
rai pas 1 ufage 01} Ion eft de leur couvrir les parties
qui font ordinairement nues chez les femmes,
la poitrine & les bras. Mais je ne vois pas pourquoi
, dans un air tempéré , on. augmenceroit le
nombre des couvertures dont elles ont coutume d’u-
fer. Il eft auffi dangereux d’accumuler un grand
nombre de vêtemens & de couvertures fur une accouchée
, que de forcer la chaleur de fa chambre. Il
en3 réfulte même un inconvénient de plus ', c ’eft
qu on provoque des fueurs abondantes, qui , con-
leryées dans les vêtemens, finiffent par infecter celle
qui les porte, & exigeroient qu’on la changeât
fréquemment de linge. Cependant on n’ofe fe
faire de peur du froid3 parce que ces mêmes fueurs,
en échauffant & amoljiffant la peau, la rendent
beaucoup plus fenlible aux impreflions de l ’air extérieur.
La propreté eft pourtant une des choies les
plus néceffaires a la fanté des femmes en couches,
& le changement de linge en eft une partie effen-
tielle. Je ne dis pas qu’il le faille faire imprudemment
& fans précaution 3 mais il eft certain qu’on
n en auroit pas tant redouté les effets, fi l ’on navoit
pas adopte la mauvaife habitude d’exciter pendant
les neuf premiers jours des couches , des fueurs ex-
ceffives & fùperflues. Et à quoi fervent ces fueurs î
Je conviens que la iueur -paroît être une des évacuations
favorites de la nature, pour décharger le
corps de la furabondance de l ’humeur laiteufe : mais
la nature a-t-elle befoin pour cela de nos fecours ?
Laifions-la faire; écartons feulement tous les obf-
tacles qui peuvent déranger fon action, & les évacuations
qu’elle excitera feule viendront , & dans
leur temps , propre, & dans la mefure qui convient
a- nos befoins : au lieu que toute fueur artificielle
fera toujours plus ou moins au' détriment des forces
, parce qu elle fera toujours ou prématurée ou
trop abondante.
Qu on couvre donc Y accouchée à peu près comme
a fon ordinaire. I l eft d’ufage qu’elle refte au l i t ,
& fi la perte eft abondante, cet ufage eft affez
raifonnabïe , au moins dans les premiers jours. Sa
fituation doit être fur fon féant , autant qu’il eft
poflible, pour que les vidanges ne contractent
point de putridité en s’accumulant; ce qui arrive-
roit aifement dans la pofition horizontale 3 & pour
cette meme raifon , on doit auffi changer fouvent
les linges qui font fous e l le , & les laver avec les
précautions convenables.
A l ’égard des ali mens, i l n’eft pas douteux qu’ils
feront d autant meilleurs qu’ ils feront plus exempts
de toute efpèce d’âcreté, & que ceux qui feront de
plus facile digeftion feront toujours préférables.
Mais il eft fur auffi qu’en cela même on éft fou-
vent obligé de fè rapprocher des ufages de chaque
perfonne , & qu il faut lavoir quelquefois facrifier
la raifon même à l ’habitnde 3 car l ’habitude con-
ferve ici toute fa force, puifque Y accouchée n’eft
point hors de l ’état naturel. Le temps qui précède
la fièvre de lait exige cependant , à l’égard des
alimens, plus de précautions que les autres, & il
faut tâch er que l ’eftomac ne conferve aucune crudité
dans le moment de cette fièvre. Auffi les potages
font-ils en général préférés dans les premiers
jours qui fuivent l’accouchement. Pendant la fièvre
il- eft clair qu’i l faut s’en tenir aux- alimens abr
folument liquides , à moins que cette fièvre foit
nulle ou prefque nulle , comme il arrive quelquefois.
Quelques auteurs Anglois paroiffent défendre
dans le temps des couches les alimens tirés des animaux.
