
dans le royaume de Zegzeg , des montagnes habitées
, 8c cependant fi froides , que les habitans font
obligés de faire du feu , même pendant la nuit
& durant leur fommeil. Du refte , les faifons de
la Nigriïie font fujettes à l ’ordre qui règne entre
les tropiques , & qui partage l ’année en deux
iàilbns, la faifbn sèche , & la faifon des pluies.
19 - Enfin je ferai une feule & dernière région
dans le continent de Y Afrique , de tout cet eipace
compris au nord entre les chaînes tranfverfales qui
terminent la partie méridionale de la Nigritie,
entre les régions occidentales^ orientales del*A-
frique à l ’eft & à l ’oueft, & la région du Cap
de Bonne-Elpérance au fud. Ce triangle intérieur
appartiendroit également aux baflins orientaux &
aux occidentaux, fi les monts Lupata , qui vont
du Cap de Bonne-Efpérance au plateau des montagnes
de la ,Lune, étoient exactement au centre
de l ’Afrique : mais on a vu que ces montagnes fe
portoient beaucoup plus du cçté de l ’eüt que de
l ’oueft, & qu’en conféquence les baflins occidentaux
étoient beaucoup plus profonds que les orientaux.
Audi les pays fitués au centre de Y Afrique
appartiennent-ils néceflairement beaucoup plus aux
baflins occidentaux. Ils compofent ce que les géographes
appellent la Caffrerie intérieure, dans la quelle
font à l’orient les royaumes de Monoe-
mugi , _de Macoco, de Gingiro ; 8c à l ’occident y
le pays des Jaggas, les royaumes d’Anzico , de
Mujac , &c. Dans ces pays , font , dit-on , des lacs
immenfes , des forêts étendues ; c’eft de leurs montagnes
que fortent les fleuves qui arrofent les régions
occidentales & orientales. Ce qu’il y a de
lu r , c’eft que ces contrées font néceflairement partagées
entre des montagnes & des vallées» On
dit même que l ’on y trouve , dans la partie
montagneufe , depuis le pays des galles juf-
qu’à celui des hottentots, des nations d’hommes
blancs, & mêmes de nains : mais le général des
habitans eft abfolument noir ; & , à tous égards y
cette région mériteroit les regards les plus attentifs
du médecin & du naturalifte. Mais ces pays,
habités par des nations féroces & indomptables ,
feront encore long-temps inacceflibles à l ’obiervation
du philofophé, & fermées à la cupidité européenne.
Quoi qu’i l en (oit, fi jamais l ’entrée de ces contrées
nous eft permife , elles nous offriront deux
ordres d’obfervations à faire, tant fur les hommes
que fur les productions & la température ; car il
exiftera néceflairement une diftin&ion eflentielle
entre la température , les productions, & les habitans
des montagnes, & la température , les habitans
, & les productions des plaines.
Aux dix-neuf régions entre lefquelles je viens
de partager le continent de Y A fr iq u e> il faut
joindre les îles qui l ’environnent, 8c qui en font
partie. De ce nombre font, dans la mer des Indes ,
Madagafcar 8c les îles voifînes ; 8c dans l ’Océan I
africain, le groupe des îles du Cap- V e rd , celui I
des Aço r es, & celui des îles Canaries y auxquelles i l
faudra joindre l ’île de Madère.
La température d’uné île dépend, non feulement
de la latitude dans laquelle elle eft fituée, mais
encore de fon étendue T de l ’éloignement od elle
eft du continent, & de fbn ifolement. Il faut encore
y confidérer les parties les plus élevées & les
plus^ baffes. Les premières font ordinairement
placées vers le centre (i) , la direction des vents de
terre & de ceux de mer, dont il a déjà été parlé y
en eft même une conféquence*
Madagafcar eft la plus grande des îles connues
en Afrique. Voifine des régions qui font »
1 orient de Y Afrique , entre le tropique du capricorne
& l ’équateur, la diftribution des faifons y
eft la même, & fon étendue fait que fa température
diffère peu de celle du continent. Cependant
, partagée dans fon centre du fud au- nord par
une chaîne de montagnes , elle offre néceflairement
à l ’obfervateur deux ordres de températures
celle des montagnes 8c celle dès plaines : celles-
ci font brûlantes comme,les plaines du refte de
Y Afrique , mais elles font fertilifées par une grande
quantité de rivières; & la nature , qui ne refufe
aux habitans que le blé & le vin , les en dédommage
par beaucoup d’autres richefles 8c par
de doubles récoltes. I l doit y avoir aufli une différence
entre les côtes occidentales & les orientales*.
