
différentes, au moins pour la fenfibilité de cet
organe aux influences de Yair t de celles que remplit
la peau de l ’homme. Leur digeftioii n’eft pas
la même, ni pour la force des lues digeftifs , ni
pour les produits excrémentidels de la digeftion.
Et fî les exerémens, même des animaux qui vivent
avec nous , & que nous nourrirons de, nos ali mens',
portent, pour la plupart, des cara&ères fi diffé-
rens de ceux que nous rendons , cette différence
ne doit - elle pas paffer jufquesdans la nature ,
ou au moins les proportions des fluides élaftiques
qui fe dénaturent ou fe dégagent dans l’étendue
de leur tube inteftinal ? C ’elt ce qui rendra fou-
jours cette matière d’un difficile examen. D’a illeurs
elle ne pourra être examinée avec un certain
degré de perfection, tant que la nature des
fucs digeftifs de l ’homme, & celle des exerémens
ne fera pas connue mieux qu’elle ne l ’eft ; car
i l nous importe peu ici que le fuc gaftrique de
quelques oifeaux corrode jufqu’au quartz , fi nous
ignorons ce que celui de l ’homme produit furies
alimens. L ’homme eft dans les fciences ce qu’il
eft dans le commerce de la vie ; il cherche partout
des productions exotiques , & fe croit riche
ou lavant de la polfeffion ou de la connoiffance
des chofes qui font loin de lui , tandis qu’il ne
peut être heureux que de la jouiflàncè de ce qui
l ’environne, ou de la connoiflance de fon être.
C H A P I T R E I I .
De s effets que Vair produit fu r nos corps par
fe s propriétés & fe s qualités phyjîques.
J’ai commencé par expofer les effets des com-
b.naifons de Yair dans le-corps animal, parce
qu’i l m’a paru néceflaire de donner d’âbord une
idée précifo du rôle que joue ce fluide dans la ref-
piration ; d’ailleurs la çonnoi flan e.evdes phénomènes
importans qu’il préfente dans l ’économie animale,
étoit néceffaire pour diflîper des erreurs long-temps
reçues au fujet de fes propriétés phyfîques, & fur-
tout de fon élafticité.
U a ir ainfi confidéré- dans le moment ou i l fo
charge d’une des matières excrémentitielles de notre
corps, & où il nous donne en échange une chaleur
vivifiante qui entretient l ’a&ivité de nos organes
, peut être regardé comme notre propriété,
comme un des ïnftrucnens de nos fonctions , &
comme un des alimens de notre vie. ’Mais les phénomènes
qu’i l offre fous ce point de vue, entière
ment chimiques , n’appartiennent qu’à la couche
d'air qui nous touche immédiatement, & à la portion
de ce fluide reçue dans nos poumons, ou contenue
dans le canal alimentaire.
Au contraire, les effets dont nous allons nous
occuper maintenant, j font abfolument étrangers
aux cembinaifons que Y air fu.bit au dedans de nous.
L a plupart appartiennent autant aux portions les
plus élevées de la colonne atmofphérique qui pèle
fur nous, qu’à celle qui repofe fur la furface de
nos corps. Iis ne font point réglés par les lois chimiques
, & ne font abfolument déterminés que par
celles de la Italique des fluides ; en un mot, nous
envifageons à cette heure Y air comme un fluide
d’une étendue immenfe , au milieu duquel nous
fommes plongés, & qui agit fur nous comme fur
tous les corps de la nature, en nous environnant,
en pefant fur nous , & en contrebalançant la ré-
fiftance de nos organes.
Uair ainfi confidéré hors de nous, produit fur
nous des imprefiions qui dépendent de fes qualités
phyfîques & des variations dont elles font fufeep-
tibles. Parmi ces qualités, les unes lui- font eflen-
tielles, c’eft-à-dire , lui font tellement inhérentes,
qu’elles en font inféparables , comme la fluidité , la
pefanteur, & l’ élafticité. Les autres lui font accidentelles
, c’eft-à-dire, dépendent d’autres.principes qui
s’y unifient en différentes proportions, comme l’humidité
& la chaleur. Les premières ont été défîgnées
par Arbuthnot fous le nom de propriétés. Il a
réfervé l ’expreflion de qualités pour les dernières
(44)*
A rt. Ier. D e s qualités effentielles ou des propriétés
phyfiqu.es de U air, & de leur effet fu r
nos corps.
