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C H A P I T R E X XXIX.
Administration des convicts.
Ce chapitre, consacré à l’administration des convicts de Port-Jackson,
est un des plus importans et des plus laborieux de l’ouvrage. J ’ai tâché
d’y mettre de l’ordre, et je n’ai rien négligé de ce qui pouvoit faire connoître
avec exactitude un établissement jusqu’ici sans modèle chez ies
nations civilisées, et dont ona parlé souvent sans avoir peut-être toujours
sous les yeux les documens nécessaires pour en faire apprécier sainement
l’ensemble.
Six paragraphes seront consacrés à ce travail : le premier traitera du
transport des convicts d’Angleterre à la Nouvelle-Hollande; le second,
de leur arrivée et de leur distribution dans la colonie. Nous parierons
successivement ensuite de leur emploi, de leur entretien et de la poiice à
laquelle iis sont soumis; enfin, dans un dernier paragraphe, nous placerons
quelques réflexions sur les bagnes et sur le système pénitentiaire qui est
suivi en France. Puissent mes efforts parvenir à porter quelque lumière
sur un sujet aussi compliqué, aussi difficile et qui intéresse à un si haut
degré l’avenir de nos sociétés européennes !
§. I.
Transport des condamnés ( i ).
Reportons-nous au moment où les vaisseaux, sur le point de quitter
l’Angleterre, embarquent ies prisonniers qu’ils doivent transporter dans
un autre hémisphère. Là commencent pour ces misérables une existence
et des rapports nouveaux.
Précautions préliminaires.— Une inspection de santé, qui précède l’embarquement,
a pour objet de s’assurer qu’aucun convict n’est attaqué de
maladie contagieuse. Chaque criminel doit être porteur d’un certificat
délivré par ie shérif ou le geôlier de la prison d’où ii sort, dans lequel sont
( i) L e premier R ap port de M. B ig g e au comte Bathurst ayant été souvent consulté et mis a
conuibution dans ce pa ragraphe, il suffit d’en prévenir une fois le lecteur.
L IV R E V .— D e s S a n d ’w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t , i i i 5
exactement indiqués la nature du crime commis, l’âge tlu malfaiteur,
son état de marié ou de célibataire, le genre d’industrie qu’il exerce, le P o r t-Ja c k so n .
détail de sa conduite pendant qu’il est resté en prison, tant avant qu’a- T r a n s p o r t_
des condamnés.
près son jugement, puis les observations du geôlier sur le caractère per-
sonnel et les dispositions particulières du convict; à cela on ajoute toute
autre information capable d’éclairer sur le premier genre de vie qu’a
mené ie condamné.
Un chirurgien-major, embarqué sur le vaisseau chargé du transport
des prisonniers, reçoit des pouvoirs suffisans pour y maintenir l’ordre et
la discipline la plus sévère (t).
Précautions contre la révolte. — La plus grande vigilance est recommandée
à ce chirurgien-surintendant, pour parvenir à connoître tout ce
qui est relatif aux mouvemens des déportés, 11 est permis à un tiers seulement
de ces hommes de se promener à la fois sur le pont; on évite
par ce moyen l’exécution des complots qui pourroient être tramés contre
la sûreté du navire. Au reste, depuis la fondation de Port-Jackson on
ne cite qu’un seul bâtiment de ce genre qui ait été enlevé, et ce vaisseau
transportoit uniquement des femmes convictes. Par suite de connivences
coupables eiles engagèrent les matelots à la révolte et à conduire le
vaisseau qu’elles montoient à Rio de Janeiro ; cet événement arriva pendant
la guerre.
On a reconnu qu’en générai les convicts déportés à vie se conduisoient
beaucoup mieux que ceux qui n’étoient condamnés qu’à terme (2); aussi,
dit M. de Blosseville (3), a-t-on renoncé à déporter les criminels dont la
peine ne s’étend pas an moins à sept ans ; tous ceux dont la condamnation
à mort a été commuée par le roi sont envoyés dans les colonies pénales,
disposition qui est particulièrement applicable à tous les banqueroutiers
frauduleux.
( 1) U n a c te du parlement autorise le chirurgien-major d’un navire-transport de con v ic ts, à
punir corporellement, avec l’approbation du capitaine, les prisonniers qui se rendroient coupables
de quelque faute gra ve pendant la Iraversée.
(2) A y a n t eu occasion de visiter la maison centrale de détention de femmes établie à M on tpellier,
j’ appris aussi du directeur de cet établissement que les femmes les plus criminelles
étoient celles qui se conduisoient le mieux dans la maison. C e fa it important n’est pas jndigne
d’occuper les méditations de l’homme d’ état.
( 3) H is to ir e des colonies p én a le s , etc.