
végétaux répandent autour d’eux, & qu’ils verfent
continuellement dans l’atmofphère.
> L ’état aériforme eft le dernier degré d’atténuation
, de divifion que puiffent acquérir les corps
naturels ; quoique j’aye compté les matières qui en
jouiflent parmi les agrégés, & que j’en aye fait
\me clafle particulière , i l femble que la force
d agrégation y foit nulle : c’eft dans cet état
que les corps obéiffent le plus à l ’affinité de com-
binailon , & qu’ils paroiffent en même temps
avoir le plus d’aétion fur l ’économie animale, il
n y a qu une douzaine d’années qu’on fait que la
plupart des fubftances fufceptibles de fe volatilifèr,
doivent cette propriété à celle qu’ils ont de prendre,
par la chaleur , l ’élafticité , la tranfparence, & les
autres qualités apparentes de l ’air. Cette découverte,
honorable pour notre fïècle , & qui eft due au
célébré Prieftley, a excité une nouvelle ardeur
dans les travaux des chimiftes ; mais elle paroît
n avoir pas encore frappé les médecins , qui cependant
peuvent en tirer le plus grand parti ,
comme je le démontrerai dans plufieurs endroits
de çet ouvrage. I l eft vrai qu’en Angleterre plusieurs
hommes célèbres »occupés de l’art de guérir,
ont commencé^ à profiter de l ’état aériforme de
quelques matières., & particulièrement de l’acide
crayeux.ou air fixe., pour le traitement des maladies
: les fuccès que les do&eurs H e y , Withering,
Percival., Dobfon , Warén , ont obtenus avec, ce
dernier acide , dégagé dans l ’eftomac par l ’effer-
x>efçence d’un mélange approprié , ou in je été en
nature dans les inteftins à l ’aide d’une veflie &
d’un canal flexible , ou appliqué fur la peau, ou
refpiré avec l ’air , dans les fièvres putrides-, les
maux de gorge gangreneux, les ulcères fordides,.
la pthifîe pulmonaire , &c, , doivent inviter tous
les gens de l ’art à continuer des eflais -fi. heureu-
fement commencés. On peut concevoir des efpé-
rances d’autant plus heureufes de Tadminiftration
-des , médicamens fous cette forme , qu’elle facilite
& favorife,. beaucoup plus que toutes les autres ,
une aétion prompte & énergique , & que plusieurs
remedes volatils & ftimulans paroiffent ne devoir
le? effets rapides qu’ils produifent, qu’à la propriété
qu’ils ont de fe réduire en gas à la moindre
chaleur : tels font 1 alkali volatil fluor , le vinaigre
radical, &c. Je ne puis même douter , d’après les
Joins & 1 attention que j ai mis un. grand nombre
de fois à' obferver d’état des malades , les change
mens occasionnés par le camphre , les eaux dif-
tillées,.les liqueurs fpiritueufesi, l ’éther, les écrits
volatils , les huiles effentiellês végétales , celles
de Dipp el, que ces médicamens n’agiïïent avec
l ’efficacité qu’on leur connoît, -que parce que la
chaleur de i ’eftomac en dégage , fous la forme
gafèufe, les principes volatils qui les conftituent y
dont les courans fe portent fur les vifcères
même les plus éloignés. Peut-être découvrira-t-
on quelque jour que c’eft à une expànfion aériforme
de la même nature qu’il, faut.: attribuer
les phénomènes finguliers produits fur l ’économie
animale par l ’opium , le caftoreum , tous les
végétaux vireux , & beaucoup d’autres fubftances,
dont la manière d’agir n’eft pas , à beaucoup près,
convenablement connue.
J’ai lieu d’éfpérer que les détails dans lefquels
je viens d’entrer relativement à l ’agrégation des
médicamens, m’autorifent à avancer avec certitude
les propofitions fuivantes. i° . L ’état des différentes
modifications de cette force naturelle influe fur.
les propriétés médicamenteufes. z°. Dans plufieurs
cas , la forme d’agrégation conftitue feule une
ail ion particulière dans les remèdes. 30. Il n’eft
prefque point dé cîrconftances dans lefquelles
cette forme n’altère bu ne modifie leurs effets avec
plus ou moins d’énergie. 40. Il eft néceffaire d’y
avoir toujours égard dans leur adminiftration. $°. Ces
confidérations ' peuvent éclairer fur la nature &
la manière d’agir de plufieurs fubftances / qui
n’ont pas été affez bien appréciées par les auteurs
de matière médicale.
