
Galien , ainfi qu’Hippocrate, renvoie à l ’article
des fruits les amandes , les no-ix, &c. , qui font
vraiment des femences émulfives , ainfi'que les
châtaignes, qui contiennent une fubftance farineufe, 8c
qui ne peuvent être mifes qu’au rang des femences.
I l n’eft pas douteux que la diftiuttion la plus
naturelle à faire entre les graines > eft celle qui
les partage en femences farineufes graminées, en
femences farineufes légumineufes & en femences
émulfives. L ’ordre botanique des plantes , la fubf-
fance de leurs graines, les ufages auxquels on peut les
employer, confirment cette diftinétion. Enfuite dans
les farineufes , 8c fur-tout dans les farineufes graminées
, il eft bon de diftinguer celles qui peuvent
faire du paiu , c’eft-à dire, celles qui peuvent
non feulement fermenter , mais encore lever,
parce que cette diftinétion eft effentielle, & tient
aux différentes parties réunies dans la farine. Mais
cette matière fera examinée dans un autre lieu.
Des alimens tirés des fruits , des plantes. , &
des racines.
Hippocrate palfe des graines aux animaux ,- &
paroît à peine compter les herbes & les fruits au
nombre des alimens } Galien traite de tous lès
végétaux , avant de pafier aux alimens tirés du
règne animal.
La fedtion dans laquelle Galien traite du relie
des végétaux, eft partagée en trois divifions y l ’une
eft pour les fruits proprement dits , *■ l ’autre pour
îçs plantes, l ’autre pour les racines. Hippocrate
n’obferve pas cet ordre-là. Il eft bon de remarquer
ici que Galien annonce la tranfttion de la
feârion précédente à celle - ci , par une obfervation
qui mérite d’être citée $ il obferve que la différence
des fruits aux graines étant abfoiument celle
de l ’enveloppe à la femence , lorfque , même
parmi les légumineufes , cette enveloppe prend un
certain volume, & fe charge d’une allez grande
quantité de fubftance pour .fêrvir d’aliment, elle
mérite d’être mife au rang de ce qu’on appelle
proprement fruit en fait d’aliment. 11 prend pour
exemple le haricot vert (<Poà«x®» xapôs «àw)..
De s fruits.
Galien commence par les fruits de la clafle
des cucurbitacées , & paffe enfuite à ceux qu’on
cueille fur les arbres. Cette diftindfion a cela de
bon & de jufte, qu’elle met à part une clafle de
fruits que leurs propriétés connues & leurs quar
lités fenfibles caraétérifent d’une manière bien '
tranchante. I l les met, outre cela, à la tête des
fruits que les anciens appeloiept dpaXot., horoei r
fruits du moment, c’eft-à-dire, qui n'e fe con-
fervent point, àcaufe de la quantité de fuc aqueux
qu’ils contiennent, mais qui, quand ils font crus ,
rafraîchiflent par cette humidité même. Mais nous
avons déjà dit à l ’égard de cette propriété rafraîchiiïanfe,
qu’il en falloit diftinguer une qu’on
pouvoit nommer rfefroidiflante , & dans l ’effet de
laquelle il y a quelque chofe de fpafmodique..
C ’eft celle qui appartient à prefq.ue toute la- clafle
des cucurbitacées, & qui eft jointe à une propriété
plus ou moins laxative. Cette propriété rafraî-
chiflante fe diflipe par la cuiflon , comme le
remarque très-bien Galien j. elle eft plus remarquable
encore dans le fruit qui n’a pas acquis toute
la maturité, & fe perd ou s’affoiblit beaucoup dans,
quelques-unes par la maturation comme dans fe
potiron & le melon : mais quand ces fruits font un
peu verts , ils font laxatifs comme les autres , font
une impreflion particulière fur l ’eftomac & cette
propriété eft jointe à. une odeur nauféabonde qu’on
lent très-bien à l ’ouverture des concombres & des-me-
lons qui n’ont pas atteint leur maturité. Mais nous
aurons! lieu de revenir lù-deflus-.dans un autre endroit.-
Hippocrate nous donne encore fiir les fruits Une.
obfervation remarquable, relativement à ceux qu’il
appelle xa’jsrw/Éa, oejluofa , fuj'ets à donner des
rapports brûlans. Parmi les fruits proprement dits,,
ceux qui, félon Hippocrate , font IL jets à produire
cet effet , font les figues & les■ raifins féchés-
au fo le il (Soxaitj sra<p/«Pes) • & parmi le? figues, les-
figues sèches fur-tout ont cette qualité (icLÇnpdl
truxcc x.ttvo-dJ'tcé. D’après ce que dit Galien des.
