
tenues, & qui pourra fixer les bornes fies effets
lympathiques des remèdes plus ou moins énergiques
appliqués à l ’extérieur! Qu'on prenne gardé
cependant de pouffer trop loin cette action, icde
1 attribuer a des médicamens inertes , tels que des
OS , des dents , des coraux , des fruits inodores ,
&c. ; car alors on retomberoit dans ces fiècles bar-
bares , ou le cbarlatanifme & l ’ignorance avoient
fait adopter les amulettes , les anneaux conftel-
lé s, &c.
§. IL Oc r l action générale des médicamens
appliqués aux organes des fens.
Quoique la peau recouvre tout l ’extérieur du
&^e rfplpie dans les cavités qui pénètrent
jufqu a 1 intérieur , il eft plufieurs régions dans lef-
quelles elle prend un tiffu beaucoup plus fin &
laiile les nerfs beaucoup plus i découvert Tels
font en particulier les organes deftinés i tranfmettre
au lenforium les perceptions des diverfes qualités des ‘
corps extérieurs , l ’extrémité des doigts , l’oeil les
folles natales, la bouche, &c.L’épiderme eft tellement
aminci dans ces régions, que les nerfs , qui y font
tres-nombreux & dénués eux-mêmes des membranes
qui les recouvrent dans toute leur continuité y
font prefque à nu. Les médicamens appliqués '
a ces organes doivent donc avoir plus d’éneroie
que lorfqn’on les applique fur les autres endroits
de la peau; aufli cette application demande-t-elle
une confidération particulière de la part du mé-
decin. En effet , fi elle fournit, dans plufieurs cir-
confiances , des reffources heureufes , i l en eft plu-
lîeurs oii elle peut être nuifible, & iln ’en eft aucune
ou elle foit indifférente.
La correfpondance, la fympathie qui exiftent entre
les nerfs olfa&ifs, la cinquième paire , & prefque
tous ceux du corps humain , au moyen de cette
dernière , démontrent quelle influence fîngulière les
xemedes appliques aux foffes nafales peuvent avoir
fur les autres organes. De la Futilité des odeurs
fortes & ftimulantes, des: fternutatoires, des eaux
fpiritudifes, pour réveiller & exciter les fondions
languiffantes du coeur & des poumons ; de là dépend
aufli 1 action frappante des odeurs fétides &
antifpafmodiques dans les affrétions vaporeufes, les
convulfîons, les fyncopes hyftériques , &c. C’eft
enfin à cette extrême fènfibilité des nerfs olfaétifs
que font dus les dangers qui accompagnent fou-
vent ladminiftration des poudres âcres , employeés
inconfîdérément par le peuple dans les coups a la
tê te , les douleurs, &c.
Les ofoillations produites par l ’impreffion de»
corps fapides fur les nerfs de la langue, peuvent
auffi avoir une" action affez forte fur les autres
organes. Si un atome de fublimé corrofif, tenu
quelque temps fur la langue , eft capable de faire
ï aijre f ans ia ê or§ e un fenriment de refferrement
& de ftrangulation quelquefois, très - forte , on
doit juger de là que tous les médicamens âcres
agiffent d’abord par leur impreflïon fur l’organe
du goût. C eft ainfî que le vin & tous les fpiri-
tueux reparent pour quelque temps les forces , en
les tenant feulement dans la bouche; que les
médicamens^ d une laveur défagréable excitent des
naufées, même avant d’avoir été avalés. Tous les
corps , qui produifent un fentiment d’âcreté & de
chaleur, occafionnent la même fenfation dans l ’oe-
fophage & dans l ’eftomac , lorfqu’on les tient
pendant quelque temps dans la bouche. Les fels,
.pont la laveur eft forte, le fel ammoniac en particulier,
le fel marin lui-même , ftimulent les
nerfs de la langue allez vivement pour ranimer
1 action languiffante & foible de ces organes dans
des régions fort éloignées de celle - là , comme
1 expérience 1 a appris dans la paralyfie , l ’apoplexie
, & toutes les maladies comateuiès. Il eft
rare cependant qu on adminiftre des médicamens
feulement par cette voie , fi l ’on en excepte les
mafticatoires : mais quoiqu’on ait coutume d’attribuer
lès bons effets de ces derniers à l ’abondante
excrétion de falive qifils font naître , ce qui vient
d etre d it, d apres l ’oblervation , démontre qu’i l
faut ajouter, à la caufe de ces effets, Y action,
ftimulante & irritante qu’ils exercent en mêm»
temps fur les nerfs.
