
sèches, peu humettées, fans que pour cela la
fibre (bit toujours coriace ; mais alors elle eft plus
ou moins friable. Les animaux domeftiques ont
fouveni la chair humide j prefque tous les oifeaux,
au contraire, font sèche. Les animaux les plus
jeunes ont aufll la chair humide , & la vifcolité
glaireufe de leur partie géiatineufe ne peut exifter
lans cetté humidité. Quand cette humidité n’eft
pas jointe avec cet état glaireux de la fubftance
géiatineufe , elle ne fait que rendre la folubilité
des chairs plus grande & leur digeftion plus facile.
E lle fe rencontre abondamment dans les animaux,
même dans les oifeaux domeftiques, qu’on engraiffe
dans l ’oifiveté & le repos. Alors elle forme le
lien de la gélatine & de la graiffe tenue dont leurs
fibres font imprégnées.
J’ai dit que cette lymphe étoit en partie al-
bumineufe. L ’exiftence d’une partie albumineufe
dans les chairs a été démontrée par les analyfes,
comme nous l’avons remarqué. Elle paroît l ’être
aufli par le fait bien connu de la néceftité de
préparer, par une chaleur douce, la cuiffon de la
viande dont on veut tirer tout le bouillon , d’élever
par degré cette chaleur , & de la foutenir dans
une ébullition modérée, en ne donnant pas un feu
violent. Sans cela le bouillon fe feroit m a l, &
deux caùfes pourroient y concourir, l ’endurciffe-
mcntdela fibre animale, qui fe contra&e, comme
on fa it , par l ’impreflion violente d’une chaleur
fubite, & la coagulation prompte de la matière
albumineufe.
i ° . Clafjification phyfîque des alimens tirés des
chairs des animaux.
D ’après ces notions préliminaires, i l eft’aifé de
Clafler les divers alimens que nous iburniffent les
chairs des animaux, félon les diverfes combinaifons
de leur matière fibreufe & fa diverfe confiftance.
Chairs Hanches on dans lefquelles la fubjtance
fibreufe, combinée avec la gélatine, n’ejlpoint
pénétrée de matière extraflive.
Je mettrai dans une première claffe l«s chairs des
jeunes animaux, & en général de ceux dont Iq chair
eft blanche, c’eft-à-dire,dans lefquels la fibre mufeu-
la ire , combinée avec la fubftance géiatineufe , n’eft
point pénétrée de matière extraélive.
Dans cette dafle il faut faire plufieurs divifions.
i° . La première fera, celle des chairs dont la
partie géiatineufe eft imparfaite, v if eide & glaireufe,
& toujours humide. Les extraits de ces
viandes ne peuvent fe deffécher. C ’eft dans cet
état que nous mangeons certains animaux, comme le
cochon de lait. Tous les animaux trop jeunes opt la
chair femblable, & même lesojfeaux, qui cependant
perdent plutôt que les autres cette vifeofité. Il eft peu
a alimens qui conviennent à moins d’eftomacs : il en
f i l peu qui donnent des indigeftions plus violentes.
x°. Viennent enfuite les chairs opxx^ fa n s avoif
tout à fa i t perdu cette première vifeofité, ont ce-
pendant une fubftance géiatineufe plus parfaite ;
telles font les chairs du veau, de l ’agneau, du
chevreau, &c. On prend ces animaux à diftérens
âges depuis leur naiffance ; plus ils fe rapprochent
de ce premier moment, plus leur chair eft: vifqueufe
& humide , plus elle a les inconvéniens de
cejle dont j’ai parlé d’abord. Mais quand elles
ont paifé ce premier état, elles fourniflent une
gelée très-douce ; & quand i’eftomac n’eft pas
mal difpofé pour ce genre d’aliment, elles font
légères, & tiennent toujours Je ventre un peu libre.
Mais il fautfe défier de leur ufage pour les gens dont
l ’eftomac eft foible, comme les convalefcens. Dans
cet état, la délicateffe des organes donne une
très-grande valeur aux moindres' différences ; &
c’eft fur cette mefure qu’il faut dreffer l’échelle
luivant laquelle on doit ranger les alimens \ tous
font indifférais à l ’eftomac robufte qui digère ai-
lément les nourritures les plus folides\ ou les plus
indigeftes. On ne compte dans la divifion dont
nous parlons, alimens ufïtés,que les jeunes quadrupèdes
domeftiques. Les oifeaux, paffé les premiers
jours de leur naiffance (& alors on les mange ra^
renient), perdent toute efpèce de vifeofité.
