
1 hôtel-dieu de Paris , par exemple , les Coeurs hof-r
pitaiierés iont dans la poiTcIîion & prétendent être
dans le droit d'admiuiftfer elles-mêmes les a lim e n s
aux malades-, laps l ’ordonnance des médecins &
chirurgiens, Sc quelquefois même coptre leurs avis.
Entiu les chirurgiens n’ont rien ou prefque rka
dans leurs réglemens de relatif à la diète.
Les lois de l ’églife chrétienne fur les a lim e n s
ont principalement deux objets, le jeûne Sc l ’abf-
tjnence de viande. Ces lois font générales ou particulières
: générales, pour les jours de jeûne &
& dabftjnence preferits fur le calendrier eceléfiafti-
que/ particulières , dans le pouvoir que l’églife a
donnp à fès miniftres de preferire l ’un Sc l ’autre
■ au tribunal de la pénitence, pour fatisfajre - à la
juftice divine & réprimer la concupifçence. L ’on
lent bien que pour concilier la nature avec la
religion , l ’exécution de ces deux fortes de règles
demandent bien des çonfidérations pour être appliquées
à i ’âge & au fexe , à la confti.tution & au
tempérament, à la fortune Sc au? çirconftances,
afin de ne point bleffer la loi naturelle , en voulant
obéir à la loi révélée. Pour concilier l ’une & Pau-
tre , l ’églife a recommandé a fes miniftres de n’aç-
corder les dilpenfes à fes lo is , qui doivent être
en grand nombre, que fur les éxoines ou 'certificats
des maîtres de l ’art de guérir j mai? pourtant
ces miniftres n'y ont pas eu beaucoup d’égard ; ils
ont cru pouvoir donner d’eux-mêmes les difpepfes,
& cependant on n’a point fait entrer dans le plan
des études epciéfiaftiqües , les connôilfances fur le
régime, qui feroient néceftaires à cette difpenfa-
tion. Ces dilpenfes arbitraires ont mis la loi eq
diferédit. Les proteftans , les anglicans eq particulier
ont confervé dans leur liturgie les préceptes
du jeûne & de l’abftinence à peu pies tels
qu’ils font dans le calendrier. I l les ont iaiffé fub-
fffter pour tous les vendredis de l'année , lès quatre-
temps , le carême, Sc les vigiles des grandes fêtes ,
& cependant ils ne font p^s plus olffervés actuellement
parmi eux , que s’il n’en eût jamais été quef-
tion. Une des caufes principales de leur inexécution
eft venue de l'indifférence Sc de la maladreffe
des miniftres dans les difpenfes. La même caufe
contribue beaucoup à faire perdre la loi de vue
chez les catholiques romains : chacun croit pouvoir
prendre de lui-même des difpenfes que l'on voit
diftribuer avec tant de légèreté. V o y . D ispense«.
La légiflatjon françoifie, fi indifférente fur ces
divers ulages des a lim e n s , s’eft plus occupée de
Jeur commerce ; elle les a réglés fous le titre
de denrées, qu’elle diftingue^des épiceries Sc des
drogueries dans fes tarifs & fes réglemens : mais
on ne peut fe dilfimuler qu'elle a plus fongé à retirer
des droits de leur vente, qu’à n’en procurer
que de falubres .$ car les fermiers généraux ont eu
aflez de crédit pour faire taxer tout ou prefque
tout , les objets les plus péceflaffes à la vie,
£orame ceux du luxe le plus inutile Sc le plus dangereux.
I l a fallu que le pauvre & l’homme mal-
àifé aehetàflent d’eux la permi/fion de faire leur
petit repas , comme les * plus opulens. Il n’y a eq
de diftinCtion que dans la proportion, Sc même
ï f a lim e n t le plus commun Sc le plus néceflaire
eft quelquefois celui qui a été le plus furchargji.
Par exemple, le- fel, que la nature a rendu le plus
abondant après l ’eau, parce qu’il étoit le plus utile,
apres cet éiéxqent, aux hommes & aux beftiaux,
a été vendu Î4 fous la livre par le financier qui
ne 1 achetoit pas deux .liards dans la faiine j & il
a fallu que le pauvre achetât à un prix fi exorbitant
ce correétjf de fon régime groifier, ou qu’il
ne mangeât point j mais il eft i efpérer que la
nation affranchira de tout impôt les dlimens grof-
fiers dont le peuple fe repaît, pour en répartir liir
les inftrumens du luxe, le poids qui deviendra
ainfî léger pour les riches. Dans les tarifs, les
a lim en s- font féparés des drogues & épiceries , Sc
confondus avec la mercerie , ia quincaillerie , 8cc. ,
fous le titre d,e denrées ; mais il faut efpérer que
les repréfentans de la nation, s*occupanst des agens
de la v ie , en feront Une claffe particulière, qui
deviendra l ’objet des foins dés hiagiftrat? de police.
