
gemens qu'elle doit fubir pour nourrir. Cette
réfifiance efl ce qu’ Hippocrate appelle force,
V ’/yt. Les alimens qui oppofent à Vaction de
nos organes une grande réjijlance , font très-
forts , , /V^upoïara I ls fe changent & s appliquent
difficilement, mais fe diffipent difficilement
aufji. J't/jraÀÀo/w'loï TpoCpji, j'vri^ct<iaX(CTof. I ls nourri
ff&nt plus lentement-, mais plus folidement. L’aliment
q u i, au contraire, offre peu de réjijlance,
e jl ce qu Hippocrate appelle, foible , a^evs'f. I l fe
change facilement , s’applique promptement ;
st^M-fTaêÀHToî iv'itfBff-'biras i mais i l fe diffipe fa c ile ment
, «uEçavstAcoro s, i l nourrit plus promptement,
îTiûij- d’une manière moins durable. Towr co/z-
Jijle dans les proportions. J»nj forte qu’un a liment
qui offre trop de réfifiance à nos organes,
île même quun aliment trop foible & qui fe confo
rm e & fe diffipe trop - vite , fon t également
incapables de nourrir , par une raifon contraire.
Alors L’aliment n e fl plus aliment ; Tpocpw
cw rpocpvi. I l fa u t donc pour tqu un aliment nour-
riffe , non feulement qu’ il ait les qualités & les
propriétés qui conflituent Valiment, mais encore
qu i l le s ait dans la proportion des forces
du corps à la nourriture duquel. i l efi defliné.
E t la variété de ces proportions efl encore une
grande fource de différences parmi les alimens.
On diminue la réfifiance des fubfiances alimen-
teufespar la fermentation , la cocîïon , & en général
par-tout ce qui avance les changemens
que doit éprouver la. matière nutritive ; c’efl ce
qui fa i t la différence de la farine au p a in , des
alimens cuits , aux' alimens\crus.
7.. On fent encore qur les hommes diffèrent,
entre eux pour la force de leurs . organes , au
moins autant que les alimens pour les proportions
de leurs propriétés nutritives ; i l en réful-
tera néceffairemeht que les proportions qui 'conviennent
à l ’un ne conviennent point a Vautre,
& que l ’aliment qui nourrit l ’un ne nourrira
pas l ’autre ; fo it que cela vienne de l ’excès de
réfifiance qu’ i l oppofe à fe s organes , fo it que
cela vienne au contraire de la trop grande ‘
promptitude avec laquelle cet aliment f e change
& fe diffipe. ( C’eft ce qu’Hippocrate traite fupé-
rieurément dans fon livre de l ’ancienne Medecine. )
Outre cela, i l efl encore des difpofitions différentes
qui changent l ’effet des alimens ,* a in fi,
dit Hippocrate , le lait - efl un aliment , mais
cet aliment convient aux uns & ne convient
p as aux autres ; le vin nourrit les uns & ne-
nourrit pas les autres , &c. Mais ceci ne fup-
pofe pas une différence dans les alimens , mais
feulement dans les hommes qui en ufênt. Ceci
regarde la diététique ou i ’ufage des'alimens.
8. Dans quelque état que fo it Valiment, quelles
que Joient fe s proportions & fe s qualités , il
fa u t y pour être difiribué & pour nourrir, qu’ i l
fo it mis dans l ’état de fluidité , fo it hors du
ifliEJJxf°irdans le corps , par fon mélange avec
nos boiffons & nos humeurs. Car l ’humidite eft
le véhicule de l ’aliment ; wfpa«« , rptqns «XK/U,a*
9. Quand Valiment efl dans les proportions
convenables , quand i l a fubi les changemens
néceffaïres pour nourrir, la nutrition ou la réparation
de nos organes Je fa i t plus ou moins
promptement, félon Vétendue & le ■volume de
ces organes. C’efi ce qu’on voit clairement par
les temps différais qu’exige la formation du
c a l, «S* la foudure des os fracturés , félon la
grandeur & le volume de ces os.
10. Enfin Hippocrate paroît regarder la matière
nutritive Comme uniforme dans toute la
nature ,• & différant uniquement par les degres
& par les proportions. C’efi ce que femble indiquer
ce paffage qui fu it l’expofition de la dif-
tribution des alimens par-tout le Corps.. Toutes
chofes ont une même origine y d it- il, & toutes
ont une même f in , &c. Mais on trouvera cette
idée expofée d’une manière bien plus claire dans
le traité de M. Lorry.
