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véritablement altéré , il boira for le champ, & ne
battra Veau que lorfque fa foif aura été fuffilàmment
étanchée. Permettez-liii dans ce moment de l’agiter
avec l’un ou l ’autre de Tes pieds antérieurs, fi ou ne
l ’en détourne pas , il s’y couchera bientôt infailliblement.
Enfin offrez à celui-là même qui b raiera
de la foif la plus ardente une eau faie, brouillée
& fétide, il la dédaignera abfolument : or il pa-
roît qu’ici Arijlote a attribué mai propos à un
animai qu’il appeloit d’ailleurs phylolutron , phi-
lydron, pour exprimer l ’amour naturel qu’il a
pour l ’eau, une intention qui n’eft point réelle,
& il femble'plus raifonnabie de penfer que dans
l ’inftant où il bat l’eau, ainfi que nous l’avons
dit, ce n’eft nullement pour la troubler, mais
uniquement pour la faire rejaillir fur lu i, ce qui
eft même démontré , puifqu’il eft commun de le
voir s’y plonger inceffamment après ; le philosophe
fe ïèroit donc moins éloigné de la vraifem-
blance , en imputant nûment ce mouvement à
X’infîinft & au goût qu’il avoit reconnu lui-même
dans le. cheval.
C’eft fans doute ce même goût qui le; follicite
Sc qui l’engage à plonger pliis ou moins profondément
fa tête dans l’auge ou dans le fceau qui
contient fa boiffon. Cette action qu’on n’aperçoit
en lui que lorfque fa foif n’eft—pas fort preftante ,
a encore ocçafionné de nouveaux écarts. Pline
en a conclu que plus le cheval a de feu , plus
il plonge les nazeaux dans Veau- quand il s’abreuve
(^i). Garimhert prétend qu’il y plonge la
tête. ju (qu’aux yeux, tandis que les ânes & les
mulets hument du bord des lèvres (i). 11-eft certain
que le cheval hume en buvant, ainfi que
l ’âne , le mulet'& le boeuf, comme le même
P lin e l ’a obftrvé ailleurs d’après Arijlote (3),
& dans les mêmes termes (4) , & qu’il n’eft aucune
différence entre eux, ! cet égard. Or l’aétion de
humer, qui n’eft autre choie que celle d’attirer
ou d’in (pire r en quelque manière le liquide , ne
pourroit s’exécuter de la part du cheval, fi fes
nazeaux baignoient dans l’eau , parce qu’én même
temps qu’il en rempliroit la cavité de fa bpuche,
jl en attireroit incanteftablement autant dans fes
foffes nazales , l’aftion d’inlpirer par cette première
cavité , & celle d’infpirer par les fécondés, étant
évidemment fimultanées ; & l ’on comprend dès
Jors que l'animal ne pourroit qu’en être fuffoqué.
C’eft aufli conféquemment à cau-fe de cette inspiration
inféparaSie de l ’aétion de humer, que
l ’on eft obligé de couper ou de rompre de temps
en temps Veau â l’animal , fu'r-tout à celui qui,
preffe du befoin le plus grand , boit à perte
(1) Hijloire Naturelle , tome 3 , livre 8, chapitre 42,
page 430 , édition-: de 1771.
12) Problème 2Si pages 64.-66, ‘traduction françoife de
J. Louveau. Lyon , 155-9, in-89.
£3) Lac. cit. , chapitre 6, page 476.
£4.) Tome 4e» livre 10, chapitre 73 .page 200.
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d’haleine & tout de fuite , aux rifques de s’étouffer
entièrement. M. de Buffon a été plus loin encore ,
il a penfé que l’attion de tremper les nazeaux
dans Veau en buvant, étoit peut-être , pour le
cheval, la caufo la plus générale de la morve,
parce que lorfque Veau étoit froide il s’enrhumoit,
& qu’il fùffiroit fans doute, pour prévenir cette
maladie , de ne point laiffer boire les chevaux à
Veau froide , & de leur effuyer les nazeaux immédiatement
après(i). M. de Buffon, en écrivant
ceci, oublioit la nature qu’il a fi louveixt confultée
avec fruit j i lne réfléchiffoit point que d’après
fon idée, la morve devroit être très-commune dans
tout -le nord , où les chevaux boivent à froid,
tandis, au contraire, quelle y eft bien moins
fréquente que dans les autres régions. Cette erreur
a été répétée par M. Vitet dans fa médecine
vétérindire (2) , & par 'le dernier traducteur de
Pline (;)• -. .
