
I ï 2 A C I
fa (Te très-promptement dans leur eftomac , peut-
on croire que cet acide paffe fans altération juf-
qu’aux reins’& à la veflîe ? La force de cette ob-
jeftion fuflit fans doute pour démontrer que Yacide
crayeux, employé de cette manière , ne peut pas
être regardé comme lithontriptique , quand bien
même il auroit réellement la propriété de diflou-
dre les calculs de la veille hors du corps ; &
cette propriété eft le plus fouvent nulle, comme
nous le prouvons à l ’article lithontriptiques. Cette
manière d’adminiftrer l’acide crayeux, dans les
autres cas où il peut être utile,, a donc de véritables
inconvéniens, & il n’y a nulle raifon de
la préférer aux boitions aérées.
L a fenfibiiité des poumons, & la néceiîîté de
l ’air pur pour la refpiration , font telles , que
les animaux font bientôt fuffoqués lorfqu’ils font
plongés dans des lieux remplis d’acide crayeux ;
c’eft ce qui arrive dans la grotte du chien , dans
les puits, les caveaux méphitifés, &c. A la vérité
, lorfque Vacide crayeux ne fait qu’un douzième
du volume de l ’air , comme on l a propofé
pour la phtifie , il ne peut point expôfer les
hommes aux accidens énoncés ci-deflus. Mais ce
mélange eft-il fans aucun danger, & les médecins-
peuvent-ils fe permettre de le jaire refpirer ? Lorf-
qu’on co'nfidère ce qui fe paffe dans des lieux où
ï air eft chargé d’une plus grande quantité d’acide
crayeux que ce qu’il en contient ordinairement,
comme dans les affemblées , dans les falles de
fpectacles , dans les prifons, dans les'vaiffeaux ,
&c. ; on ne peut s’empêcher d’attribuer le mal-aife ,
l ’étouffement , & tous les fymptômes nerveux
qu’éprouvent les femmes & les hommes foibles
dans ces lieux , à la quantité trop abondante
d * acide crayeux , ou au moins de le regarder
comme une des principales caufès qui les produi-
fent. Nous croyons donc , d’après ces réflexions,
qu’on ne peut employer ce procédé pour la phtifie
pulmonaire , qu’après un . grand nombre d’expériences
& d’effais fur les animaux. Nous verrons,
a l’article A ir. v it a l , toutes les précautions qu’il
faut prendre pour faire refpirer aux malades un
fluide très-pur , 8c combien , à plus forte raifon ,
on doit être circonfpeét pour introduire, dans les
poumons, une certaine quantité de fluide aeriforme
méphitique , quel qu’il foit.
Acide marin.
U acide marin eft retiré du fel marin ou fel de
mer , dont il'conftitue un des principes , par le moyen
de l ’huile de vitriol, qui a plus d’affinité avec la bafe
de ce fel que n’en a fon acide. Cette fubftatice ,
appelée efprit de fel quand elle eft concentrée,
a les propriétés générales des- acides, & fe dif-
tingue par les caractères fuivans : c’eft un liquide
blanc & fans couleur , d’une faveur très - forte ,
exhalant des fumées blanches par le contaft de
l ’a ir , ayant une odeur âçre & fuffoquante, qui ,
A G I
quand elle eft fort étendue , reffemble a celle
du fafran ou des pommes. Cet acide peut prendre
la forme élaftique & gafeufe ; on l ’appelle dans
cet état,air marin, ou; gas acide marin. Il fç combine
& forme des fais neutres- particuliers avec
l ’argile, la chaux , la magné fie;, & les alkalis.
.Trois d,e ces fels , favoir, le fel marin , le fel fébrifuge
, & le fel ammoniac, font employés en
Médecine t & les;autres pourroient 1 être avec
beaucoup d’avantages , comme nous 1 expoferons
dans les articles qui porteront leurs noms.
L ’acide marin concentré eft un cauftique affez
puiffarit : on l’employe pour détruire la nature
putride & arrêter les progrès des aphtes: gangréneux
, dans les maux de gorge de ce caraétere.
On le porte, a l ’aide de petits pinceaux de linge,
fur ces ulcères ; on le fait entrer aufli dans^ les
gargarifmes appropriés à cette maladie. Applique
fur la peau , il y produit des taches jaunes , 8c fait
tomber l ’épiderme ; il produit le même effet fur
la peau lorfqu’on ,en met une plus- grande quantité.
