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l ’impulîîon de la vie. M. Nducler ayant fuivi cette
marche dans le traitement de ce malheureux , la
région ombilicale & la poitrine commencèrent à
s’échauffer. Mais on ne s’apercevoit encore alors
d’aucune refpiration fenfible. Ce ne fut qu’au, bout
de quatre heures de foins, vers les deux heures du
foir , que le mouvement de cette fonction commença
à s’annoncer ; le pouls ne devint fenfible
qu’une heure & demie après, c’eft-à-dire , vers les
3 heures & demie ; au bout d’une heure encore les
mâchoires fe defférrèrent , fuivit une légère fueur
& un peu de rougeur aux joues ; à cinq heures du
foir les yeux commençèrent à fe mouvoir, & les
bras à fix heures. A huit heures i l parla d’abord
peu diftintfcement, & quand on put l ’entendre, il
déliroit encore.- Les doigts du pied n’étoient plus
noirs, mais les pieds étoient froids : à dix heures
du foir il commença à remuer les pieds , mais avec
douleur ; ils étoient encore froids , & on les enveloppa
encore avec des linges imbibés d’eau froide :
la nuit il y eut du fommeii, les pieds n’étoient plus
ni froids ni douloureux , le pouls écoit fort & élevé,
le malade avoit foif ; à midi le pouls étoit devenu
plus doux , & il eut quelques Telles fûmes de fueur
& de fommeii. Le foir le malade fe leva , & quoiqu’il
fouffrît un peu il put fe rembarquer. On fuit
pas à pas, dans cette hiftoire , le retour de la chaleur
& de la vie du centre à la circonférence , & la
manière dont l’art doit fe conformer à la nature dans
le réîabliffement de la chaleur & du mouvement.
I l fuit de là que le froid non feulement agit fur
nos fluidè& & nos folides , comme fur tous les corps
de la nature, mais encore qu’il fufpênd, pour ainfî
dire , le principe de la v ie , du mouvement, & de la
fenfibilité, fans la détruire , & que l ’homme frappé
de froid, fans mouvement, fans fentiment, fans
chaleur apparente, reffemble en quelque forte à
des animaux qui relient engourdis pendant les temps
froids, & ne donnent de lignes de vie que quand
le retour du printemps a ranimé la v ie , le mouvement,
& la chaleur dans leurs organes.
( i o°. Effets de Vhumidité & de la féchereffe
fu r le corps humain. ) Il eft difficile de dire l ’effet
que produit fur nos corps un air humide & un air
fec, fans joindre à ces confédérations celles de la
chaleur 8c du froid. Néanmoins l ’humidité en général
relâche les fibres, les amollit, diminue la
tranlpiration , paroît déterminer & augmenter la
force abforbante de la peau, quoique ^cet objet ne
foit encore conftaté que par un petit nombre d’ob-
fervatîons , & augmente les effets des différentes
températures fur nos organes; un air froid paroît
plus froid quand il eft humide ; il paroît de même
plus chaud quand i l eft chaucL-Dans l’humidité,
les corps font plus inaétifs , & la difpolition à la
putrefeence eft plus grande; les lieux inohdés &
marécageux , quand iis font chauds , font infeftés
de fièvres putrides & malignes; les intermittentes
y prennent un caraétère de malignité qui lés rend
promptement funeftes, & toujours la bile altérée
A I R. y joue un rôle principal parmi les altérations humorales.
Quand les lieux humides & marécageux
font froids, ils font infeftés de fièvres intermittentes
plus longues & plus opiniâties, accompagnées d‘obf<
truélions rebelles ; & la putridité , qui quelquefois
fe joint à ces affections, eft plus cachectique que
bilieufe , eft fouvent vermineufe 8c fcorbutique.
Par-tout en général l’humidité accélère les décom-
politions fpontanées , & devient la caufe de ces
altérations humorales qu’on attribue à des miafmes
dont elle paroît être le véhicule, qffion croit être
abforbés avec elle & par fon moyen par les pores
inhalâns de notre peau , & dont les effets dangereux
font fi communs dans Le voifinage des eaux &
des marais. Enfin un air humide eft toujours plus
ou moins infaiubre.
