
A L I
Fruits » e n f r u i t s d’ é t é & e n f r u i t s d ’ a u tom n e . . . . C e dans Vétat <T acerbité's
» q u ’ ils a p p e lo i e n t f r u i t s d’ é t é , fo n t c e u x q u i
»» n ’ o n t q u ’u n e d u r é e f o r t p a f l a g é r e , e n fo r t e q u e ,
» q u o iq u e l ’ e fp è c e d e f r u i t s d u r e p lu s o u m o in s
» d e t em p s , l ’ in d iv id u n e p e u t g u è r e f e co n fê 'r -
» v e r e n fo n e n t ie r J’ e ip a c e d e p lu f ie u r s jo u r s . C e
» f o n t c e u x q u e l ’ o n t r o u v e dans H i p p o c r a t e & dans
» G a l i e n , fo u s l e n om d e «paîiu. L e s f r u i t s d’ a u -
» tom r ie , a u c o n t r a i r e , f e c o n f e r v e n t a l l e z l o n g -
» t e m p s , & m êm e p lu f ie u r s d’ e n t r e e u x o n t u n e
» d u r é e a f f e z l o n g u e p o u r n ’ ê t r e é b r a n lé e q u e
» p a r l e s p r em iè r e s c h a le u r s d e l ’ a n n é e fu i v a n t e ,
» a u x q u e l l e s i l e f t à p e u p r è s im p o f i ï b l e q u e l a
» fu b f ta n c e d’ a u c u n f r u i t p u i l f e r é f if te r ; a u ff î l a
» p lu s g r a n d e d u r é e d e s f r u it s c o n fe r v é s d ans l e u r
© é t a t n a t u r e l , q u e lq u e f o in a u ’ o n y a p p o r t e , n e
® p e u t g u è r e s ’ é te n d r e a u d e l à d’ u n e d em i -
© a n n é e ................. ».
Caractères des fruits en général.
( P . 3 0 8 . ) a Les fruits en général ont été
» cara&érifés par les anciens par le nom d’ali-
», ment a tenuium partium , alimens dont les
» parties font fort atténuées ; nom dont Galien*
» donne l ’explication, en difant qu’on en peut ju-
» ger par leur facilité-à-la folution . . . . quod
» m tenuiora facile folvantur ,• 8c pour délermi-
» ner de quel genre de folution il veut parler,
» i l nous l’explique : quod verô ea folvantur
» calor animalis cui applicantur caufa eft ( 4 3 ) .
» Le même auteur prononce que le caractère de
» douceur qui fe remarque dans certains fruits , eft
» l’effet d’une chaleur modérée ... (les anciens en-
» tendoientpar ce mot tout mouvement qui produit
» la coétion & le mélange exaét des principes ) . . .
» Cette douceur eft en effet le fruit du travail de
» la nature . . . . Mais lés principes des fruits peu-
» vent encore acquérir plus de tenuité , ajoute Ga-
» lien , & quand ils auront paffé le degré de matu-
» rite, alors ils perdront cette douceur. Car, dit-il,
» on peut retirer également du vin de tous les
» fruits ( 4 4 ) . . . • ( 4*. 30^. ) Si l’on fuit les pro-
© grès des fruits depuis leur naiflance jufqu’à l’état
» de leur maturité, on verra dans tout fon jour
» cette belle uniformité des mouvemens de la
» nature. Plus les fruirs prennent d’atténuation ,
» plus , à la vérité, ils fe différencient par leurs
» parties les plus fubtiles ; mais ils confervent
» uniformément la douceur, qui eft le fruit de
» l ’égalité des parties. . . . . . .
(43 ) Galien en effet dans cet endroit indique la'mixtion
de ces fubftances à nos humeurs, & la facilité avec
laquelle elles pénétrent dans le corps, 8c cèdent à l’aftion
de nos organes.
(44) Il paroît que Galien regarde la fermentation vi-
neiife comme un degré au delà de la maturation, qui
produit la douceur dans les fruits.