L ’opinion dans laquelle on a ete que 1 eau
.trouble ^grailfe le cheval & lui eft infiniment
plus falutaire que toute autre, n’çft pas moins
à rejeter. Il feroit en effet très-difficile de découvrir
la forte d’élaboration à la faveur de laquelle des
corpufcüles terreftres & grofliers aideroient à fournir
un chyle falutaire & propre a une aflimilatioli
d’où réfulteroit une homogénéité véritable, 'Non
feulement le fluide aqueux extrait les parties les
plus utiles des alimens , il diffout les humeurs
vifqueufes , il entretient la fluidité du fan g , il
tient tous les émoneboires ouverts , il débarrafie
les conduits excrétoires & facilite merveille u fe me rat
la tranfpiration infenfible, mais fans fon focoufs
la nutrition'ne fa.uroît être parfaitement opérée ;
il eft le véhicule qui perte• le- fuc nourricier juf-
ques dans les pores les plus ténus. I l fuit donc,
de ces vérités, que les feules eaux bienfaifantes
feront celles, qui légères, pures., (impies, courantes,
douces & limpides , paneront, avec facilité dans
tous les . vaifTeaux, & , feront les plus propres à
appaifer la foif de tous les animaux. Nous devons
penfer que celles qui font crues , pefantes, crou-
piffantes, ina&ives, terreftres & imprégnées, en
un mot, dè matières hétérogènes greffieres, formeront
une boiffon-d’aulam plus nuifible qu’elles
ne fe frayeront qu’avec peine une route dans les
canaux qu’elles doivent parcourir, - & qu’elles ne
parviendront jamais! leurs extrémités fans y-caufer
des obftruéïions. Il faut avouer néanmoins , eu
égard! la conftitution de la plupart dés animaux,
■ Sc a la force de leurs organes digeftifs, que ces
dernières eaux ne leur feront point aufli perni-
cieufes qu’a l ’homme; on voit journellement des
chiens boire dans les ruiffeaux les plus fangeux ;
des beftiaux s’abreuver dans* les marres de jus de
(1) Hijloire Naturelle -, tome7 , partie z , pages 369- 370 y
édit, en 31 vplumes.
’ (2) Tome 1 , page 326.
(3.) M. Foinjinet de Siv ri, édition citée, tome 3 , page
480, note 44.
fumier.
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fumier, & dans celles qui ont forvi au rouiffage
du chanvre , fans en paroître incommodés; on ne
doit cependant pas moins faire attention aux différentes
qualités de celles dont on les abreuve.
•( Les eaux trop vives & trop fraîches, quoique
claires & limpides, comme celles de quelques
fources , fufeitent de fortes tranchées, des > gonflè-
nsens confidérables dans les parotides ; les eaux
de pluie , de neige , & de grêle, .débitèrent peu
le s animaux; les dernières provoquent affez communément
une toux violente , un engorgement
confidérabie dans les glandes maxillaires - & fub-
linguales , ainfi que dans les glandes lymphatiques
amoncelées ! la partie fupérieure de l ’auge ; elles
excitent en même temps, dans les jeunes chevaux ,
un flux confidérable par les nazeaux, d’une humeur
plus ou moins épaiffe & d’une couleur différente
ÿc plus ou moins foncée, dont la durée peut avoir
des fuites funeftes. Les eaux croupiffautes y comme
celles des marres,, font le plus Couvent chargées
de fels âcres & cauftiques qu’elles ont diflouts
des fubftances animales & végétales qui fe font
putréfiées dans leur fein ; elles ont perdu d’ailleurs,
par la chaleur ■ du foleil , J une partie de l’air
qu’elles comenoient , & qui les rendoit légères
& digeftibles; elles fourmillent encore de vers &
d’oeufs d’info&es de toute elpèce, q u i, avalés
par les animaux, éclofent 8c croiffent dans leurs
inteftins, donnent lieu aux maladies vermineufes
& à tous les accidens qui les accompagnent, !
l ’acrimonie des humeurs , a des fièvres putrides,
malignes , pour l ’ordinaire épizootiques , &c. Les
eaux bitumineufes' font defàgréables à boire ; les
.animaux ne s’en ' abreuvent que lorfque la foif les
y contraint ; leur ufege eft prefque toujours dangereux;
un dégoût permanent, qu’accompagne bientôt
le dépériffement, & une toux plus ou moins sèche,
font les moindres des maux qu’elles occafionnent;
en général, cellês des fources voifines des mines font
mai-faines, & de toutes les eaux minérales , celles
qui font gazeufes ou âcidules , font les feules recherchées
par les animaux. Celles des puits, chargées ,
dans plufieurs quartiers de Paris * d’une grande quantité
de félénite, produifent une infinité de maladies,
cutanées, & contribuent peut-être beaucoup à la
formation des bézoarts & des calculs qu’on trouve
affez communément dans les inteftins des chevaux ;
enfin qui ignore les effets funeftes de la rofée dans les
animaux qui pâturent l’herbe qui en eft couverte,
fur-tout lorfqu’elle a rouillé les plantes, & c ., &c.
L ’eau paroît contenir quelques particules nutritives,
puifqu’elle eft un foulagement dans la faim,
qu’elle modère les douleurs qu’éprouvé alors l ’ef-
tomac , & qu’elle peut feule foutenir la vie pendant
un certain efpace de temps, comme nous le
voyons dans les circonftances où les animaux font
mis a la diète la plus auftèré ; mais cependant elle
ne peut fuffifammeht réparer les déperditions &
entretenir cette même vie ; l ’àmaigriffement rapide ,
la perte des forces & la difette de fuppmation
Médecins. Tome I.