dattes douces ou fucrées, il paroît que l’on peut
les joindre à ces fruits ; car après avoir dit combien
leur fuc eft vifqueux , difficile à- digérer, & nuifir»
ble aux vifcères, il d it, «vJ'hAov ^ ot*. â'Ép/AOTspoy [xt*
e.yov-rt Tsv yvfxoy ci yAvxtii jcpomxsv xap^olj J i l ejl
clair, dit-il, que les dattes douces ont un fuctrès-
chaud. Il ré fuite de là que cette propriété dan?
le fuc des fruits appartient à ceux fur-tout qui fe
diftinguent par un fuc épais, vifqueux, & fucré 5>
ou dans lefquels on l ’a rendu tel par la deflicca-
tionj & fous le point de vue médical, cette manière,
d’être des fruits forme vraiment une clafle à.part, à>
laquelle appartiennent dans le fiait les figues, & fur-
tout les figues sèches-, les raifins fecs,. 8c les dattes
fucrées. ( Voye^ Vexplication du mot xavcrdJ'ia.)
' Nous remarquerons encore le foin avec lequel
Hippocrate diftingue les fruits fauvages des fruits-
cultivés, & les fruits acerbes 'des fruits acides &
des fruits d o u x & parmi les acides, ceux dont
l ’acide exifte dans la maturité. C’eft dans les pommes
& les poires fur-tout qu’il fait ces diftinétions$
& il remarque de plus que le goût & la propriété
allringente des fruits fe diffipe parla cuiflon. Toutes
ces remarques peuvent donner lieu à des divifions
& à des diftinétions intéreflantes pour J.e médecin , 8c
dont la plupart ont été bien failles par M. L ow y ,.
comme ou le verra bientôt. Ç’eft à l ’extrait de
fon ouvrage que je renvoie ce qu’Aelius a dit d’inlé-
reffant fur la. nature des fruits..
D e s plantes..
A l’égard des plantes, qu'Hippocrate réunit avec
les racines, fous le titre de Aa^ava} glera , on ne
reeonnoît aucun ordre dans l ’énumération qu’Hip-
pocrate en fait \ car il ne les range ni dans l’ordre
de. leurs rapports extérieurs, ni dans celui de leurs
faveurs, ni dans celui de leurs propriétés.-
Cependant à la finde cet article il réfume, fur-tout
en parlant des herbes non cultivées ( \dyaia. aÿpia ) ,
& préfente un rapprochement des propriétés de ces
plantes avec leurs qualités fenfibles à l’odorat &
au goût. On y voit que' les unes font acides (o £/<*■ )
& font rafraîchiflantes (-vj/i/%t<x«). Il eft fingiilier que
dans l’énumération qui précède, il ne foit mention
d’aucune plante qui puiffe être’rapportée à cette
clafle. D’autres font les aromatiques (tvdJ'id) ; 8c
parmi elles il en eft qui , fans être sèches, excitent
dans la bouche une faveur chaude ( rS ro/xa-n â^p-
pcuTixct), d’autres qui impriment une faveur acre &
piquante (J'pi/xla.) : ces deux claffes portent de préférence
aux urines, & la première, outre cela, échauffe.
On reeonnoît là le perfii (o-çAi/ov), d’une part, & de
l ’autre, les plante^ de la famille des oignons & des
poireaux. Mais les âcres, qui avec cela font sèches
dans la bouche , deflechent & échauffent ( «Tptpéct kf
fjupÄ e» tm rc/xa.Tt Trdirct %npdîné j les alimens acerbes
& aufières refferrent ; enfin ceux qui joignent à
une odeur défagréable ( or/xd: ßapiiou ) une fa veur
froide & fu i e ( -\vyph kj /xmfi ) avec une
fubftance très-humide ( kj vy<$v,i tpvVi» ) , font de nature
à augmenter les feiles plutôt que les urines.
Nous, avons déjà vu que certains fruits’ parmi les
cucurbitacées ont ces dernieres, propriétés , que la
cuiflon leur enlève en partie.
