
Incureioii Une heure après avoir abandonné les bords de la Nepean , nous par-
a Bathurst. a , , , , , 1 ’ r
1 8 1 9 vînmes a la base des Montagnes-Bleues, ou nous nous enfonçâmes dans
Novembre. Un chemin aussi bien entretenu que bien tracé; ses rampes successives
dirigées dans un sens ou dans l’autre, s’infléchissoient selon que
l’exigeoient les dispositions du terrain, mais s’éievoient toujours insensiblement.
Les arbres voisins de cette route magnifique sont grands, et en
général fort espacés entre eux : à côté des eucalyptus croissent piusieurs
espèces de casuarinas, des persoonias, des exocarpus, des mélaleucas,
des mimosas, &c.
Dans le voisinage du second poste miiitaire [ Spring-Wood], croissent
les pins beaux arbres que nous ayons vus dans ces contrées. La
route qui y conduit s’ouvre au milieu de vastes forêts, où l’on marche
sous des domes de verdure du plus agréable effet. Nous remarquâmes
que tous ces arbres étoient noircis dans leur longueur, circonstance due
à ce que les sauvages aimant à mettre le feu aux herbes et aux
broussailles qui embarrassent leur route, l’incendie se communique souvent
à l’écorce filamenteuse des plus grands végétaux, qui brûlent alors
sans que ieur tige en soit aucunement entamée et sans nuire à la végétation
de leurs cimes. La même richesse de produits ne se présente
cependant pas sur tous les points de cette route ; la crête des montagnes
offre çà et là, suivant ies sinuosités qui s’y rencontrent, des changemens
notables dans le sol ainsi que dans les végétaux qu’il nourrit. Ici
l’on quitte ies forêts pour retrouver cette belle végétation des plaines,
d’autant pius remarquable, que souvent un terme de comparaison subit
en fait plus vivement sentir toute la magnificence.
C ’est dans un de ces agréables réduits que nous vîmes pour la première
fois de malheureux habitans de ces hautes régions : iis n’étoient alors que
deux (pl. lo i ); l’un étoit un vieiliard malade, couché sur des peaux de
kanguroo, près d’un feu, et qui recevoit les soins d’un homme plus jeune.
M. Lawson reconnut ce vieillard pour être Kamdm, chef suprême ou
roi de cette partie de la montagne. N u i, seion iui, ne s’étoit montré plus
dangereux pour les Anglais, dont un grand nombre avoient péri sous
ses coups , sans que jamais on eût pu le prendre sur le fait. Depuis longtemps,
au reste, cet homme montroit pour les colons des dispositions
LIVRE V. — D e s S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . ¿ 4 *
paisibles; il les servoit même, soit en faisant ia guerre aux sauvages de
l’intérieur, quand ceux-ci vouloient s’approcher de la Nejiean, soit en
prévenant les postes anglais de leur marche, s’il n’étoit pas assez fort
pour les repousser sans assistance étrangère, soit enfin en servant de guide
aux troupes anglaises lorsque des tribus ennemies se répandoient dans le
pays pour y commettre des déprédations.
Nous priâmes le plus jeune de ces sauvages d’aiier nous chercher
une gourde d’eau fraîche, ce qu’ii fit aussitôt; nous les quittâmes
ensuite après leur avoir fait quelques présens.
Peu de temps après notre arrivée à Spring-Wood, lieu désigné pour
passer la nuit, un homme nous ramena le cheval dont M. Jamieson
avoit disposé ie matin, et annonça qu’on n’avoit pu retrouver l’autre. La
température étoit froide, et nous nous chauffâmes avec plaisir au grand
feu que faisoient les soldats gardiens de ce poste militaire; nous soupâmes
avec du thé et de la viande saiée.
Quelque contrariété que dût éprouver M. Lawson en s’éloignant de
chez lui à une époque si peu opportune, eiie ne diminuoit en rien ses
complaisances. Nous dûmes à son adresse le plus grand nombre des
oiseaux qui furent tués pendant ia route; très-souvent aussi il descendoit
de cheval pour montrer à M. Gaudichaud les plantes qu’il croyoit nouvelles
pour lui; enfin, lorsque nous fûmes réduits à une seule monture,
il nous offrit la sienne, et soutint qu’il préféroit aller à pied. Tant d’égards
et de prévenances, joints aux politesses dont nous avons été deux fois
l’objet sous son toit hospitalier, nous ont pénétré de la plus vive gratitude.
Spring-AVood est un iieu très-abondant en gibier de toute espèce. Ses
bois élevés sont l’asile de grands phaiangers volans , dont les fourrures
douces et soyeuses offrent des teintes diversement nuancées : les oiseaux
n’y sont pas moins nombreux ; et sans compter la famille si éclatante des
perruches, il suffit de citer le magnifique manura, ou faisan à queue de
ly re , qui est ici assez commun. Un autre oiseau, qu’on trouve très-fréquemment
dans ces contrées, est celui dont le chant ressemble au son
harmonique d’une clochette fortement tintée : c’est le soir qu’il se fait entendre,
et que nous prenions plaisir à l’écouter. Déjà, pendant notre
séjour à la baie des Chiens-Marlns , nous avions ouï ce bruit métallique ,
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Novembre.