
rations ont eu le temps d’être digérées ; une forte
quantité à3alimeris , prife toute à la fois, ne peut
jamais être élaborée exafîement ; elle furcharge
infailliblement le ventricule , & les fuçs prépofés
d leur diSolution ne fauroient être raflemblés en
même temps en affez grande abondance pour l’opérer
; d'une autre part, une première digeftion
manquée ne fe répare ni dans la fécondé ni dans
la troiftème, & le féjour que font, dans l ’eftomaç
& dans les imeftins , ‘des premiers alimens non travaillés
comme ils aurorent dû l ’être » occafionne
des crudités , des vents r des. gonfle mens des amas
dans les replis des gros inteftins , & devient la
fource d’une fouie de maux , dont la caufe eft
toujours difficile à connottre , le traitement incertain
& fou vent Contre - indiqué , la terminaifo»
enfin plus ou moins longue & prefque toujours
funefte. 11 convient donc de divifer le poids de la
nourriture à donner, en plufieurs portions, & de
régler auffi, d’après ces obfervations , les heures
de la diftribution. C ’eft ordinairement le matin,
à midi, 8c le foir. Il eft des chevaux dont les
organes digeftifs ont moins de force, d’autres en
qui ces mêmes organes ont une activité furpre-
nante ; les heures pour ceux-ci devroient donc
être plus rapprochées que pour les premiers. Au
fur pi us, cette affignation d’heures déterminées &
confiantes, quand elle efi poffiblè , contribue évidemment
à la fan te de l ’animal 8c à la durée de
fa vie ; celle de la plupart des chevaux dé manège
n»efi auffi longue que par l’exaétitude du régime
qu’on leur fait obfervej;; & telle eft la force &
l ’empire de l’habitude , aue la nature , ' accoutumée
dans des inftans fixes a l ’exécution-de telles fondions,
eft preflee , comme par un befoin réel & indif-
penfable,, de s’y . livrer de nouveau dès le retour
de femblables inftans; c’eft' ainfi qu’à l ’heure ordinaire
où l ’on abreuve & où on départ le fourrage
& l ’avoine, ces animaux henni fient, s’agitent,
battent du pied, & -s’abandonnent à une multitude
de mouvemens qui annoncent auffi fûrement que
l ’horloge la plus jüfte, la révolution du moment.
Nous conviendrons cependant que cette fixation
n’eft pas une condition fi abfolue,que tout cheval
ne puifle fans elle exifter bien portant; nous en
voyons une très-grande quantité. non afiujettis à
cette lo i , & fatisfaire à de forts travaux ; 8c d’ailleurs
on pourroit dire que ce n’eft pas fans danger
que l’homme & l ’animal contractent de longues
habitudes, puifque ces habitudes font une fécondé
nature, qui fe trouve bieffée du moindre changement
: mais tous les chevaux & tous les hommes
ne font pas fi fains & fi robuftes, que tous genres
de vie quelconques, & fueceffivemeüt variés, ne
puiffent leur êtreindifférens. (AT. H u z a r d .')
A lim ens. ( Jurisprudence de la médecine.) Les alimens font une des fix chofes naturelles , ou plutôt
l ’un des fix agens de la v ie, que Tinftitutpur
doit régler dans l ’éducation phyfique, ainfi que le
philofophe ou l’économifte dans l’hygiène ou l ’art
de la fauté, & le médecin dans la diète, tous trois»
d après les lois de la nature > dont le théologien
& le cafuifte modifient l ’ufage d’après les précep-
tes de la religion & les lois de l ’églife ;• que
les magiftrats de police font adminiftrer par une
- foule de métiers 8c de commerces, d’après un grand1
nombre de fiatut«-propres* à chacun ; d’après des
lois générales, & fouvent d’après les rapports de
corps de médecine & des médecins qui font con-'
fuites à,ce fujet.
