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en société.
manifeste se trouve encore entre cet usage et ce qui se pratiquoit jadis
en pareil cas aux Mariannes (i).
E x il volontaire. — 11 n’est pas rare qu’un naturel s’exile volontairement
de sa peuplade pour éviter un châtiment mérité. S’il revient dans la
suite, c’est qu’il juge que la colère des personnes lésées est calmée; alors
il subit la peine de son délit, qui, n’étant plus infligée avec passion, est
nécessairement moins rigoureuse.
Offenses personnelles. — D’après les principes reçus ic i, que tout délit
exige une réparation, on doit peu s’étonner des voies de fait et surtout
des duels qui en sont ia suite. Un naturel qui avoit été battu par un individu
d’une tribu voisine et alliée, chercha à surprendre son agresseur
et parvint à l’attaquer à l’improviste avec son casse-tête; celui-ci, étant
entièrement désarmé, reçut en silence ies coups qui lui furent donnés,
et dont il résulta pour lui de graves blessures; mais la bonne harmonie
qui existoit préalablement entre les deux champions n’en fut point détruite.
Une femme olfense-t-eile son mari, celui-ci la châtie en la frappant.
Dès que cette pauvre créature s’aperçoit qu’un coup est sur ie point
de l’atteindre, elle avance la tête pour le recevoir, ce qui ne l’empêche
pas de pousser en même temps des cris horribles. On rencontre peu de
lemmes dont la tête ne porte des marques de l’atroce brutalité de leurs
maris; quelques-unes en ont le crâne tout dentelé. Dawson fait à ce sujet
la réflexion que les indigènes de la Nouvelle-Hollande doivent avoir ies
os de la tête beaucoup plus épais que les Européens, dont aucun ne pourroit
recevoir impunément des coups aussi effroyables.
Toutes les fois qu’un naturel a été victime d’un assassinat, ses parens',
et, à ce qu’ii paroît même, ses amis, sont en droit, si le véritable coupable
leur est inconnu, d’appeler au combat les personnes qui, ayant
été présentes à l’événement, doivent répondre des conséquences, soit
que l’homme attaqué ait été tué, soit qu’il n’ait été que blessé. Suscipere
tam inimicitias seu patris seu propin qui, quant amicitias necesse est: nec impla-
cabiles durant (2). On a vu un naturel qui, après la mort de sa femme,
( 1 ) K o / f j plus h a u t , pag. 478 et 4 79 .
(2) C ’ est une obligation d’épouser les haines ainsi que les a ffe c tion s, soit d’un p è re , sc
d’un pa rent; mais les haines ne sont point implacables. ( T a c i t e , de ?norüus Germanorum.)
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en société.
LIVRE V. — De.5 S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . 7 8 7
vouloit attaquer un karrahdi qui, selon lui, n’en avoit pas convenable- P ort-Jackson
ment pris soin.
Tribunaux. — Les membres de la tribu ou de la famille, réunis en
assemblée (i), jugent la gravité des délits qui intéressent la société, et
infligent ies punitions que le coupable mérite. Il est fâcheux que de plus
grands détails n’aient pu encore être réuni.s sur cet important sujet.
Propriétés territoriales et héréditaires. — Le bagage très-léger que les
naturels peuvent au besoin traîner partout avec eux forme l’ensemble de
leurs propriétés mobilières. Nous avons parlé du territoire qui appartient à
chaque tribu. Dans les cas de grande épidémie on a vu plusieurs peuplades
voisines et amies se fondre en une seule, et réunir aussi les terrains qui
leur appartenoient. Mais ce qui paroîtra singulier, c’est que quelques individus
possèdent des propriétés immobilières, qu’ils peuvent transmettre
par succession; Béneiong, cité par Collins, étoit dans ce cas. Une des
îles de la rade de Sydney iui appartenoit en propre, et lui avoit été léguée
par son père; son projet étoit de la laisser en héritage à l’un de ses compagnons,
qui étoit son ami particulier.
II n’existe chez les Nouveaux-Hollandais aucune espèce de corps F o r c e a rm é e ;
militaire permanent; aussi est-ce la peuplade ou la tribu tout entière et TOm^batc
qui prend les armes aussitôt que l’intérêt général l’exige. Lorsqu’une
armée se met en mouvement, tout marche avec elle, hommes, femmes
et enfans, et l’on conçoit qu’il doit en être ainsi, car pourroit-on abandonner
sans défense ceux qui par leur âge, leur sexe ou leur foiblesse,
seroient hors d’état de se défendre l
Les contestations de tribu à tribu ne sont pas rares, et finissent ordinairement
d’une manière tragique. En pareil cas les populations amies
se confédèrent presque toujours entre eiles; et chacun cherche, en
s’étayant de ses amis, à s’assurer une victoire plus facile et plus certaine.
Mais avant d’entrer dans quelques détails sur les divers combats et sur les
guerres que les naturels se font entre eux, disons un mot de.s armes qu’ifs
emploient.
Armes. — Les sagaies sont les principales, et se composent en générai
de deux tiges ou styles de xanthorrhéa, réunis ensemble à la manière
(c) D aw so n , op. cit.