
infufer les feuilles de laurier-cerife dans quelques
fauces 8c dans le lait»
Emulfives inodores.
Un caractère auffi fenfible que celui d'un aromate
dont perfonne n’ignore la prélence dans les amandes
même les plus douces de cette claffe, diftingue
fuffifamment les emulfives amygdalées , de toutes
les autres emulfives dont nous ufons ordinairement,
& dont aucune ne préfente les mêmes qualités.
Ainfi l ’on conçoit la raifon de la diftinttion admife
dans les écoles, entre ces amandes & les femences
çucurbitacé.es , appelées femences froides. Les femences
des cucurbitacées font abfolumèm inodores ;
& quoique M, Cullen ne veuille pas reconnoître
de différence entre toutes ces émulfives, la différence
du goût & celle de l ’odeur, quand on n’en
auroit pas d’ailleurs l ’expérience , autorife fuifi-
famment a admettre une différence dans les propriétés.
Peu de perfonnes nieront que le lait
d’amandes foit en général moins à charge à l’eftomac
que celui des femences froides, quoiqu’il y ait
des perfonnes auxquelles celles-çi paroifient mieux
convenir.
Au nombre des graines émulfives dont nous
nous nourriffons, il faut encore mettre les avelines
$ fur-tout les noix. Elles ont chacune un principe
odorant qui leur eft propre, & ce principe eft fi
adhérent à leur huile, qu’on ne peut confondre
ces huiles entre elles , ni pour l ’odeur, ni pour la
couleur. Les noix en particulier contiennent une
grande quantité d’huile, excepté quand elles font
jeunes & en cerneaux.
Les différentes proportions de l ’huile & de la
fécule font donc encore une fource de différence
entre les graines émulfives ; & cette différence ne
peut pas ne pas influer beaucoup fur la digeftion.
JLmulfives dont Y huile eft concrète. Amande
du cacao,
Un autre genre de graine que l ’on ne peut pas
féparer des émulfives, eft la femence ou l’amande du
cacao Theobroma cacao l. ; amande dont l ’huile eft
concrète & abondante, dont la fécule eft imprégnée
d’une matière colorante brune qui lui donne un goût
amer qui n’ eft pas exempt d’un léger aromate :
la fubftance de cette graine eft fi bien une fécule,
que le chocolat qui en eft compofé acquiert par
r ébullition, même fans une évaporation confidé-
rable , une grande épaiffeur , & que fi on le laiffe
ainfi bouillir il fe gonfle prodigieufement & Cç
répand au delà des bords du vafe. Le chocolat qu’on
fait d’abord & qu’on laiffe repofer, acquiert dans
ce repos une plus grande épaiffeur, fans que l ’évaporation
de l’eau qui le diflout, ait été fenfible ;
& fi on vient alors à le chauffer de nouveau, il
f ’éj?aiffii beaucoup plus qu’il n’auroit. fait dans unç
première ébullition ; ce qui démontre "que la fubfi*
tance de l ’amande s’eft pénétrée infenhblement du
liquide, dans lequel elle eft fufpendue, qu’elle y
eft devenue plus foluble, & qu’en même temps
elle s’eft véritablement gonflée, comme le font
toutes les fécules, par la macération & l ’ébullition.
Ainfi l’amande du cacao' eft vraiment nourriffante ;
fa fubftance même feroit affez ftomachique &
peferoit peu fur les eftomacs foibles, fi l ’abondance
du beurre ou de l ’huile concrète qui y éft
contenue ; ne produifoit cet effet $ mais quand on
dépouille le chocolat de cette fubftance après l ’avoir
laiffé refroidir, il perd cet inconvénient ; il le perd
auffi, quand, dans fa préparation , l ’amande a été
g r illé e , au point qu’une grande partie du beurre
a été confommée. Voyez i’aticle chocolat.