» «ta tMionai sd ’qAuëet iupse ufutr- olens afjrouuittse r? aL élas bfreuliltes ,d aifvfaenr-t »» alecuqru ism laat udriotuéc ,e u&r qauvia nlet uqru eef t lperuorp rme u,,c filoangte t oauist » acerbes. Tout corps acerbe eft terreux & froid y » dit Aëtius. L ’ expérience m'a toujours démon- » tré que toute acerbité, abflraction fa ite des
» autres qualités accejfoires, /toit ejfentielle-
» ment froide (45 ) : acerbum corpus- terreum. ejl
» & frigidum. Omne acerbum , ab aliis quali-
» tatibus purum , omni experimento fa c lo f r i-
» gcoidmupmte rin lveesn fir.u iDtsa nasu cneot mébtraet , doens nfeu bpfteaunct esg uaèlrie— »» amuetnetueru,f eqs.u eI l qfuauoti qpuo’iul rtya nta irte mpaeruq udeer advieffcé nreontcree » entre ces efpèces aacerbité , chaque fruit cou- » ferve néanmoins un caractère propre à l ar-
» bre qui le porte. Servat tamen unufquifque »» farluocrslu asu caurnb ocraisr afactcèer en aptuourar md.i ftOinng uneer pleeust farvuoitisr; » d’été des fruits d’automne.............Mais, enfin
» ( P. 310.) cette acerbité fe diffipe par trois:
» moyens dijférens ; par la chaleur par l'/iu-
» midité, & par .l'un & Vautre réunis. Refol-
» vetur acerbitas ilia tripliciter, aut calefcens T
» aut humefeens , aut utrumque fimul perpe-
» tiens (46) ». . > •
Maturation des fruits d ’été. Fruits acides.
« Les fruits qui quittent les premiers de tous
» les caractères de l’acerbité, font des fruits ex-
» trêmement fon dans , qui portent avec eux un
» mucilage, fort imbibé d’eau & un caractère d a-
» cidité très-fenfîble.. Si Vacerbité > dit Aëtius'r
» f e pénètre feulement d'humidité , & que cette
» humidité fo it atténuée & combinée d'a ir , on.
» aura des acides : f i humefeat fiolùm , humi-
» ditasque ilia f it tenuium partium & aère a,
» acidum reddetur (47). C ’eft en effet le premier
(45) Ici Aëtius entend par froid tour ce qui réfifte â la
digeftionY & ne fe laiffe pas aifément pénétrer par les fucs
gaftriques. Il eft fur que tous les fruits acerbes pèfent fur
l’eftoraac, & ne fe digèrent qu'avec peine. A l’égard du
principe terreux1 qui, félon Aëtius ôc félon . Hoffmann ,
Lorry , 8cc., continue le corps acerbe,,, les chimiftes modernes
ont démontré que prefque toutes les acerbités végétales
appartenoient. à un acide particulier qui s’unit très-
promptement au fer , & Je précipite en noir. Cer acide
eft l’acide gallique, ou l’acide de la noix de 'galles. Il paroît
que prefque tous les aftringen* végétaux contiennent
cet acide.
(45 ) Cette théorie d’Aëtius fur les progrès de là maturation
, 8c fur l’influence des "caufes de cette maturation
fur les changemens qu’éprouvent les principes des différens
fruits, eft ingénieufe & curieufe à plufieurs égards.
(47) Ce mot aërea eft remarquable , & le mot de tenuium
partium, qui précédé , en explique le fens 5 car on
ne peut pas fuppofer à Aëtius la connoiffance des décou-
» degré de chaleur qui mûrit les acides j la grande
» quantité d’eau empêche le développement- de
» l ’huile ».
Des fruits doux d'été.
