
m a l, tous les remèdes de la Pharmacie ; i l en eft
au contraire qui n'ont qu’un procédé qu’ils appliquent
à tout ; & ces excès font des abus.
I l faut ofer foutenir à quelques perfonnes qu’elles
fe portent bien, & qu’il ferait abfurde & dangereux
de les, médicamenter: dans, certains cas, la
caufe & le liège du mal font li cachés, que l ’un
& l’autre fe dérobent aux regards les plus péné-
trans ; & alors on doit en convenir : on doit prononcer
ces mots, que l ’ignorance & la préfomption,
fe font interdits pour toujours; ces mots qui révoltent
le peuple, parce, qu’il n’eft pas aflez accoutumé à
les entendre , je Vignore, je n’en fais rien. Tous
les médecins ont-ils ce courage? En manquer, n’eft-
ce pas tromper ceux dont on a la confiance? & cette
trompeiie-tfeft-eile pas un abus ?
La maladie & la mort offrent de grandes leçons
dans les hôpitaux. En profite-t-on ? écrit-on l’histoire
des maux qui y frappent tant de vidtimës ?
y ouvre-t-on les corps de ceux qui y périffent ,
pour découvrir le foyer des diverfes affeftions auxquelles
ils ont fuccombé ? y rédige-t-on un expofé
des diverfes conftitutions médicales? y recueille-
t-on les faits nombreux & intéreffans qui s’y présentent
? y enfeigne-t-on l ’art d’obferver 8c de traiter
les maladies ? y a-t-on établi des Chaires de
Médecine clinique ? & n’eft - ce pas de nos jours
que l’on a vu des mains habiles, occupées, pour la
première fois , à éloigner les nombreux abus qui
S’étoient introduits dans ces ailles ?
On ne fait quelquefois, dans les grandes villes,
en quel lieu les écoles de Médecine feroient le
mieux fituées , & où il feroit le plus à propos
de les conftruire. Qu’on en jette les fondemens au
fein même des hôpitaux : l ’exemple feroit auprès
du précepte ; la théorie , furveillée par la pratique,
y deviendroit plus réfervée , & îe profeffeur,
forcé de juftifier fes principes par' l ’expérience, y
donneroit plus de foin à fes procédés, plus de
folidité à la doctrine • il travailleroit plus sûrement
aux progrès de fon art, 8c i l y auroit moins
d’abus.
. Mais le public, les grands, les riches, comment
nous jugent-ils ? fur quelle bafe établiffent-ils leur
confiance ? Et n’eft-il pas permis de dire, en voyant
la lifte de ceux dont la renommée publie les noms ,
que ce n’eft pas au feul mérite que font dues fes
faveurs , dont plufîeurs font des abus ?
Etre étranger, inconnu, empirique, font des
titres qui furprennent l’attention , & qui mènent, à
la céléb rité. On pardonne aux nouveaux venus l ’impudence
, l ’ignorance, la fourberie ; on fe livre
avec eux aux illufions de la philofophie corpuf-
culaire & magnétique , aux extravagances de la
cabale, de la magie même : pourvu qu’ils foient
extraordinaires, on court à eux, on les écoute ,
on les croit , on s’enrôle publiquement parmi leurs
difciples, on fe laiffe attacher au cou le grelot de
la folie , on les paye, on les honore même jufqu’à
ce qu’ils foient chaffés ou punis ; & encore crie*«
t-on a l ’injuftiçe : y a-t-il de plus énormes abus?
Mais la Médecine eft un art conje&ural, difent
les fauteurs, de ces étranges rêveries. S’il en eft
ainfi, il faut donc choifîr pour médecin celui qui
réunit une grande inftruCtion a un bón ëfprit , parce
qu’il eft à préi'umer qu’il conjecturera mieux qu’un
autre.