$. Ier. Fluidité.
La fluidité de Y a ir , l ’extrême fubtilité de Ces
parties, & la grande mobilité qui en eft la fuite,
font des propriétés qui appartiennent à tous les
corps qui ont, ainfi que Y a i r l ’agrégation qui
diftingue les gaz; elles font que ce fluide s’applique
immédiatement fur toutes les parties de la fur-
face de nos corps; qu’il les affeéfce également toutes
& dans le même degré, & qu’il eft fufceptible de
( 44 ) Dans l’expofition des propriétés phyfîques de l’air ,
je ne m'étendrai que fur les phénomènes qui tiennent à
l’imprelïion que ce fluide produit fur nos corps. Cependant
cela feul exige des détails de phyfique, dont je ne
prefenterai dans le texte que les réfultats, & dont je réserverai
les détails Sc la démonftration pour les notes ,
afin de ne pas interrompre la rapidité du difeours, donc
la précifîon eft in réparable de la clarté.
Beaucoup de gens penferonc que des détails de phyfique
font fupernus & inutiles aux progrès Sc à P avancement de
la Médecine. Je ne fuis pas de leur avis. Je fais bien qu’on
peut être un fort bon médecin fans ces connoiflances ; mais
il faut diftinguer en Médecine Part, de la fcience. L’arc
s’occupe des réfultats Sc de leur application à l’utilité Sc à la
Confervation des hommes. La fcience en étudie 8c en ana-
lyfe les caufes. La. fcience éclaire Part, 8c en çend les opérations
plus fûres 8c plus exaétes. La perfection de la fcience
n’eft donc pas indifférente à Pareille. Il n’eft jamais inutile
d’acquérir une intelligence plus complète des phénomènes
que l’on obferve, 8c de l'effet des influences qu'o»
eft dans le cas de modifiée ou de corriger.
changer autour de nous à chaque in fiant, & de fe
renouveller avec une grande promptitude, foit que
nous nous mettions en mouvement, foit qu’il obéifle
lui-même à rimpulfipn d’un courant ; il ëft même
rare qu’il foit en repos, & l ’on verra, dans la dernière
partie de cet article , ce qui regarde les
mouvemens rapides dans lefquels Yair eft entraîné
par une multitude de caufes. On verra encore plus
au long dans les articles atmofphère & vents ,
l ’effet des vents qui s’élèvent à la turtace de là terre ,
& l ’effet contraire de la ftagnation de l’air.
C ’eft la fluidité de l’czzV qui caufe ou détermine
prefque tous les phénomènes dont il va être parlé
dans différens articles. On verra au fit dans d’autres
parties de ce dictionnaire, & fur-toüt dans la partie
Chimique , les différentes obfervatioas modernes
concernant la fluidité des gaz. Ici fe ne m’occupe
de ces connoiflances qu’autant qu’elles nous font
immédiatement applicables ; & il fuifit de dire, à
l ’égard de la grande fluidité & de l ’extrême mobilité
de Y a ir , que c’eft à elle que nous devons
l ’imprefijon que font fur nos corps fes autres qualités
phyfîques, ainfi que la facilité avec laquelle
on le renouvelle & on le purifie»
§. II. Pefinieur.
La pefanteur de Y a i r dont la découverte & la
preuve ont immorcalifé Toricelli , Pafcal , Boyle ,
& Mariotte , peut être divifée en pefanteur fpéci-
fique & en pefanteur totale ou atmofphérique.
1°. Pefanteur fpécifique.
( i°. Mefure de la pefanteur fpécifique de Y air. )
La pefanteur fpérifique de. l ’eau étant fuppofée
égale à 10000, la pefanteur fpécifique de Y air
atmofphérique ( prife à la moyenne hauteur du baromètre
à Paris, qui eft en général de 28 pouces,
& dans la température de 10 degrés du thermomètre
de Réaumur ) eft à la pefanteur de l’eau ,
foivant les calculs de M. Brifion , comme 12,3233
eft a 10000; c’eft-à-d ire , comme 1 eft à 811
> ou j Par approximation, à peu près comme
1 eft à 811 y > en forte que Yair. eft 811 fois &
demie plus léger que l ’eau , & qu’à poids égal il
occupe un efpàce 811 fois & demie plus grand.