A l ’égard des fruits , qui de l’état d’acerbite
Commun à tous les fruits dans leur enfance, patient
à l’état de douceur, Aëtins en attribue la formation
aux combinaifons d’une plus grande chaleur
avec l ’humidité , & de celle-ci avec ce qu’il appelle
l ’air (48) > & il en déduit deux ordres de
fruits j les uns {implement doux, dans lefquels l ’eau
vertes modernes. L'air, l’efprit, irvivp.ee , chez les anciens,
étoit regardé comme la fource de la- chaleur dans les corps
vivans , & ici Aëtius prouve qu’il le regarde dans les^ végétaux
, ainfi que dan;. les animaux , comme la caufe d une
efpèce de chaleur interne 8c d’atténuation-,■ comme un des
inlirumens de la maturation, comme un des principes qui
contribuent à former les produits de cette maturation, &
principalement l'acide & l’huile. ( Voye\ note 48.) M. Lorry,
dans la note qu’il met à cet endroit, compare l air d Aëtius
au phlogiftique de Stahl, Théorie pour théorie, 1 un
répond affez bien à l’autre , fi ce n’eft que pour les anciens
l'efprit ou l'air étoit la caufe de la chaleur vitale , 6c
pour les modernes le phlogiftique en feroit le produit. La
Chimie , de nos jours , rejette le phlogiftique ; mais ce
qu’elle rétiendra certainement, c’eft la combinaifon diver-
fifiée de l’air 6c des gaz dans les fubftances végétales, leur
influence dans la production des acides , des huiles, ôc de
la fubftance folide de leurs organes. Cette combinaifon reçoit
de la maturation une perfection, que nos fens nous attellent,
ainfi que l’ànalyfe. ■ . ' .
(4i) S i verb humefeat atque çalefcat, cum aquofa humi-
ditate in dulcedinem tranjikit, cum aërea verb in pinguedi-
nein. Si Vacerbité fe pénètre à la fois d'humidité& de chaleur,
alors y f i l'humidité .ejî fimplement aqueufea Vacerbité page
à l'état de douceur j f i elle ejl combinée d'air, elle fe tourne
en huile. C’eft ici que M. Lorry compare l’air d’Aëtius
au phlogiftique de Stahl. En général, voici la fticcelïion
des idées d’Aëtius fur la formation des fruits d’ete. P remière
combinaifon d'humidité feule avec 1 air 8c peu de
chaleur. Fruits acides. Seconde combinaifon d?humidité avec
beaucoup de chaleur 6c peu d’air. Fruits doux aqueux,
Troifième combinaifon d’humidité avec beaucoup de chaleur
ôc beaucoup d’air. Fruits doux onélueux , pinguedo.
Dans les théories des anciens, c’eft rarement la théorie
même qui eft précieufe , ce font les faits fut lefquels elle
eft fondêë; 6c en général leurs erreurs ont toujours pour
bafe une. vérité très bien bbfervée, 6c très-mal expliquée.
Ici Aëtius fait entre les fruits une diftinûkm très jufte en
elle-même , en féparant parmi les fruits d ete , les fruits
acides 8c aqueux~ des fruits doux 6c aqueux, 6c de ceux
dont, le mucilage , plus épais , plus vifqueux, ordinairement
très-fucré , lui paroit être dû au développement de
l'huile, ou au moins , ce qu’on ne peut contefter, des
principes qui entrent dans la compofition des huiles.
Il obferve que les fruits acides mûriffent les premiers, &
que les autres ne mûriffent que quand les chaleurs ont
duré quelque-temps ; il en conclut; que les combinaifons de
la chaleur avec l'eau 8c l'air entrent davantage dans . la.