Les premières font expo fées aux mouflons , qui vont
alternativement de l ’île au continent, & du continent
à l ’île en différens temps de l ’année, & aux;
eourans violens de cette mer; les fécondés reçoivent
un vent fud-eft plus régulier & plus continuel. Les-
habitans font dans la claffe des noirs orientaux*
Dans les montagnes du centre, on prétend qu’i l
exifte , comme au centre de Y Afrique , une nation- >
d’hommes blancs 8c de nains : mais ce n eft pas
encore ici le moment de nous occuper des hommes*
( Voye\ §. V I I .) Les îles qui environnent Madagafcar,
infiniment moins étendues, doivent être 8c
plus humides 8c plus tempérées. Les îles Comorro'
font fertiles en toute efpèce de fruits, mais peu?,
falubres. Elles font placées au deffus du détroit d*
Mozambique , expofées à dès mouflons de fud-
oueft & de nord-eft. Les habitans en font très-
mêlés. On vante la falubrité des îles de France
(i) Quand je dis que les paroles lès plus élevées font
toujours placées au centre des îles, cette propofirion n'effc
peut-être pas fans exceptions î Sc l’on pourroit dire que ,
par exemple, l’île de Sainte-Hélène eft bordée de rochers
très-élevés. Mais pour juger des parties les plus élevées d’un
lieu, il ne faut pas porter les yeux fur certains points qux
furmontent les autres, & qui font des accident dans, la.forme
générale du fol ; mais il faut fuivre la progrelfion de la
bafè même fur laquelle portent ces pics éleves , & qui va
toujours en s’exhaûffant vers le centre , quoique les pointes
qu’elle fupporte ne fuivent pas toujours, dans leurs proportions
mutuelles,, ceçtç progrelfion étagé* de la circonférence
an centre.
ou Maurice, & de Bourbon ou Mafcarenhas >
q u i, plus éloignées du continent, réunifient, aux
avantages d’un air pur, ceux d’un terrein fertile.
L a plus riche eft l ’île Maurice , dont les montagnes
élevées , qui occupent le centre, font couvertes
de végétaux & de verdure ; elle eft placée
au milieu du vent de fud-eft, qui règne dans cette
, mer, & les vents alternatifs de terre & de mer
entretiennent encore la falubrité de. fon air. L ’île
Bourbon* placée entre elle 8c Madagafcar', eft
moins fertile , fans doute parce que fes plantations
font fujettes à être renverfées par des ouragans
terribles ; elle contient un volcan.
Les îles du Cap- Verd forment un groupe placé
dans le voifinage de la région du Sénégal ; leur
température eft plus douce que celle du continent
voifin , & elles ont répondu , par leur fertilité ,
aux foins & à l ’induftrie des portugais; avant
l ’arrivée defquels elles étoient peuplées d’un petit
nombre de noirs. Ceux qu’on y voit maintenant
font couleur de cuivre. Au refte, il faut obferver
que , de même que les îles d’une grande étendue
fe rapprochent de -la température du continent ;
de même les îles placées en groupe très^-près les
unes des autres , doivent fe rapprocher de la température
des grandes îles, plus que celles qui font
fort ifolées , quoique d’une grandeur pareille. Leur
pofition ,- par rapport au groupe dont elles font
partie , & relativement au vent dominant, ne peut
pas non plus être indifférente. Ainfi, les obfèrva-
tions faites à Bonavijia , près du continent, & à
l ’eft du groupe des îles du Cap-verd , pourront
différer fenfiblement de celles faites à l ’île Y A n tonio
, ou à l ’île de Brava , placées à l’occident,
l ’une au fud, l ’autre au nord du même groupe :
tandis que dans des îles parfaitement ifolées, une
pareille différence de latitude ou de longitude pro-
duiroit des effets à peine fenfibles.
