentement par la
vapeur du plomb fondu, ou par les particules de ce
métal ou de fa chaux qui pénétrent dans 1 eftomac
& dans les inteftins , il paroît que ces particules fe
fixent dans un point du canal inteftinal, s y accumulent
peu à peu, & n’exercent leurs qualités nui-
fibles , que lorfqu’elles font affez abondantes pour
exciter par leur preflion un foyer d’irritation ner-
veufe, que je 'regarde comme la caufe. de cette
efpèee de colique. Si Fon ne veiit ranger cette opinion
qu’au nombre des hypothèfes, au moins ne
pourra-t-on pas nier qu’elle a beaucoup plus de
vraifemblance que l ’explication donnée par les
Galéniftes pour faire concevoir Y action vené-
neufe du plomb. La prétendue qualité ^froide que
Galien attribuoit à ce métal, n’eft qu’un produit
de fon imagination ; & tous les médecins lavent
que fa doôtrine fur les qualités premières, appliquée
aux propriété des médicamens, n’a fervi qu a
jeter dans une erreur très-préjudiciable aux progrès
de cette partie de Fart de guérir. Je crois donc
avoir démontré dans ce paragraphe , i°. que la
pefanteur eft une des principales caufes de 1 action
des médicamens; i° . que cette force influe fur les propriétés
médicamenteufes , comme fur tous les autres
phénomènes naturels ; 3°. qu’elle s’exerce d abord
dans l ’eftomac & les inteftins, q u i, par leur rapport
, par leur fympathie avec les autres organes ,■
en propagent au loin Y action ; 40. que c eft particulièrement
en tendant les fibres, en augmentant
leur action tonique, en multipliant leurs ofcilla-
tions , qu’elle produit les effets médicamenteux qui
en dépendent; 50. que les particules des remèdes,
introduites dans le fyftême vafculaire., y agiffent
"en partie par leur gravitation, & que les altérations
qu’elles produifent font d’autant plus énergiques
, que leur poids eft plus confidérable ; 6°. enfin
qu’il faut faire entrer le calcul de cette-propriété
dans les explications des effets des médicamens.
Je ne doute pas qu’en portant plus d’attention à cet
objet, les Médecins ne parviennent à étendre beaucoup
les vues: que je viens de préfenter ; l’état
aôtuel de la fcience médicinale, la néceflité de
borner & de circonfcrire mes idées, dans un ouvrage
de la nature de celui-ci, me forcent de m’arrêter
à ces généralités ; elles feront fans doute fai-
fies par ceux qui fentent combien les connoiflances
exaôtes & profondes de la Phyfique de Newton
doivent influer fur celles qu’on veut acquérir dans
la Phyfique des corps animés. , '
§. III. De Vagrégation confidérëe comme caufe
<Fa£tiôns médicamenteufes.
On connoît, fous le nom d’agrégation , la fore«