
l u i , ont été allez courts 3. celui qui l’a fait avec
le plus d’étendue ,. eft M. Carrère. Nous allons,
le copier, parce qu'il prend1 Agrippa à l’âge
de vingt ans , & qu'il le fuit dans plufieurs
époques de fa vie , à ce qu’il paroït d’après
Teflier.
Henri-Gorneille Agrippa I de l ’illuftré famille
de Néttesheim , naquit à Cologne le 14 feptem.-
bre i486. Ses ancêtres ayant été- attachés-depuis
long-temps à la maifon; d’Autriche , il entra de
bonne heure au fervice de Maximilien I. I l firt
d’abord un de fes fecrétaires 3 mais comme i l
aimoit la profeffion des armes, i l alla, fervir ce
prince durant fept ans dans fes-armées d’Italie.
I l s’y fignala en plufieurs occafions 3 ce qui. lui
mérita le titre de Chevalier : il fe fit enfuite recevoir
dofteur en droit & en Médecine.-
Vers l’an 1506 ( i l n avoit que vingt ans )
i l vint en France.. Il fit un voyage en Efpagnè 3
i l revint à Dole'en Franche - Comté en 150^
Cage de vingt-trois arçs)yi l y obtint une chaire
de profeffeur des lettres faintes ( f i Le fu i t efi
v ra i, i l fa u t convenir- du i l efi prefque incroyable)
3 & il y expliqua ,. à la prière de quelques
perfonnes de • qualité., le livre de verbo mirifico.
de Jean Capnion- ou R’euchlin 3 ce qui; lu i fit
des affaires avec les zélés ,. & donna occafion au
père Jean Catelinet , cordèlier , . d’écrire- contre
lui.A
grippa fit depuis le voyage d’Angleterre , d ou
i l revint à Cologne donner des leçons de Théolo
gie ,. nommées quodlvbétalés-. I l repaffa enfuite
en Italie ,. où il fervit encore dans l’armée de
l ’empereur Maximilien. 1. IL s’y diftingua. par fa
bravoure.. '
L e cardinal de Sainte-Croix , eonnoiffant fbn-
anérite-,r l ’appela, au concile qui- fi.it tenu en
35 r i ( Agrippa- avoir alors vingt-cinq~ ans) a
P ife .'con tre le pape Jules- II-, & dans lequel
j l devoit être théoLogien du concile. ( On concevra'
difficilement qu un cardinal ait choifi ,-
pour être théologien dans, un concile ., un jeune:
homme qui devoit mieux connoùre un. camp
gue la Théologie:;. fa n s 'doute qu on avoir
des vues politiques-, fi. ce choix a en lieue ■
Comme Agrippa parloït huit langues, & qu’j]
avoit une grande connoiffance dès fciences , il fe
fit des amis parmi les .grands hommes de fon
temps. Trithême Era-fme , Mékn&ôn,- Jacques
le Fehvre d’Eftampes WM quelques autres furent
charmés dè fon- mérite.'
IL enfefgna là-’théologie à Pàvie 3 & vers 1 an-
T515 ,, à Turin , d’o i rU fiit obligé de fe retirer.
'
I l alla a M e tz , & y fut fÿndic, avocat, &
orateur de la v ille , en 1518. 11 fut encore obligé
de lortir de cette- ville en m n j g âge"dâ trente*
ornitrc ans ) , tant pour -avoir écrit contre-
Topinion., commune en-ce temps - l à , des-trois
maris <fe fainte Anne ,"que pour avoir protégé
une payfanne accufée de forcellerie.
Il fe .retira à Cologne fa. patrie. L’année fui-
vante , i l alla à Genève 3; de là à< Fribourg , où
il exerça la Médecine.- ( I l était ’docteur en cet
an dès Vage d-environ v ing t• ans; & i l fe met
à Vexercer dix-fept ou dix-huit ans après , fans*
qu’i l paroijfe s’en être occupé durant ce: long,
intervalle ; f i ha?:diejfe & fa fujffifance fup~
plèoienc au défaut de connoijfances pratiques ;
i l avoit farts doute un répertoire de formules
qu i f employait! , comme le fon t encore de nos>
jours des empiriques• & certains- faux- médeci,
ns.)