Cette précaution me paroît pouffée bien
lo in , fi d’ailleurs il n’y a aucune- altération décidément
tendante à la putridité , & fi l’on a foin
d’écarter tout ce qui peut réellement la caufer, en
veillant foigneufement à l ’entretien de la propreté
&- au renouvellement 'de l’air. Il feroit impoffible
chez nous de pratiquer cette exclufion, & , hors
les cas de maladie, je crois qu’on peut la regarder
comme inutile. Cependant, quoique, nous innftions
pour qu’on ne traite pas une femme en couches
comme fi elle étoit malade ,• il faut néanmoins
convenir qu’elle eft alors plus que jamais fufcep-
tible de toutes les impreflions qui peuvent donner
lieu aux maladies, & que fon état exige en con-
féquence de grandes précautions. C’ eft là-deffus que
font fondées les, règles du régime qu’on doit faire
obferver aux accouchées, tant relativement aux alimens
, que par rapport aux autres chofes non naturelles,
en y joignant la confidération néceffaire, &
du temps de la coud&e, & des ufages de Yaccouchée.
Quant aux boiffons hors le temps des repas, les
tifanes dont on furcharge les accouchées, ont
d’autant plus d’inconvéniens qu’elles font plus mé-
dicamenteufes. Toute propriété décidée eft à craindre
, & les feules tifanes: que je perméttrois, fe-
roient celles qui , Amplement délayantes & légèrement
apéritives, fe réduifent à une infufion de
chiendent , de pommes de r'einetté , ou d’autres
fubftances femblables, incapables d’opérer des ehan-
gemens marqués.
Les lavemens font fouvent néceffaires, fur-tout fi
Y accouchée refte beaucoup au lit , ou dans une
pofition à peu près horizontale; auffi je ferois
d’avis qu’elle reftât au lit le moins long-temps
poflible, à moins que la force de l’écoulement ne
s’y opposât, que la foibleffe des hanches, après un
travail difficile , ne rendit la marche douloureufe,
ou qu’un relâchement connu dans les ligamens de la
matrice ne fît craindre la defcenté de cet organe. Sans
. cela, il eft sûr que l ’excès des précautions produit un
excès de délicateffe , rend parconféquent les femmes
beaucoup plus fenfibles aux moindres changemens,
& que les plus heureufes font en général celles
q u i, plus faites à la fatigue , font moins fufcep-
tibles des impreflions étrangères.
A l ’égard des purgatifs, je crois qu’on , doit dans
l ’ état naturel, les mettre en ufage & le plus tard & le
moins poflible. Tant que l'écoulement dure, je ne vois
que des inconvéniens a les employer 3 & quand il eft
ceffé, il eft fouvent inutile d’y recourir, lur-tout fi 1%
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faîfon & les forces de Y accouchée permettent un
exercice fuffifant , qui eft g meilleur moyen de
rendre aux organes leur force & leur reffort , &
d’en prévenir les engorgemens. J’ai vu •même des
femmes, purgées très-tard, fe fentir tres-bien jusqu’au
moment où on les purgeoit, & ne connoître
le mal-aife & les indifpofitions que le lendemain
de leur médecine : c’eft que, comme nous l ’avons
dit plus haut, il refte encore, long-temps apres là
ceffation des écoulemens, un travail peu fenfiole ,
mais très-réel, dans les organes fecrétoires du la it,
qui s'entretient long-temps, ne ceffe que très-in-
fenfiblement, & qui peut encore , s’il eft dérangé ,
produire, des troubles, altérer les humeurs, eau-
fer même des ravages dont on ignore alors la
fburce & l’origine. Cependant il eft des cas où
il eft indifpenfàble de recourir aux purgatifs :
mais l’état de la langue & la diminution de l’appétit
font là - deffus des indices certains. Je
dis la diminution de l ’appétit , car la langue
d’un grand nombre d’accouchées eft toujours
plus ou moins chargée, tant que les reftes du lait
fubfiftent dans le corps; & ce n eft pas toujours une
raifon fuffiiante pour purger.
On fait combien rës affetlions de Tarne & les
objets qui frappent vivement les fens, ont d’aétion
fur les femmes en couches. Les odeurs les plus
agréables leur font infupportables, même à celles
qui les ont le plus aimees dans l ’état ordinaire ,
tandis que les plus fétides les incommodent infiniment
moins , & que quelquès unes , même des plus
défagréables , femblent pour elles un préfervatif
contre celles qu’on appelle bonnes. Sans entrer dans
des détails qui me meneroient trop lo in , je m’en
tiendrai, à 1 egard de toutes les chofes qui peuvent
faire une impreffion vive fur les femmes en couches,
à une réflexion; c’eft que dans les premiers temps
des couches , & fur-tout avant la fièvre de la it , les
fuppreflions font plus rares , & ne font produites
que par des caufes très-fortes; mais auffi les maladies
qui en réfultent font très-vives, & , s’il m’eft
permis de parler ainfî, foudroyantes. Après la fièvre
de lait au contraire, & plus on s’éloigne du
commencement de la couche, plus les fuppreflions
font facile^ : Le moindre changement les occa-
fionne dans les perfonnes fenfibles ; les maladies qui
les fuivent font à la vérité moins fortes & moins
menaçanres que dans les premiers temps, mais
elles font plus longues & plus opiniâtres.
