
VOYAGE AUTOUR DU MONDE.
§. I I I .
Géologiiic
« L’archipel des Sandwich doit son origine à l’action des feux souterrains
; du moins les trois principales îles que nous avons visitées en
ü w h yh i. présentent constamment les caractères. Owhyhi, ia première et ia plus
grande, apparoît de très-loin au-dessus des flots comme un dôme immense
; mais à mesure qu’on s’en approche, les trois pitons de Mowna-
Kaah, Mowna-Roa et Mowna-Worroraï se détachent, et développent aux
regards leurs flancs isoiés.
» Le littoral de cette île est en général abrupte et peu découpé. Le soi
commence à s’élever dès le bord de la mer, et s’exhausse progressivement
sous une inclinaison rapide. Nous abordâmes du côté de l’Ouest, sur
deux points que nous ailons successivement faire connoître.
» Nous avons déjà dit combien est triste et sauvage le lieu où est bâtie
ia petite ville de Kayakakoua; pour s’en faire une idée plus complète,
qu’on imagine des couches de fer fondu, sur lesquelles seroient entassés
des blocs énormes de lave noirâtre ; les éruptions qui ont vomi à la
surface ces amas de matières confuses, ont dû être prodigieuses. Devant
nous s’élevoit une montagne [Mowna - Worroraï] dont les dernières
cimes [voy. page 551) ont plus de 3 000 mètres de hauteur, et qui,
se prolongeant en pente douce au Nord et au Sud, va se terminer à
deux promontoires éloignés l’un de l’autre d’environ huit lieues : cet
espace est tout volcanique, couvert d’une lave noire, poreuse, légère
et souvent scorifiée à la surface. Non loin du rivage, on eût dit que
l’éruption venoit d’avoir lieu (i) : des ondulations ferrugineuses et des
( J ) D ’après W . E llis ( op, c h .) , une éruption d’un des larges cráteres du sommet de iVïowna-
Worro ra ï eut lieu vers l’année 1 7 9 8 , et détruisit plusieurs v illa g e s , beaucoup de plantations
et de viviers. D e s dots de lave comblèrent une baie profonde de vingt milles d’ o u v e r tu re ,
et formèrent la côte qui s’avance aujourd’hui de 3 ou 4 milles dans lam e r , au N o rd et près
du point où est maintenant Kaïroua ou Kayakakoua . ( Voyez pl. i 7. )
L e plus grand volcan des S an dw ich , d’après ia même au to rité , est celui de K ïr a o u é a ,
situé sur le flanc oriental de M ow n a -R o a , et à 20 milles du r iv a g e ; son cratère n’a pas moins
LIVRE IV. — D e G fflAM a u x S a n d w i c h i n c l u s i v e m e n t . 5 5 9
boursouflures en larges pâtés circulaires bombés au centre, se montroient lie s S andw ich,
avec des bourrelets enroulés tout autour; quelquefois la matière en fu- C.éologie.
sion s’étoit tortillée sans affecter de forme régulière.
» Ces laves, toutes poreuses, ne contiennent du péridot qu’à leur
surface; en un seul endroit, au-dessus de la bourgade, on voit une
grande quantité de blocs basaltiques rhomboïdaux, entassés sans ordre,
et remplis de grains de péridot.
» Plusieurs coulées assez minces ont dû avoir lieu les unes au-dessus
des autres , à diverses époques ; on les reconnoît à la forme différente des
laves, aux couches distinctes qui les séparent, et qu’on peut enlever
facilement, quelquefois avec ia main. Lorsque cette matière en fusion
est entrée dans la mer, l’action de l’eau paroît y avoir occasionné de
longues et profondes fissures qu’on ne remarque point sur la lave qui n’a
pas été immergée.
» La contrée est remplie de cavernes plus ou moins vastes ; cependant
toutes n’ont point d’ouverture apparente à l’extérieur, et on ne ies
reconnoît souvent qu’au bruit qui se produit quand on marche pardessus.
Les voûtes qu’il est possible d’observer sont d’une seule pièce,
ou formées de larges morceaux. Dans l’une, la iave avoit subi un retrait
si régulier, qu’on eût dit quelle avoit été taillée exprès en cintre (2).
» II ne faut que s’élever à six ou huit cents mètres pour arriver dans
la région des nuages, dont l’action agit avec tant d’activité pour décomposer
les substances volcaniques, que c’est dans cette région seulement
que les habitans peuvent établir des cultures. Quoique les laves
y soient encore très-pressées et qu’il faille les écarter pour trouver un
peu de terre, ia végétation y est fort belle.
» Sur le second point d’Owhyhi que nous avons visité [Kohaïhaï],
de I 5 à 16 milles de circonférenc e; et le fond de cette c a v ité , de deux railles de long sur un
de large , est rempli de lave dans un épouvantable état d ébullition. V in gt-d eu x bouches lancent
continuellement des colonnes de fumé e, des flam m e s, e t plusieurs d ’entre elles des flots
d une lave étincelante qui retombe dans un bassin de feu.
( 2 ) U n peu au Su d de Karakakoua, selon le même a u teu r, se trouvent particulièrement de
nombreuses c.avernes du même genre : les unes sont h ab ité es, d’autres servent d’ateliers aux
femmes, qui y fabriquent des nattes tressées ou des étoffes de mûrier à p ap ie r ; d’autres sont
remplies de bois de sandal q ifon emmagasine.
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