formation ou là: maturation des derniers. Or que la chaleur
entre comme principe dans, la formation des fubftances
végétales-& animales, c’eft ufte opinion que ne défavoue-
roient pas nos chimiftes modernes. On voit donc dans cette
diftin&ion d’Aëtius entre les fruits , trois claffes qu'il nous
eft impoffible de ne pas admettre, & dont, i°. les cerifes,
domine j les autres moins aqueux , dans lefquels domine
ce qu’il appelle l ’huile, pinguedo (49). M,
Lorry, fans infifter fur cettè diffinètion, qui cependant
eft jufte , aux expreflions près, puiique l ’on ne
peut pas confondre les fruits doux, aqueux , & fon-
dans, avec les fruits pulpeux , on&ueux , & fucrés,
s’attache feulement aux fruits doux en général ,
& dit :
« II eft donc dans ces fruits un temps où ils
» s’approchent davantage de la nature des animaux
» pour lefqjjels ils font faits , & ce temps eft
» celui de leur douceur. Cette qualité prouve 1 ana-
» logie qu’ils ont avec nos humeurs, comme le
» remarque Aëîius {y. la note 46 ) j car, d it - il,
» tous les alimens ont, dans leur nature, une
» convenance, & dans toute leur fubftance , une
» affinité avec les corps auxquels ils fervent de
» nourriture. Omnia enim alimenta iis quoe alun-
» tur naturâ convenientia & totâ fubjlantia
» familiaria exifiunt. La folubilité qui les rend
2°. les pêches, 3 “. les abricots, ou la famille des pruniers,
nous préfentént les principaux individus.
Enfuite Aëtius, en écabliffant comme un principe général,
que la chaleur eft la caufe de toute maturation , dif*
tingue deux efpèces de chaleur, l’une externe, communiquée
par le foleil ; l'autre interne, donnée par la nature à chaque
individu, toutes les deux concourant au travail né-
ceffaite à la. perfection du fruit. ( Cceteràm calore maturi
fiunt otnnes, \ui duplex naturâ. e x if iit , alter proprius &
fingulis â naturâ infitus, alter forinficus & h. foie aleatus. J
Il paroît que c’eft la chaieur interne qu’il attribue aux combinaifons
aeriennes, 8c nous avons déjà, fait remarquer
quelle part les anciens donnoient à l’air dans la production
de la chaleur interne. Les modernes lui ont rendu
cette prérogative, au moins pour les animaux.
Enfin Aëtius, regardant la douceur comme un effet de
la maturation des fruits par le moyen de la chaleur 6c de
fes combinaifons, déclare que tout ce qui eft doux eft
chaud*, mais, que cette chaleur des corps doux n’eft pas fu-
périeure à celle qui eft propre à nos organes ( omne dulce
calidum e j l , & non immodicè fuperexcellit caliditatem 'quet
in nobis ejl) ; ce qui fait qu’ils impriment fur la langue un
fentiment agréable ; d'où il déduit que les fubftances douces
font alimenceufes : ex dulcibus nutrimur, avoir dit Hippocrate.
Ainfi, l’on voit que dans leurs théories les plus vagues, les
anciens avoient toujours pour bafe 6c pour but l’obfervacion
ou la démonftration d’une vérité, qu'ils vovoient avec certitude,
ôc qu’ils expliqûoienc autant que leurs lumières le
leur permettoient. Ce n’eft donc pas toujours une fpécu-
lation oifivé & inutile que l’étude dè ce qu’ont dit les anciens
, 6c même de leurs théories ; nos fucceffeurs en diront
autant des nôtres.
( 49 ) Il paroît que par l’huile Ou la graiffe, pinguedo,
Aëtius entend l’onâuôfité du mucilage fucré & épais de
certains fruits, comme des abricots, des prunes, 8cc. Le
léger aromate qui accompagne la plupart de ces fruits, 8c
que M. Lorry regarde , d’après les anciens 8c d’après Hoffmann
, comme uni à une huile tenue , peut être auflï compris
dans, ce. mot d’ Aëtius.- _ ,
Jè prends ici les expierions d’Aëtius dans la traduction
latine de l’édition des' Etiennes ( Medecinoe principes.
citée par M. Lorry , la recherche de l’original grec , 8c les
difcuflïons auxquelles elle donneroit lieu, exigeroient trop
de temps pour que je puiffe m’y livrer ici.