La Médecine n’exifte pas , difent les autres. S’ils
en font perfuadés, qu’ils s’abandonnent donc à la
feule nature : car, dans tous les cas , il faut renoncer
au charlatanifme. Mais les perfonnes inftruites
peuvent-elles ignorer maintenant que la fcience
du véritable médecin .eft fondée fur l ’expérience?
qu’à de grandes, richefles acquifes dès la plus haute
antiquité , elle joint une ample moiffon de faits
recueillis par les modernes ; que de nos jours elle
rejette les fyftêmes ; qu’elle a , comme la Phyfî-
que expérimentale , fes principes , fa méthode, fes
vérités ; que, comme e lle , la Médecine ne fe permet
des conjectures qu’avec réferve, & feulement
pour lier les rapports de certains faits qu’elle a
befoin de rapprocher ; qu’elle commence à faire
une application heureufe des autres fciences phyfi-
ques à fes propres oofervations ; que fes procédés
deviennent à la fois plus énergiques 8c plus Amples
; que fa langue , c’eft-à-dire fa nomenclature,
s’eft beaucoup perfectionnée dans ces derniers temps ;
& qu’en un mot\, elle^eft aflez sure de fes progrès,
pour ofer dénoncer au public les abus qui les retardent
, & pour ne pas craindre de dire a tons des
vérités hardies, mais utiles, & qu’il eft important de
révéler.
Dans notre carrière , plus que dans toute autre ,
l ’homme qui n’a que des vues éphémères, 8c qui
ne travaille que pour l’inftant ou il v i t , court de
grands rifques en s’expofanî à l ’ingratitude & à
l ’injuftice des partis. Celui que de grands motifs
animent, que de grands obftacles n’arrêtent point,
qui a pour la gloire un amour pür , & qui fait
tout facrifier pour elle , peut feul fixer les fuffrages
de fes contemporains, en fe rendant digne de ceux
de la poftérité. ( V . D . )
A bus. Hygiène.
Partie III. Règles de l’Hygiène.
Divif. II. Hygiène privée.
SeCt. I. Principes généraux.
Ordre I. Manière d'ufer des chofes non na
turelles en.général.
On entend communément par abus, l ’ufage exceflïf
ou mal ordonné des chofes deftinées à nos befoins ou
ànosplaifirs.
Quand Y abus confifte dans un ufage exceflïf, on
le nomme ordinairement excès , & non abus (yoye\
Ex c è s ) ; cependant quand on dit, faire abus des
liqueurs fpiritueufes , on comprend dans cette ex-
preflïon un ufage exceflïf. On fait de même abuj
Je s aflaifonnemens, en en faifant üti trop grand j
& un trop fréquent ufage. Il en eft de même de
prefque toutes les choies faites pour le plaifîr.
Mais la vraie & exaCte lignification du mot abus
eft un mauvais ufage. C’eft dans ce fens que je l’ai
pris dans le difcours préliminaire fur l ’Hygiène.
Tout mauvais' ufage ou tout abus doit tôt ou ,
tard être préjudiciable à la fanté ; il l ’eft plutôt,
fi le corps eft foible 8c fenfible; plus tard, s’il
eft robufte & peu irritable. Il eft cependant des
abus auxquels i l femble que le corps fe faffe fi
bien, qu’après une longue habitude il ne puiffe
plus s’en paffer. C ’eft lorfque , dans Y abus même ,
i l y a une forte de régularité ; c’eft par la régularité
que fe contractent les habitudes : mais li à
l ’abus fe joint l ’irrégularité , bientôt il incommode
le plus robufte, & tôt ou tard il lui devient funefte ;
l ’excès , joint à Y abus & au défbrdre, produira
encore des maux plus grands. ( Voye\ Usage ,
Habitude , Désordre , E x c è s , &c. ). Je renvoie
à l ’article de chacune des chofes non naturelles, les
détails fur les effets de Y abus qu’on en peut faire.
( M. H a l l é , y
A bus de Soi-même. Hygiène.
Part. III. Règles de l ’Hygiène.
Divif. II. Hygiène*privée.
SeCt. II. Régime- général.
Ordre IV & VI. ■Ufage des chofes non naturelles
de la 4* & de la 6e clajfe. Ufage des organes
fexuels.
On entend par abus de foi-même l’ufage défor-
donni que fait un homme ou une femme des parties
de la génération, de mânière à faire naître
dans l ’individu ifolé les plaifirs que la nature n’accorde
qu’à l ’union bien ordonnée de deux fexes.
On a donné encore à cet abus le nom de maf-
turbation ou manuflupration> 8c mal à propos ceux
d’ Onanifme 8c de pollution ; je dis mal à propos ,
parce que le crime que l’Écriture reproche à Onan
n’eft-point Y abus de foi - même , & «pie le mot
de pollution appartient également à l ’excrétion,
foit volontaire, foit involontaire, de la femence ,
fans coït vénérien.
