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en société.
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des pièces d’une flûte, et consolidés par une rousture que recouvre une
couche de résine; le tout a ordinairement de sept à huit pieds de longueur,
sur environ cinq lignes de diamètre ; mais les dimensions varient selon les
peuplades : au Sud de Botany-Bay, on en a vu d’au moins dix pieds de
longueur, et au Port-Jackson même il y en a de plusieurs sortes, à
chacune desquelles est aflecté un nom différent. Les unes sont simplement
affûtées en pointe; d’autres ont une ou plusieurs barbelures, tantôt
taillées dans le bois, tantôt composées de fragmens de coquilles ou d’éclats
de pierres dures, soudés avec de la résine, sur une longueur de cinq à
six pouces, à partir de l’extrémité aiguë. Ces armes barbelées font des
blessures d’autant pins dangereuses qu’il est ensuite fort difficile d’en
extraire de la plaie les parcelles.
Toutes ces sagaies se lancent à l’aide d’un levier de trois pieds, connu
sous le nom de woniéra, dont ii y a deux variétés : i’un est garni de la valve
d’un coquillage à la poignée ( i ) ; l’autre n’a point cette coquille, mais seulement
une sorte de bourrelet formé de fiiamens d’écorce, revêtus de résine.
Chacun de ces instrumens porte un crochet au petit bout, destiné à être
placé dans un trou pratiqué à l’extrémité de la sagaie, lorsqu’on veut la
lancer. Plusieurs figures de nos planches 10 2 , 103 et io 4 montrent de
quelle façon ie woméra s’ajuste sur la sagaie, et sa position dans la main
de celui qui veut s’en servir. Après avoir visé au but, le guerrier abandonne
des doigts la sagaie, et ne la manoeuvre plus qu’avec son levier, qu’il
pousse avec une extrême vigueur, et de manière à atteindre souvent à
plus de 200 pieds de distance. On voit encore une sagaie courte qui ne
se lance pas, mais dont on se sert sans qu’elle quitte la main.
Après les sagaies viennent les casse-têtes, dont les formes et les noms
sont divers; les uns ressemblent à des champignons à grosse tête, d’antres
sont allongés et d’un dessin plus uni. Le quatrième sauvage à gauche,
sur notre planche io 4 , tient à la main l’espèce de casse-tête appelé
waddy; on pourra voir le dessin de quelques autres de ces armes dans
l’atlas du Voyage aux Terres australes (2® édition). Celle désignée sous
le nom de bomerang a la forme d’un arc de cercle, ou d’une lame de sabre
(1) C ’ est ce coquillage , avons-nous dit plus haut, qui fait parfois aussi l’office de couteau.
( Voyez pag. 7 8 1 . )
LIVRE V. — D e s S a n d w i c h .a P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . 789
fortement courbée ; on la rend grossièrement tranchante des deux côtés,
et pointue à chaque bout. Après lui avoir imprimé un mouvement de rotation
analogue à celui de notre toupie, on la jette soit en l’air, soit contre
terre, avec une telle roideur, que rarement celui vers lequel on la dirige
la voit venir à lui, quoique le sifflement s’en fasse entendre. « Lancée
»à terre, dit M. Barrailler, dont nous tirons ces détails(i), elle se relève
»et ondule sur la surface du sol, à la manière des boulets, circonstance
» qui lui a fait donner le nom de sahre-à-ricochet, sous lequel on la désigne
» quelquefois. » Le même auteur parie de certains montagnards, voisins de
la rivière Wolondilly, qui ne connoissent point le woméra, et dont les sagaies
sont aussi beaucoup plus grosses que celles des habitans de Sydney;
ce sont de simples branches d’arbre dressées et durcies au feu, qui peuvent
être jetées à une assez grande distance, mais avec la main seulement,
le levier employé ailleurs pour cet objet étant ici tout à fait inconnu.
La hache de pierre, déjà cirée, sert, dans quelques cas, pour l’attaque;
et nous verrons bientôt que les femmes, lorsqu’elles se battent
entre elles, font usage d’un bâton court, aiguisé à chaque bout, qu’elles
tiennent par ie milieu et de ia main droite : c’est probablement celui qui
leur sert aussi dans les champs à arracher leurs racines de fougère.
Comme arme défensive, on remarque le bouclier d’écorce d’eucalyptus
ou de xanthorrhéa durcie au feu, et celui en bois , qui est beaucoup plus
solide et pius résistant. Les dimensions qu’on donne à Port-Jackson à cette
arme défensive sont d’environ trois pieds de long sur un pied de large, avec
une forme ovaioïde; ii est garni en dedans d’une anse qui sert à le tenir,
et sa surface est légèrement bombée (pi. io 4 )■ Une tribu voisine du port
.Stephens fait usage d’un grand bouclier d’écorce d’eucalyptus de forme
presque circulaire, sur chacune des faces duquel sont peintes quelques
lignes rouges placées en croix sur un fond blanc.
Exercices militaires. — Avant de manier la sagaie à la guerre, les jeunes
gens et même les enfans s’exercent à cette gymnastique en lançant des
roseaux ou de petites pièces d’écorce; ils s’habituent aussi à combattre
avec le bomerang, dont la manoeuvre est assez difficile. Quant aux autres
casse-têtes, il ne faut pour ainsi dire que de la force pour s’en servir
( i) Voyage aux Montagnes-Bleues, mannsic.
Voyage de l’Uranie. — Historique. T. II. ]-j j-j
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