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d e s p l a i e s d an s l é s a n im a u x r é d u it s ! l ’ e a u , fo n t
d e s p r e u v e s d e fo n in tû f f ifa r x é '. O n c o r r i g e o u
o n d é t r u i t q u e lq u e f o i s fe s m a u v a i f e s q u a l i t é s p a r
l ’a d d i t io n d u v in a ig r e o u d e s a u t r e s a c i d e s , c o m m e
o n l a r e n d a l im e n t e u f e o u m é d i c in a le , e n l u i
u n i f ia n t l e f o n , l e s fa r in e s , l e m i e l , l a d é c o & io n
d e f o i n , d e c h o u x , d e n a v e t s , c e l l e d es p l a n t e s
m é d i c am e n te u f e s ; & c . , & fo u s c e p o in t d e v u e ,
e l l e p e u t ê t r e d ’ u n e g r a n d e r e f fo u r c e d ans u n e
f o u l e d e c a s m a la d i f s . Le ( V o y e z boiffon ,—eau.) t em p s & l a m a n iè r e d’ a b r e u v e r l e s a n im a u x
f o n t d e s p o in t s q u i in t é r e f f e n t e f f e n t i e l l e m e u t l e u r
c o n fo rm a t io n .
O n n e d o i t j a m a i s , & d ans a u c u n e c i r c o n f t a n c e ,
l e s f a i r e b o i r e q u a n d i l s fo n t é c h a u f fé s p a r u n
e x e r c i c e v i o l e n t . L e s e f fe t s d e l ’ e a u f r o id e fu r
u n f a n g r a r é f ié Sc d an s u n a n im a l e n fu e u 'r , fo n t
fu n e f t e s ; l e p o i f o n l e p lu s a é t i f n e t r o u b l e . , p o u r
a in f i d i r e , p a s p lu s p r o m p t em e n t l ’ é c o n o m ie a n i m
a l e , l ’ a ô t io n p r o g r e f l l v e d u f a n g e f t e n q u e lq u e
f o r t e a r r ê t é e fu r l e c h a m p , i l fe c o a g u l e 8c s’ é p a i f l î t .,
t o u t e s l e s fo c r é t io n s & l é s e x c r é t io n s f o n t f i i lp e n -
d u e s , l e s p a r t ie s fo n t c r i ( p é e s & t e n d u e s ; i l fur-
v ie rit d e s in f lam m a t io n s m o r t e l l e s d an s l e s v i fo è r e s
v a fo u l’e u x , c o m m e l e p o u m o n , l e f o i e , l a r a t e ,
d e s p l e u r é f i e s , d e s flu x io n s c a t a r rh a le s in f lam m a to
i r e s , q u e fu i t t r è s - f o u v e n t l a m o r v e , u n e f o u r - ,
b u r e in d o m p t a b l e , & c . Morgagni, q u i n o u s a
l a i f l e q u e lq u e s o b fo r v a t io n s fu r le s a n im a u x , a
t r o u v é l e m ë fo n tè r e d ’ un c h i e n a b fo lu m e n t g a n g r e n é ,
p o u r v o i r b u d’ u n e e a u t r è s - f r o id e ; a p r è s a v o i r v i o l
em m e n t c o u r u .
L ’heure la plus convenable pour abreuver les
chevaux eft celle de huit ou neuf heures du matin ,
& de fopt où huit heures du foir ; en été on les
abreuve ,• avecraifon, trois fois pat jour, & alors la
fécondé doit être fixée environ cinq heures après la
preriiière. I l eft vrai qu’eu égard aux chevaux qui
travaillent & aux chevaux qui voyagent, un pareil
régime ne fauroit. être exactement confiant &. fuivi ;
les chevaux de manège, dans plufieurs académies
bien réglées ne boivent qu’une heure ou deux
après la fin dés exercices, le foir on les abreuve à fopt heures, & toujours avant de leur donner
l ’avoine; c’eft au furplus à celui qui feigne un
animal depuis peu a étudier & a faifir en quelque
forte l ’inftant du befoin ou de quelque ancienne
habitude méconnue & toujours impérieufe ; nous
en citerons un exemple remarquable. Un cheval
nouvellement acheté mangeoit peu, & fur-tout ne
buvoit pas ; le palefrenier très-foigneux lui pré-
fentoit régulièrement là ration de' fourrage & de
boiffon ; mais, fans aucun ligne maladif, le cheval
dépérifloit a vue d’oeil ; On le mit à Veau blanche,
on ordonna de lui en préfenter fouvent & peu à
la-' fois ; on lui en donna à dix heures du fo ir ,
il la but toute fur le champ ; la dôfo fut répétée,
il la but encore , ce qu’il répéta jufqu’à quatre fois ;
il continua de boire abondamment tous les foirs,
après avoir oeangé le foin 8c l ’avoine, 8c peu ou
N n n u a