
eft ver-fée par un canal particulier , lorfque le
fleuve a atteint la hauteur de dix-huit coudées $ car
c eft alors feulement que ce canal fe remplit.
Cette eau fouterraine fert aux ufages & a la boif-
fon des habitans, & refte ftagnante dans ces caves,
lorfque le N il s’eft retiré & n’emplit plus le
canal. Elle fe corrompt au point d'être fétide &
verdâtre dans les chaleurs de l'été, jufqu’à ce qu’à
l a fin A août, ou au mois fle feptembre, elle
foit de nouveau remuée, délayée , & emportée par
une nouvelle crue i aufli le mois d'août , fi falu-
bre dans le refte de l ’Egypte, ne l'eft il nullement
a Alexandrie, où cette efpèce d’étang fou-
îèrrain & empefté eft mis en mouvement. Du
temps de Prolper-Alpin 8c de fielon, le voifinage
du lac Mareoùde , placé au midi de la ville ,
chargeoit aufli l ’air de fes exhalaifons , qui étoient
portées fur la ville par les vents du midi : aujoür-
fl hui ce lac eft à fec , & n'eft plus qu'une plaine
de fable fèche & ftérile. Mais les caufes précédentes^
fûffifent allez pour rendre raifon de l ’infa-
lubrité d’Alexandrie, & les fièvres putrides, mali-
gpes, peftilentielles font plus communes dans cette
v ille qu’en aucune autre de l ’Egypte. Il eft inutile
de s’arrêter davantage à démontrer le danger-de
pareilles influences. C ’eft à une. femblable caufe
qu’on doit attribuer néceftairement la mauvaife
qualité des petites- véroles qui régnent tous les
ans au Caire. L'eau reftée après la retraite du
N i l , dans le grand canal qui trayerfe la ville ,
contrarie une fi mauvaife qualité, qu'elle devient
d’abord verte , & enfuite noire j & au commencement'
du premier été, elle répand une odeur in-
fe&e. Il eft d’une obfervation confiante que dans ce
temps toutes les petites véroles qui Attaquent les
en Fans dans le voifinage de ce canal , prennent
un caraftère de malignité funef t e& que les habitans
ont loin de s’en éloigner , quand ils ont
des enfans qui pourroient- être expofés aux atteintes
d e , cette maladie.
La Barbarie eft plus (allibre dans toute ton étendue
que n eft 1 Egypte. Elle eft cependant ravagée
quelquefois par la pefte, fur-tout dans là partie orientale.
Dans la partie occidentale ce fléau eft peu
connu j car M. Shaw nen parle point, quoiqu’il
parle, très au long de tout ce qui concerne la Barbarie
occidentale depuis Tunis jufqiiaux frontières des
royaumes de- Maroc & de Fez. Cependant Prof-
per-Alpin parle en Egypte de la pefte apporté
e de Barbarie , comme de la plus funefte de toutes ;
ce qui regarde peut-être uniquement la côte dèJTri-
poli. Tunis eft fi tué à l ’oueft d’un lac qui fe dé-'
charge dans la mer par un canal étroit, appelé
la ^ Goulet te. C e lac , autrefois capable de réce-
voft une flotte y maintenant fort bas & fort rétréci,
rempli d’ailleurs de toutes les immondices
de la v i l le , & ayant peu d’écoulement, eft
■ une malpropreté extrême , & répand des miaf-
mes infectes1 qui , portés fur la ville par le vent
d eft, en-corrompent Pair. Mais M. Shaw préterjd
que ces miafmes feraient beaucoup plus dangereux
pour la ville , fi le mafiic , la myrrhe , & les
aromates qu’on y brûle en très-grande quantité dans
les poêles, & les bains ne corrigeoient l’air d’une ma**
niere , a ce qu’il d it, très - fenfible. Ce n’eft donc
qu à commencer de la pointe du cap Bon , 8c
meme d A lg e r , dont le territoire commence à1 être
bien cultivé, qu’on peut regarder ce pays comme
digxie des eloges que Lind lui a donnés. J’ai déjà
parle des maladies de nos comptoirs de Bonne 8c
de la Caile, fitués à l’eft d'Alger. La Calle eft
placée au nord de trois étangs , fur une languette
de terre qui s'avance en mer. L'influence de ces;
étangs eft fi évidente , que le Bajiion de France
ancien comptoir , qui étoit placé plus proche de
1 étang le plus pccidendal, & qui par conféquent
etoit expofé de plus près aux vapeurs qui s’en,
exhalent, a été abandonné à caufe de fon infa-