C ’eft fur cette obfervation que font fondées les
précautions qu’on fait ôbferver aux femmes avant
de les relever tout à fa it, c’eft-à-dire de les ramener
à la vie commune ( V . Relevailles. ) Elles
confiftent toutes à éviter la rapidité des changemens
, & il eft inutile d’entrer là-deffus dans de
plus longs détails. Une feulé obfervation me paroît
encore ici riéceflairé 3 c’eft que de toutes les
parties la plus couverte dans les couches, la plus
îujette aux fueurs, & par eonféquent la plus fen-
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fible au froid, c’eft la tête : c’eft auffi celle dont
la tranfpiratiôn prend l ’âcre té la plus vive, tant à
caufe de la nature de cette tranfpiratiôn même ,
que parce qu’elle eft la plus renfermée & la plus
concentrée. Auffi je penle qu’une fois la fièvre Je
lait paffée, il faudroit, en obfervaut-les précautions
néceffaires, nettoyer la tête de très-bonne heure ,-
& le répéter fouvent-, pour y maintenir la propreté;
mais auffi ne la découvrit que très-tard pour adopter
les coiffures ordinaires. Les femmes qui fe font
coiffer trop tôt, fat-tout fi elles ont été longtemps
fans faire nettoyer leurs cheveux dans leurs
couches, font fujettes à une multitude d’accidens &
d’éruptions qui affectent la tête, le vifage, & les
yeux.
Toutes lés précautions dont je viens de parler
fuppofent une cônftitution fenfible & délicate , telle
que celle des femmes accoutumées à vivre à couvert
&c dans les villes 3 mais on fent. combien la
conduite qu’on a à fuivre doit être differente félon
les différens tempéramens & les différentes confti-
tutions.
Voyez cette femme qui , endurcie aux fatigues
de la campagne , partageant avec fon mari les travaux
les plus pénibles , accouche au milieu du
champ qu’elle arrofe de fa fueiir 3 elle rapporte
elle-même fon enfant dans fes bras, & le nourrif-
fant dé fon propre la it , elle ignore prefque ce que
c’eft qu’un li t , une fièvre, & des couches : expofée
à toutes les intempéries de l ’air , elle en reffent
peu les influences 3 elle fentiroit bien davantage
l ’influence d’une viè molle & oifive qu’elle n’a jamais
connue 3 & les foins qui confervent à peine
l ’exiftence frêle & précaire de nos femmes , feroienfc
bientôt pour elle une fource de maladie & de dé-
fordre.
Apprenons même dans nos villes combien le
courage peut fouvent fuppléer à la force , & comment
on parvient à écarter le danger eh ofant le
braver. On a vu de malheureufes filles, fous les yeux
de leurs parens, parvenant à cacher le trifte fruit
de leur foibleffe, ne fe méttre au lit que pour
paffer le temps de la fièvre de la i t , & vaquer tout
le refte du temps aux foins de leur ménage fans
précautions & fans malheurs.
La chaleur des climats méridionaux, en diminuant
, par une abondante tranfpiratiôn , les évacuations
qui fuivent l ’accouchement , diminue encore
la néceffité des précautions que ces évacuations
exigent; & le temps des couches eft fort abrégé
pour celles qui les habitent.
Mais quels que foient les lieux, les circonftanees,
& les cônftitutions, le fait phyfujue qui fait la
bafe des réflexions que je viens d’expofer, exifte
toujours 3 & depuis la femme la plus molle jufqu’à
la plus robufte, dans les climats les plus rigoureux,
comme dans les plus variables , le changement plus
ou moins fenfible que produit l ’accouchement fe
réduit toujours à ces trois phénomènes, qui fervent
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