Les régions de la peau ou les nerfs font les
plus, nombreux & les plus fenfibles ,, comme la
main & le pied, &c. , font en même temps beaucoup
plus fufceptibles que les autres de recevoir
l ’impreffipn des médicamens. C ’eft pour cela que
1 application de ces derniers fur ces régions particulières,
a fouvent de très - grands avantages en
Médecine. Les bains, les friétions, les linimens y
le fînapifme , les vefficatoires agiffent beaucoup
plus fortement fur ces endroits que fur toutes les
autres parties de l ’extérieur du corps.
Enfin la Médecine morale, qui eft fi utile pour!
favorifer Y action de la plupart des remèdes, &
qui fuffit feule dans plufieurs maladies tient de
près aux confédérations fur l'influence des fens y
pour la guérifon des maladies. Les fpeéiacles variés
& pris dans les productions de la nature r
les voyages, les promenades, les leétures agréables
, les conversations animées , la fociété des
hommes d’efprit, la mufique, en tenant les fens
occupés, fufpendent & charment la trifte impref-
fion de la douleur ,' éloignent les réflexions affligeantes,
& portent avec eux , dans l ’efprit des
malades, le bonheur & la confolation. C ’eft encore
à la même atiion, mais plus rapide & plus
forte , que l ’on doit rapporter l ’art d’exciter &
d’émouvoir les pafflons par les fecouffes de la
crainte, de la frayeur , & c ., que l ’ on a quelquefois
employé avec fuccès.
§. III. D e /’aétion générale des médicamens
reçus dans Vefîomac.
L a voie la plus ordinaire d’employer les médicamens,
eft celle qui va nous occuper. Tout ce
qui a été dit dans la plupart des articles pré-,
cèdens, fe rapporte naturellement à Yatiion_àes
remèdes reçus dans 1‘eftomac; mais il eft néceffaire
de confidérer quelle eft la différence dans 1 impref-
fion qu’ils font fur ce vifeère , d’avec cell * qu ils
produifent fur les autres organes. . _
L ’eftomac eft pourvu dune grande quantité de
nerfs j la huitième paire, qui fe termine fur les deux
faces, en embrauant fon orifice fuperieur , les.
communications multipliées de celle-ci avec 1 in-
tercoftal, les tameaux qu’elle envoie aux plexus
nombreux fitués dans le voifînage , annoncent affez
de quelle extrême fènfibilité doit jouir ce vilcere.
Il eft donc aifé de concevoir comment les medica-
mens qui y font re«çus peuvent agir avec beaucoup
de promptitude fur des partie? très éloignées i ce
qui fe paffe dans les différentes affrétions dont ce
vifeère eft attaqué, les fymptômes'qui fe mani-
feftent à la' tête, dans la bouche, dans les membres,
& c ., démontrent que Y action dés médicamens
peut fé porter de même dans ces régions,
lorfquiis ont été reçus dans l’eftomaç. Tous ces
phénomènes, dépendant de 4a fympathie nerveufe,
fe préfentent dans, les effets des poifons. Les ver-,
tiges, la perte de la raifon, la cécité, la furdité,,
les odeurs fingulières , les bruits , la frayeur , les
convulfîons des extrémités, les fueurs froides, le
fommeil, les fyncopes, le hoquet, la gêne d elà
refpiration , reffoufflement , les palpitations tiennent
à cette réaétion nerveufe : en appliquant ces
fymptômes à l’effet des remèdes , on conçoit très-
bien l ’énergie qu’ils doivent avoir quand iis font
contenus dans ce vifeère.
La grande quantité de vaiffeaux qui ferpentent
entre les membranes de l’eftomac, & de ceux qui
s’ouvrent dans fon intérieur, apprend , d’une autre
part, que la partie la plus atténuée & la plus volatile
des fubftances médicamenteufes peut être ab-
forbée par les bouches veineufes , & portée de là
dans le tiffu cellulaire , dans les organes voi-
fins , & jufques dans le torrent de la circulation.
