
n’y font pas extrêmement multipliés, les fièvres
putrides y font graves les fluxions de poitrine
y deviennent plus longues, & plus difficiles à
guérir 5 enfin on y voit naître ces fièvres putrides
caraétérifées par l ’abatement du genre nerveux
, auxquelles on a donné le nom de fièvres
»alignes d hôpital. Ces fièvres attaquent fur-tout
le s vagabonds qui fe réfugient dans les hôpitaux
par parefFe, & qui abforbent y avec des alimens
qu’ils prennent outre mefure, la contagion qui
réfide dans Y air. Au contraire on a obfervé dans
les armées que les foldats malades , obligés, par
la néceifité des circonftançes, à vivre fous des tentes
pu dans des chariots ambulans & mal couverts y
gùériffoient beaucoup plutôt & plus finement que
ceux qui reftoient dans rhôpital. Les divetfes qualités
de Yair corrompu ont des influences différentes.
L ’effet d’un air putride eft de faite naître
des complications caraétérifées par la fo if, la fé-
chereffe, le délire, l’affoupiffement, & quelquefois
de produire des épiphénomènes inexplicables. On
©blerva, i l y a quelques années , a l ’hôtel - dieu
de Paris , que plufieurs des hommes attaqués de la
petite vérole perdoient la vue, quelque précaution
que l ’on prît pour prévenir cet accident, & on
ne put l ’attribuer qu’à la pofition. très-infa-*
lubre de la falle où ils étoient placés. U air humide
& trop fro-id s’oppofe à la coétion , fait
naître des diarrhées, des dyflenteries des bouffi-
fores ,* & donne un mauvais cataélère aux abcès
critiques ou chroniques j. enfin de toutes les difpo-
fitions de Ya ir , la plus dangereufe eft l ’humidité
jointe à la chaleur : il en réfuite des fièvres malignes
pétéchiales , des inflammations intérieures
& des gangrènes. L ’Angleterre conferve dans £es
annales un exemple trop- frappant de la corruption
de l’a ir , occafionnée par la grande multitude
df hommes enta fies dans un petit efpace , pour ne
pas en parler ici. En *745,. les Anglois, affiégés
©ans le fort de Calcula, fe rendent au vice-roi
de Bengale, au nombre de 146 r &. font renfermés
dans une étroite prifbn de dix - huit pieds carrés ,
qui n’offroit d’autre ouverture que deux fenêtres
garnies de fer à l ’orient. La quantité A*air qui
pouvait pénétrer par cette ouverture , étoit incapable
de foffire.à l ’exiftence d’un auffi grand nombre
d’individus , 8c leur malheur fe trouva encore redoublé
par la chaleur du climat- Il eft impofiîble
de concevoir le défefpoir de ces malheureux. Leur
premier fenti ment fut de eonfternation-r au bout de
quelques inftans le cachot fut rempli de gémiffe-
mens, de cris , de eonteft-â fions , de eonfofion ;
bientôt la rage & la fureur furent au comble j la
langueur & ua filence plus terrible y fuceédèrent,
& le lendemain matin il ne reftok plus que 23
de ces infortunés r parmi lefquels plufieurs moururent
dé la fièvre maligne des prifons. Il n’y a
guère que dans les vaiffeaux deftinés à la traite
des Nègres, ou l ’on ait pu voir des effets appro-
chans de l ’horrible tableau que nous venons de
tracer. Cependant quoique l’altération qui a Ifeai
dans Yair des hôpitaux les plus mal-lains, foit-
encore fort éloignée de ce degré de corruption
elle n’en diffère que du moins au plus, & elle produit
des effets auffi pernicieux fur quelques individus.
Quant aux différences qui fe rencontrent i
çet égard entre les hôpitaux, elles dépendent de
plufieurs circonftances , telles que le lo c a l, la
température r la difeipline, & le genre de malades
qu’on y reçoit. Ainfi, i l y a des hôpitaux od le
feorbut règne toujours , & il y en a d’autres où
les maladies éruptives font fréquentes. Quand les
malades mangent trop, ou que les maladies des
différentes claffes font mêlées enfemble, la putridité
fe manifefte bien plus facilement. Enfin pour
donner une idée de l’influence différente de plufieurs
genres de maladies , il fuffit de remarquer que les
hôpitaux de femmes en couefees, les hôpitaux d’en-
fans' trouvés ont chacun des maladies contagieufes>
particulièresrelatives au genre de malades auxquels
ils font confàcrés.
