
des jeunes eft légère & pafle promptement. C ’eft
de là peut-être qu’eft venue de la part de Celfe
une erreur qu’il ne faut pas attribuer à Hippocrate ,
dont l ’auteur Romain fuit ordinairement le texte.
De ce qu’Hippocrate déclare en général que les
chairs des animaux fort fanguins oppofent une grande
réfîftance à la digeftion, & qu’au contraire, les
chairs pâles & dépourvues de üang des jeunes animaux
font beaucoup plus légères que celles
des adultes } Celfe en a peut-être conclu que les
chairs de porc étoient les plus légères de toutes,
inter domejlicos vero quadrupèdes leviffima
fu illa e j l, gravifjima buBula ( 1 . i j , c. xviij. )
■ Mais Hippocrate n’a pas dit cela, il a dit que la
viande de porc e'toit peu pénétrée de fa n g , à caufe
de la'petitejje des vaijfeaux de cet animal, &
qu’elle étoit très-forte en chair , c’eft-à -dire ,
très-compa&e } il en a conclu qu’elle pajfoit
abondamment par les felles , comme il lë dit
de toutes les chairs blanches, mais non pas qu’elle
étoit très-régère j ce qui eft très-différent. Il dit
même quelque chofe qui fuppofe le contraire , &
qui eft commun aux alimens qu’il appelle réfif-
tans (<V%upà), c’eft que cette chût fortifie beaucoup
ceux qui la digèrent (W'xÿi tS a-apctTi t/vxoKu /^.aAAo»).
On a de la peine a attribuer à Celfe une fem-
blable erreur; mais il eft. très - vrai qu’elle n’eft
point autorifée par Hippocrate, & qu elle eft ré-
rutéê par la nature.
Lés diftin&ions dont nous venons de parler font
très-médicales, fondées fur des obfervations très-
vraies , quoique fujettes à quelques exceptions ;
mais nous n’y infîfterons pàs davantage ic i, parce
que nous en avons allez parlé en expliquant les
mots ( <Vx.upof ) fo r t , (/3apuj). pefant, (xovepos) léger,
f e c , ( uypo?) humide , <Sv.
Hes parties des animaux.
Quant" aux parties des _ animaux, Hippocrate
diftingue des autres vifeères, ceux qui ne contiennent
point de fang , comme le cerveau & la moelle
de l ’épine. Ceux-lâ lui paroiflent offrir plus de refit*
tance à la digeftion ( jVxvpiraTa ) , quoique fufeepti-
bles de fournir un bon aliment quand ils font digérés,
ainfî que le remarque Galien. Le fondement de cette
remarque n’eft certainement pas e-xaft } il fuftit de
remarquer que les glandes qui font aufli privées de
fang que le cerveau font d’une digeftion facile. Il faut
donc attribuer cette qualité dans le cerveau à la
nature onâueufe de fa fubftance, & â l ’état de fon
tiffu, q ui, quoique très-mou, eft cependant très-
plein. Hippocrate diftingue encore les chairs qui
avoifinent la tête, de celles du refte du corps, &
les regarde comme, plus légères que les autres ,
ainfi que celles des extrémités, & celles qui en-
vironneut le ventre. Galien met encore au nombre
des chairs les plus légères, celles.de la langue,
qui ; quoique toute raufc.uleufe, eftporeufe & fpon-
gieufe. L e coeur, qui eft un vjfcèr.e mufeuleux,
mais dans une a&ivité continuelle, fuit la loi des
autres chairs , & eft doutant plus réfiftànt qu’il eft
plus exercé que les autres mulcies ; mais il nourrit
beaucoup, comme le remarque Galien. A 1 égard
des autres vifeères, Galien les range fuivant l ’ordre
de leur denfité, & regarde le foie comme de tous
le plus difficile’à digérer , fans lui refufer la propriété
de donner une bonne, nourriture. Il place
enfuite les reins, la rate, le poumon , & c.-, félon
l’ordre de leur légèreté ; mais cette manière de
confidérer les vifeères eft loin d’être exempte d’erreur.
Nous aurons occafion d’en parler autre part,
& principalement à l ’article de chacun d’eux.
D u fang y du la it, & du f romage des animaux;
Hippocrate n’a point parlé du fang des animaux
comme aliment : ce qu’il en dit cependant annonce
qu’il le regarde comme formant une fubftance forte,
dont la digeftion doit être pénible, puifqu’il déclare
que les chairs qui en font pénétrées acquièrent
cette qualité. Galien confirme cette conclusion , en
affurant que toute efpèce de fang eft de pénible
digeftion , mais fur-tout celui de boeuf, comme
il paroît qu’Hippocrate le penfoit aufli.