De ces fubftances, les unes font pour l ’horrime, les
autres pour les beftiaux Sc pour les autres animaux
que l ’on élève 8c nourrit , où pour devenir eux-
mêmes la nourriture des hommes , pu pour leur
rendre des fervices. Sous lé premier alpeCt, ils forment
la matière de l ’éducation & de la médecine
humaine , 8c fous le fécond, celle de l’art vétéri-
rinaire. Sous lAin & l'autre afpeéï ils forment celle
de.l’économie ; 8c à tous égards le magjftrat de
police dojt en furyeiller la production, la préparation,
le débit & J’ufage , fur les rapports des
maîtres de 1 art de guérir, plus en état que tou£
autres citoyens d’en connoître les bonnes & mau-
vaifes qualités , d’en fuivre les bons Sc mauvais
effets fiir le peuple qui en fait ufage, & de re-‘
monter aux caufes qui les rendent fains ou yréné-
neux,
• Les comeftibles font l'objet d'un grand nombre
d’arts, de commerces, & de négoces. Les jardiniers,
les laboureurs, les vignerpns , 8cç., font naître &
perfectionnent les végétaux les plus npceffaires à
la vie, Les progrès qu’ils ont procurés à lçurç arfs>
dans notre fiècle, excitent fans doute l’admiration
de ceux qni veulent bien y réfléchir j & ces arts
ont autant influé fijr la falubrité que fur la quantité
de leurs productions : or cette beureafe révolution
eft moins due ^ux expérience? des artiftes ,
qu’à la théorie des physiciens & des médecins, qui
le font réuni? d$ns |es fociétés d’agriculture (1).
fi) La plupart des plantes qui fervent & alimens, font,
dans leur état naturel ou fauvage , incapables de nourrir
par leur âcreté , plufieurs mêmes font ,yénéneufes> 'C'èft
par leur culture qu’elles deviennent aufli falubres qu’agrH-
. I l eft de plus des circonftances où il faut recourir
aux lumières des maîtres de l’art de guérir, pour qu’ils
pourvoient aux befoins de la fociété. En 1785 , la
difette des fourrages fit craindré une dilèrte de
beftiaux qui.ne pouvoit être réparée que par plu-
lieurs années fertilifées par la nature & l ’art. M.
fruerrier de Lormoi, qui toute fa vie s’eft occupé
avec M. fon frère de la culture de la terre & de
la nourriture des beftiaux, avec autant de fuccès
que de zèle, propola au gouvernement de^nourrir
les beftiaux pendant l ’hiver avec des navets
d Angleterre, appelés turneps. Il repréfenta que
cette racine croifloit aiféiiient, promptement ,
& abondamment dans toutes fortes de terrains ,
tant que la végétation n’y eft pas entièrement interrompue
; que pendant l ’automne on pouvoit en
faire brouter les tiges, les feuilles,& les racines,
par toutes fortes ae beftiaux, & en cueillir pour
leur en donner à l ’étable pendant l ’hiver j & que
ces terres, amendées p'ar les reftes de la plante &
par la fiente des animaux, pourroient être enfemen-
cées le printemps fuivant, avec plus d’efpérances
<^ue fi elles fuflent demeurées en friche. L ’avantage
etoit frappant j mais cette nourriture étoit-elle
falutaire aux beftiaux ? étoit-elle propre à leur pro*
curer une bonne chair & un bon laie ? Voilà des
queftions que fit élever la follicitude du miniftère.
Pour y répondre d’après les principes de l ’ économie
animale & de l ’hygiène, M. Lormoi m’adrefla
une lettre qui expofoit fuccincfcement ces importantes
queftions. Je répondis, le z j décembre 1785,
que cette nourriture procuroit, dans l’hiver même 'y un
fuc aulfi falutaire aux beftiaux, que les fourrages
verts pendant le printemps & l ’automne $ que la chair
des beftiaux ainfi nourris pouvoit être aulfi fuccu-
lente , aulfi grafle , & aulfi faine $ que leur lait de-
voit être auffi fucré, auffi agréable au goût, & aulfi
fain, & même qu’il ne devoit point fentir le four-
fage, comme celui des animaux nourris ordinairement
pendant l ’hiver avec des fourrages fecs j
mais aulfi que ce lait étant plus lùcculent, il falloit
y avoir égard dans fon ufage pour la nourriture
des enfans, des pe-rfonh.es hectiques, & des autres infirmes
& malades ; j’eus recours aux lumières de
M. Defcemet, médecin de l ’univerfité de Paris ,
qui confirma mon avis par fes obfervations. M. de
Lormoi préfenta notre rapport au gouvernement,
qui 1 accueillit. On diftribua dans les campagnes
des graines de turneps , avec une inftruétion fur
leur culture pendant l ’automne. Les cultivateur?