Quels font les moyens de corriger les differentes
altérations de Voir dans les hôpitaux-1
Q u A r T H l ÈM- B - Q U E S T I O - S .
Le plus1 efficace de tous les moyens, & le plus
fimple, eft de régénérer Yair méphitique pat
l’introduélion d’une grande quantité d’air atmosphérique
r foit eflS multipliant , foit en agrandif-
îànt les ouvertures , foit en diminuant le nombre
des individus contenus dans les- falles dont on veut
renouveler l’azr. Mais ces- moyens , quoique naturels
, font fouvent impraticables , & d’autres fois
ils ont beaucoup d’incoovéniens pour les malades.
Le temps preffe cependant , & l ’art eft néceffaire
pour corriger avec promptitude & fans danger l’air
méphitique des hôpitaux. Les moyens ordinaires
auxquels on a recours dans ces circonftances ur-
_ gentes , font les. fumigations , les feux , la détonation
& le dégagement chimique d’un principe
propre à neutralifer l ’air méphitique. Les fumigations
avec- des aromatiques , telles que celles
faites avec le genièvre, foarniffent une petite
: quantité d’air éiaftique, & font- difparoître pour
un inftant l ’odeur putride ; mais ce moyen: n’eft
tout au plus que palliatif, & il-a d’ailleurs l ’in-
commodité de répandre, au moment oiV lo n en
ufe , une affez grande quantité de fumée,; & de
laiffer après- lai une odeur mixte',qui eft au moins
auffi défagréable* que . la première. L ’évaporation
du vinaigre fur un fer rouge , les afperfions de la
même liqueur ont beaucoup plus d’avantages,
parce que l ’exha-laîfon en eft prompte & inftan-
tanée. La- meilleure manière d’en ufer eft de faire
évaporer le vinaigre -dans des phioles placées fur
des réchauds qu’on met tour à tour dans les diffé-
r-ens1 endroits- de la falle. Cette évaporation corrige
Yait. méphitique , le neutraliferanime le
genre nerveux , & il n’eft pas de médecin d’hôpital
qui n’ëti connoiffe les excellens effets. On
a employé, avec fuccès, l ’explofion de la poudre
à canon dans la pefte de Marfeille : on s’en
fert habituellement dans les vaiffeaux, en faifant
fufer un peu de poudre à canon mouillée , où
en la projetant fur un boulet rouge. Il eft certain
que ce procédé fait dégager une quantité
confidérable d'air éiaftique, & que l ’odeur fuifu- (
reufè qui en réfulte, ne peut avoir qu’un effet favorable.
Enfin quand on veut avoir urt*dégagemeut
plus marqué encore, on répète l ’expérience de
JVL de Morveau, en verfant une certaine quantité
d’acide du vitriol for.du fel marin ; l ’acide marin qui
s’en fépare s’élève avec vîteffe, & dans une fi grande
divifion, qu’il femble fe combiner avec tous les
points* de l ’atmofphère.
Mais quelque efficaces que puiffent être ces
procédés entre les mains d’un médecin ou d’un
phyficien éclairé , le moyen le plus sur , lorfque
le mal eft grave , eft de recourir à un infiniment'
qui puiffe abforber-promptement l ’air méphitique
des falles , & y introduire en même temps de
Yair atmofphérique. Or de tous les moyens employés
pour cet effet, celui dont l ’aétion eft la
plus prompte , eft un-ventilateur. Celui de Haies,
dont M. Duhamel a donné la defeription en 1759,
abforbe plus de 25000 pieds cubes d’air en une
heure. M Duhamel en a fait plufieurs fois l ’épreuve
for des frégates, & a fait une expérience
encore plus publique à l ’hôtel royal des invalides
de Paris. 11 avoit brûlé de la paille dans une fa lle ,
au point qu’il étoit impoflibie de s’y voir : il fit
jouer fon ventilateur : en un quart d’heure la fumée
fut non feulement diffipée, mais l ’atmofphère
fe trouva abfolument pure.