Cette obfervation a lieu bien fenfiblement dans
les Canaries. Les voyageurs ont obfervé que les
habitans naturels des îles les plus méridionales de
ce groupe , étoient plus bafanés que ceux des
îles plus feptentrionales , quoique la différence de
leur latitude foit bien médiocre. Placées en deçà
de notre tropique ., à la même latitude que les
côtes occidentales de la Barbarie , que le Sahra
& la haute Egypte ; ces îles font bien plus tempérées
que les pays correfpondans dans In continent;
& leur fertilité, qui fe foutient encore de
nos jours, leur a mérité , des anciens-, le nom
d’îles fortunées. On peut voir les obfervations de
M. Adanfon fur celle de Téneriffe , dont le pic
eft un véritable volcan, 8c dont le terrein rougeâtre
& peu profond eft cependant d’une fertilité
prodigieufe , propriété commune à toutes les
terres volcaniques , pour peu qu’elles fe trouvent
■ friffifamment arrofées 8c dans une latitude favorable.
Les obfervations de M. Mongès fur la légèreté.,.
la vivacité , la fecherefle de Pair , & la force
éle&rique de l ’ atmofphère au haut de ce pic, appartiennent
plus à la grande élévation du lieu
qu?à la nature du climat ( Journ. de phyf., août
1786). Joignons aux îles Canaries celle de Madère
, jouiflant, comme elles, des mêmes faifons
aftronomiques que nous, plus feptentrionale, plus
fertile peut-être , couverte d’un terrein gras, excellent
j plus tempérée , plus falubre encore „
8c digne , comme elles, du beau nom d’île Fortunée.
Les A ço r e s, un peu plus feptentrionales que
les Canaries , offrent les mêmes productions; leurs
vins font moins eftirriés , leur terrein moins fertile
: cependant l’on y voit de même, auprès du
pic de F a y a l, une terre volcanique rougeâtre, dont
la fertilité n’eft pas moins remarquable que celle
de Téneriffe.
Les autres îles de Y A fr iq u e , très-éparfes, doivent
être divifées en deux ordres. Les unes bordent
les côtes, 8c en font très-peu diftantes ; les autres
font fort éloignées du continent. Les îles côtières
doivent participer à la température du continent
dont elles font partie , dans l ’ endroit ofl elles fe
trouvent. Ainfi, les îles qui bordent les côtes de
Bénin & de Juida (o u , comme l ’écrivent les
anglois, Xi^hydaw ) , font très - mal - faines , très-
humides , & très-chaudes. Il en eft de même des
îles du golfe de Guinée, telles que celles de
Fernand-Pô , & S. Thomé, très-chaudes, très-in-
falubres , quoique très-fertiles. Celle de S. Thomé
fur-tout eft couverte de brouillards aux deux équinoxes
, parce qu’elle eft immédiatement fous la
li^ne ; mais dans les mois de juillet & d’août,
ou le foleil eft moins perpendiculaire , l ’air y eft
pettoyé par le vent d’eft qui foufflè alors avec plus
de force , & qui diflïpe les nuées^
Annobon, plus éloignée du continent, eft plus
falubre & moins chaude ; elle a des montagnes-
très-élevées & couvertes de neige. Cependant cette,
analogie des îles côtières avec le continent voi-,
fin , n’eft pas toujours exaéte. Et ce que dit M.
Adanfon de l ’île de G orée , démontre qu’une très-,
petite diftance produit déjà de grands effets. Ce
voyageur dit que l ’air de Gorée eft fingulière-
ment tempéré , ce qu’il ne dit pas du continent,
qui l’avoifine. I l femble attribuer cet effet à l ’égalité
des jours 8c des nuits , .qui cependant doit
être la même dans le continent. Une raifon plus
plaufible eft Talternative foutenue des vents de
terre & de mer : mais ces vents ont lieu dans
toutes les autres îles femblables. Il feroit plus
aifé d’expliquer ce fait par la petitefle de l ’île ,
qui doit être rafraîchie par le vent de mer , plus
promptement que fi fon étendue étoit plus grande j
d’ailleurs, plus éloignée du continent vers l ’eft
qu’au nord, elle doit recevoir du vent d’eft , qui
lui vient du continent, plus de rafraîchiffement.
L ’île de Zocotora, ou Socotra, qui avoifine le
cap de Guardafu , eft compofée d’un fol dur & pierreux
, aflçz peu fertile, ainfi que la côte voifine $