
cet objet, traité convenablement, & éclairci par
des expériences dont M. Jurine a démontré la
poffibilite & 1 exactitude - par des expériences tentées
dans 1 air pur ou Y air méiangé, dans Y air
ilagnant ou renouvelle , dans les différens gaz ,
& fur differentes parties du corps , nous donnera
des connoiffances plus précifes fur la théorie de
nos habjlJemens & de nos h abitation s , fur leur
influence fiir la fanté & la vigueur de nos corps,
& fur les .obftacles ou les modifications qu'ils
apportent a 1 aétion utile ou nuifible de Y air fur
l'organe de la peau.
II. Effets de l ’air, dependans de fe s combi-
naijbns dans le canal alimentaire.
Cette matière eft très - peu connue, & fera longtemps
obfcure. M. de Fourcroi a découvert que
Yair contenu dans la veffie des carpes , & qui pa-
roît venir de leur eftoraac, eft entièrement de la
mofette ou du g'a% azotique. Mais il feroit dérai-
fonnable de regarder les obfervacions faites fur les
poiflons comme concluantes, relativement à l ’çco-
nomie de l'homme & des animaux qui vivent dans
1 air. Ce qu il y a de vrai, c’eft que la bafe de
la mofette ou l'azote eft un des principes de la
partie fibreufe du corps animal. Tous les organes
mufculeux la donnent en abondance , fuivant les
obfervatlons du même chimifte elle fort aufïî
très-abondamment de la partie fibre ufe du fang.
Enfin I alkali volatil ou l'ammoniaque , qui eft un
des^ produits les plus remarquables dans la diftil-
lation de cette fubftance fibreufe , qui fe développe
fi aifément dans les décompofitions des fubf-
tances animales ; l’alkali volatil a pour un de fes p rin cip e s la baie de la mofette ou Ya^ote, ainfi
que l'a démontré'parfaitement M. Berthollet.
_ II ne feroit donc pas étonnant que dans un
vifcère ou les alimens, fouvent tirés des matières
animales, mêlés au moins avec des liqueurs ani-'
males, font analyfes par une efpèce de macération,
i l fe développât un fluide élàftique dont la bafe
paroît former une portion de notre fubftance. Il
eft en même temps certain que dans le mouvement
de la maftication nous mêlons â nos a limens
une certaine quantité de fluide atmofphérique,
& que certaines de nos boilTons y portent , ou an
moins doivent y laiffer développer de l'acide crayeux
o^ucarbonique. Ainfi, le fluide élàftique contenu dans
l ’eftomac doit être un mélange de plufieu.rs gaz
differens. L air qui s échappe par i'oefophao’e
pourroit être^ un indice de celui que l ’eftomac
contient, indice très - variable , mais encore plus
difficile â recueillir & â examiner : celui qui s'échappe^
par l'extrémité du canal inteftinal, doit en
etre tres-different j i l doit etre un indice imparfait
de Yair contenu dans les gros inteftins. Rien ne
nous annonce quelle eft la nature de celui qui eft
contenu dans les inteftins grêles. Sur tous ces objets
nous n avions point encore ^expériences. Il
étoit affez connu que Yair qui s’échappe par 1 anus^
contient du gaz inflammable ou .gaz hydrogéné
fétide j mais comme cet air eft plus ou moins fétide
, & quelquefois - prefque inodore , il. faudroit
l'examiner dans dlverfês circonftances.
C ’eft donc â l’expérience qu’il faut recourir pour
connoître Yair qui eft contenu dans toute letendue
du canal inteftinal, & M. Jurine a fait aufti des
tentatives fur cette matière , qui, jufqu a lu i , n a-
voit été effleurée par perfonne.
L 'air rendu par la bouche eft tres-difficiîe a fe-
parer de celui de là refpirâtion,' & par eonféquent
fon analyfe ne peut être que très - infideile (4°)>
Celui qui s'échappe par l’anus a donné à 1 eau
de chaux une petite quantité d’acide crayeux , quoiqu'il
eût été reçu à travers l'eau d un bain. I l a
éprouvé très-peu de diminution de la part de I/z/.r
nitreux, & contenoit par eonféquent peu d air
vital j enfin le gaz reftant étoit en pairie inflammable
(4T) ; d'on il réfuite qu'il contenoit un peu
d'acide crayeux, prefque point Yair v ita l, du
gaz inflammable , & du gaz azotique ou mofette.
A l'égard de Yair contenu dans tout le tube
inteftinal, i l ne- pouvoit être examiné que dans
les animaux & dans le cadavre de J homme j &
pour que les expériences fur l ’homme fuffent concluantes
, il falloit les faire promptement fur des
(40) C'eft une réflexion qui a été faite par M. Jurine.
