
Distilla tion
de
l’eau de mer.
î 4 oo VOYAGE AUTOUR DU MONDE.
» aperçu, qu’en supposant l’atmosphère de i o'* au-dessus du liquide dans
» ia chaudière, il faudroit un alambic cinquante fois plus grand que ce-
» lui dont nous avons donné la description. Quon se figure maintenant
»un appareil aussi immense, et qu’on juge si 1 embarras et la depense
» peuvent jamais permettre de s’en servir.
»Nous avons voulu montrer combien ie succès de l’idée de la distilla-
» tion dans le vide avec économie est éloigné et peu probable. Nous ne
» prétendons pas qu’il est tout à fait impossible de profiter de ce moyen,
» mais nous voulons seulement dire qu’en attendant on ne doit point
» négliger la distillation par ies procédés actuellement connus.
»Nous croirions davantage à quelque succès par ia ventilation; mais ce
» n’est pas non plus un problème sans difficultés, car il faudra ne pas prodi-
» guer la force motrice si l’on emploie des hommes ; et meme si on parvient
» à découvrir un moyen d’en enlever un peu au vaisseau, il faudra aussi
» être économe de ceiui qui pourroit retarder sa marche; le mouve-
» ment de roulis appliqué àun penduie n auroit pas cet inconvenient.
n Nous concluons donc qu’en appliquant à la distillation de leau de
» mer ies procédés généralement usités, on peut avoir de très-bonne
n eau douce, à très-bas prix; assurer ainsi ia santé des marins, et obte-
» nir d’autres avantages très-grands dans la navigation. »
Y II.
Expériences sur T innocuité de Teau de mer distillée.
Les expériences faites publiquement à Paris, en presence dune commission
spéciale, ainsi qu’ii a été dit plus haut, ne purent porter la conviction
dans tous ies esprits, li étoit impossible, il est vrai, de nier lexac-
litude de nos opérations; mais on disoit que leau douce obtenue par
ce procédé auroit une action délétère sur les équipages qui en feroient
usage. Un habile académicien, M. Sage, fut un de ceux qui accrédita le
plus cette idée. Dans un Mémoire(i) publié le i 4 juillet 18 1 7 , il prétend
que i’eau de mer distillée contient toujours du alcalin oléagine
( i) C e Mémoire a pour titre : Expériences qui fo n t connoître qu 'on ne peut admettre l ’ innocuité
de l ’ eau de mer d is tillé e, e tc ., par B . Sage.
A p p e n d i c e . ¡ 4 o i
produit par la putréfaction des êtres organisés marins, dont
il assure que faction ne peut être que nuisible à féconomie animaie.
L’auteur convient, toutefois, que ce gaz échappe à l’action des réactifs;
mais il ajoute que «lorsqu’on goûte feau de mer distillée et
» qu’on la tient dans la bouche pendant quelques secondes, la langue et
» ies lèvres éprouvent une sensation aussi piquante et aussi inflamma-
» toire que celle produite par l’alose ou tout autre poisson qui n’est pas
B frais.
B Le sentiment imprimé par cette eau de mer distillée subsiste pen-
» dant plusieurs heures, et la lèvre inférieure reste gonflée pendant tout
» ce temps.
» L’eau de mer distillée ne perd pas cette propriété après avoir été ex-
» posée à i’air pendant plus d’un mois.
B Si le gaz alcalin oléaginé neptunien occasionne sur forgane du goût
B un sentiment érosif et inflammatoire, il ne peut manquer d’affecter l’é-
B conomie animale lorsqu’on a employé cette eau en boisson. »
Cette opinion d’un de nos chimistes les plus expérimentés parvint aux
oreilles du Ministre de la marine, et lui fit naître des inquiétudes sur
l’emploi de l’eau de mer distillée, que je me proposois de donner en
boisson à l’équipage de ÏUranie. Dans l’examen que la commission de
Paris avoit fait de cette eau, elle n’avoit négligé ni l’épreuve des réactifs,
ni celle de ia dégustation; en tout on favoit trouvée semblable à
feau de Seine distillée, et aucun de nous ne remarqua cette saveur piquante
et brûlante dont parle M. Sage, et encore moins ies enflures qu’il
attribue à son usage.
Néanmoins le Ministre désira que, par des expériences directes,
positives et suffisamment prolongées, on mît dans tout son jour fin-
nocuité de l’eau de mer distillée.
Des ordres furent expédiés en conséquence dans nos trois principaux
ports, de Brest, Toulon et Rochefort, afin qu’un certain nombre
d’hommes fussent soumis, pendant an moins un mois, au régime de l’eau
de mer distillée donnée exclusivement en boisson et pour la cuisson des
alimens.
Nous ferons connoître avec quelque détail le résultat de ces expé