blés au goût. Il n’en eft peut-être aucune efpèce, de celles
même que l’on redoute le plus, que l’art ne piaffe perfectionner
& préparer pour nos râbles. J’en appelle au témoignage
de M. Thouin , jardinier du jardin du roi, &
membre de l’académie des fciences , pour qui cette affer-
lion n’eft point un paradoxe. Que le phyfirien & le mé-
decin apprennent donc aux jardiniers de pratique à mé-
ramorphofer les poifons en alimens, & à ménager de
nouvelles reflources aux pauvres &ç à tous les citoyens
dans les cherté oc difette dès autres comeftibles.
s’y donnèrent avec zèle , & cette culture a été un
des moyens qui ont accéléré la ceflalion de la
difette des beltiaux. C ’eft ainfi qu’en réunifiant les
lumières des phyfiologiftes aux expériences des cultivateurs
, la nouvelle légiflation pourra contribuer
à augmenter & bonifier les productions de la terre.
Les bergers, les bouviers, les porchers, ceux qui
nourri fient & engrâiflent la volaille , les pêcheurs
<Sc les autres ouvriers qui s’occupent de l ’éducation,
nourriture, engrais, & confervation des animaux
dont on fert la chair fur nos tables , pourroient encore
devenir bien plus utiles qu’ils ne le font, fi
la nouvelle légiflation foumettoit leurs travaux &.
leurs expériences à l’infpe&ion des phyficiens 3c
médecins. Un autre exemple, joint au précédent,
peut commencer à ouvrir les yeux fur cet objet
aulfi important qu’il eft étendu. Un naturalifte aulfi
recommandable par fon zèle que par fes vaftes con-
noi fiance s , M. d’Aubenton, avoit entrepris de perfectionner
les races de bêtes à laine de France, par
une éducation, une nourriture, & une médecine qui
leur fufient plus convenables que celles que l ’ufage
ou plutôt la routine leur avoit confacrées, 8c les
expériences ont fait faire des prqgrès à ces arts.
M de Lormoi, q u i, avec M. Guerrier fon frère
aîné, s’eft occupé aulfi de cet important objet avec
de grands fuccès , depuis bien des années, me propola,
dans une lettre du 16 novembre 1784, ces
deux queftions : la génération n’eft-elle pas le vrai
moyen de perfectionner les bêtes à laine ? 3c
n’elt-il pas dangereux de les parquer pendant l ’hiver
dans les provinces de France expolées aux frimas
, à la neige., 3c à la gelée ? A la première , je
répondis que l ’accouplement de nos plus belles
brebis, avec des béliers de Barbarie, d’Efpao-ne ,
3c d’Angleterre , étoit un moyen plus prompt 8c
plus sûr que la meilleure éducation, pour perfectionner
3ç régénérer même les races de nos bêtes à.
laine. A la fécondé , que les raifons qui ont établi
i ’ufage. de les parquer dans les. pays chauds ,
pour les faire jouir de la douce température qui
y règne toute l ’année ,. doivent empêcher de le
faire dans les climats froids-, où les frimas» la
neige , 3c ia gelée font périr les animaux, leur
procurent une m.-.uvaife chair Sc une laine sèche 3c de
moindre qualité. MM. Defcemet 3c Guilbert confirmèrent
ces obfervations par les leurs. Le gouvernement
confulta fur ce fujet les chefs des principales
manufactures en laine , Sc ceux-ci répondirent qu’en
effet les laines d’Angleterre , ou l ’on parque les
brebis pendant toute l'année , avoieut tellement le
défaut de la fécherefte, que n’’avoieut point celles
d’Efpagne, que pour les employer, ils étoient
obligés de les humeCter dans l’huile ; Sc par leur expérience
ils confirmèrent notre théorie. Ces obfervations
ont frappé même les anglois fur leur préjuo-é
de parquer leurs bêtes à laine. Les deux lettres précédentes
ont été imprimées, dans un m ém o ir e 'de
M. de Lormoi, f i i r Va g r ic u ltu r e , en 178p.
L e s r a p p o r t s d e s p e r fo n n e s in f t r u i t e s d e F é c o *