En 15x4 (â g é de 38" ans) , il vint à- Lyon^
Simphorien dé Bullioud , évêque de Glandève
lui procura Les- entrées à la cour, qui étoit alors
en cette ville. Le roi François premier lui donna
une penfion(ce f u t fa n s doute en qualité A homme:
de lettres- ou de. f avant) 3 & il .fut médecin
dé Louife de Savoie , mère de ce prince : mais-'
il encourut bientôt fa difgrâce , tant pour n’avoir-
pas* voulu chercher , par les règles de LAftrolo—
gie r l ’événement des affaires de France,, que pour
avoir ; fait, des prédirions en faveur du connétable-
de Bourhon-,.ennemi ,de cette princeffe.- ( Ces déuse:
chofes 11e fe concilient pas. bien. )
I l revint donc à Paris, d’où il alla à Anvers :-
mais en 1325) f âgé- de quarante trois; an s) ib
fut appelé en même temps par Henri V I I I , roi;
d’Angleterre ;,par Galtinara, chancelier de Charles-
Quint 3 par: un feigneur d’Italie 3- & par Margue-^
rite d’Autriche y feeur du même Charles-Quint
alors gouvernante des Pays-Bas^ Il accepta les^
offres dè cette princeffe qui lui fit donner le •
titre d’hifforïograpfie de l ’empereur fon frerè. IL
publia en cette qualité la relatiori dii couronne-^
ment de ce prince , & bientôt après-- i l fit l’o-
raifon funèbre dé Marguerite.. ( E lle mourut em 4gim • ‘Sgi S ■ ■ ■ ■ .■ -S : Il ht imprimer en- 1530 (âgé de quarante-■
quatre ans ) fon traité'-dé la vanité des- fciences
&.\fa philofophïe occulte .3; ce qui le fit mettre
en prifon l’année fuivante à Bruxelles. Après en:
être fort! , il -paffa, dans le pays de Cologne à *
Bonne, où il demeura jufqu^èn 1535 , - qu’il revint
•en France, avec la réfolution de demeurèr à Lyom
Il y fut emprifonné pour avoir écrit contre Louife
de Savoie , mère de François premier. ‘.(- Cette
princeffe étoit morte en 1531). Dès qu’i l fut',
élargi- , il alla à Grenoblè , où il mourut la 1-
même année. 1535 , (âgé p a r oonfêquent de
quarante-neuf ans ; c’èfi . au f i T âgé que lui
donnent Manget & autres écrivains. Mais M.
E ioy placé fa mort en 4 , & lé f a i t vivre-
foixante-huit ans*):,
JL éprouva dès malheurs continuels;, que lui attirèrent
fon ineonffanee & fa'trop-1 grande har-
dieffe à* parler &: à écrire fur les matières les*
plus délicates. Grand nombre d’auteurs l’ont accufé
de magie. Paul Jove , Delrio , Thevet, &
ques.autres le traitent fort m a l, & difent q uil
fut chaffé de tous les lieux où il voulut s’établir.
Paul Jove ajoute (anecdote ridicule ), qu Agrippa
.avoit un chien noir qui lui apprenoit tout ce qui
fe paffoit dans le monde , & qu étant près de
mourir , comme on le preffoit de fe repentir, il
.ôta à ce chien un collier garni de clous, qui
formoient dés inferiptions nécromantiques , &, lui
dit avec chagrin : Va-t-en, malheureufe bête ,
qui es caufe de ma perte totale : A b i y perdit a
fbejlia, quæ. me totum perdidijli ; & qu enfuite
■ et chien alla fe précipiter dans la Saône s fans
que jamais on l’ait revu.
L ’attachement d’Agrippa pour les fciences cachées
donna fujet à ce conte & à l ’accufàtiôn de
magie.. Sa pauvreté , fa misère font affez voir qu il
n’étoit pas grand forcier. Il a toujours vécu
& eft mort dans la communion de l ’églife romaine
3 & i l s’ eft déclaré contre la doctrine de
Luther , quoiqu’i l ait ménagé fa perfonne. Au
.r e f t e i l faut avouer qu’il avoit de grandes qualités
, & qu’on a eu raifon de l ’appeler le trifmé-
gifte de fon temps, parce qu’il étoit favant en
Théologie , en Médecine , & en Jurifpriidence.