Tout, ce qui vient d’être dit fur les femences
nutritives, démontre, je crois, combien il eft néceÇ-
faire, quand on confîdère la nature des alimens,
de ne point s’arrêter aux feules parties fixes, qui,
à la vérité , conftituent prefque feules la partie
nutritive, mais qui peuvent avoir une. parfaite
identité dans des alimens dont les effets font très-
differens, comme nous venofisde le voir. Je n’ofe-
rois pas même affiner que de moindres différences
de faveur & d’odeur duffent être indifférentes pour
un obfervateur. Certainement rien ne reffembie à
du riz comme du riz ; cependant tous ceux qui
ont mangé du riz du levant, le diffinguent fort
pour le goût, du riz de Piémont & du riz de
Provence. Rien ne reffembie à la pomme de terre
comme la pomme de terre; cependant en France,
celles de Lorraine ont une fupériorité marquée
fur toutes les autres. On a obfervé que leur ufage
étoit fingulièrement utile aux troupes qui ont leur
quartier dans cette province , & particulièrement à
Lunéville, & qu’i l contribuoit à rétablir les foldats
dont la fanté etoit altérée. Ils les mangent avec
beaucoup plus de plaifîr que dans tout autre
endroit.
Toutes les fubftances farineufes nutritives dont
j’ai parlé jufqu’i c i , font incapables de faire du
pain, c’eft-à-dire , de former une pâte qui lève en
fermentant. Il me refte à parler de celles dans
lefquelles la fécule nutritive eft unie à un’ mucilage
vifqueux , & de celles dans lefquelles cette
même fubftance eft unie à une matière glutineufe.
6°. D e s alimens farineuse qà la féçule ejl unie
à un mucilage vifqueux,
On connoît l ’exiftence d’un mucilage vifqueux
dans une fubftance farineufe , lorfque cette fubftance
réduite en farine & humeétée .avec de l ’eau, fe
forme en une pâte plus ou moins lié e , & fufcep-
tible de s’étendre fans fe rompre ; lorfqu’en même
temps l’analyfe de cette fubftance ne donne aucun
figne de matière glutineufe, quoiqüe la liai fou
de la pâte qui en r é fu l t e lu i donne une reflçrav*
blance apparente avec la pâte faite avec de la
farine de froment; lorfque la fubftance culte dans
l ’eau & pénétrée d’humidité a quelque chofe de
gluant &T d’épais ; enfin lorfque l’eau dans laquelle
on aura cuit cette fubftance devient gluante 8c fe
réduit en un mucilage filant & collant, quand on
l ’épaiffit par l’évaporation. Tous les mucilages
n’ont pas le même degré de vifcofité ; il y en a
qui font très-peu vifqueux, Comme nous l ’avons
obfervé dans le mucilage des graines émulfives:
ce n’eftpas de Ce mucilage-là dont il eft ici queftion.
La fève de marais, la graine du feigle & la
pomme de terre , font les fubftances farineufes
connues qq|j contiennent le plus évidemment ce
mucilage vifqueux. Onpourroity joindre la graine
de lin ; mais la graine de lin ne nous fert pas
d’aliment, & la graine de lin eft une fubftance
émulfive.
La fève de marais , fa b d ; vicia faba L . , & la
févrole , qui eft une petite efpêce de fève de marais,
contiennent, comme je l’ai dit, un mucilage v ifqueux.
La coûion feule les réduit en bouillie ;
cette bouillie fe prend en maffe, elle a beaucoup
plus d’adhérence que.n’en prend la farine des
autres légumineufes , & quand elle eft épaiflie,
elle fait corps' comme un mortier. La fécule ainfi
que le mucilage qui la lie , font tous deux très-
ncurriffans, & l ’expérience a prouvé que non feulement
cette farine fie combinoit très-bien avec la
farine de froment pour faire du pain, mais même
que feule elle fermentoit & levoit affez bien, ou
au moins beaucoup mieux que toutes les légumineufes,
& faifoît un pain préférable à celui de
beaucoup de graines céréales^ comme le r iz ,
l ’orge, le maïs , v. note 5 5, &c. J’ai déjà parlé de la
fubftance fucrée très-abondante dans laT jeune fève ,
ainfi que de fa partie colorante 8c de celle de
fon enveloppe.