§. IV. De la température tonfidérée comme
caufe d'actions médicamenteufes.
On doit encore compter parmi lés caufes de
Y action des médicamens examinée en général, la
diverfité'de leur température. Tous les hommes
font dans le cas d’éprouver par eux-même la ..différence
des fenfalions & des effets les plus faillans
des divers degrés de froid ou de chaud dont jouiflent
les corps appliqués à l ’intérieur ou à l ’extérieur
de nos organes. Mais ces impreffio'ns promptes &
générales que le fentiment fait percevoir , ne
fuffifent point aux favans pour apprécier lés effets
de la température; le fimple réfultat de la fen-
fation inftantanée , que tous les hommes font également
fufceptibles d’apercevoir , n’éclaire point
affez le Médecin j il porte Tes regards au delà
de ce fens du moment ; il obferve les phénomènes
qui. fuivent & qui ont pour - caufe cette
première impreflion, & ïl'reconnoît bientôt que
la variété'dans la température des fubftànce? ,,'appliquées
de quelque manière que ce-foit au corps
humain , apporte des 'altérations & des /change-
meus plus ou moins marqués dans les fondions
des diftérens; organes qui le conftituent.
Sans décrire ic i , avec tout le foin néceffaire , les
effets multipliés; de la chaleur fur l ’économie animale
, fans chercher dans fon action toutes les
propriétés médicamenteufes qu’un médecin inftruit
peut y trouver (ce qui fera l ’objet des. articles
C h a l e u r , F f u ) ; il eft cependant indifpenfàble
d’en préfenter les réfultats généraux , pour être-
en état de reçonnoître fon influence fur les puifi-
fances aétives. des remèdes;
Les phyfiologiftes favent que les différentes températures
de l’atmofphère changent & modifient,
chacune à leur manière, les fluides & ies; folides
du corps humain ;, de forte que Tétât de ce dernier
varie, pour ainfi dire y autant.que le,thermomètre.
Mais outre le relâchement des fibres , la raréfae^
lion & la volatilifation des-fluides , opérées par la
chaleur douce , le deffechement & l'aridité produits
-dans les folides -pas la. chaleur, forte.& co-n^
tinue , leur re{ferrement: y la .condenfation » & ' Ta
çeflaiion du mouvement dans -les liquides ,-occai-
iionnées par le froid plus ou moins, vif que Te
corps des' animaux éprouve-, * ainfi que toutes le's
autres matières inanimées'; l’irritabilité & la Ten-
fibilité qui diftinguent ces êtres organiques de tous
les autres, les rendent fufceptibles d’altérations
plus nombreufes & plus compliquées de la part
de ce.s agens naturels. Le mai-ailé , la pefanteur ,
le penchant au fommeil -, l ’accâblèment , la difficulté
de refpirer , l ’étouffement , l ’inflammation
apparente ou fauffe , les hémorragies, &c. , . font
autant de phénomènes qui accompagnent- Tim-
preflion d’une chaleur forte & non interrompue.
Une chaleur plus douce & long-temps continuée ,
fur-tout réunie à l ’humidité atmofphérique, ajoute
a ces premiers fymptômes la dégénérefcence des
fluides,-leur tendance à la f ë p t i c i t é & même la
putréfaction , lorfque les humeurs y font déjà dif-
pofées par d’autres caufes intérieures & particulières
au corps humain. Le froid modéré -foutient le-ton
& anime la force irritable des^fibres ; les fecrétions
& les excrétions fe-font avec régularité pendant
fon impreflion ; les fluides confervent leur, naturê
douce & Leur mouvement ; ' enfin cette température
foutient la fanté dans; les individus-vigoureux &
bien conftitués. Un froid trop v if produit dés effets
contraires; la peau fe refferre ; les fibres mufcu-
laires fe contrarient avec trop d’énergie ; les vaif-
feaüx , comprimés par fon' àcîion , oppofent un
obftacle au fang qui preffe inutilement leurs parois
; les fluides s’épaifltffent, leur mouvement fe
rallentit ;- ils n’ont point cette adlivité , ce ftimulu-s
néceffaires pour foutenir l’adtibn vitale des folides;
bientôt ils s’accumulent, ils s’arrêtent -, & pfodui-
fent l’infenfibilité & l’immobilité dans les organes
où fe fait .cette fîafe , & la gangrène, qui en eft
le dernier degré.