U acide marin étendu - d’eau eft antifeptique ,
rafraîchi (Tant, & tempérant com méfiés, autres acides.
On en fait verfer quelques gouttes dans les boif-
fons, jufqu’à ce qu’elles aient une. acidité agréable.
S’il étoit néceffaire de lui donner plus d.action,'
on en ajouteroit une plus grande quantité,
ou on l ’emploieroit en plus, petit, volume dans
.des. potions. Il- réunit, aux propriétés indiquées ,
la qualité tonique &; aftringente. Quelques médecins
en ont recommandé, l ’ufage dans les pertes
habituelles , les hémorragies ; mais prefque toujours
on lui préfère Y acide vitriolique , donc les
effets font plus furs. & la faveur plus agréable.
C ’eft en raifon de . fa propriété aftringente qu’il
faifoit partie du remède du prieur de Çhabrières
pour les defcentés.
On a remarqué aufli que Y acide marin avoit la
vertu diurétique dans, un degré trés-marqué ; aufli
en a-t-on fait ufage avec fuccès dans quelques
efpèces d’hydropifie , dans les rétentions d’urine,
dans la gravelle, &c.
L a propriété irritante de cet acide le rend
très-propre à ranimer les forces , à augmenter le
ton 8c l’aélion vitale dans les parties ; c’eft ainfi
qu’i l rappelle les humeurs fur les organes d’ou
elles avoient été repouffées par une. caufe quelconque
; c’eft à cela qu’il faut attribuèr fes fuccès
dans les bains de pied préparés par M. Goii-
drand , chirurgien de Park. Ces bains , qui réuf-
fiffent très-fouvent pour déterminer l ’humeur gout-
teufe à fe fixer dans les extrémités inférieures , 8c
qui ont l’avantage de la rappeler allez promptement
aux pieds ,, lorfqu’elle s’eft jetée fur la
poitrine ou fur l’ellomac , ne fonc autre «chofe qu’un
mélange d’eau & d’acide marin fumant, confervé
dans des flacons, à l’aide d’une certaine quantité
d’huile qui le recouvre , ôc qui en empêche l'évaporation;
poration'; il paroît que M. Gondran, qui a beaucoup
d’habitude & d’expérience fur l’adminiftration
de ce remède , varie la dofe de l ’éfprit de fel fui-
vant l ’état des malades, la nature de la peau, fa
fenfibiiité, & fur-tout fui vaut, la promptitude de
l ’effet qu’on veut obtenir.
On pourroit fans doute porter beaucoup plus
loin & étendrê à beaucoup d’autres circonftances
l ’ufage de Yacide marin , comme ftiraulant & enflammant.
Peut-être la vapeur •• d’efprit de fel ou
le gas acide marin , appliqué pendant quelques
inftans fur la peau , pourroit-il rappeler des éruptions
fupprimées. Il faut cependant être prévenu
que cet acide aéfiforme eft très-âcre. 8c très-cauf-
tique ; il produit des rougeurs , ‘des. démangeai-
fons, & des éruptions même fur. la main , lorfqu’on
fait de fuite beaucoup d’expériences fur ce fluide
élaftique : c’eft l ’effet d’un véficatoire léger ; & fi
fon application étoit plus immédiate ou plus longtemps
continuée, je ne doute point qu’il n’eût
l'aélion d’un véficatoire affez fort.