Le vulgaire défîgne fous ce nom les fubftances1
fblides & fluides que la faim & la foif demandent^
que le goût diftingue des autres , que la maftica-
tion & la déglutition envoient aifément dans l ’ef-'
tomac, & dont l ’appetit règle la dofe. L a plupart
des hommes n’ont pas d'autre règle fur leur ufage
leur choix,; 8c leur quantité ; 8c notre légiflation4
fra içpiie,- fi étendue 8c fi- compliquée,- n’a pourtant
guère été infpirée par d’autres motifs fur cet ira-,
portant objet. Cependant les phyficiens qui fe font
toujours occapés de la recherche des moyens que'
la nature. & les aits emploient pour nous fuften-'
ter, & des règles que fuit la nature humaine pour
nous développer & nous nourrir, n’igdorent pas>
combien l’inftinéb vulgaire eft infuffifant & même
trompeur. Cet inftinCE eft naturel, & les futftances
nourricières font naturelles auffi : cela eft vrai y
! mais ce n’eft rien dire , ou plutôt c’eft établir un-
principe bien dangereux , que de vouloir juftifier
ainfi l’ignorance, l’indifférence , & les abus qu’elles
enfantent. La nature produit confufément les alimens
, les médicaméns, 8c les p oifons , 8c fouvent
elle les crée tous les trois dans la même fubftance,
C’eft à l’obfervation & à l ’expérience de débrouiller
8c de faire reconnoîue ces differentes vertus, dans-
les différentes efpèees de productions naturelles ,■
dans leurs variétés ,• dans les individus mêmes : c’eflf
à différens arts d’en apprécier les aétions , 8c à
régler l ’ufage de tout ce que la nature nous offre-
pour 1-e,développement, l’entretien la prolon--
galion de la vie 8c de la fanté, comme pouf la cure
des maladies : c’eft au commerce a fournir toutes
les productions de la nature & de l ’aft dans l’état
le plus propre à opérer les effets qu’on en attend;.
& c’eft à la légiflation a régler ces arts & le commerce
de la manière la plus convenable, à prévenir
& réprimer les abus du vulgaire, pour faire 8c
affiner lé bonheur de l’homme.
D’après les connoifiances que la phyfique nous
donne des propriétés & des vertus des alimens, les
médecins les ont regardés corn mes les fubftances né-
ceffaires pour réparer les pertes des fluides 8c des fb-
lides que le corps animal fait inceffamment en fanté'
& en maladie, par la tranfpiratioa & par les autres
émonCtoires, & par fuite pour entretenir l ’équilibre
entre les fol ides & les fluides, & rétablir les
organes ufés. En dirigeant leurs recherchés d’après
cet/e : définition, ils ont fait un . grand nombre de
découvertes précieufes, & établi, un grand nombre
de préceptes falutaires ; & la police en a fait quelque'üfage,
pour régler en France le commerce
8c 1 emploi des fubftances alimentaires. Mais fûffi-
foit-il de leà conlidérer fous ce rapport, pour
rendre auffi utiles qu’ils peuvent l ’être , les arts
qui ont la nature humaine pour objets & pour
rendre leur légiflation parfaite?
L ’éducation phyfique n’a pas pour feul objet
de réparer les fubftances que perd fans ceffe
1"homme dans les premiers âges fu,jets à la croif-
.lance ; elle doit conlidérer les fubftances nourricières
dans leur rapport avec le.s forces digeftives, prefque
nulles dans les premiers temps de la vie , &
qui fe développent peu à peu pendant le premier
tiers, de fa carrière : elle doit en outre les confi-
dérer dans leurs rapports avec 'le développement
lucceffif des parties ; Sc^fur-tout dans l ’analogie
du foc nourricier qu’elles fourniffent, avec la con-
fiftancé des humeurs & des folides qu’il doit réparer
& faire croître. C ’eftle moyen non feulement, d’entretenir
& d’affermir la fanté , mais encore d’étendre
la carrière de la vie , s’il eft vrai, comme on
en convient, que la vieillefTe confifte naturellement
dans l ’oblitération & la rigidité des fibres qui leur
otent la v ie, & qui .empêchent l ’aftion d e .l’organe
dont elles forment le tiffu , s’il eft vrai encore
que, toutes chofes égales d’ailleurs, la virilité
& la vieilleffe correlpondent tellement en durée
aux âges de croiffance, que ces âges de croiffance
forment naturellement le tiers de la vie. Cependant
les médecins, les feuls qui s’occupent maintenant
des vertus des alimens, n’ont pu. en acquérir
que des connoifiances générales 8c vagues , puifque
le développement de l’homme ne fe fait point