Néanmoins il a donné l'analyfe de l'air rendu pat l'cefo-
phage, recueilli le mieux qu'il lui a été poflible. Cet air
a donné le matin à jeun huit centièmes d acide crayeux;
apres un léger déjeuneE onze centièmes ; après, un dîner
ordinaire onze centièmes ; après un repas où on avoir
mangé du gibier faifandê, neuf centièmes. Pour la mofette ,
dans le premier cas, Yair atmolphéricjue mêle avec le gaz.
nitreux donnant 0,98 & Yair de là refpirâtion i,i© ; l.flir
rendu par r'oefopbagedonna 1,11 : dans le fe'cond cas, Ya ir
àtmofphérique donnant 0,99, & l'air de la refpirâtion 1,10;
Yair rendu par l'cefophage donna i,io : dans le troifième
cas Pair atmofphérique donnant r,oo , Pair de la refpi-
ration 1,14, celui rendu par i'cefophage donna 1,20. Enfin
dans le dernier cas l'air atmofphérique donnant 1,00', Pair
de la refpirâtion i, i5, celui rendu pari l'cefophage donna
1,22. Il fembleroit donc que dans le travail de la digeftion il
fe dégage de la mofette, & que les alimens faifandés en
dohneroient plus que les autres ôc moins d'acide carbonique;
mais il eft a-ifé de voir que cette analyfe ne peut être
bien fidèle.
(41) i°. L'air rendu par l'anus dans le bain a 7 heures dm
foir, a donné à Peau de chaux quatre centièmes d’acide
carbonique ; par eonféquent il en contenoit davantage au
fortir de l'anus ; 8c l'air atmofphérique donnant 0,99, avec
le gaz nitreux , celui de l'anus donna i,8+, .Sc une autre
portion donna 1,7+ -• 2°. le matin , a jeun, 1 air de 1 anus a
donné i l'eau de chaux cinq centièmes 8c demi; ÔC l’air atmofphérique
donnant, avec le gaz nitreux 1,00, celui de
l'anus donna 1,90 8c 1,86. 3°- Ayant retenu Vair de Vanus
très-long-temps avant de le rendrecet air ne donna plus
à l'eau de chaux que deux centièmes d’acide carbonique,
8c Pair atmofphérique donnant avec le gaz nitreux 1,00 >
celui de l'anus donna 1,9 S* Tous ces airs fe font ^enflammés
, mais plus foiblemènt que ne s'enftiramc Yair
des inteftins grêles, pris à l’ouverture des cadavres
hommes morts de mort violente ou de mort Subite.
M. Jurine en préfente un exemple pris d’un
homme fou , mort fubitement, en une nuit , 5c
qu'on a cru être mort falfi de froid. Ses autres
expériences fur des cadavres; ont prélenté des variations
& quelques réfultats généraux & conftans :
mais la progreffion des phénomènes qu’a préfentes
Yair contenu dans, l ’eftomac , les inteftins grêles
,& les gros inteftins , dans le cadavre de ce fou ,
mérite d'être rapportée ici. On peut divifer 1 air
contenu dans le tube inteftinal en gaz acide carbonique
, air v ital, gaz azotique ou mofette,
gaz inflammable ou hydrogène.
1 L e gaz acide carbonique, dont la préfence
eft démontrée par l ’eau de chaux, .s’eft trouvé en
grande quantité dans l'eftomac , m oindre dans les
inteftins grêles-,; encore moindre dans les gros.'im-
teftins. Dans l'efto m ac , cet acide formoit le .cinquième1
de la mafle totale de Yair,' c eft-a-dire,
que l ’eau de chaux en a abforbé cette- proportion
(42) : mais ce ré fu ltat eft lu jet à beaucoup Je variations
dans les autres cadavres.}
- i®. L ’air vital, c’efti-dire, cetté portion de
Yair, fufceptible d’être abforbée par le mélange du
gaz nitreux, s’eft trouvé en affez grande proportion
dans l ’efto m a c .,'en -beaucoup moindre quantité dans
les inteftins grêlés , &, moindre encore -dans les
gros inteftins (43). _
3°. La portion de Yair, qui n’eft ni fufceptible
de s’unir à l’eau de chaux , ni capable d’être abforbée
par le gaz nitreux, peut-être regardée
comme, compofée de mofette 8c de gaz inflammable.