Le ventilateur de Haies eft fort fimple & peu
coûteux , il eft compofé de deux caiffes de bois de
chêne , plates, & pofées -l’une à côté de l ’autre ;
chaque caille a quatre grandes foupapes, deux qui
permettent à l’air extérieur d’entrer , & deux autres
qui laiffent fortin l’air intérieur ; par la dif-
pofition des caiffes , les foupapes afpirantes fe
trouvent aux extrémités, & les foupapes expirantes
au milieu. Dans chacune de ces caiffes , il y a
un diaphragme mobile par une tringle ; ce diaphragme
eft attaché «au deffus des foupapes qui
laiffent entrer l ’a ir extérieur. Or il eft aifé de
Concevoir qu’en agitant cette planche mobile ou
ce diaphragme, on preffe l ’air contenu dans la cavité
des caiffes, & que cet a ir fe trouve pouffé
vers le milieu , où ces deux caiffes font réunies ;
mais dans ce milieu la réunion des deux caiffes
forme un fommier qui reçoit l ’air afpiré, & à qui
si ne refte* plus d’autre chemin à prendre que
les foupapes expirantes qui s’y rencontrent. Pour
rendre le hanffenaent & bâillement du diaphragme
faciles , on place un arbre au milieu des deux
fouffléts qui afpirent ainfi d’un côté & foufflent de
l ’autre par un feul- mouvement.
Le fleur XPeulerffe, ingénieur mécanicien de
la marine du ro i, vient de préfenter une machine
plus compofée , plus délkate , mais auffi plus
efficace que celle de Haies : elle a quatre pieds
de hauteur & quatre de longueur , for deux pieds
& demi de large. p r
Elle préfentè extérieurement une carcaffe ou
affemblage en menuiferie, dans la quelle eft renfermé
un double fouffiet perpendiculaire qui occupe
tout l ’intérieur de la caiffe , & qui eft .compofé*
de trois planches, dont deux mobiles, c’eft-à-dire,
l ’une pour afpirer & l ’autre" pour fouler ; la troi-
fième , qui eft à demeure, reçoit Yair par les
quatre foupapes qui ont une communication avec
les autres foupapes de la table intérieure , le s quelles
fervent à afpirer Y a ir des endroits quelconques
, & q u i, par le mouvement de la bafi-
cu le , tranfmettent Yair afpiré dans la partie Supérieure
, qui fert pour le foulant, & vomit par
les trois tuyaux attachés à l ’entour, uniformément
au milieu de l ’extérieur de la caiffe , & fe dirige
à volonté , & foivant le befoin du fervice. Les
mêmes trois tuyaux foulans pour le bon ou mauvais
a i r , font extérieurement armés chacun d’un
bouton de fer attaché à une planche propre à
rompre la diftribution de Y a ir , ce que l ’auteur
juge abfolument néceffaire pour accélérer ou diminuer
à fon gré la rapidité de Yair. Les fix
tuyaux afpirans font également adaptés au bas de
la caifle , & pe uvent, en fe dirigeant à volonté,
faifir Yair dans les différentes hauteurs & longueurs
, à trois ou quatre cents pieds cubes de
diftance ou de circonférence, de l ’endroit où la
machine -fe trouve établie.
Ce ventilateur place & déplace dix-huit pieds
cubes d’air à chaque coup de bafcule, qu’une feule
perfonne peut mettre en aôlion. Or une feule
perfonne peut donner 32’ coups de bafcule par
minute, ce qui forme 1910 coups-par heure. L ’auteur
vient d’en faire l ’expérience dans une des
| falles de l ’hôtel-dieu de Paris, où. il a établi fa
j machine.
Il eft en co re d’autres machines propres à renouveler
& à p erfection n er l ’a i r , mais qui, comme
plus lentes', font plus propres à prévenir la corruption
de l ’atmofphêfe , qu’à diflïper fubitement
celle qui exifte. Nous en parlerons tout à l’heure.
Quant aux différentes complications méphitiques
qui peuvent réfulter delà chaleur & de l ’humidité,
il eft aifé’ d’y remédier, en obfervant toutefois
de ne pouffer la ch aleu r que lo rfq u e la fource de
putridité eft épuifée ; & dans le cas où il eft
queftion de rafraîchir , d’éviter ce* qui ponrroit
occasionner une humidité générale ou un froid
trop fobit. Les modifications à employer alors
rentrent dans les principes généraux de la médecine
; mais comme il eft plus aifé de prévenir
les accidens qui proviennent d’une grande altération
de l ’a/>, que de les détruire, cette méthode