
la raifon. On ne fouroit être trop au fait des fciences
pofitives qui forment les fonde mens de la. fcience
àe la Médecine5 & Tonne fàuroit trop mettre de
îcrupule dans l ’étude des caufes dont nous éprouvons
1 influence. Plus la théorie médicale eft dif-
ficile & ^conjecturale-, plus il faut mettre de févé-
^ exaétitude dans nos raifonnemens, & par
confeq.uent de précifion dans les connoiffances qui
en forment la bafe.
Trois avantages doivent réfulter de la connoiffanee
des propriétés & des qualités phyfiques de Yair ,
ainfl que de fes propriétés chimiques, expofées en
partie dans le chapitre précédent3 i°. l’intelligence
des phénomènes atmofphériques 3 a0, la perfection
de la météorologie j 30. la connoiffanee plus exaéfce
de la maniéré dont Yair influe fur nos corps.
Ce dernier objet, qui eft véritablement l ’objet
du médecin, eft fi. intimément lié avec les deux
autres, & par conféquent avec la connoiffanc# phy-
flque & chimique de Yair, qu’i l eft impoflible d’en*
porter la théorie à un certain degré de perfection,
fans avoir aufli une connoiffanee exaéte de tout ce
qui concerne la phyfique de V'air atmofphériqiie;
% Néanmoins Timperfeétion aétuelle de nos théories
ne nous permettant pas toujours d’apercevoir
cette liaifon dans tous fes points, a fait que 1a plus
grande partie des médecins fè. font contentés- de
Pobfervation momentanée & individuelle des phénomènes
& des dérangemens de l ’économie animale,.
& ont négligé de chercher dans l ’étude des phénomènes
atmoiphériques les variations relatives à ces
déraupemens , ou du moins ne.l’ont fait que d’une
manière vague & fuperficielle. De là le diferédit
dans lequel font tombées les obfervations météorologiques
exactes ,, dont l ’utilité n’a jamais été que
préfumée,. & n’a point encore été fentie. Le peu
de- progrès que TEiidiométrie a fait faire 2 la fcience
météorologique , a augmenté encore l'indifférence
des médecins à cet égard. Néanmoins i l eft très-
probable que cette inutilité apparente de la Météorologie
& de l ’Eudiométrie appliquées à la Médecine
, ne vient que de Timperfeérion actuelle de
«es deux fciences 3 & loin de décourager les médecins
, il femble que ces difficultés ne devroient
qu accroître leur zèle & multiplier leurs travaux.
Ce qu’i l y a de vrai-, c’eft que ces deux objets de
travaux ne pourront être fùivis d’une manière utile
que pa» des médecins, c’eft-à dire , par ceux qui,
également occupés de l ’étude de l ’économie animale
& de celle des chofes qui nous environnent , ne bornent
point leurs recherches à la fatîsfodtion d’une
euriofite oifive, ni à l ’étalage d’une fcience inutile.
Il netoit donc pas fbperflu dans cet article de
préfenter aux médecins , dans Tëxpofiiion des propriétés
& des qualités phyfiques de Y air, la bafe
de leurs travaux météorologiques;
( »a. Utilité de la connoiffanee des propriétés
& des. qualités- phyfiques de Vais pour la Météorologie
& PEÙdioméirie. ) Deux chofes entre
autres paroiffeot manquer à. la perfedfion de la
Météorologie, 1®. La connoiffanee des différentes
élévations auxquelles s’opèrent les révolutions at~
mofphériques , ou l’état comparatif de Ta&*, pria
en même temps à différentes hauteurs.-1°. La véritable
mefure de l’humidité de Y air & la con-
noiffance de Tétat & de la quantité de Teau fuf-
pendue dans ce fluide. Cette connoiffanee trop imparfaite,
parle moyen des hygromètres ordinaires
peut être infiniment perfectionnée par la méthode’
de M. Leroi. Mais comme les révolutions atmof-
phériques dépendent beaucoup de Tkumidité de
Tûirj que cette humidité a des rapports certains*
avec la température 8c la denfité de ce flfiide ; que
cette température & cette denfité font différentes-
à différentes élévations , dans lefquelles les révo*-
lutions atmofphériques font aufli fort différentes 3;
il en réfulte que la progreflion des denfités de Yaip
à différentes élévations y que les variations de ces
denfités fuivant les différentes températures 3 que
leurs rapports avec l’humidité diffoute ou fufpendu«
dans Y air méritoknt d’être déterminés dans cet artic
le,, qui fe trouve par-là contenir, comme le»
élémens, ce qui doit être dk dans l ’article atmo£
phère.