Mais en prenant d’abord ces deux gaz collectivement,
la portion non abforbable de Yair s’eft
trouvée-, dans l’eftomac, excéder notablement la proportion
ordinaire de mofette contenue dans 1 atmol-
phère, mais dans les inteftins grêles cette portion
s’eft trouvée beaucoup plus considérable, &. dans
les gros inteftins elle s’eft trouvée prefque égale
au volume de Yair extrait du tube -inteftinal ; en-
forte que la diminution, opérée dans cet air par
le gaz n il r ê ü x s ’eft trouvée infiniment petite.
( Voye^ la note. 43. ) Cette dernière progreffion
s’eft rencontrée conftamment dans toutes les expériences
faites fur d’autres cadavres.
40. Enfin dàns cette portion non abforbable , les
proportions relatives de mofette & de gaz inflammable
peuvent être préfumées d’après l ’obfervation
fuivante. La flamme réfultante de la combuftion
de Yair tiré de l ’eftomac a été légère & de peu
de durée j elle avoit une couleur bleue. La, flamme
(42) L'eau de chaux a abforbé, de l’air de l’eftomac,
vingt centièmes malgré fon paflage par l'eau, de l'air des
Inteftins grêles quinze centièmes , de l'air du colon huit
centièmes.
(43) L’air atmofphérique donnant avec le gaz nitreux
j,04, celui de l’eftomac donna 1,54, celui des inteftins
grêles 1,70, celui du colon 1,84,
qu’a donnée Yair tiré des inteftins grêles a été
plus, durable, & fa teinte a paru plus verte. Enfin
celle qui a paru dans Yair-.tké des gros inteftins
a moins duré que dans celui des grêles , & a
montré les mêmes teintes de couleur : d’où il
fuit que c’eft ici dans les inteftins grêles qu’il s’ eft
dégagé le plus Yair inflammable. Cependant dans
Yair de l ’eftomac, fi l ’on fait attention que la
portion de gaz non ablorbable que cet air contient
excédoit beaucoup moins que dans le refte du canal
la quantité, ordinaire de mofette contenue dans Fat-*
molphére ,, on en conclura que cet excédant étoit â
peu près tout entier de Yair inflammable. Néanmoins
il paroît que la quantité abfolue d’air inflammable
eft, dans les.,gros inteftins, plus grande que dans
l’eftomac, & moindre que dans les inteftins grêles -,
fait que M. Jtirine annonce encore comme confiant.
Il fuit aufli de la même expérience , que l ’eftomac
contient peu'dé'mofêtte plus que l ’atmolphere, que
les inteftins grêles en contiennent davantage ; mais
que ■ de tout le tube inteftinal , la partie dans
laquelle, il s’en-'produit le plus eft la portion dés
gros inteftins. Il eft à remarquer encore que i ’ana-
lyfe de l ’^i/v-conienu dans les" gros inteftins de ce
cadavre fe rapporte bien avec cellé de l'a i r qui
s’échappe de. l ’anus dans i’hojm me >vivant. .
Dans l'analyfe de recueilli dans le cadavre
de ce fou ; il n’eft pas queftiori du gaz alkalin j
cependant M. jurine remarque que les vents échappés
par l ’anus , quoique reçus-fous l ’eau , donnent
des vapeurs que l ’approche de l’acide nitreux rend
très-fenfibles à la vue. Il remarque encore que,
quand les vents font inodores, outre qu’ils donnent
moins d’alkali v o la til, ils donnent aufli moins
de mofette 3 ce qui nous fait regretter que M..Jurine
, dans l ’examen des airs Contenus dans le
tube inteftinal, ait omis la comparaifon facile des
phénomènes caradériftiquès du gaz alkalin avec
les proportions relatives du gaz azotique & du
gaz hydrogène ou inflammable.
Quoiqu’il en foit, les proportions dans les parties
compofantes de Yair contenu dans le tube inteftinal
, fe trouvent, dans cette expérience, pré-
fenter un réfultat remarquable : c’eft que la quantité
d’air vital & de gaz acide carbonique va en
diminuant de l’eftomac aux gros inteftins, & que
la mofette au contraire va en augmentant dans la
même progreffion.
Je m’arrêterai i c i , & me contenterai d’avoir
réuni ce que l ’expérience nous fournit de plus
certain fur une matière aufli difficile à traiter, &
dans laquelle on n’à pas l ’avantage d’obferver les
variations fucceflives qui doivent répondre aux
différens états du corps, & même aux viciflitudes
de Yair extérieur : car perfonne ne doute qu’i l n’y
ait une côrrefpondznce très-rapide entre les fonctions
inteftinales elles- de l ’organe cutané. On
ne pourra même parvenir à cette obfervation que
très,-Imparfaitement par les expériences fur les
animaux. Les fonctions de leur peau font bien