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qu’ ils- font éprouver à ces dernières: dans les premières
voies.
3°. Jufqu’â quel point les fluides contenus dans
les fécondés voies , le fang , là lymphe , &c., peuvent
être changés par la réaction chimique des
principes médicamenteux.
4°. Enfin, s’i l eft poflible , d’après l ’eftimation
exaéte de ces effets , d’admettre des divifions des
médicamensfondées fur leur nature. & leurs propriétés
chimiques*
I l ne faut jamais perdre de vue , dans toutes
ees conûdérations , que la fenfibijité , l ’irritabilité-,
la vie , en un mot, qui anime les organes des animaux
modifie Y action chimique des médicamens,
qui eft toujours foumife aux forces vitales , &
qui diffère effentiellement de celle qui a lieu
dans nos laboratoires , & à l ’aide de nos inf-
trumens.
§. Ier. D e /’aéfion chimique des médicamens
appliqués à Vextérieur»
S’il exifte un moyen de reconnoître avec exactitude
l’effet dés forçes chimiques des corps mé-'
jdicamenteux, & de prouver que leurs vertus font
dues en partie à Y action de ces forces , c’eft fans
doute dans les phénomènes opérés par les topiques,
qu’il faut le chercher. Ces phénomènes, fournis
à i’obfervation qui les apprécie facilement,
font très-marqués dans Y action des cauftiques, qui ,■
en réveillant la fenfibilité & en excitant l ’inflammation
V corrodent l’organe cutané, en diffol-
yânt le tiffu. Les acides & les alkalis purs concentrés
déforganifeiït la peau , en réparant fes principes
conftituans & en fe combinant avec eux. Si
Y action de ces médicamens eft la plus forte & la
plus énergique que Fon connoiffe , cette force,
.cette énergie ne peuvent être dues qu’à la grande
tendance que ees roenftrues ont pour fe combiner,
ou à ce que les chimiftes appellent affinité de
compofition. Cdmme il eft démontré aujourd’hui
que cette tendance à la combinaifon eft en raifbn
direéte de la faveur, ou plutôt que ces deux propriétés
font abfolumêrt la même, tout ce que j’ai
expofé fur Y action des médicamens, relative à
leur faveur , dépend en grande partie de leurs«pro-
priétés chimiques. Mais pour revenir à Y action des
cauftiques , on conçoit que l ’irritation , la chale
u r , l ’inflammation, & la douleur qu’ils excitent ,
font produites par leur combinaifon, avec les principes
de la peau , & par le déchirement & la dé-
forganifation qui en eft la faite ; aufll, lorfique la
pierre à cautere , la pierre infernale , le beurre
d’antimoine , & tout les autres cauftiques ont agi
fur la peau , l’efearre qui en réfulte contient leur
combinaifon chimique , qui eft de nature faiine
neutre , & dont la faveur & les propriétés chimi-;
ques font tellement affoiblies , qu’il? ne peuvent
plus reffervir aux mêmes ufagçs, $ç que fi l ’on
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veut exciter une nouvelle, corrofion, ou une nou-i
velle inflammation , on eft obligé d’appliquer une
fécondé fois le même caüftique.
Quoiqu’il n’y ait que cette claffe de médicamens
dont les effets chimiques foient aufli fen-
-fibles liir la peau. entière , on retrouve des phénomènes
dus à l’affinité de compofition dans un
grand nombre d’autres topiques. Toutes les fois
que l ’épiderme eft enlevé , que les humeurs coulent
à fa furface , dans les différentes éruptions
accompagnées de quelque flux féreux -, ou qu enfin
le tiffu de la peau, ramolli & dilaté, peut donner
facilement paffage à quelques portions des médicamens
fort atténués,, ou naturellement volatils,
leur application immédiate , les mettant en contact
avec,ies fluides animaux, leur permet d’agir chimiquement
& de changer .la nature de ces fluides..