Le lait & le fang font les fources des autres
parties tant fluides’ que folides du corps humain,
& c’eft de la part d’Hippocrate une idée très-phi—
lofophique & très-jufté d’avoir porté fon jugement
fur les chairs des animaux, d’après la confidéra-
tion de ces deux liqueurs génératrices. Le lait des
animaux eft une des nourritures les plus anciennes
& les plus univerfelles dont les hommes aient ufé.
Hippocrate range les différens laits dont il parle
félon la facilité avec laquelle ils paflènt par la
voie des felles ; car c’eft encore là une des idées vraiment
philofophiques de'ce grand homme : ne pouvant
pénétrer dans l ’intérieur du corps pour y voir
les effets infenfibles que les différentes fubftances
alimentaires prôduifent félon leur nature, ni la
manière dont elles s’y cffimilent, il a Congé
qu’après leur introdu&ion dans le corps, il n’en
falloit plus çhercher les indices caraétériftiques
que dans-les évacuations qui entraînent les débris
de la digeftion Sc de la co&ion , & certainement
quelque peu étudiée que foit cette matière , l ’ob-
fervation des excrétions , & furtout des évacuations
alvines , comparées avec les alimens dont
elles font les reftes, eft un des moyens les plus
fdes de pénétrer dans les myftères de la digeftion
& de la nutrition. Tout ce qui ejl préparé avec
le lait y dit Hippocrate, ejl nourrijfant (eVi ?«aa*-.
'los M Tp»<pi/K.o/ /2.jï Travrêî ) ; mais le lait de brebis ref-
ferre 8c conftipe ( îtAjÎv ya\a. to /aév oÿov t?wrt ) , celui de
chèvre rejferre davantage ^ >9 to aï/tm ^«aaoy ), celui
de vache rejferre moins ( to ièttw A<r<rav), mais ceux
d’ânejje & de jument relâchent au contraire davantage
( to <fe iToriitv >ij ro oum ^«AAoy
Ainfi, fous ce point de vue, l ’ordre des laits, depuis
ceux qui refferrent le plus \ufqu’à ceux qui
lâchént le plus, eft celui-ci ; les laits de chèvre ,
de brebis , de vache , d’âneffe , Sc de jument.
Galien les confidère autrement & les range par
ordre de confiftance ou de légèreté5 le plus léger,
félon , lui eft le lait de chameau , enfuite celui de
jument , puis ,-d’ânefle ; celui qui tient le milieu
de tous eft le lait de chèvre, enfuite de brebis,
& de vache. Enfin Galien les confidère fuivant la
fui fon Sc le temps j & obfervant qu’au printemps
le lait eft nouveau , il ajoute qu’il eft fort liquide
alors, parce qu’il eft plus près de l ’accouchement,
qu’il a acquis toute fa confiftance en été, & qu’i l ’
diminue & celle en automne} qu’au refte, le lait
le plus léger eft celui qui pafle le plus vite par
les felles, parce que la proportion de la férofîté
y eft grande, & que la férofité relâche , tandis que
le fromage reflerre. Le lait entroit dans les gâteaux
Sc dans beaucoup de préparations alimentaires,
Sc c’eft même à l ’occafion d’une préparation
d’orge ( xvxîmv), qu’Hippocrate parle du lait.