Cette légère efquiffe des effets de la température
d-iverfe- de ratmofphere, dans laquelle vivent
les animaux, peut être rapportée aux modifications
que le' froid ou là chaleur font naître dans Y action
des médicamens : quoique ces • derniers n’aieùt jamais
: leé excès- de chaud & de froid dont j’ai
apprécié l’énei-giè 'dans les extrêmes afin dé la
rendre plus fenfible ; fi on fuppofe' letir dcîiôii
modérée relativement à cés propriétés phÿ^quès, on
. aura une idée affez jufte des changèmens que la
température produit dans/leur maniéré d’agir.
Un ’ médi ;ament très-châud dilate & raréfie fu-
biternent les fluides;,:il excite }un ôrgaftne-violent';
& fort àdmlnifti-ation eft piefque toujours- fuiviè dé
dangers : • une chaleur affez vive dans les remèdes
Extérieurs àgite; les fibres , multiplie'leur1 mouVement',
divife & atténue les fluides, & agit comme
fondante , iépetculfive, altérante, &c.
Un neimède d’une chaleur de ao à i f degrés à
peu près , adminiftré à d’intérieur:, détend & relâche
-les fibres , appaifé l e Tpafrne-, calme les douleurs ,
dilate;.les; fluides.,, ouvied.es--bouches des vaiffeaux,
& '.'fait! couler la TueurbnSi on eft continue l ’u-fage
trop dong-temps , i l diminue le ton des fibres , il
-affoibiit les : malades--,' il prive l ’eftomac d’une-partie
de, fai-foirce digeftive , il enlève l ’appétit, il
nuit à la nutrition , & -il trouble peu à peu
toutes les fondions : tels font les maux dcCafion-
■ nés par l ’abiis' du régime relâchant en général, des
boiftons chaudes- , du- thé , du lait chaud , du chocolat
pris!habituellement, comme le font'plufieurs
nations>,, OïLi- des .bouillons légers de veau & de
poulet, employés pendant trop long-temps|icomme
l ’ont voulu quelques- médecins. Dans le plus grand
pombre de cas, on. ne doit donc pas infifter trop
de temps' fur la chaleur des tifanes & des boiflons
quelconques ; dans les pays tempérés , dans les
{aifons chaudes, , il vaut prefque toujours mieux
adminiftrer les médicamens fluides à la température
-ordinaire de Tàtmofphére. Un jeune médecin
doit fe fouvenir que-Tabus & la trop longue continuité
: dans les .remèdes prefcrits à une température
chaude, occafionnent plus de maux qu’ils n’en
peuvent guérir. On voit fouvent, dans la pratique ,
l ’appétit revenir promptement chez les convalef-
cens , lorfqu’après avoir quitté les tifanes & les
autres- -fluides: chauds ~&trëlâcbans dont ils faifoient
ufage dans leurs maladies , ôn ne*leur fait prendre
: que quelques boiflons froides. On remarque
encore-la même chofe chez les femmes qui habitent
les villes : la plupart , même parmi le peuple
; ont la mauvâife habitüde de prendre tous les
matins des liqueurs chaudes, du thé , du lait très-
àqueux ; dü‘ café fort étendu ; leur eftomac, affoi -
bli par cette abondance de boiflons fades ,& relâchantes
, n’éprouve point , aü milieu du jour v
cette fenfation agréable qui doit accompagner le
béfoin' de-manger, & qui précède toujours une
bonne digeftion. 'Elles ne prennent que très-peu
d’alimens, qu’elles digèrent encore très-mal ; &
ce n’eft que vers le fôir que leur appétit fe
développe un peu plus ; elles regardent le fou-
per comme le meilleur repas ,' & y mangent en
effet beaucoup plus *que dans le refte de la journée
; & c’.èft à ; ce ' mauvais régime que font dus
en grande partie » ainfi qù’à leur vie trop féden-
tkire■ , l'es maladies-qui les attaquent, & qu’on ne
'connaît point dans les campagnes.
La teriipérature froide change entièrement les
propriétés des médicamens fluides. En effet, un remède
qui, adminiftré chaud , relâchoit , détendoit
les fibres, ouvrent les pores, & faifoit couler la
lueur ; produit dès effets bien différens fi on le
donné' froid aux malades. Il ftimule légèrement les
parois dé l’eftomae & des inteftins ; au lieu de
. rèlâchér la peau & d’augmenter la tranfpiration,