C’eft ainfi que les vapeurs aqueufes élevées fans
celle des émolliens , du lait chaud , & c ., d-ifïol—
vent & étendent les humeurs épaiffies & amaffées
dans les vaiffeaux fous-cutanés, & dans le tiffu cellulaire
; c’eft ainfi que l ’air pu gas alkalin, dégagé
des embrocations dont l ’alkali volatil fluor fait la
bafe, pénétré lès pores dè la peau , paffe facilement
dans les cellules du. tiffu muqueux , & y
agit comme diffolvant des humeurs lymphatiques,
& fur-tout du Tait coagulé : Y action chimique a
encore lieu dans l ’emploi des antifeptiques externes,
qui n’eft jamais plus marqué , que lorfqu’ôn
les applique fur les fluides animaux altérés qui
baignent le tiffu cellulaire, comme Cela s’obferve
dans la gangrène & la .carie humides , les ulcères
. anciens, fçorbutiques, les aphthes , &c. : enfin, les
effets des ftyptiques puiffans, , pris dans la claffe
des, acides minéraux, dont oh eft obligé dè-Te fer-
vir quelquefois à l ’extérieur pour arrêter Técoù-r
lement immodéré d’un fàng affez diffous pôur que
fes, canaux relâchés ne puiffent' plus le retenir ,
dérivent abfolument de‘ leur affinité’chimiqué & de
leur action coagulante fur la fubftànce lymphatique
des fluides^ animaux. '•
Il paraît également Certain que les maladies &
la mort même j occafionnées par les différens virus
introduits ' dans le tiffu cellulaire placé fous l ’épiderme,
& auquel Malpighi a donné fon nom ,
ne font dues qu’au mouvement inteftin & à Une
fermentation particulière, excitée par la nature chimique
de ces différens virus. Les venins des animaux
, celui des vipères , le virus hydrophobique ,
le variolique, font de cette claffe; il en eft de
même des poifons végétaux introduits par la peau ,
& en particulier du ticunas , dont quelques peuplades
de l’Amérique imprègnent leurs flèches. Leur
aétion chimique eft tellement démontrée, que c’éft
fur le fang quelle fe porte principalement , 8ç
qu’on peut en arrêter & en détruire les effets par
des corps falins. M. l’abbé Fontana , dans fes belles
recherches fur les poifons , a découvert que la
pierre à cautère , introduite dans la bleffure , ren-
doit nulle l ’impreffion dû venin de là vipère, &
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que les acides minéraux , mêlés au ticunas, en
domptaient la nature vénéneufè. Les effais analogues,
faits dans toutes les maladies qui fe communiquent
& fe propagent par le contaét, par
l ’inoculation , pourraient avoir un très-grand degré
d’utilité, & la recherche des topiques propres à
dénaturer chaque virus , poufroit peut-être conduire
à celle des remèdes capables d’en arrêter les effets
meurtriers.
§. II. De Vaétion chimique des médicamens reçus
dans ies premières voies.
I^es premières voies , contenant toujours une plus
ou moins grande quantité de fluides , on ne peut
douter que les médicamens , qui les parcourent,
n’agiffent en partie par leurs propriétés chimiques
fur ces humeurs. Cette action a même été tellement
reconnue par les médecins , qu’ils ont donné
à des çlaffes entières de remèdes des noms qui
l ’expriment. En effet , les dénominations de dé-
layaus , de fondans , de favonneux , de diffolvans ,
d’antifeptiques , de coagulans , d’incraffans ; d’é-
paifliffans , d’abfbrbans, font manifeftemerit puiféeS
dans les propriétés chimiques des médicamens
auxquels elles font confaerées. Un léger examen
des effets de l ’affinité chimique des corps
introduits dans l ’eftomac & les inteftins, fur les
fluides qui arrofent ces vifeères , fuffira pour prouver
avec quelle énergie cette force peut altérer
ces fluides, & combien elle doit contribuer-à la
guérifbn dès maladies.