T elle étoit la doétrine d’Hippocrate fur la nature
de l’aliment. Les médecins qui 1 ont fuivi
n’ont rien ajouté à fes idées, & fe font contentes
de les développer avec plus ou moins de clarté.
Galien eft certainement un de ceux qui les a expo
fées le plus favamment, quoique dans un ^ftyle
un peu diffus , dont il ne fe défend pas lui-meme ,
comme il le dit à la fin du premier ehapitre^du
livre fu r les propriétés des alimens. Je ne m arrêterai
pas à faire connoître les commentaires de
ce célèbre auteur, touchant la nature de la "matière
nutritive , parce que je n’ajouterois par-la
rien d’effentiel à ce que je viens de^ dire d apres
Hippocrate. Je rappellerai ici la définition-que
Galien donne de la nutrition, en difant qu elle
efl proprement l’afflmilation de la fubfiance qui
nourrit, au corps qui efl nourri, opma-it
tow rpê'ÇoïTos t« rpecpo^L/vai ( Comm. fu r le livre d H.ip~
pôcrate de l’aliment, tfcxt. 11. )
Je ne m’arrêterai pas non plus aux ob fer valions
des autres anciens qui ont fuivi Galien , quoique
dignes, d’attention, & fur - tout Aëtiusj mais je
paffèral à‘ l ’expofition de ce qu’a donne fur la
même matière M. Lorry dans fon traité des ali-
mens , qui, fans préfenter d’autres principes que
ceux du père de la Médecine , & ceux de Galien
, d’Oribaze , d’Aetius, de Beccher, de Stahl,
d’Arbuthnot; & c ., les préfente avec une clarté telle ,
& les rend fi fenfibles & fi féconds , qu’on ne peut
nier qu’ils n’y prennent un nouveau degré d utilité..
§. II. Doctrine des médecins modernes. M. Lorry,
traité des alimens (iz ).
De l ’exiftence de la matière, nutritive.
(P a g . 2,. ) «Pour foutenir, pour réparer, pour
(i2) J’aLretrancké dans cet extrait de l’ouvrage de M.
augmenter,
1» augmenter, il faut des corps qui foient de même
,> nature que le nôtre j autrement fa fubftânce ehan-
i» geroit tous les jours.. . . Toujours formés des
» mêmes principes, nous avons toujours les memes
»> propriétés. Cependant la matière de l’aliment
» eft évidemment différente de celle qui conftitue
* notre corps. Il faut donc que cette matière perde
» fa forme primitive , & fe change en notre pro-
1» pre fubftânce. C ’eft en ce changement que con-
» fifte toute la nutrition j c’eft à quoi eonfpite le
» mécanifine de tout le corps ».
a . . . . Toutes les fubftances que nous voyons
1» augmenter & fe nourrir ont donc généralement la
» propriété de changer les matières étrangères en
» leur propre fu b ftân ce ......
( P . 3.) « Les végétaux & les animaux qui
» tous les jours fous nos yeux fuivent toutes les
» viciffitudes des âges, ont par conféquent cette
» propriété. * . .
( P . 7. ) « . . . . En général , l ’humeur qui-
» nourrit les végétaux eft tirée en partie de la fe-
» mence, en partie de la terre qui fournit les.
» mêmes fucs pour tant d’ efpèces différentes. • . .