C’eft ainfî que les fpiritueux, le v in , les toniques,
agiffent avec une promptitude fouvent étonnante
5 c’eft ainli que les alimens reftaurans & faciles
à digérer paffent avec rapidité dans les humeurs
, & réparent très - vite les forces abattues.
A la vérité, il n’en eft pas tout à fait de même
des médicamens d’une faveur âcre & forte. Les
orifices vafculaires, doués d’une fènfibilité exquife,
fe ferment & fe refferrent d’abord par l’impref-
fion irritante & lubite de ces fubftances; aufli de
très-grands médecins ont ils penfé que Y atiion de
ces remèdes fe borne à l’eftomac, & qu’ils ne
paffent point. dans les fécondés- voies. Mais fi les
matières très - âcres fe bouchent elles - mêmes le
paf fagei l eft cependant certain que ce îles qui
n ont qu’une faveur modérée , & même celles dont
la faveur très-forte eft adoucie diminuée par les
corps fades qu’on y mêle en grande quantité, pénètrent
dans les vaiffeaux , & vont, porter leur
action jufques dans les filières les plus tenues de
nos organes. Aufli, pour rendre plus fure & plus,,
facile i ’abforption des, médicamens âcres & irritahs, •
combine-t-on fouvent avec avantage des caïmans,
des antifpafmodiques , qui s’bppofent a la grande
irritation produite par les premiers , & facilitent
conféquemment leur intromillion dans les vaif-
feaux. C’eft ainfî que le camphre & même l ’opium ,
affociés aux induits , aux fondans , dont la&ivite.
& l ’énergie s’oppofent fouvent a leurs bons effets ,
Les inteftins , qui s’abouchent immédiatement
avec l ’eftomac , ont abfolument la meme ftruéture ;
ils n’en diffèrent que par le plus grand nombre
d’orifices abforbans qu’ils contiennent, & par une
fènfibilité d’autant moindre, qu’ils s eloignent plus
de ce vifeère. Aufli les médicamens, qui y parviennent
fouvent fans avoir change de nature, y agil-
fent ils abfolument de la même manière, fi 1 on
ajoute qu’il s’y fait une abforplion plus confidera—
"ble dans ceux que les anatômiftes ont appelés inteftins
grêles. Quoique labfprption loit moins
forte dans les gros inteftins, elle 1 eft cependant
affez pour qu’on employé avec fueces les^ reme—
des âcres fous forme de lavemens, lorfqu on a a
craindre une fènfibilité & une irritabilité trop con-
fidérables de la part'de l ’eftomac. T e lle eft la raifon
de l’ufage des lavemens nourriffans , des lavemens
antivénériens, dont les effets font ties-
utiles dans plufieurs circonftances ; des lavemens
âcres & irritans, fi avantageux dans l ’apoplexie ,
&c.L
a longueur, du trajet que les médicamens par-'
courent après avoir été avales , eft encore une
caufe qu’il faut confidérer pour bien concevoir
leurs effets. Il n’ y a , pour ainfî dire, aucune partie
inaétive par cette adminiftration ; ce qui n a point
aai for l ’eftomac & le duodénum, agit dans; 1 îleunj,
le cæcum, & même dans les gros inteftins ; c eft
en partie pour cela que les remedes prefcrics par
cette voie ont une action plus énergique & plus
durable que ceux qu’on adminiftre de toute autre
manière.
Outre les nerfs & le réfeau vafculaire fur le£—
quels les médicamens portent leur action dans
l’eftomac & les inteftins , ils en exercent aufli une
très-marquée fur les fibres mufçulaires dont ces vil—
ceres font pourvus. Tantôt ils en excitent les contrarions
fuivant le mouvement naturel de ces
anneaux irritables, & alors ils font purgatifs ; tan-,
tôt ils oceafîonnènt des mouvemèns inverles ou
antiperiftaltiques , & alors ils deviennent émeti-
tiques ou vomitifs. D'autres fois ils n irritent quq
légèrement ces fibres mobiles , & alors ils font
toniques , refferrans , ftomachiques , aftringens ,
8cc. Enfin ils eu arrêtent les mouvemens trop