(P o u r bien prononcer , i l faudroit prendre la
peine de lire fe s ouvrages , & lès. juger fu r les
eonnoiffattees de fon Jiècte.)
Paul Jove , qui eà un de ceux qui le traitent
moins favorablement, avoue' néanmoins qu’il avoit
de l’efprit jufqu’au prodige., portentofum inge-
nium. Jacques Gohorri Le place entre les plus
brillantes lumières de fon dècle , inter clarijfi-
mafui fceculi lumina. Le do été Louis Vivès le
nommé le miracle des lettres & des doâres, &
l’amour des gens de bien : Venerandum dominum
Agnppam, littirarum ütteratorumque omnium mi-
mculum, & amoxem bonorum.
Nous avons d’Agrippa , continue M. C . , les
ouvrages fuivans , concernant la Médecine :
i° . De Alcitmifticâ. Lugduni, 1535 , in-8°.
>°. Contra peflem antidota fecurifjima. Lugduni
, 1535 , in-8°. .Cet.écrit eft dédié à Théo-
<doric de Corena , adminiftrateur de l’archevêché
de Cologne.-.
3 D e medicinâ in généré.
40. De medicinâ opératrice.
ç°. Depharmacopoliâ.
6°. De chirurgiâ.
70. De anatomifticâ.
8-0. D e veterinariâ.
9°. D e dicetarïâ.
io°. D e arte coquinariâ.
Tout ceci eft renfermé dans le fécond tome de
fes oeuvres.
Nota* Ce que M. C. indique ici comme des
traités particuliers , ne font, à ce q uil paroït, que
des titres de chapitres de l ’ouvrage de incertiiu-
dine & vanltate omnium fcientiarum. ( Vqye-^
la note d à la fin de cet article. )
i i °. Occultaphilof ophia, Lugduni, i ? 33> in -fo l
i i ° . Appendix apologetica pertinens ad fecun-
dam operumpartem. Lugduni, apud Beringos
. fratres. i$o$ , in-8°.
( Si cette date eft jufte, ce qui 11e doit pas
être , cette appendix auroit été compofee par l ’auteur
à dix-neuf ans. )
On a encore d’,Agrippa-.
i° . Comment aria in ârtem brevem Raimundt
Lulli.
z°. D e triplici radone cognofcendi deum.
30. Dehortatio à theologiâ -gentili.
4°. D e vanitate fcientiahim.
5°. Expofiulàtio cum Joanne Catilinero.
6°. Epijlolarum libri feptem.
7°. D è proejlantïâ fe x û s feminini.
8°. De peccato originali.
5>°. D e facramento matrimonii».
10. De coronatione imperatoris.
i i °. Orationes.
Ses oeuvres ont été imprimées en deux volumes
in- 8°. | à Lyon , en 1600.
Agrippa avoit beaucoup d’efprit & d’érudition 5
i l écrivoit bien, & compofoit des pièces affez
juftes-: mais i l étoit grand déclamateur , fatirique,
emporté, trop libre , & trop hardi. I l fe plai-
foit à avancer des paradoxes, comme celui de la Eréférence des femmes for les hommes. L ’opinioa
a plus extravagante qu’il ait foutenue , eft celle
de la nature du péché d’Adam , dont i l dit des
chofes qu’on devroit chercher i oublier, fi on le%
avoit apprifes.
Le plus confidérable de fes ouvragés eft ’fort
traité de la vanité des fciences & de l’excellence
de la parole de Dieu , dans lequel i l entrepend
de prouver ce paradoxe , q u i l n’y a rien de p lus
pernicieux , ni de plus dangereüx pour la vie
des hommes & pour le fa lut de leur ame, que
les fciences & les arts..
Wier , qui avoit été domeftique d’Agrippa %
&; qui entreprit' de le juftifier , prouve que le
traité decaeremoniis magicis , n’eft pas de lui.
On a inféré dans le premier volume du recueil
de fes oeuvres quelques autres pièces dont i l n’eft
point auteur.
- Son traité de la vanité & de l ’incertitude des
fciences , a été traduit en françois , d’abord pat D d d IIS .