» L ’expérience de Van-Helmont , répétée plufieurs
» fois, prouve aufii que l ’eau feule a pu fuflîre pour
» donner aux plantes leur accroiffement (13). »• • »•
Lorry tout c& qui, quoiqu’intéreffanc d’ailleurs, pouvoir
rompre la chaîne des idées principales qui appartiennent à
l’objet aue je traite en ce moment. J’ai retranché auffi tout
ce qui fe trouve répété dans d’autres- endroits plus à pro-v
pos, & d'une manière plus concluante. J ’ai retranché.toutes
les applications -des paffages d'Hippocrate qui viennent,
d’êcre préfentés au le&eur , perfuadé qu’on en fera très-
aifément l’application & le rapprochement, fans qu'il foit
befoin de les répéter encore ici. J’ai tranfpofé divers endroits,
pour les ranger fuivant l'ordre que j’ai adopté dans
cet article. Enfin j’ai ajouté au texte quelques mots qui
m'ont paru néceflaires pour augmenter la liaifôn des idées
fins en altérer le fens ou qui font néceffiiés" par le rapprochement
des pafiages , qui dans l’ouvrage font beaucoup
plus éloignés les uns des autres., qu’ils ne le font dans cet
extrait, j ’ai auflî , quoique très-rarement, fubftitué quelques
mots à ceux dont l’auteur s'cft fervi, iorfqu’un plus
grande clarté a paru l'exiger, & que l’idée n'en pouvoit
être aucunement altérée. ~
(13)'La terre ne peut rien fans l’eau. L’eau feule peut
prefque tout fans la terre. Mais ies phyliciens modernes,
appuyés fur des expériences inconteftables, ajouteront l’air
& même la lumière & la chaleur à l’eau , 8c les regarderont
, ainfi qu’elle' , comme les principaux alimens de la
végétation. On fait bien que les engrais ajoutent beaucoup
à la perfe&iori de cette végétation dans certains genres
de plantes ; mais il eft encore difficile de dire au jufte
ce que leurs fels & leurs' huiles deviennent dans le
corps du végétal ; 8c comme la plupart des engrais font
fore animalifés, on pourroic croire qu’ils fourni fient la bafe
du gaz azotique ^ pour concourir à former le gluten de la
plante. On faic que cette bafe forme un des principes cônf-
tituans de cette partie glutineufe appelée par plufieurs chi-
miftes végéto - animale, à caufe de fon analogie avec la
partie übrèufe du fang des animaux. L’on fait aufli que
cette partie glutineufe eft fort abondante dans certaines
plaines, 8c fur-tout dans le grain du froment, à la pei-
ieftion duquel les engrais contribuent û. évidemment»
M é d e c i n e . Tom. I ,
[ P . 8.) « Pour les animaux, la Matière de
» laquelle ils fe nouiriffent eft prefque aufli variée
» que les efpèces différentes de végétaux. . • • »•
« Plufieurs genres différent d’animaux fe nour-
» rident de la même efpèce de plante ; le même,
» animal fe nourrit de plufieurs genres de végé-
» taux ; il y a donc -dans les plantes une matière.
» nutritive, matière beaucoup moins variée que
» les efpèces de planres qui la contiennent ».
a Cette même matière peut être extrêmement
» multipliée pour le genre humain. Les hommes
» tirent leur aliment de tint d’efpèces de plantes
» différentes, & fe les aflîmilerit fi également >
» qu’il eft néceflaire qu’il y ait. quelque chofe de
» commun entre elles, pour qu’elles puiflent pro-
» duire un même effet fur des fujets de même e£-
» pèce, & fouyent fur le même lu je t .. . . ( P . 9 )
» L ’ufage que nous faifons d’une variété.prodi-
» gieufe d’animaux qui fe font eux-mêmes nourris
» de végétaux d’efpèces toutes différentes de celles
» dont nous nous fervons ordinairement , nous
» marque encore combien la matière nutritive eft
» étendue ».
<c Mais . . . . quelque analogues que foient les
» parties nutritives des plantes & des animaux avec
» celles quPdoivent enhn proprement nous nourrir,
il n’en eft aucune qui foit nutritive par elle-
même, i l faut, auparavant qu’elle ait éprouvé
l ’aétion des différentes fon&ior.s, qu’elle ait pris,
pour ainfi dire ,-le cara&ère propre de l ’animal
qu’elle doit nourrir ».
(P . 10. ) « Tous les corps qui doivent nous fervir
d’alimens font donc réduits néceffairement en
une feule & même fubftânce , qui eft cette fubf»
tance chyieufe . . . dont fe forment toutes nos
humeurs. De cèlle-ci fe produit, parla continuation
de la même opération, cette autre ef-
pèce de lymphe mucilagineufe deftinée à arro-
fer les premières fibres, à s’y attacher, a les
augmenter , d Jes réparer».
« C’ eft donc de la diftribution générale de cette
matière dans toutes les parties du corps, & du
changement que nos organes peuvent lui imprimer
, que dépend l ’accroiffement & la réparation
».
( P . it . ) « I l fuit de ce peu.de principes que
l ’altération que nous avons d faire fubir aux.
» alimens, dépend en premier lieu de la facilité
» plus ou moins grande qu’a la matière qui doit
» fervir $ aliment, d être altérée par nos organes*
» . . . . En fécond lieu , de la force des agens
» corporels qui tendent à l ’altérer 5c a l ’aflimi-
» 1 e r . . . . ».
( P . i i . ) « Dans le grand nombre de corps que
» la providence a répandus fur la terre pour noua
» fervir de nourriture ,'la facilité à s’altérer n’eftr
» pas la M êm e .... Nous obfervons la même di-
» verfité dans la force des agens qui travaillent
» à ce changement. Rien uç fait varier davantage»
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