C’èft là une des raifons qui m’a fait donner ut»
peu d’étendue à l ’èxpofition des phénomènes d®
l ’humidité & de la- chaleur confédérées dans Yair r
ainfi qu’aux obfervations relatives à; fa pefanteur
fpécifique & aux dégradations de cette pefanteur r
fuivant l ’élévation des lieux. Car en donnant une
idée de la manière dont on détermine les élévations
des lieux par le baromètre , mon but a été
feulement d’indiquer le rapport entre les denfités~
ou les pefanteurs atmofphériques & les élévation»
dés lieur, & les changemens que ce rapport éprouve
de la part des températures.
A 1 égard-de l ’Eudiométrie , fi Ton confidère les
différentes méthodes employées pour juger de Tétat
& d elà cornpofiiion de Yair fournis aux épreuves
chimiques, on verra que dans toutes on a négligé'
de tenir compte de l ’humidité, & que dans tous
les moyens mis en pratique pour cette analyfè r
cette humidité eft entraînée & confondue avec les
- autres- produits. Certainement d’après la quantité
confidérable d’eau qu’on retire quelquefois de Yair,
on a du- confondre & compter pour a ir vital une
affez grande portion de Yair atmofphérique qui
ifen étoit pas. C ’eft fans doute à une pareille erreur
qu’eft du un réfültat fort remarquable , & trouvé
. conftamment par un favant italien ( M. Céfar Gat-
lorti f i En foifont par l’eudiomètre de M. Volta
Tànalyfè de Y air pris vers l ’embouchure de Y Adda>
dans le lac Côme, lieu ou l ’on ne peut prefque s’arrêter
une nuit fans gagner la fièvre , & au deflus des
rizières dit Piémont fi marécageufes & ffmal-foines,
il trouva dans ees airs une proportion plus forte d’air
v ital, que dans celui qu’i l examina fur le mont Le-
gnone à une hauteur d'e 1440 toifes-, lieu dont le-
féjpus eft reconnu pour très-falubre. M. de Sauffure
& d’autres favaiis ont foit des obier valions analogues*
Ceci peut donner une idée de ce qu’on verra autre
part, & que j’ai déjà indiqué dans cet article , corn-“1
bien l ’appréciation de la quantité & de Tétat de
l ’humidité dans l ’atmofphère , p'ourroit devenir importante
dans l’étude des effets de Y air fur l ’économie
animale.
(3 0. Utilité de la connoiffanee de Vétat &
des propriétés effentielles de l*air à différentes
élévations. ) Les propriétés effentielles de Y air ne
font fufceptibles, dans une même élévation, que d’une
certaine mefure de variations j ces variations
n’ont par Conféquent qu’une influence peu fenfible
fur nos corps, quelque réelle qu’elle foit. Mais fi
l ’homme changeant de lieu , ou s’élève beaucoup
ou pénètre^ de grandes profondeurs, alors ces propriétés
varient avec la maffe atmofphérique, leur
variation a néceffairemént un effet plus fenfible fur
nos organes, & cet effet mérite notre attention.
Nous avons vu qu’à la hauteur de 1500 toifes ,
Y air atmofphérique avoit perdu plus du tiers de fa
denfité 3 que là il étoit encore refpirable ; que les
lieux fitués à cette élévation étoient habitables,
mais qu’au delà de cette pofition, les fondrions
étoient manifeftement gênées, les forces diminuées,
& que tout annonçoit que la raréfaction de Y air
étoit la caufe de ces effets 3 que cependant M. de
Sauffure s’étoit élevé encore plus haut, & que par
conféquent on pouvoit vivre, qnoiqu’avec incommodité
, dans un air beaucoup moins denfe, & dans
une pofition beaucoup plus élévée ; mais que probablement
on ne pouvoit point y habiter. La fphère
habitable & falubre paroiit donc bornée à une hauteur
de i^oo toifes au deflus delà mer. Nous ignorons
jufqu’à quel point cette même fphère peut
s’étendre en profondeur, & quel degré de condenfation
deviendroit nuifible à nos organes & à notre fanté*
Mais quel que foit l ’efpace compris entre la plus
grande denfité compatible avec l ’intégrité de nos
tondrions & la plus grande raréfadrion à laquelle
elles peuvent réfifter , il eft probable que dans cet
.efpace, les différentes denfités de l ’air ont des effets
différens fur les différentes conftitations.