Ces détails annoncent que la vapeur de l ’efprit
de fel eft très-dangereufe à refpirer ; que, portée
avec l ’air dans les poumons , elle peut bleffer ,
enflammer, & même corroder fon_tifîu délicat; 8c
u’on ne doit pas s’expofer a le pefpirer trop abon-
amment dans les laboratoires , en délutant les,
appareils où on a diftillé cet acide ; car pendant
fa diftillation l’on n’a plus rien à redouter de. ce
gas , depuis qu’on fe fert de l ’appareil ingénieux
de M. Woulfe. . . ,
Cette vapeur ou ce gas marin a une propriété
dont on pourroit peut-être tirer un- grand parti
en Médecine. I l eft fortement antifeptique ; de
la chair enfermée dans un flacon rempli de ce
gas, fe conferve faine & fans..altération pendant
très-long-temps ; il y a plus, de la chair en pur
tréfaélion, expofée à la vapeur de Yacide marin,
eft en quelque forte rétablie , ou au moins fon
odeur fétide 8c fa molleffe font détruites. Ne
peut-on pas efpérer que cette vapeur mêlée .en
très-petite quantité à l ’air atraofphérique, & portée
par ce véhicule dans les poumons , auroit une
aétion marquée-fur l ’altération feptique qui attaque
& corrode manifeftement ce vifcère dans
plufieurs efpèces de phtifie ? N ’eft-ce pas à une
aélion analogue que font dus les fuccès de la vapeur
du vinaigre & de l ’eau acidulée par un acide
minéral dans cette maladie ? & le gas acide marin
n*auroit-il pas la propriété de détruire la purulence
, ou la difpofition à la formation du pus, qui
a fi fouvenfalieu dans ces vifcères ? Nous ne pré-
fentons ces idées que comme des hypothèfes vrai-
femblables ; c’eft a l ’expérience feule & au temps
a prononcer fur leur valeur : & nous obfervons
que les effais de ce genre doivent être faits avec
les plus grandes précautions. Mais il doit être
permis de propofer des moyens nouveaux dans des
maladies aufli peu curables que la phtifie . fur-
Médecine. Tome I,
tout lorfque ces moyens font, avoués par une faine
théorie , & lorfque l ’analogie les indique.
C ’eft en raifon de la vertu antifeptique & de
l ’a&ion très - énergique de Yacide marin , qu’il
eft très-propreà corriger l ’infeéUon de l ’air 8c à détruire
les molécules putrides qui font diffoutes dans
l’atmofphère, comme l ’a très-bien expofé M. de
Morveau, en propofant d’employer un mélange
de fel marin & d’huile de v itr io l, pour corriger
la qualité feptique de ce fluide , qui a lieu dans
les caveaux de lépulture , dans les hôpitaux , dans
lés priions* &c. Nous pénfons avec lu i , que cette
vapeur eft un très-bon moyen de définfecHon , &
qu’elle eft capable d’oppofer une barrière puif-
fante aux exhalaifons putrides 8c délétères , qui1
altèrent l ’air dans ces différentes circonftances.
Acide nitreux*
U acide nitreux eft retiré du nitre par la diftillation,
à l’aide de Yacide vitriolique, qui s’empare
de fa bafe. Cet acide a pour caractères particuliers
une odeur forte, défàgréable, & nauféabonde ; une couleur
plus ou moins brune , lorfqu’il a touché quelques
matières combuftibles; la propriété de détruire-
les couleurs bleues végétales; & celle de former,
avec les bafes alkalines, des fels neutres détonans
fur les charbons.
Cet acide concentré répand des vapeurs rouges;
quand on le mêle avec l ’eau, il prend un couleur
bleue qui paffe enfuite au vert ; 8c fi la propor--’
tion de l ’eau eft confidérable , il en refaite un
fluide fans couleur & fans vapeurs, qu’on connoît '
fous le nom d’eau-forte.
L ’acide nitreux a une action très-forte far les
matières animales ; il. les corrode & les brûle rapidement
lorfqu’il eft concentré. S’il eft affoibli ,
il les diflout peu à peu. C’eft ainfi qu’i l détruit,
les verrues & les porreaux : une goutte d’eau-
forte mife fur l ’épiderme y fait une tache "jaune,
ou une efpèce d’efaare qui s’exfolie au bout de
quelques jours. Quelques perfonnes n’ont pas craint
d’introduire une goutte de cet acide dans une dent
cariée, pour détruire le nerf & calmer la douleur:
la dent corrodée tombe en petits fragmens. Ce
moyen peut avoir des fuites dangereufes ; je l ’ai
vu produire des convulfions & des douleurs violentes.
JJacidè nitreux , quoique noyé dans une grande
quantité d’eau, ne peut pas être donné à l ’intérieur
, parce qu’il a toujours une faveur défagréà- '
ble , & parce qu’il excite le vomiffement, ou au-
moins des naufées qui durent long-temps. Peut-
être fon origine qui tient à la puiré.fatlion , 8c
la mofette atraofphérique qui eft un de fes principes
, d’après la découverte de M. Cavendifch ,■
font - elles la caüfe de cette fingulière pro--
priété.
L ’eau-forte étant une des matières les plus employées
dans les arts , & fe trouvant dans prefquç