U abus de foi-même eft caufé & entretenu, i° . par
le développement des organes de la génération ;
développement qui porte le jeune homme à fatif-
faire lui-même un befoin dont il ne connoît ni le
but ni la nature ; i° . par l ’imagination, ou échauffée
par quelque objet aimé , ou occupée d’idées laf-
cives; j 0. par un libertinage volontaire ; 40. par
l ’habitude une fois contractée de fe livrer à ce
. plaifir, qui forme alors un attrait prefque irréfifti-
ble , 8c qui ne peut, être combattu que par la vigilante
la plus exaCte.
Une courte obfervation des phénomènes qui accompagnent
l ’aCte vénérien , fuffira pour donner
i une idéé des maux que peut faire naître Y abus
fréquent de foi-même , qui a un danger de plus
que Yabtis des femmes 5 c’eft qu’il peut être commis
à toutes les heures 8c à tous les moraens ;
que les jouiffances appellent les défirs ; que les
défirs font immédiatement fuivis des jouiffances , 8c
que fouvent il peut avoir lie u , avant même que
la nature ait eu le temps d’y difpofer fuffifammenfc
les organes."
L ’aile vénérien eft accompagné, chez les hommes
comme chez les femmes , d’un fentiment d’irritation
, fuivi d’un fpafme très-marqué, accompagné
d’une perte de connoiflance prefque totale &
momentanée , qui l ’a fait comparer à un léger accès
d’épiiepfie. Chez les hommes, ce fpafme amène
l’excrétion violente de l ’humeur féminale ; chez
les femmes , il n’eft fuivi que de l’exprefllon d’une
mucofité peu abondante. Sans nous arrêter davantage
fur cet objet, il eft aifé de concevoir que de
Y abus de foi-même , ainfi que deYabus des femmes
, mais plus aifément encore , doivent naître
deux fortes de maux, les uns dépendans de l’agacement
nerveux , les autres de l ’épuifement caufe
par une évacuation trop répétée : de là une fuite
de maladies, dont je ne traite pas dans cet article ,
dans lequel je m’attache uniquement àconfidérerla
chofe fous le point de vue de l ’Hygiène.
Je fuppofe donc l ’homme fain , qu’il faut avertit
des dangers d’un abus, auquel il eft porté par un
inftinit dont i l eft à craindre qu’il ne foit pas le
maître; il faut, ou l ’empêcher de s’y laiffer aller ,
ou, s’il a eu ce malheur, l’empêcher d’en prendre
l ’habitude. Je le répète; je fuppofe ici qu’il n’a
point encore befoin de remèdes : il ne lui faut qu’ua
régime , une conduite , & rien de plus.
I l eft évident qu’un régime doux , l ’ufage des
viandes tirées des jeunes animaux, i’ufage des herbes
potagères , l’abftinence des alimens âcres, quelquefois
même du vin, l ’exercice du corps , la dif-
fipation de l ’efprit , font les moyens vraiment
indiqués pour prévenir Y abus dont nous parlons ,
& fes funeftes fuites. Les lits trop mous portent
de même à cet excès; 8c il eft, à beaucoup d’égards ,
utile aux jeunes gens d’être couchés un peu durement.
L ’éloignement des occafions qui font naître
les défirs, eft encore abfolument néceffaire , & per-
fonne ne doute de l ’utilité de toutes ces précautions.
Mais eft-il avantageux de laiffer les jeunes gens,
fur-tout les hommes , dans une ignorance entière
fur cet article ? N’eft-il pas à craindre que, n’étant
point prévenus fur les fenfations qu’ils doivent éprouver,
ils ne s’y livrent fans réferve, comme fans crainte
& fans fcrupule ? Beaucoup d’inftituteurs & de
pères fe font au contraire applaudis d’avoir faifi
le moment, & d’avoir éclairé leurs enfans & leurs
pupilles fur les dangers qui les menaçoient. Mais
il faut encore prendre garde à quels efprits on a
affaire ; 8c s’il fe rencontroit de ces caractères mal *
I heureux pour lefquels la défènfe même devient
m