
brillantes de guérifons & de faits? Chaque fcience
d’ailleurs n’a-t-elle pas, dans la portion la plus
éclairée de ceux qui la cultivent-, fes juges & fes
pairs j qui feuls doivent prononcer & fai-re loi
lur • tout ce qui la concerne-? Dans le nombre
des partifans les plus décidés du magnétifme, combien
n’ y en avoit-ii pas qui auroient réclamé cette
vérité contre tonte innovation mal fondée dans leur
état? La cure fympatbique elle-même avôit-elle
pu, malgré fes volumes d’ofefervations-'& fes illuftres
profélytes, réfifter au jugement de ce tribunal qui
l ’avoit condamnée? 8c uefavoit-on- pas q.u’il n’y a
que ce moyen-pourne pas tomber toujours dans l ’inconvénient
d’adopter les opinions les plus abfurdes ?
C ’étoient ces principes qui avoient empêché les
médecins des différentes villes d’adopter tant de
cures que l’on citoit en faveur des traitemens
dont ils étoient témoins* Ils avoient vu qu’en
comparant les guérifons annoncées , à la multitude
prefque infinie des traitemens entrepris, il n’y avoit
aucune proportion y ils avoient vu qu’en retranchant
encore de ces cures fi peu nombreufes toutes
celles qui,, n’ayant de fondement que dans l’en-
thoufiafme du peuple ., qui n’étant relatives qu’à
des maladies imaginaires , ou qui , confiftant uniquement
dans des foulage mens momentanés &
apparens-, '& celles encore qui y racontées Fans
aucune circonftànce ni. de temps ni de lieu , &
avec tout le merveilleux 6c la déraifon des liftés
des charlatans , pouvoient être ainfi. réputées
n’avoir aucune réalité , l ’on n’avoit pasbefoin d’un
avent inconnu pour1 rendre raifon du petit nombre
que l ’on en citoit d’ailleurs. Ils avoient obiervé
que , dans cette, méthode, les traitemens étant
très-longs, 6c leur durée laiffant ainfi à la nature
le temps d’agir \ qu’admettant d’ailleurs dans £es
procédés , & les fecours moraux, & les moyens
phyfiques du même genre , qui influent agréablement
fur l ’efprit, & les médicamens généralement
üfités , on pouvoit attribuer le petit nombre de
fes fuccès,- ou aux remèdes connus qu’elle em-
ployoit comme la. médecine ordinaire, ou à la
nature , qui fouvent peut les fuppléer. Relativement
à la- nature , Us avoient remarqué que l ’on
avoit plus d’une fois fait honneur au magnétifme, de
cures-qu’elle avoit opérées, j & pour ce qui concer-
noit les remèdes , ils avoient également obfervé que
c’étoità leur ufage fieureufement appliqué dans cer-
taines circonftances, qu’on avoit été redevable de
quelques-uns des fucces attribués à cette méthode.
T e lle étoit fui:-tout l ’obfervation fi fameufe de
Thydropifie guérie par M. Thers, dont le journal
de Paris avoit rendu compte ( 1 ) , & qui ne pouvoit
avoir de plus illuftres témoignages en fa faveur.
On apprit bientôt que cette cure prétendues’étoit
terminée par la mort du malade , arrivée deux mois
après, que tout l ’ effet du magnétifme s’étoit
réduit à une apparence plus .ou moins frappante
de foulagement. Mais" quant à cet effet même dis?
moment, que l ’on avoit prétendu taire pafïe-r pour
-une guérifon merveilleufe, on avoit obfèivé que fl
L’on ne pouvoit révoquer en doute le changement
furvenu dans l ’état du malade, on étoit fondé au
moins à eontefter la caufe qu’on lui affignoit, 6c
qui étoit le magnétifme. Sans parler ici de quelques
autres circonftances qui avoient pu contribuer
à l e produire , on ne pouv oit affez s’étonner , en
remarquant que perfonne n’avoit fait attention aux
remèdes, ou plutôt au régime prefcrit en même
temps au malade y & que ce régime ou ces remèdes
étoient énoncés dans le cours même de l’obfervation.
Telle étoit fur - tout la- diète laiteufe. I l
n’eft pas permis d’ignorer qu’il exifte une efpèoe
d’hydropifie qui ne cède qu’à l ’ufage de ce moyen.-
Les ouvrages des obfervateurs font pleinsde fera-
blables faits. Or on doit remarquer que ce fecours;
fi bien éprouvé, comme efficace dans certaines hy-
dropifies , avoit é té , dans l ’obfervation dont i i
s’agit ic i, employé concurremment avec le ma-
ouetifme, 6c que c’étoit M. Thers lui - même qui
f’indiquoit, lorfqu’il difoit que le malade avoit été
mis à l ’ufage du pain trempé dans du la it, &
d’un peu de vin d’Efpagne pour toute nourriture.