Un air fec au contraire eft prefque toujours fa-
lubre" ; il refferre les fibres, 8c l’on peut en tout
comparer l ’effet de l ’air humide & fec fur nos fibres,
à fon effet fur le cheveu dont M. de Sauflure forme
fon hygromètre : Y air fec augmente l ’évaporation
cutanée; il eft moins accablant quand il eft chaud
que. Yair humide , & moins pénétrant quand il eft
froid. Sans doute une abforption moins abondante
contribue beaucoup à ces deux effets. L ’air fec ,
comme tout ce qui refferre & tend la fibre , augmente
l ’aCtivité de nos corps , & en même temps
il diminue la tendance de toutes les humeurs à
la putréfaftion. Dans les pays chauds, les fituations
élevées, éloignées des marais , des* rivages , & qui
fe trouvent fupérieures à la fphère des vapeurs
humides, qui le foir s’abattent fur les plaines ou
qui s’en élèvent au lever du fo le il, font exempts
des maux multipliés qui défolent les lieux bas &
humides; La fanté , la ftature, la force , & le courage
des hommes nourris dans des lieux élevés , &
qui jouiffent d’un air libre & dépouillé des-vapeurs
humides, fait un contrafte marqué avec la eonfti-
tution & la foibleffe des habitans des pays plats.
Nous le voyons en Auvergne ; on le voit dans les
montagnes d’Ecoffe ,• ou les habitans des lieux
élevés parlent avec dédain des habitans du plat
pays , qu’ils nomment avec rbépris Lovs-Linders f
on en a vu des exemples dans Ya.t\icle-j4frigue,
où toute la différence entre les contrées falubres
ou infalubres de cette vafte partie de ■ l ’Univers
eonfifte dans la féçhereffc & l’humidité de Yair,
déterminées, par la pofition des lieux.
11 faut cependant avouer que les effets mêmes
de ces deux qualités de Yair démontrent qu’elles
ont l ’une & l'autre leurs avantages 8c leurs incon-*
véniens. Dans certaines conftitutions , les fibres
sèches & tendues ont befoin d’un air chargé jufqu’à
un certain point d’humidité , mais d’une humidité
pure & non ftagnante. I l eft des poitrines qui ne
fupportent pas un air très-fec; & en général, partout
où la fibre nerveule eft fort à nu,_ la féche-
refFe eft nuifible ; une doùce humidité eft avanta-
geufë. I l eft d’çxpérience que fur la colline de
Montmorenci, près Paris, qui eft sèche, fablon-
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t»eule, & expofée à un air très-vif, les poitrines
ulcérées fouffrent beaucoup , & les phthifiques y
trouvent pour la plupart l ’accélération de leur fin ;
quoique prefque tous les autres malades, fur-tout
les cacheCtiques y éprouvent un foulagement marqué.
La plaine offre des effets contraires ; & il eft
auffi d’oblervation què la plupart des épidémies,
foit automnales , foit printannières, qui régnent dans
la vallée, femblent s’arrêter & comme échouer au
pied de cette colline.
Il eft encore bon de~remarquer que dans 1 a ir , ■
ce n*eft pas l ’eau qu’il contient qui nuit par elle-
même , excepté par le relâchement qu’elle peut
caufer quand l ’humidité eft extrême ; elle a , au
contraire, des avantages quand elle eft pure ,comme
on vient de le voir. Il eft très-probable qu’elle ne
nuit que par lès émanations auxquelles elle, fert
de.véhicule; & c’eft pour cela qu’on peut regarder
l ’a n a l y fe de Yair atmofphérique , quelque loin que
l ’aient pouffée les chimiftcs modernes, comme bien
éloignée de la perfection néceffaire à fon utilité.
Il auroit fallu tenir compte de l ’eau qu’il contient,
& qui, dans toutes les méthodes de l ’éprouver,
nfifes en ufage jufqu’ic ï, eft néceffaire ment entraînée
& confondue avec les autres produits de fon
analyfé.
( i i ° . Effets des combinaifons de' la chaleur
j& du froid avec V humidité & la fée lier effe ; jg
premièrement de ta chaleur sèche & humide, )
Nous avons déjà dit, & tout le monde fait que la
ConftiCutiôn chaude & humide de l 'û/reft celle qui
relâche le plus la fibre organique , qui énerve davantage
le corps , & qui difpofe le plus les ku-
meuis à la putridité. C’eft auffi celle qui fe charge
le plus aifément des miafmes putrides & des émanations
malfaifantes. L ’hiftoire des épidémies, des
maladies des faifons & des climats, eft pleine des
preuves de cette propofîtion.