Le fuc gaftrique & le fuc intèftinal font d’une
nature lymphatique ; l ’eau J0 diffout. & les rebd
plus fluides ; les acides végétaux leur, donnent de
la confiftance ; les fpiritueux les épaiffiffent également;
les acides minéraux les coagulent. Les
médicamens aqueux, les tifànes, les bouillons légers,
ies fucs végétaux, agiffent fur ces fluides à
la manière de l ’eau ; ils les étendent & les délayent
; ils en diminuent la vifeofîté -&• la confiftance
; ils en facilitent l ’écoulement par les inteftins
, ,& l ’abforptîon par les vaiffeaux inhalans ;
ils font donc très-propres à en débarraffer les premières
voies. Les acides & les fpiritueux les altèrent
d’une manière oppofée; ils en. rapprochent &
en condenfent les molécules; ils les épaiffiffent;
ils en détruifent l ’âcreté alkaline, qui eft quelquefois
très-marquée ; & lorfque la trop grande abondance
& la fluidité trop confidérable de ces fucs
les font couler trop facilement par les inteftins ,
& entretiennent des flux plus ou moins nuifibles,
les acides peuvent, arrêter ces mauvais effets par
la confiftance qu’ils y produifent. C ’eft ainfi que
l’ufage des boiffons acides diminue la fluidité &
l ’abondance des évacuations féreufes & donne naif-
fance a celles que l ’on connoît généralement fous
le nom de glaires. Comme ces médicamens font
en même temps très-antifeptiques , fi le féjour trop
long & la -chaleur trop forte ont produit un
Méd e c in e . Tome I.
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commencement d’altération putride dans les fucs
gaftrique & intèftinal ; alors les acides corrigent
promptement cette dangereufe altération ; & telle
. eft la caufe des effet prompts & heureux de cette
claffe de-remèdes, dans les maladies putrides dont
le foyer a prèfque toujours fon fiége dans l ’efto-
mac & les inteftins.
\Jaction chimique des médicamens fur la hile
èft encore plus marquée que celle qu’ils exercent
fur lés fucs précédais , en raifon de l ’abondance
plus confidérable de ce fluide , & des chan-
gemens qu’i l éprouve dans les maladies. Tous les
remèdes favonneux , les fucs & les extraits des
plantes qu’on a appelées hépatiques , divifent,
atténuent • cette humeur èpàiffie , & en procurent
l ’évacuation par la véritable diffolution chimique
qu’ils en opèrent , comme on peut s’en convaincre
en mêlant le fiel condenfé’ par la chaleur avec
ces médicamens. Les expériences faites fur cette
humeur dans les laboratoires-, ne peuvent point
induire en erreur , parce qu’il eft certain qué les
fubftancès , avec lesquelles on la traite- dans les
verres , ' s’y mêlent abfolument de la même manière
dans les premières1 voies oû elles la rencontrent.
C ’eft ainfi que lés alkalis & les médicamens
alkalins en général la rendent plus fluide ,
& détruifent les empâtemens du fo ie , que fon fé-
jour & fon épaiffiffement entretiennent; c’eft ainfi
que les acides la font couler, & la détachent des
parois des inteftins qu’elle tapiffe, & auxquelles
elle adhère par fa- vilcofité. L ’aétion de c es d e r nières
fubftancès fur la bile mérite même qu’on
s’ y. arrête & qu’on l ’obferve avec plus de foin qu’on
ne l’a encore fait. Tous les chimiftes faveiit, d’après
les recherches de MM. Cadet & Van-Bochaute,
que ce fluide eft une efpêce de favon animal formé
d’une réfîne & d’alkali fixe minéral. Lorfqu’on
verfe. un acide foible fur cette humeur, elle s’é-
pàiffit & fe coagule fur le champ , mais beaucoup
moins fenfiblement que la lymphe ; il fe
précipite une! matière floconn.eufe , d’un gris verdâtre
, qui prend peu à peu , & à mefure qu’elle fe
raffemble , une Couleur verte très - brillante : ce
précipité, ramaffé fur un filtre , n’eft plus diffo-
luble dans l’eau , mais fe diffout très-bien dans
l ’efprit-de-yin ; c’eft une matière-véritablement réfine
ufe , d’une amertume confidérable. L ’acide, en
s’emparant de l ’alkali fixe minéral de la bile, dé-
compofe ce favon , & fépare la réfinè qui étoiî
diffoute dans l ’eau , par l ’intermède de ce, fel. Le
phénomène que l ’on obferve dans ce mélange a
lieu dans plufieurs maladies, & dans l ’ufage. médicinal
des acides. Si l ’on obferve-ce qui fe paffe
danç les maladies des enfans ,. on voit, que toutes
les fois qu’il fe forme de l ’açide dans leurs premières
voies, leurs évacuations prennent une couleur
verte claire , femblable à celle que prend
la bile mêlée avec ces efpèces de fels dans nos laboratoires
: ce< fait eft connu même des nourrices,
qui annoncent la préfence des aigres chez les enfans.,