lübrité , quoiqu’il fût fort élevé. Bonne eft
moins infalubre que la Calle’ , & ne l ’étoifc
point du tout avant que la rivière qui coule auprès
, fut tellement encombrée à fon embouchure
par la barre fàblonneufe qui s’y eft formée, que
les eaux ont été obligées de fortir dû l i t , & de
former des marais qui baignent les murs de la ville«-
Bonne eft à l ’oueft de la Calle. A l’eft" font
deux comptoirs moins confidérables , mais bien plus-
falubres , Tabcïrque 8c Çollo: , dans lefquels les
conceftionnaires malades recouvrent promptement
leur fanté, & où l ’on voit beaucoup dé naturels;
octogénaires. Aux obfervations déjà données fur
les températures de la Barbarie & fur les vents de ce-
pays, ^’ajouterai, d’après M. Ramel, qu'à là Calle
le thermomètre,, en hiver, fe tient ordinairement
a 4 au deflus de zéro ; 8c l ’été, pendant la êani-
cule , de z f a z 8 r mais il eft bon ici de remar--
quer un phénomène qui tient à l’üfage où font
les arabes erra-ns ou nomades de brûler leurs chaumes
apres leur moiflon faite. Ils coupent leurs;
blés à quatre travers de doigt de l ’épi y 8c quand
leur récolte eft renfermée dans lés greniers qu’ils pra^-
tîquent fous terre , ils mettent le fou à la paille qui
eft fort haute .,. & qui brûle .promptement dans
une très-grande étendue de terrein alors, fi le:
vent fouffle du côté dé la terre , la chaleur s’élève
jufqu’à 3 4 degrés,. devient accablante y on eü£
obligé de fe renfermer- dans- les nîaifons , d’en
fermer les. ouvertures,' d’àrrofer continuellement
les planchers 3 on fond en fueur , & l'on- étouffe :
mais le foir ■ il s’élève , du- côté dé la mer r
de petits vents alyfés qui râfraîchiflent l ’atmof-
phère ( r ). Pour le royaume de Maroc, qui,
(t) J’ajouterai ici encore, pour dit d’apres Shaw fur les vents qcuoi mrpélgénteern tc ee nq uBea rjb’aaîi
priéetu, equuxe , pfeonudffalen t ful’rh ilvese r clôet esv en&ir rdauf r-anîcohridt l,’ afioru; velen rv iemnt
adi’neffît fouffle âuflî quelquefois ; il eft chaud &■ mal-fain-, que le vent du midi. JL’été , le vent du midi ou de
terre: fouffle légèrement toute la matinée.j & vers le foir* le vent de mer s’établit èc dure une partie de la nuit, ( M»
Ramel, mémoire delà- cité, ).
occupe la partie la plus occidentale de la côte
de Barbarie , Lind le regarde comme une des
.parties les plus falubres de Y Afrique. Il en donne
pour preuve, entre autres , la bonne, fon té qu’y con-
fervent les efclaves chrétiens , malgré les mauvais
traitemens qu’ils y éprouvent , & l'exemple du
Litchfie ld, vai fléau anglois échoué fur la côte
de Maroc, donc tout 1 équipage vécut dans ce
pays dix-fept mois entiers fans perdre un foui
homme & fans avoir un malade. ( V . Lind , EJfay
on difeafes incidental to europeans, &c. , 1. i ,
c. z , f. i, ) On voit aufli dans ce pays beaucoup
d’hommes d’un âge très-avancé, même parmi ceux
qui font originaires (^Europe. Il eft vrai que Prof-
per-Alpin remarque qu’en Egypte même , 'malgré
les maladies qui la défolent en certains temps, on
voit aufli un grand nombre de nonagénaires. Quoi
qu il en foit, il paroît que les endroits de la
Barbarie occidentale qui font éloignés des eaux
ftagnantes, font d’une lalubrité Remarquable , excepté
lorfque les vents de fud & de fod-eft viennent
à fouiler. Ces vents, qui viennent des déferts
brulans de la Libye 3 apportent avec eux une ■
chaleur fèche & brûlante , & une infalubrité qui
fait de l ’é té , dans ces climats, une faifon dan-
gereufe.
Enfin , pour compléter le-peu que nous lavons
des caufes dépendantes de Tair & des lieux qui
influent fenfiblemént fur l ’homme au nord des
tropiques , il eft bon de remarquer que ceux qui
travaillent aux mines de Tegaze , .dans le Sahra ,
font fujets à un mal d’yeux très - commun parmi
■ eux, & qu’on attribue à l’adtion des vents de lud-èft.
^ La Croix , Relation de VAfrique, & Diclionn.
gêograph. de Thomas Corneille , art. Tegaze.)