O-n doit ajoutes que L’on n’avoit pas fait d’ailleurs
affez d’attention aux caufes morales' qui
durent agir vivement fur l ’efprit du- malade, ni
aux fecours en tous genres qu’on s’étoit empreffé.
de lui prodiguer. L e malade étoit pauvre, 8c.comme abandonné-} mais l ’intérêt qu’avoient pris
à fa fituation des perfonnes- riches 6c diftingdées r
les alimens reftaurans dont il avoit été abondamment
pourvu, les fecours dont on s’étoit empreffé
de l’affifter .dans fa mifèrê , & plus que tout cela-
encore , peut - être , l ’efpoir de. guérir qu’àvoiént
dû faire renaître en lui les procédés finguliers,
auxquels en< l’avok fourni», uavoient - ils pas dû'
contribuer puiffamment à le ranimer ? Et que Tonne
regarde pas Thydropifie comme une maladie:
qui foit toujours: au deffus des impreffions que peuvent
produire lés affections morales-. Quel que foit
l ’état d’apathie, dont , pour l ’ordinaire , elle eft.
accompagnée,. elle peut , être en certains cas Tou—
mife à toute l ’influence de cette caufe.. Il exifte
des efpèces d’hydropifie qui dépendent plus qu’on>
ne le peafe communément de l ’état des nerfs, 6c
les faits confirment cette vérité. Il fuffit pour en
donner la preuve, de rapporter ce fait frconnu,
d’une femme q,ui s’étoit retirée dans un des hôpitaux
de celte ville , pour s’y faire guérir d’une
hydropifie afcite bien caraftérifée. Les remèdes
ufités en pareil cas ayant été inutilement employés
, on réfoîut d’avoir, recourt à la ponction ,
qui parut indiquée , & que Ton remit au lende.-
main j mais pendant la nuit les eaux s’écoulèrent
par la voie des urines , & le matin les chirurgiens
réunis trouvèrent le ventre entièrement affaiffé»
L ’impréffion vive que la crainte de l’opération avoifc
occafionnée à la. malade, avoit ( ï ) Voyez n°. 2 zp y 1$ août 178:4» produit en elle cette
févolutîon înefpérée. Quoi qu’il en fait au refte
à cet égard , on voyoit qu’on n’avoit pas fait affez
d’attention, dans l’obfervation de M. Thers , a
tontes les caufes qui, dans les circonftances oû fe
trouvoit le malade , avoient pu avoir une aCtion
réelle fur lui. Cependant ;c’étoit , parmi les faits
publiés à l’appui du magnétifme , un des plus frap-
pans que Ton eût cités;: 6c que devoit-on donc
penfer des autres, après l ’avoir ainfi approfondi?
Mais quelque évidente qu’eût été la méprife dans
ce’ cas, fi Tobfervation n’étoic pas une preuve de
la bonté du nouveau fyftême , elle oftroit au moins
un bel exemple de bienfaifance j fi elle ne démpn-
troit pas l ’exiftence du magnétifme , -elle honorait
au moins l’humanité. Il feroit plus facile ,de pardonner
aux erreurs, fi elles donnoient lieu toujours
à de pareilles - aélions.
Mais c’étoit fur-tout à l’empire que notre ame
a fur notre corps & nos pallions fur nos maladies,
que les médecins avoient fenti qu’on devoit avoir
égard pour rendre raifon des prétendus effets du
magnétifme. Ils avoient vu que fi c’étoit à la prévention
de l’efprit-, à l’émotion que produifent tour-
jours dans les fens les chofes extraordinaires , qu’on
devoit attribuer les effets momentanés, qui en ré-
fultoient, depuis les impreffions les plus foibles
jufques aux; çrifes les plus violentes, la même
caufe pouvoit également expliquer les effets, con-
fécutifs, c’eft-à-dire -, les changemens opérés dans
la fanté ; en un mot>, le petit nombre de guéri-
fpns citées. Ils favoient que l ’extrême con/iance ,
iekdéfir ardent,, de- guérir ,. le .grand efpoir de l ’être ;
par une caufe reg-ardéè prefque comme furnaturelle ,
peuvent opérer "idans certains malades d’heureufes
révolutions ; que par l ’effet de ces moyens;on. a
vu plufieurs fois des douleurs enlevées ou mitigées,
des tumeurs difparoître ou perdre de leur volume,
des membres paraiyfés reprendre quelque mouvement.
G'esjeffets , comme,on le fa it, ont été. fou-
vent la fuite, des grandes pallions de l ’ame &
çeft à cette caufe fi puifiante de l ’influence du moral
qu’on .doit rapporter les fuccès, &• le- fréquent
ufage .des amulettes, qui-, dans la médecipe de
Tefprit , ont joué de tout temps un rôle fi important.