Je ne prétends pas juftifier dans toutes les claffes
l’exaâitude de ces rapprochemens généraux entre les
propriétés & les faveurs ; mais ces obfervations, dont
le fonds eft vrai, donnent au, moins l ’idée d’une claf-
fification médicale dont perfonne ne peut nier l ’importance
, toutes les fois qu’il- s’agit d’étudier l ’influence
des corps' extérieurs fur le nôtre ; 8c quoique
les propriétés des corps foient loin de dépendre
toujours de leurs faveurs, il eft cependant
vrai qu’elles leur font liées en grande partie , & les
faveurs douces, fucrées, acides, falées , amères,
âcres , aromatiques , dans les fubftances tant humides
que sèches , forment certainement des’ claffes
très-diftinétes dans leurs propriétés & dans leurs
effets. Dans les plantes dont les anciens fai foient
ufage pour leurs alimens , il eft à remarquer que
la clafle des aromatiques étoit fîngulièrement nom-
breufe. C’eft ce qu’on voit dans le détail que nous
en donnent Hippocrate, Galien, Diofcorides, 8c
Pline.
De s afperges.
Une remarque importante relative aux plantes
alimentaires, & aux différences que l ’âge apporte
dans leurs propriétés, eft celle qui a rapport aux
afperges. Les anciens défignoient fous ce nom
(.-aTTrapaj-oi), toutes les jeunes pouffes de plantes,
principalement des plantes âcres ou aromatiques,
qui alors font douces & agréables au gemt j ils
mettoient aufli au nombre des afperges les jeunes
pouffes de quelques arbrifleaux. On peu ajouter à
ces alimens peu nourriffans les bourgeons des arbres
& arbr'iffeaux , qu’ils défignoient fous le nom de
6aa.7ci y germina y gemmez. Galien remarque que
les payfans mangeoient jufqu’aux jeunes pouffes
des* épines. On pourroit ranger dans la même
clafle toutes les plantes 8c les parties des plantes
prifés dans un état d’enfance , dans lequel leurs fo-*
lides n’ont point encore de fermeté, & leurs focs
n’ont qu’une-, foible faveur. Ainfi c’eft dans cet ordre
à'alimens plus agréables que nourriffans, qu il.faut
mettre le fameux choux palmifie ( thv xopvcpiiv, roi
* >xecpaAov tou <po/v/xoï ) , dont parle Galien, ainfi que
nos chouxfleurs 8c les broccolis des italiens } nos
laitues mêmes, nos chicorées, & le s têtes de nos
choux telles que nous les préparent les jardiniers,
ne peuvent pas être confidérées autrement. A
l ’égard de l ’afperge d’Hippocrate , il eft ^difficile
de dire au jufte ce que c’eft. Mais il paroît qu on
ne prenoit les jeunes pouffes , qu’on^ nommoit afperges
, que dans les plantes douées d une certaine
a&ivité, & dont l ’âcreté fe trouvoit eteinte
dans cette jeune & tendre production, qui. néanmoins
avoit déjà quelque chofe de la parti? active
du végétal auquel elle appartenoit , comme
le remarque. Galien des afperges tirées des plantes
qu’il appelle oxymyrfine , chamczdaphne, oxya-
cantha, ainfi .que de la bryone 8c des afperges
qu’ils norhmoient royale 8c éléène ÏMtos; il die ne
toutes, qu’ellesfbnt ivs o/xctx^ > à* J'io'uptrix.oi, >9 ppct-yj*
to Tpo(pj/xov syovTu y flomachiques , diurétiques, 6*
de peu de nourriture.
D e s racines.
A l’égard des racines, il eft à remarquer que
dans la fuite de plantes 8c de racines dont Hippocrate
fait mention , il ne parle d aucune des
racines farineufes que nous cultivons aujou,rd hui ,
& qui font d’un fecours fi grand pour les gens de
la campagne, 8c fi importantes dans les temps
de difette des grains. Galien parle de Yarum 8c
du dracontium , deux plantes fort analogues entre
elles, & dont les racines contiennent, comme on
fait, une fubftance farineufe, nourriffante , jointe
à une fubftance âcre. On jetoit la première de-
cofition de ces racines, mais elles confervoient
encore , après cette première préparation, quelque
chofe d’âcre 8c d’incifif qui en faifoit un aliment
médicamenteux. Notre fécule d’arum eft abfolument
exempte , ainfi que celle de bryone , Jes
propriétés aâives de leurs bulbes frais , mais on
le doit à la perfection des moyens qu’on emploie
pour les féparer. C’eft dans la' même clafle qu’i l
faut ranger, une racine dont Galien parle ainfi
que Diofcorides , 8c qu’ils appellent ÆoaCoj , @oa€g^
iJ'dJ'i/xos ; bulbus efculentus ÿ le bulbe. Cette racine
11e peut être mife au nombre, des oignons $
qui généralement né. donnent que peu de nourri