
Réflexions
générales.
n S
pousser au Nord, jusqu’à ia baie Moreton, les établissemens de pénalité,
placés précédemment dans les champs fertiles de Newcastle et de Port-
Macqnarie.
On a dit encore que ce digne général avoit trop multiplié les cartes de
congé ; mais ne se rappelle-t-on plus les injonctions si souvent répétées des
ministres aux gouverneurs de la Nouvelle-Gaües, de chercher par tous
les moyens possibles à diminuer les dépenses que l’entretien des convicts
occasionnoit au trésor royal (i)! Or nous avons dit plus haut que les
personnes munies de ces espèces de cédules, n ayant pius alors aucun
droit aux rations fournies paiT’état, se trouvoient ainsi n’être plus à sa
charge.
Et pourroit-on avoir oublié qu’on doit encore au gouverneur Macquarie
la première grande route qui ait traversé les Montagnes-Bleues,
ia régularisation de la ville de Sydney, la fondation de celles de Bathurst,
Campbeii, Macquarie, etc.; que c’est également à lui que sont dus
le tracé et ia construction d’une multitude de chemins et de ponts qui
y conduisent; la prospérité des finances, qu’assura surtout la création de
ia banque de Sydney; l’ordre de la police à terre comme sur rade; de
touchans et persévérans efforts pour la civilisation des sauvages; enfin
cette multitude d’ordonnances qui eurent sans cesse pour objet le respect
des choses saintes, l’encouragement des mariages, l’épurement des moeurs,
la propagation de l’éducation et de l’instruction des créoles, le développement
de l’agriculture et du commerce, le bonheur et ia prospérité des
colons !
Il semble que dans le jugement qu’on porte d’un administrateur on
devroit toujours considérer le mérite des premières difficultés vaincues,
non moins que l’importance de ses travaux et la pureté de ses intentions.
Tel projet qui dans la spéculation paroît irréprochable rencontre souvent
dans la pratique d’immenses difficultés. L’administration, comme
ies sciences physiques, marche progressivement vers la perfection, mais on
n’y arrive jamais tout à fait; et maintenant, comme du temps de Bossuet,
les vues des hommes se trouvent toujours courtes par quelque endroit.
Le général Macquarie est mort depuis plusieurs années, médiocrement
(i) Marsden, Mémoire sur l ’agriculture de la colonie, M. S.
LIVRE V. — D e s S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t , i 199
accommodé du côté de la fortune, et avant d’avoir reçu les récompenses
que lui méritoient la loyauté et ia longueur de ses services; on assure
même que les contrariétés qui lui furent suscitées hâtèrent sa fin. Ayant
eu le bonheur de vivre dans son intimité, tant à Port-Jackson qu’en Angleterre,
j’ai pu connoître à la fois son administration vigoureuse et
prévoyante, la candeur de son âme, la noblesse de son caractère, son
désintéressement, et cette bonté inépuisable et paternelle qui le faisoit
généralement respecter et chérir.
La coionie qu’il gouverna pendant douze ans a pris par ses soins un
essor prodigieux. L’impassible histoire dira ia part qui lui est due de ia
reconnoissance publique; et, comme Labourdonnais à l’Ile-de-France,
il vivra à jamais dans la mémoire des colons, et sera nommé le.bienfaiteur
d’un pays destiné à jouer plus tard un rôle important dans la politique
des nations.
Macquarie a laissé une veuve aussi distinguée par les qualités de son
coeur que par le mérite de son esprit, et un fils digne de sa vive sollicitude.
Je ne les reverrai vraisemblablement jamais; mais si ces lignes, dictées par
l’amour de la vérité et par ia reconnoissance, tombent un jour sous leurs
yeux, puissent-ils y trouver un gage non douteux de l’affection et du respect
que j’ai voués à la mémoire comme au nom de Macquarie.
On ne peut disconvenir que la déportation n’ait épuré, jusqu’à un certain
point, la population de l’Angleterre; toutefois les criminels convicts
n’ayant pas tous été déportés à vie, quelques-uns ont pu conserver i’espoir
de revenir dans leur patrie; il est vrai que pour les retenir à la Nouvelle-
Hollande le gouvernement leur a d’abord offert de si grands avantages
que la plupart s’y sont définitivement fixés. Un tel état de choses ne sauroit
se renouveler désormais, en raison de ce que ies concessions gratuites
de terre, qu’on obtenoit autrefois avec beaucoup de facilité, ne doivent
plus avoir lieu maintenant. Les habitans, en effet, seront tenus de payer
intégralement, à l’avenir, la vaieur des terres dont la concession ieur
sera faite, d’où l’on doit conclure que les colons riches et aisés seront
les seuls qui pourront devenir propriétaires.
Réflexions
générales.