
Indigènes
actuels.
voqués et respectés ailleurs, furent ici entièrement méconnus et violés sans
scrupule. La résistance de quelques individus plus courageux fut traitée de
révolte, et ieurs représailles de voies de fait criminelles; enfin, abusant à
leur égard d’une puissance immense , on leur fit souvent une guerre
meurtrière et l’on publia même contre eux ia loi martiale (t).
La nécessité, triste conséquence de l’infériorité de force et d’habileté
où les naturels se trouvoient vis-à-vis des Anglais, rétablit enfin la paix.
Mais ce ne fut qu’en 1814 que le gouverneur Macquarie, touché de
compassion pour ces malheureux' , voulut créer à Parramatta une institution
spéciale, destinée à les instruire et à ies civiliser ; projet digne de
la haute instruction et des pensées généreuses d’un si habile et si respectable
administrateur!
Ici, comme dans la plupart de leurs entreprises, les Anglais agirent
par l’intermédiaire d’un comité spécial ; le gouverneur fut le protecteur
de l’institution, et M™® Macquarie la protectrice.
Cet établissement, destiné à devenir un asife bienfaisant pour ies jeunes
aborigènes des deux sexes, ne devoit recevoir que des sujets âgés de
quatre à sept ans. D’abord six garçons et six filles y furent admis ; et ce
nombre fut augmenté ensuite, aussitôt que les circonstances pécuniaires
purent le permettre.
On donna des leçons de lecture, d’écriture, de dessin et d’arithmétique
à ces enfans. L’agriculture , certains arts mécaniques et quelques
métiers, convenables à leur âge et à leurs dispositions, furent mis
encore au nombre des études projetées; et il y eut également des leçons
de couture pour les filles.
Un article du règlement, relatif aux naturels adultes, vouloit qu’on ies
engageât à cultiver le terrain qui avoit été mis , à cet effet, à la disposition
du comité; et le gouvernement, pour les y disposer, fit toutes ies tentatives
et les efforts qui furent jugés nécessaires.
Pendant les deux premières années qui suivirent cette organisation,
( i ) C e tte forma lité, ou plutôt e s scrupule lé g a l, v is -à -v is d’une population Si violemment
dépouillée de son territoire et de la plus grande partie de ses moyens d’existence ; en faveur de
laquelle d’ailleurs on n’avoit encore rien fa it , au moins d’e ffica ce , pour compenser des maux
réels par les bienfaits de la civilisation, est vraiment digne d ’être signalée dans l’ histoire des
préoccupations humaines.
LIVRE V. — D e s S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . 895
les dépenses furent supportées par le gouvernement ; mais comme on
comptoit, pour la suite, sur le concours des souscriptions particulières,
on ne tarda pas en conséquence à les solliciter. Si Ion comprend
dans les frais annuels tout ce qui se rapporte à l’entretien, aux vêtemens
et à l’instruction des élèves, on aura, pour ia dépense occasionnée
par chacun d’eux, la somme de 15' '“ 13"'’ [ 3 9 É . '(■Ÿ\
Tous les trois mois le comité s’assembloit pour entendre et vérifier les
comptes du directeur, examiner les progrès des élèves dans la civilisation,
l’instruction, la morale, et s’assurer si l’on avoit apporté une
attention suffisante à leur nourriture, à leur santé, à leur propreté;
pour prendre enfin connoissance des abus, les corriger, et faire aux
règlemens les additions ou changemens qui paroissoient utiles au bien-
être des élèves et an perfectionnement de i institution , après avoir toutefois
soumis ces améliorations à la sanction du gouverneur.
Aucun pensionnaire ne pouvoit quitter l’institution, ni en etre retiré
par qui que ce fût, m êm e momentanément, qu’après avoir atteint l’âge
de ï6 ans lorsque c’étoit un garçon, on celui de i4 ans lorsque c’etoit
une fille.
Pendant le temps que cette école a existé, on y a successivement
reçu 37 garçons et 27 filies, ou en tout 64 enfans. De ce nombre 6 n’ont
pas voulu rester, 2 sont morts, et un autre a été retiré par son père.
11 n’y a en enfin que deux filles seules qui, après le temps révolu de ieur
éducation, ont été placées comme domestiques chez des habitans honnêtes
du pays.
J ’ai visité, moi-même, en 1819, l’institution dont il s agit, et examiné
les travaux des élèves; les exemples d’écriture qui furent mis sous mes
yeux n’étoient nullement inférieurs à ceux qui se voient dans d’autres
écoles ; et quelques paysages dessinés au crayon déceloient chez ces
jeunes indigènes toute l’intelligence et l’attention nécessaires pour imiter
correctement leurs modèles. A cette époque le nombre des élèves de fun
et de l’autre sexe étoit de 26, et on ne les tenoit séparés que la nuit.
Il est malheureux pour cette institution qu’elle n’ait pas été vue du
public avec autant d’intérêt qu’on eût pu le désirer. M. Macquarie la
soutint avec ardeur, tant qu’il administra la colonie; par ses ordres,
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actuel.'.