Hippocrate, diftingue', à ce qu’il paroît , deux
efpèces de fromages ; l’un eft le fromage gras
dont il dit , il caufe des . ardeurs parce qu’il eft
gras ( Kuva-wéts otj A«rapov). L ’autre eft celui qui. eft
préparé à la manière des fçythes, qui ufoient du
lait de jument , en féparoient le beurre en le
battant, & la partie caféeiîfe toïnboit au fonds
fans mélange de partie p; rafle. Les feythés àppe-
loient cette partie br7rax»T, fromage de cheval. Il
paroît que c’eft de la première efpèce dé fromage
que les grecs ufoient ordinairement, ' c’eft-à-dire ,
du fromage. gras. Il paroît aufli que rarement
chez eux le fromage étoit âcre, puifqu’Hippo-
crate dit ( L. de Vancienne Médecine ), on ajfure
que le fromage réuffit fingidièrement aux gens
maigres (rots ’to-yJoKnv «v ^v/x<ÇtptiyStctv/Aaff-lo:sTUft%(rttl)y
de que dans plufîeurs autres endroits il le taxe'd’oc-
cafionner des glaires ou de la pituite. ( V^oye^
les-mots q>üsrct£iv Sc i<rxvfof')
Galien nous parle d’un beaucoup plus grand
nombre de fromages , Sc premièrement de ce qu’il
appelle Toxygala ou le lait mêlé de vinaigre ,-
Sc bu avant que la partie caféeufe ne fe fépare
complètement du refte du lait , boiflon dont il
vante l ’ufage comme rafraîchiffante pour les gens
qui ont l ’efcomac chaud. Il parle enfuite du fromage
qu’on tire du lait nouveau pris après- q.ue
la vache a mis bas, & qu’on en fépare feulement
en chauffant le lait. I l diftingue le fromage frais
& le fromage vieux qui eft âcre , & , fuivant lui T
déteftable. Celui qu’i l préfère à tous les autres
eft le fromage fait avec l’oxygala, & il paroît
qu’il y avoit des préfures qui donnoient à- ce
fromage beaucoup d’âcreté. I l ne nous dit pas ce
que c’eft que le fromage roumain , appelé Æaâ’à ,
auquel il donne des éloges } il diftingue encore
le fromage très-mou , du fromage dur, St donne
l’avantage au premier. Il ne parle pas de la. fa-
lai fon du fromage, dp'nt Diofcoride fait mention}
mais il parle du mélange du miel au fromage,
mélange qui en facilitoit lq digeftion, & le fai-
foit- pafler plus aifément par les felles.
Les grecs & les romains ne faifoient pas ufage
"du beurre. Le beurre reftoit dans le fromage,
Hippocrate ne parle de la préparation des ley thes
que comme d’une méthode étrangère, qui n etoit
point en ufage çh.ez les grecs. Aujourd’hui mémo
dans les pays chauds, & où croiffent-les oliviers,
on ignore i ’ufage du beurre, on n’y fait ufage que
d’huile.
D e s oifeaux.
Pour les oifeaux , Hippocrate ni Galien ne nous
donnent des détails bien fatisfaifans fur les alimens
qu’on en tire, ni fur les divifions qu’on peut faire
dans cette clafle d’animaux. La feule divifion remarquable
qu’on y aperçoive , eft celle qui diftingue
des autres oifeaux, dabords les oifeaux grani-
vores (o<ra «-7r£pi«aToAo78£i),,dont,, fuivant Hippocrate,
la chair eft la plus sèche , Sc les oifeaux aquatiques,
dont la chair eft très - humide , quoi-
qu’en général la chak des oifeaux foit plus sèche
que celle des autres animaux. La chair des oifeaux
contient aufli, fuivant Galien , moins de nourriture
que celle des autres bêtes , Sc il fait aufli une diftinc-
tion entre les gros oifeaux 8c les petits regardanÉ
la chair de ceux-ci comme plus dure. Toutes ces diG
tinélibns font bien vagues , & n’approchent pas du
nombre d’obfervatiorîs auxquelles ces animaux peuvent
donner lisuj Alais on peut' leur appliquer,
relativement à leurs alimens , à leur manière de
vivre , à la différence de leurs parties, à la couleur
de leurs chairs, aux différences que prôduifent
en eux la domeflicité, l ’ exercice , le v o l , ou la
marche , Pâge, le fexe , & la rnutilation , tout ce*
qu’on a dit des quadrupèdes. En effet, Hippocrate
ayant terminé tout ce qu’ri dit de tous les animaux-
par fa belle comparailon , dont nous avons fait
mention , il paroît avoir eu deffein d’y comprendre
les oifeaux comme les quadrupèdes. Quant à leurs-,
oeufs , qui font le lait du p e t it, dit Hippocrate ,
nous, en avons parlé'aux mots <VxüP°'s f o r t , rpoepiy.oe
nourrijfant, tçvraéts, qui gonjle. ■
A l ’égard des parties des oifeaux , Galien remarque
que leurs extrémités font trèsTaciles à digérer
, & il donne des éloges , & comme aliment
& comme mets, au foie des oies nourries de lait»
D e s PoiJJons.
J’aï déjà dit aux mots xoSço« léger, apSu s rare y
repMî ferme & compatle , fiupvs pefant, ce que
Hippocrate penlbit des poiflons, félon qu’ils étoient
voyageurs ( -a-Aava-Tcu) r faxatiies ou vivant'fur les
côtes (îrtrpéwoj ) , enfin vivant dans les lieux marécageux
Sc dans la bourbe , comme les muges Sc les-
anguilles. Outre cela, il diftingue ceux qui ont la.
chair ferme & ceux, qui l ’ont molle & légère »