En même temps qu’on s’élève .& que lai/*perd
de fa denfité , il fe dépouille aufli d’une partie des
émanations que le voifinage de la terre lui communique
, & à égale température, jldevient moins
humide. Il eft donc plus pur.
Le fait que nous venons de rapporter de la proportion
apparente de l ’air vital plus grande dans
Y air des régions inférieures., que dans celui des
régions plus élevées , ne prouve rien contre ce que
j’a v a n c e j e le répète, un examen plus attentif
des phénomènes de cette analyfe auroit peut-être
démontré que la quantité refpedrive d’eau contenue
dans l’un 8c dans l’autre, eft la caufe de cette différence.
Alors cette expérience ne feroit que confirmer
la propofition générale, que plus Ton s’élève dans
1 atmofphère, moins l ’air contient d'eau en diffolu-
tion. Mais jufqu’à quel point cette eau eft-elle utile
ou nuifible à nos organes î II paroît qu’il eft des tempéramens,
& fur-tout des poitrines pour lefquellés.un
air chargé d’une certaine proportion d’humidité eft
utile, 8c pour lefquelles au contraire un air trop
dépouillé de cette humidité, 8c qu’on accufe communément
d’être trop v i f , eft véritablement nur^
fible. Les perfonnes dont la fibre eft sèche, tendue,
irritable, dont la poitrine, facile à s’affe&er, s’agace
& s’enflammé ' aifément, & eft menacée d’ulcération
, font dans ce cas j elles fouffrent ordinairement
dans cet a ir , & par conféquent dans les
lieux qui font très-élevés & en même temps fec*
& peu arrofés, comme je l ’ai déjà dit de la montagne
de Montmorenci. Les tempéramens contraires
font dans un cas différent 3 mais il faut noter que
l ’humidité utile dans Y air n’eft pas une humidité
ftagnante, chargée de miafmes & d’émanations putrides.
I l eft donc des proportions d’humidité différentes
fuivant les fîtes & les élévations des lieux,
& ces proportions ont une influence direéfe fur la
fanté des hommes.
Ce ne feroit donc pas un travail étranger à la
théorie de l ’hygiène, ni peut-être inutile par la
fuite à fa perfection, que la eomparaifon des élévations
des lieux avec les degrés de denfité & d’humidité
correfpondàntes dans Tatmofphère} & cette
confidération me fera, j’efpère, pardonner des détails
qui, au premier afpeét, ont pu paroîtré étrangers
a la matière que je traite.
( 4°. Préceptes d’hygiène réfiiltans des effets
que les qualités accidentelles de Pair produifent
fu r nos corps. ) Quant aux qualités accidentelles de
Y a ir , leurs variations étant plus fenfibles pour nous
que celles de fes- propriétés effentielles , parce
qu’elles font plus multipliées , il en réfulte que leurs
effetsfur nos organes font fufceptibles d’être prévenus
ou dirigés fuivant des règles plus fures, dont les principes
peuvent fe réduire à un certain nombre de pro-
pofitions principales.
i° . Nielle qualité confiante dans Patmofphère
n’efl nuifible par elle- même , à moins quelle né
fo it exceffive & délétère. Ainfi, le corps & la confti'--
tution des hommes fè fait aux chofes qui les environnent
conftamment, & quifotit toujours les mêmes.
z°. Cette propofition eft1 également vraie pour
la chaleur & pour le froid, pour l’humidité & pour
la féchereffe, 8c quoiqu’elle fut moins rigoureH-
fement vraie pour Thumidité, à caufe des miafmes
dont elle peut être le véhicule , néanmoins il eft
des exemplës qui prouvent qu’on fe foit même aux
émanations des marais, & que des peuples entiers
vivent dans des climats dont les étrangers éprouvent
toute l ’infalübricé.
3 V 'L e s qualités de Y air ne nuifent donc le plus
fbûvent que par leurs viciftïtudes.
4®. Les qualités de 1 yair portées à un degré
très-fort,. me font nuifibles que parce qu’elles ne
font pas durables 3. & elles deviennent d’angereufes ,
ou parce qu’elles agiffent fur des corps qui n’ y
font pas habitués, ou parce qu’elles font bientôt
remplacées par dès qualités- contraires.