Lespoiflbns ne recèlent de; fubftance analogue â
cet état vifqueux de la matière géiatineufe que dans
le tiffu de leur peau : nous le voyons dans la morue
& dans quelques autres poiffons dont la peau eft _
épaiffe, & peu ou point écailleufe j cette partie
même alors appartiendront plutôt aux alimens,
de la première divifion , à caufe de l ’abondance de
l ’humeur glaireufe dont elle eft abreuvée. Mais la
chair des poiffons ne contient rien de pareil. Ou
ne peut rapporter à la divifion préfente qu’un anl«
phibie dont la chair foitufitée parmi nos alimens ;
c’eft la grenouille.
I l eft bon de remarquer ici que tous çes alimens
caraétérifés par une fubftance géiatineufe impar-f
faite, & qui ne reçoit fà perfection que de l ’action
répétée & peut - être de la combinaifon d©
la chaleur , ont tous été regardés par les médecins
comme froids ou rafraîchi flans , que
leurs décodions font ordonnées comme telles ,
& nous avons déjà obfervé que quelque impropres
que fut çette expreffion, elle dependoit des phénomènes
de leur affimilation & du peu de chaleur
qu’ils prpduifent dans çette opération. Une feule
djftinétion doit être faite entre les divers alimens
qui rempliffent cette divifion , c’eft celle de la
force fit du volume de leurs fibres ; elles font en
proportion du volume naturel de l ’animal, & en
général, toutes chofes égales, les fibres des animaux
plus petits font & plus foibles & plus aifées à
divifer que celles des plus grands, & cette différence
a une véritable influence fur la digeftion.
3°. Les jeunes oifeaux & les jeunes gibiers n’ont
point la fibre lâche & encore vifqueufe des jeunes
quadrupèdes domeftiques $ leux chair eft tendre
f a n s
f u i s être molle', elle eft blanche 6* gelât lu èiife
fa n s vifeofité ; elle eft humide fans être, abreuvée.
Je les placerai dans une troifième divifion, dans
laquelle: on peut réunir les . jeunes volailles de
baffe-cour, les jeunes gibiers à chair blanche .,
comme les jeunes lapins & même les perdreaux.
Ce font, parmi les chairs dont nous nous nour-
riffons, ceiies qui conviennent le plus aux eftomacs
foibles, & qui font les plus falubres pour les
convalefcens. Leur fibre eft fi tendre, qu elle fe
divife ai feraient, même fous le pilon, & fe reduiroit
facilement en bouillie.
On doit, rapporter encore à cette cia (Te d'alimens
quelques p'oinons de mer, comme les faxatiles , &
en particulier les merlans, les limandes, les foies, &
plufieurs poiffons de rivière , comme la perche , la
•carpe, quand elle n’ eft pas trop graffe , &c. Mais il
faut toujours fe fouvénit que la fibre des poiffons,
moins confiftantè que la fibre des autres animaux , eft
en même-temps plus putrefeible, maisauffi plus folu-
ble & plus attaquable par lesagens chimiques. Cette
prompte folubilité prévient, dans les poiffons dont
51 vient d’être parlé , les effets de l ’altération fpon-
tanée, & il eft véritablement peu d3alimens qui fe
digèrent plus promptement, &qui pèfent moins fur
l ’eftomac, que ceux dont je viens de faire mention.