La chaleur sèche au contraire eft faine , & les
hommes y vivent fans inconvénient. Mais la chaleur
tant sèche qu’humide , confidérée dans l ’atmof-
phère & dans fes variations naturelles, eft liée avec
un enfemble d’autres caufes très-différentes , & qui
compliquent fes effets ; & , comme nous l ’avons
déjà d it, ce n eft pas à la feule vapeur aqueufe
répandue dans une atmofphère chaude, que l ’on doit
les maux qui en réfultent, mais aux miafmes &
aux fubftances étrangères dont il paroît que cette
vapeur devient le véhicule.
C ’eft donc encore autre chofe de confïdérer dans
Yair le mélange de l ’humidité aqueufe fimple
& pure avec la chaleur, ou de confidérer la confti-
tution atmofphérique humide & chaude, telle qu’elle
eft amenée par les faifons, produite par les climats,
ou par les variations des températures. La confi-
dération de la chaleur combinée avec une humidité
purepient aqueufe, ne peut guère avoir lieu que dans
différentes circonftances relatives aux ufages de la vie,
comme dans les bains de vapeurs, les étuves, &c.
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Mais cela fuffit pour quelle ne mérite pas moins
l ’attention du médecin que l ’obfervation des effets
qui réfultent de la température atmofphérique.
Nous avons déjà vu que l’homme pouvoit fiip-
porter un degré de chaleur plus grand dans une
étuve sèche , que dans une étuve humide, non pour
l’impreffion que cette chaleur pouvoit faire fur la .
refpiration, mais à caufe de la chaleur vive que
caufoit l ’eau condenfée fur le corps & ruiffelante
fur la peau ; car i l paroît bien démontré que 1 eau
qui coule alors de toutes parts, n’eft * point une
fueur exprimée des vaiffeaux, mais eft l’eau même
contenue dans Yair chaud & dépofée dans le contact
d’un corps plus froid que Yair environnant, tel
que le corps humain.
Mais fi l ’on confidère comparativement l ’une &
l ’autre chaleur, la chaleur humide & la chaleur,
sèche, dans un degré dans lequel la, chaleur humide
foit fupp or t a b l e , il en réfultera d’autres réflexions
qu’il eft bon de réunir ici. Je les prends dans le
détail que M. Sanchès nous donne des effets fen—
fiblés de la chaleur sèche & humide dans les bains
Ruffes. ( Mémoires d e la fociété royale de Médecine
, année 3 779 > ƒ>• 2.33— M o .) M. l ’abbé
Chappe porte c e t t e chaleur.à 56° de Réaumur ; mais
je m’en tiens à celle dont parlent MM. Sanches &
G me lin, qui eft de io j & de 1 \6 degrés de Fahrenheit;
ce qui répond à 3 3 & 37 j ùe notre
échelle.
« On n’entre point d’ordinaire , dit M. Sanches
» ( p. zço. ) , dans les bains particuliers avant '■
» d’avoir verfé une certaine quantité d’eau fur les
» pierres ardentes mi fes dans le four , & avant que
» l ’intérieur du bain foit rempli de vapeurs $
» ceux qui y entrent pour s’y baigner, s’y désha-
I » billent ».
a Mais le commun du peuple s’expofe à la cha-
» leur ardente & fuffocante avant que le bain foit
» fuffifamment rempli de vapeurs. Ils fe couchent
» fur les deux ou trois banquettes , appelées en
» ruffe poloc , où la chaleur fe fait frntir plus vive-
» ment. Plufîeurs Tentent de vives douleurs de tête,
» d’autres éprouvent une foif exceffive; quelques-
» uns en font fi tourmentés , qu’ils boivent de l’eau
o froide en allez grande quantité dans le même
» bain. Ceux qui agiffent ainfî, ruinent leur conf-
» titütion, tombent en différentes maladies , & pé-
» riffent quelquefois dans le bain même, &c. »
ci Quand on fe fent échauffé dans le bain, & que
» la chaleur ardente devient incommode , on com-
9 mence à jeter de l ’eau fur les cailloux prefque
» embrafés ; la vapeur s’élève avec rapidité & avec
o violence; elle remplit tout l ’efpace du bain; &
s lorfqu’elle commence à fe diffiper & à fe mon-
» trer par des gouttes d’eau, onia renouvelle, &
» on la rend plus forte & plus épaiffe. Alors on
» fue abondamment, 8cc. ».
Ici il eft évident que ce que M. Sanchès appelle la
fueur, eft la vapeur aqueule çondeuféefur lç corps v
A a a a i