La pefanteur de Yair étant donc repréfentée par
12,3233, & celle de l ’eau par ropoo , celle du
mercure fe trouve être de 135681 (45)» C ’eft-
( 45 ) On détermine communément les proportions de
Yair à l’eau, dans le rapport de 1 à 8jo , & celles de
1 eau au mercure, dans le rapport de 1 à 14. Mais ces
approximations font- trop imparfaites , 8c les expériences
de M. Briffon , publiées fous le titre de Pefanteur fpécifique
des corps , mettent les phyfîciens dans le cas de rectifier
une grande partie de leurs calculs, 8c-d’y porter une
precifion dont ils n'ont point approché jufqu'ici»
. Il eft bon de remarquer ici que pour la pefanteur fpé-
pfiquç des corps folides, M. Brifion l'a déterminée dans
à-dire , que l’eau eft au mercure comme 10000
eft à 135681, ou comme 1 eft à 13,5681 , ou, par
approximation , comme 1 eft à 13 y ; & Yair eft
au mercure comme 12,3233 eft à 135681 , ou
comme 1 eft à 11010 fr ffç i*
( zû. F anations de la pefanteur fpécifique de
Vair , caufées par la châleur & là comprejjïon. )
(46^ Mais ce calcul eft fujet à beaucoup de variations,
à caufe de la différence des denfîtés de Yair ÿ
car Yair n’ eft pas toujours 8 11 fois & demie plus
léger que l ’eau ; & Mufîchembroëck fait varier la
proportion naturelle entre ces deux fluides, depuis
6ob' jufqu’à iooo. Piufièurs caufes influent fur la
denfîlé 8c la pefanteur fpécifique de Yair. Parmi
ces caufes , les deux plus connues font la chaieun
& la compreflion. L a chaleur raréfie & dilate Yair,
c’eft-à-dire, augmente fon volume & diminue fa
pefanteur fpécifique ; la compreflion. au contraire
le condenfe , c’éft—à-dire , en diminue le volume
Sc en augmente la pefanteur ; d’où il fuit que la
chaleur & la compreflion produifent dans le volume
Sc la pefanteur de Yair précifément un effet
contraire. L ’augmentation de la compreflion fait
exactement le même effet que la diminution dé
la chaleur , & l ’augmentation de la chaleur le
même effet précifément que la diminution. dès
forces comprimantes. En un mot, les denfîtés ou
les pelànteufk Ipécifîques de Yair font en raifon
direéte des preflions, & inverfe des degrés de chaleur
, & les volumes qui "font en raifon inverfe des
denfîtés, font en raifon direCte des degrés de chaleur
& inverfe des preflions (4 7 ).
une température de 140 ; mais pbiir celle des gaz, elle a
été déterminée dans une température de xo°. II feroit ailes
indiftérenï pour là pefanteur fpécifique des folides , & même
de la plupart des liquides de prendre la température de 10®
pour celle de 14 5 mais il ne le feroic pas pour les fluides
élaftiques de prendre celle de 14 pour celle de 10, parce
que ces Corps font beaucoup plus dilatables que les liquides
£5c les-folides. Il feroit digne de la patience Sc des talens
de M. Brillon d’ajouter un fupplémenc important à fora
Ouvrage, en donnant la pefanteur fpécifique des diftérens
corps, ou au moins d’une patrie de ces corps dans les différentes
températures.
(46) J'au rois pu faire un. paragraphe de Vexpanfibiïité
& de la comprejjibilité de l’air, ainfi que de la propriété
de fe dilater Sc de fe condenser par les différens degrés de
chaleur & de froid ; car ce font des propriétés efiëntielles
de fair, confidéré dans l’état de gaz. Mais comme il étoit
néceffaire de parler de ces propriétés en parlant de la pefanteur
fpécifique, comme j’en parlerai encore en traitant
de la pefanteur totale ou atmofphérique, en parlant de
l’élafticité de Yair Sc de fes degrés de chaleur} j’ai cru ne
devoir point en faire un paragraphe à part, qui n'eut fait
qu’occuper ici une place fuperflue , Sc donner lieu à des
répétitions.
(, 47 )- Quand je dis que les pefanteurs fpécifiques font en
raifon direéle des prenions & inverfe des degrés de chaleur
, & que la chaleur produit le même effet que la diminution
des forces comprimantes, je ne dis pas que ces
effets ont lieu dans la même proportion.
La proportion dans laquelle les preflions condenfenr Yair
eft bien connue. On fait que les denfîtés dô l’air augmentent
exa&ement comme les profitons. L’air dans lequel