4°. Dans tous les animaux dont il vient d’être
parlé , la fibre'tendre ne doit fa foibleffe qu’à la
jeuneffe , à l’humidité, à la gélatine , à l’humeur
glaireufe & vifqueufe dont elle eft pénétrée. Je place
dans une quatrième divifion les chairs blanches
pénétrées d’une lymphe graffe, telles que celles
des animaux adultes engraiffés, dans lefquels-cette
lymphe , accumulée par le repos & une nourriture
fucculente , pénètre les fibres , leur donne,
de la foupleffe , & les entretient dans une jeuneffe
artificielle. C ’eft ici qu’on doit placer les grandes
volailles, les chapons, les-poulardes,'qui fe rapprochent
plus que les-autres par la molleffe de
leurs fibres, des animaux dont il a été queftion
dans la troifième divifion , avec un degré de fermeté
de plus. On doit placer à leur fuite les animaux
d’un plus grand volume , comme les poules d’inde,
&c. Cependant ces chairs, même les plus tendres
d’entre elles , ne font pas, à beaucoup près , aufîi
favôrables à l’eftomac que celles des jeunes animaux
, & la nature graiffeuffe de leur fuc eft
'fans doute caufe de cette différence. Cela eft fi
:vrai , que , malgré la molleffe de leurs chairs,
;îes plus graffes de cès volailles font loin d’être les
plus aifées à digérer, & on né les donnepoint d’abord
aux convalefcens. A la vérité , il faut diftinguer
dans leurs parties celles qui font les plus graffes
de celles qui le font moins. Celles , par exemple,
qui tiennent à l’aîle & s’étendent fur la poitrine ,
& qui dans ces animaux qui volent peu , font fort
tendres, & néanmoins peu pénétrées de graiffe,
parce que leurs fibres font fort rapprochées, font de
beaucoup préférables à celles qui avoifinent le
croupion , &c. - ,A'
M é d e c in e . Tom. L
Dans cette divifion des chairs abreuvees d uns
lymphe graffe , il faut placer quelques poiffons
dont la chair eft de même fort tendre & fe divife
avec une grande facilité, niais eft graffe ou plutôt
onétueufe , pèle fur les eftomacs,. fe digère
lentement, & eft fujette à donner des rapports
nidoreux. Telle eft l ’anguille, telles font les plus
graffes d’entre les carpes j l’alofe a de meme la
chair ondlueufe & très-tendré, & eft un des poiffons
qui s’altère le plus aifément & le plus promptement.
Le hareng eft moins gras que l’alofe-,
quoique l ’un & l’autre , au volume près , aient une
grande analogie, & pour les caractères extérieurs,
& pour la ftruéture de la chair. ; Mais en général ,
il eft peu de poiffons de mer , a 1 exception des
faxatiles, dont les chairs ne contiennent plus oh
moins de fubftance huiieufe , & cette fubftance a
cela de particulier dans les poiffons, qu elle rancit
aifénient, & donne à la chair altérée une âçretç
que les autres animaux ne contractent pas de même
dans les premiers degrés de leur altération. Il ne
faut pas paffer ici fou? filence la chair, ffun
poiffon beaucoup plus grand que ceux dont je viens
de parler, le faumon , dont la chair eft plus forte,
fort nourriffante , mais pénétrée d’une grande quantité
d’huile ou de graiffe. Sa fibre a cela de different
de la plupart des autres poiffons, mais de commun
avec celle de quelques-uns des grands, c eft qu elle a
une couleur un peu rofe. Tous les poiffons d un moindre
volume l ’ont conftamment blanche. Le faumon
eft pelant & d’une digeftion lente. 11 ne faut pas
non plus oublier d’indiquer parmi les amphibies,
la tortue, dont la chair vifqueufe eft en meme
temps très-graffe : mais il en eft de plufieurs efpeçes.
Les .fameufes tortues dont ôn vante tant 1 ufage
pour la guérifon du feorbut, font de meme excef-
fivement graffes , & fouvent leur ufage occafionne
de violentes diarrhées, comme .me l ’ont affuré des
perfonnes qui en ont ufé aux îles de Bourbon,
de France , & de Madagafcar. Mais il eft pofïîble
qu’un peu d’excès ait déterminé c,et effet, dont les
fymptômes. ont pu être .plus yiolens d apres la
nature même de la chair de cet animal.
ç°.'Jufq i’iei nous avons parlé de chairs blanches-,
tendres & molles. I l en eft de fermes , de compactes,
qui ne font ni fort humectées de lymphe -, ni abreuvées
de graijfe. Il faut les divifer en deux ordres ;
les unes font celles des petits qua lrupèdes , des
oifeaux de baffe-cour, & de quelques poiffons. Les
autres font celles des animaux plus grands , foit
parmi les quadrupèdes, foit parmi les poiffons. Car
quelle que foit la nature des chairs j.il y a toujours/,
toutes chofes égales , une différence de fermeté &
de folidité en proportion du volume de l ’animal.
Dans le premier ordre , on doit compter les
lapins qui ne font plus très jeunes, & dont, la
chair eft naturellement très-ferrée , tous les oifeaux
de baffe - cour qui ont paffé la jeuneffe &
qui.n’ont point été, engraiffés. Parmi ceux-ci il
faut encore diftinguer les mâles des femelles , parce