fous leurs yeux, & que l ’expérience n’a pu les bien
Infti :uire à cet égard. C’étoit aux pères & mères de
famille, aux nourrices & fevreufes, & aux inftitu-
teurs & infti tutrices de la jeuneffe, d’obferver les bons
& les mauvais effets des alimens dans le développement
fucceifif du corps humain 8c de fes parties
; mais ils font tous demeurés dans l ’impuif-
fance de le faire, parce que le gouvernement
françois ne leur a point fait donner, pour l ’educa-
tion, les connoifiances qui peuvent être les germes
de toutes les autres : i l n’à encore admis qu’une
éducation routinière fur la confection & l ’admi-
niftration des fubftances qui font les matériaux
du corps humain. I l y a plus , en autorifant les
petites vues des profeffeurs de belles-lettres, qui
préfident actuellement au gouvernement des facultés
des arts, où fe donne l’éducation générale , il
a en quelque forte reftreint les inftituteurs de la
jeuneffe au titre de maîtres de pejifîon ; & fi les
bornes d’u.qe profeffion auffi étendue qu’elle eft né- *
■ ceflaire, coûtent cher à l ’humanité, elles ne font
peut-être pas auffi préjudiciables à ceux qui l ’exercent
: car il eft de ces maîtres de penfion qui lavent
gagner dans le traitement des maladies qu’ils
donnent par l ’ignorance dans laquelle leurs ftatuts
pédagogiques les retiennent. La formation d’une
légiflation qui brife ces entraves & gratifie la nation
d’une éducation phyfique , doit donc être con-
fidétrée comme un des objets importans qui doivent
entrer dans les vues de nos nouveaux légifla-
teurs ; 8c cette légiflation défirable doit établir fur
la nourriture des enfans & des jeunes gens, des
articles qui donnent lieu aux inftituteurs d’en
trouver 8c établir les règles, conjointement avec
les médecins*
La légiflation fur l ’ufage des alimens ne doit
pas fe borner aux premiers âges ; elle doit s’étendre
fur les derniers. L ’hygiène, ou l’art de la
fanté, qui s’occupe principalement des alimens ,
a été formée par les philofophes & les médecins,
en qualité de phyficiens ; mais le citoyen qui
'.n’eft ni l ’un ni l’autre , ne va point les confultet
lorlqu’ii fe met à table, pour en apprendre les
propriétés des alimens qui fe préienlent pour
afiouvir fa faim & fa foif. Il ne Conlulte que fon
goût, fon cuifinier , & l ’ufage, & ces trois directeurs
font fouvent bien trompeurs. Le g que eft fouvent
dépravé par l ’habitude ; le cuifinier n’afpire
qu’à aiguifer l ’appetit ; & l ’ufage;, établi par les
circonfiances feules, concourt fouvent à corrompre
le goût & le cuifinier. D’ailleurs quand ces trois
nourriciers de l ’homme s’accorder oient à ne lui pré-
fenter que des nourritures faines par elles-mêmes,
il ne fera pas en fureté avec ces feuls guides, s’il
ne connoît les rapports .des fubftances qu’ils lui
offrent, avec fos forces digeftives, avec fa conftitu-
tion, 8c avec'fon tempérament. L ’hygiène n’eiVdonc
point un art philofophique ou médicinal ; c’eft un
art économique ou domeftique , doât la théorie
doit entrer dans le plan générai dès études , 8c
la pratique dans l’ ufage ordinaire de la vie. Quelle
feience y entre actuellement, fur laquelle l’hy-
giéne ne met fie la préférence ? Et cependant notre
jurifprudence n’y a pas même encore foncré.
L'hygièné prend le nom de diète entre les mains
du médecin , qui s’en fert pour régler le régime
du malade & du convalefcent ; les alimens en font
la principale partie. La loi françoife a .laifle les
malades, les convalefcens, & leurs infirmiers fournis
immédiatement aux ordonnances des médecins 5
& ceux-ci aux règles de leur art & à quelques“
articles ‘des ftatuts que fe font faits les facultés de
médecine & les collèges de chirurgie ; nous croyons
devoir faire remarquer combien la juri(prudence eft
encore ici infuffifante 8c. même abuiive en quelques
points. Le commun des malades 8c des convalefcens
font laides, par leur éducation, dans une fi
grande 'ignorance fur l ’art de la fanté , qu’ils fa-
vent même peu obéir aux ordonnances des médecins
; des rechûtes 8c la mort même font fouvent
l ’effet de leur imprudence aveugle. 11 n’y a de
réglement pour les infirmiers 8c gatdes-malades,
que dans les hôpitaux , & ces réglemens font en
plufieurs endroits contraires à la bonne police : à