C e fait méritera plus d’attention par la fuite , par
3a comparaifon des lieux où le' mal d’yeux eft
endémique.
z°. La partie de VAfrique qui eft entre les tropiques
offre au médecin une foule d’obfervations communes
à une très-grande étendue de pays. Je vais
réunir ces' obfervations générales, avant de noter les
variations principales qui diftinguent certaines contrées
& les font remarquer entre toutes les autres.
La très-grande partie de Y Afrique eft fituée
entre les deux tropiques j ,& dans toute cette étendue
l ’année eft divifée pour, elle en deux faifons,
la faifon sèche & la faifon des pluies. Celle-ci,
comme il a été dit, a toujours lieu vers le temps
du retour du foleil du tropique à l ’équateur ; &
fous l’équateur même , la faifon des pluies ou des
brouillards fe trouve double , & répond aux
deux équinoxes , comme j’ai dit qu’on l ’obfervoit à
Saint-Thomé. Mais ce qu’il y a de très-important
pour nous, c’eft que ces deux faifons, aufli remarquables
pour les médecins que pour les phyfi-
ciens, font encore appelées'à jufte titre , par les
voyageurs , la faifon faine & la faifon des maladies.
Cette/dernière eft par-tout la même que
la faifon des pluies j ou fi elle commence un peu
plus tard , parce" qu’une caufe générale a befoin
a agir quelque temps avant de produire un effet
univerfei , toujours en eft-elle la fuite évidente 3
confiante , 8c inféparable.
Le journal duvaifleau anglois , mouillant à Cat-
cliou comptoir portugais de la haute Guinée , fur
la rivière de Saint-Domingo , à trente milles de
la mer ( iz degrés lat. nord.), marque le commencement
des- pluies Continuelles au 18 mai, plus
d’un mofPavant le folftice' d’été, 8c leur fin dans
le courant du mois d’o&obre , après l ’équinoxe,
f; V . §. IX. ) Les maladies fe déclarèrent avec
fureur dans l ’équipage au mois de juin. Cepen- .
dânt, avant les pluies, tout le monde jouifloit
de la meilleure fanté. Après que les pluies font
celTées , la boue & la vafe répandent une odeur
infoéte; les infeétes s’élèvent dé tous côtés- par
effaims : mais bientôt les chaleurs exceflives évaporent
8c sèchent tout , & les maladies ceffent,
8c ne laiflent après elles que les indifpd{irions
chroniques qu’elles ont produites chez quelques-
uns, principalement l ’obftrudion à la rate (ague-
cake, gâteau de la fièvre ). Les maladies de la
faifon pluvieufe font en général le dérangement
de J.’eftomac & des digeftions , les dévoiemens bilieux
, les coliques sèches ( dry-belly-ache ) , connues
aufli dans les Indes occidentalés les fièvres
bilieufes-rémittentes malignes , fuivies quelquefois
d’une diarrhée bilieufe chronique , fouvent colli-
quative , de jaunifles chroniques , d’obftruélions à la
rate, d’hydropifie, enfin celte fièvre maligne éminemment
bilieufe, accompagnée d’une jaunifle univer-
felle, & fouvent d’hémorragie*par tous les émonc-
toires, & même par les pores de la peau. C’eft
cette maladie qu’on appelle maladie de Siam ,
ou maladie jaune. Mais elle eft encore plus
commune en Amérique qu’en Afrique. En général
, le caractère dominant des maladies d e là
faifon pluvieufe dans Y Afrique , peut fe rapporter
à trois ordres d’effets, à l ’aftbibliffement de
l ’eltomac , à la furabondance & à l ’exaltation de
la bile , & a l ’ébranlement du fyftême nerveux.
Au refte , comme je l’ai déjà d it, les blancs &
les nouveaux venus font plus fujets à ces maladies
que les noirs nés dans le pays même, &
les anciens colons accoutumés au climat.
Non feulement cette faifon eft mal-faine & dan-
gereufe par elle-même ; mais l'eau même des pluies
qui tombent par orages ou grains pendant fa durée.
, eft fufpeéte aux habitans. Ils redoutent d’en
êtré touchés. Pour s’en garantir -, ils Ce jettent
dans l ’èau ; mais ils ont foin de ne fe jeter ni
•dans l ’eau dès torrens , ni dans celle des rivières
groflies par l ’eau des pluies, mais dans les eaux
de fontaines ,• ou mieux encore , dans la mer*
( Voy. Lind , p. 1 , ch. z , f. z , note ; & Adan-
fbn , Voyage au Sénégal, p. $6.) Quel que
foit ce préjugé , il eft confiant : eft - i l fans fondement
? La faifon des pluies eft encore fertile
en météores^ dangereux de plus d’une efpèce. Je