Le feigle, fecale ceréale , eft une des graines
dont les gens de la campagne font le plus d’ufage
aux environs de Paris. Prefque tous mangent ou
du pain de feigle , ou du pain qui en eft plus ou
moins mêlé. La farine de feigle fe pétrit bien,
elle forme une pâte liée qui fermente & qui lève ;
le pain qu’on en fait a, une couleur brune ou bife,
mais égale ; les yeux qui font répandus dans toute la
maffe levée aprèslacuiffon, font petits, mais également
diitribués par-tout ; la croûte en eft bien unie, point
crevalfée; le goût eft agréable,& femblable à celui
de certaines parties extraérives végétales, fans être
amer. Ce qui me -feroit croire que ce goût eft
vraiment dû à une partie ëxtraérive qui donne a
cette farine la couleur qu’bn lui connoît, c’eft
que ce pain a une des propriétés des parties ex-
traérives, qui eft d’attirer lin peu l ’humidité de
l ’air; ce qui fait qu’il ne fe sèche pas aifément,
même lorfqu’il éft coupé ; car qband il eft entier
l ’épaiffeur de fa croûte peut s’oppofer à la diffî-
pation de fon humidité : c’eft auffi pour la même
laifon qu’il a dans la bouche une faveur fraîche
que n’a pas le pain de froment. La farine de ce
'grain ne paroît pas contenir de matière glutineufe,
ou fi elle en contient, elle en a fort peu. Mais
on ne peut pas douter qu’elle ne contienne un
^mucilage vifqueux uni à fa fécule, & qui donne
de la liaifon à la pâte & contribue à la- faire
lever.
La pomme de terre, racine du folanum tu=»
berofum, contient une très-grande quantité du
mucilage gluant & vifqueux dont nous parlons*
Quand elle eft éctafée en entier, en farte que la
fécule refte mêlée avec ce mucilage , elle eft fuf-
ceptible de former une pâte, qui, maniée à la
manière de la pâte du froment, eft fingulièrement
liée. Il paroît même qu’il eft necefiaire pouf
l ’amener au point nécefiaire pour faire le pain,
d’ajouter à la pâte de pomme de terre une nouvelle
portion de fécule. Cette pâte ainfi pétrie
comme l’enfeigne M. Parmentier ( v. fon ouvrage
des végétaux nourri fa n s ), fermente & lève, 8c
fait un pain q u i, fi l ’ on a employé tous les foins
néceffaires', eft rempli d’yeux très-également, eft
fort léger ,& très-femblable, pour les apparences
extérieures, au pain même de froment. On en a
préparé de très-bon à l ’école de boulangerie à
Paris. La fécule feule ne lève pas, comme nous
l ’avons obfervé; c’eft donc au mélange de ce mucilage
vifqueux qu eft due la promiété de lever t
propriété fans laquelle on n’a point de pain.
' Ainfi, la confection du pain ti%nt évidemment
à ce que tous les points de la pâte entrant à la
fois en fermentation, l ’air s’en dégage par-tout ,
8c ne tro'uvant pas d’iffue , parce que la continuité
de la pâte s’oppofe à fa fortie , forme une infinité
de bulles dont la pâte eft d’autant plus Criblée,
qu’elle a fermenté plus uniformément; par-là
elle fe divife fingulièrement & devient très légère*
L ’aétion du feu augmente1 encore le volume de
ces bulles, fait bourfonffler le pain, & dûreiflant
fa furface avant que ces bulles aient pu l’entr’ouvrir >
à caufe de fa ténacité, forme la croûte , qui devient
un nouvel obftacle à la fortie des bulles. Cette
croûte eft d’autant plus unie & plus continue, que
la pâte eft plus liante, & ce liant c’eft le mucilage
vifqueux qui le procure dans les fubftances . dont
nous venons de parler ; car toutes les farines qui
ne peuvent pas fe lier & fe pétrir ainfi, ne forment
point une croûte continue, & ne contiennent point
de bulles uniformément répandues dans toute la maffe*
Leur pain eft fans union , friable & compaél, 8c
la croûte en eft gercée. Mais ce mucilage vifqueux
n’eft pas la feule fubftance qui donne à la pâte
farineufe toutes »ces- propriétés. La fubftance glutineufe
produit cet effet avec bien plus d’avantage*
7°. De s alimens farineux où la fécule nutritive
eft unie avec la matière glutineufe, ou végéta»
animale.
l*e froment, tritUwn, eft de tous les aliment