Ce n’étoit donc pas, comme Tavoient judicieu-
fement obfervé les médecins les plus inftruits, à
la feule nature que l’on devoit-attribuer les cures'
paifaites ou imparfaites, que Ton difoit s’être
opérées aux baquets de M. Mefmer j. ou;, s’il étoit
jufte de recomvokre que c’étoit aux opérations, de-
cette nature bienfaifante. qu’elles étoient dues pour
la p lu p a r ton devoit auffi convenir qu'il n’étoit
pas de circonftances auffi favorables pour lui voir
produire ainfi des révolutions-Singulières, que celles'
od elle fe trouvoit excitée par dé. fortes paffions.
Mais alors.les malades étoient-ils. dans leur état
ordinaire & naturel , & ne devoit-on pas avoir
égard à l ’adlion d’une pareille caufe ? Si donc on
avoit vu M. Mefmer. opérer quelques guérifons
apparentes ou. réelles,, il falloit qu’il convînt auffi
que .ces guérifons n’étaient, fpécialement dues qu’à
Tenthoufiafmè qu’il avoit trouvé l ’art de produire»
dans les efprits crédules. C’étoit là la bafe du mef-
mérifme, 6c tout le fecret du magnétifme animal»
On ajoutoit au refte que parmi ces. cures annoncées
y. il étoit arrivé fouvent que . Ton en avoit
fuppofé qui n’avoient point eu lieu , & cette, ref--
foürce avoit plus qu’on ne le penfe contribué à la
propagation du magnétifme. C ’étoit en effet fur-tout
i ’enthoufiafme, dont la multitude-fe laiffe fi faciie-
ment enflainmer pour les nouveautés extraordinaires ,
qui avoit répandu le preftige 6c Ton pouvoit en-
citer un grand nombre d’exemples.
Les médecins témoins des traitemens prétendus
magnétiques dans les provinces , ne s’écoient pas
bornés à la fimple obfervation des effets- qui en
réfultoient pour les malades. Quelques-uns avoient
cru devoir tenter, des expériences qui les avoient
encore plus pleinement dëfabufes1, en leur faifant
voir que ces effets dépendoient particulièrement de
: l ’imagination; A ces faits très-décififs ils avoient-
fu ‘joindre les obfervations les plus judicieufes 6c
les réflexions les plus propres à diffiper à leurs
yeux tout le. preftige. Convaincus que , dans la-
méthode nouvelle , tout çonfiftoit fpecialement à
agir vivement fur l ’imagination des malades r ils-
avoient reconnu les différens moyens que Ton em--
ployoit pour féconder cette aélion. L ’appareil im-
pofant donc on. accompagnoit les traicemens, leur"
avoit paru fur-tout adopté dans cette vue. L ’ob£*
curité'des falles-, l ’ak chaud & méphitique qu’oix
y refpiroit , leur avoient femblé propres - égale-
menc à y contribue-r. En même temps ils n’avoient
pas méconnu plufieurs autres moyens Sont on fe-
lecvoit dans; cette méthode , pour produire fur le»
malades des- effets que l ’on put attribuer au magnétifme
tels étoient les fripions avec la main ^
les pie fiions’ avec les doigts fur les régions du-
çor-ps les plus fenfibles, le régime, l’exercice, la-
difiîpation , la mufique , la crème de tartre, ou
plu tôtcomme on le remarquoit, l ’ufage des re-
mèdès connus & ordinaires qu’employoient fouvent-
les partifans de eette méthode, & qu’ilsmafquoient
par leur prétendu magnétifme,
Mais c’étoit lùr-tout à la facilité , fi bien connue
& prouvée par tant d’exemples , d’exciter des ,con-
vu 1 fions & de les voie fe propager entre différentes
perfonnes raffemblées , qu’ils n’avoient pas-
manqué, de réfléchir. Ils ne pouvoient ignorer combien
i l eft aifé de les faire naître , avec quelle-
| facilité elles peuvent ife rétablir dans les fil jets
chez lefquels. elles ont eu lieu,> leur devenir alors
habituelles, ou même, fe communiquer à d’autres
par la voie dé l ’imitation j & ils n’avpient pas
rhéconnu le parti qu’on favôit en tirer dans les traitemens
publics , pour en impofer aux gens peu:
inft'rurts. Ils eurent Bientôt remarqué que c’étoit
fpécialement par de femblables crifes que fe mani-
• feftoient les effets du magnétifme y que e’étoiî toujours
par un de ces fujets privilégiés pour les re—
préfentations publiques , qui avoient le rare avan—
• tâge d’être affeélés. de fomnambulifme y qu’elles