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fond de cale. Par la même occasion la graisse fut nettoyée et on la rembarqua
ensuite. Nous remîmes sous voiles le 24» par le plus beau temps
du monde, et, poussés par un petit vent de S. E ., nous croisâmes de
nouveau l’embouchure de la baie Française. Des centaines de phoques
placés sur ies rochers qui sont au Nord de la pointe de l’Aigle nous
assaillirent à notre passage par une sorte d’aboiement. La mer étoit couverte
de grands albatros blancs, qui s’élevoient dans les airs devant nous
et devant les baleines qui, à chaque instartt et de tous les points de l’horizon,
surgissoient du fond de la mer.
» Le vent se hala enfin au Nord , et cependant nous fut toujours favorable;
mais comme nous avions encore quelques hommes à terre, ou fut
obligé de mouiller de nouveau pour ies embarquer et loger en même
temps le reste de la graisse des 102 phoques qui avoient été tués le.s
jours précédens. Ainsi la cargaison du Pinguin se trouva complète, et on
laissa la vie à 100 autres lions marins qui furent réservés pour une prochaine
occasion. ^
» Avant la nuit nous remîmes sous voiles, et nous nous tînmes eu
louvoyant, environ à 3 lieues de la côte, en virant de bord à chaque
demi-heure. Au jour, le vent ayant augmenté de force, nous nous rap-
2 6 . prochâmes de terre; mais comme nou.s n’avions plus de provisions
fraîches, en laissa porter pour aller mouiller dans ia baie Marville, par
le travers de laquelle nous nous trouvions alors. La chasse, pendant ia-
2 7 . quelle un de nos chiens fut grièvement blessé, nous procura un très-gros
cochon.
2 8 . » L ’impétuosité de la brise notis retint à l’ancre jusqu’au 28 mars
au matin, que nous appareiilâme.s enfin avec un léger vent de Stid qui
nous permit de sortir de la baie. Nous passâmes de nuit devant l’ou-
2 9 . vertiire du canal Falkland, et le soir du 29 nous donnâmes dans le
détroit qui conduit au port Tamar, où nous fûmes mouiller pour nous
30. procurer des provisions fraîches; enfin le 30 nous arrivâmes au Port-
Egmont, où nous trouvâmes le brig la Jane, navire écossais de i 20 tonneaux,
qui, après avoir fait la pêche de la baleine, essayoit de compléter
sa cargaison avec de l’huile de phoque; mais il ne paroissoit pas
heureux dans cette entreprise, c’est au moins ce que prétendoieiit les
matelots américains du Pinguin, qui se moquoient même de sa manière
de faire la chasse à ces animaux.
” A peine fûmes-nous mouillés, que la goëlette le Brooks fi), qui étoit
également sous les ordres du capitaine Orne, arriva vent-arrière auprès
de nous. Ce capitaine, inquiet de la longue absence du Pinguin, envoyoit
le Brooks à sa recherche, et lui expédioit un supplément de provisions;
dès qu’on sut que rien de malheureux ne lui étoit arrivé, la goëlette se
hâta de retourner à l’île West-Point, et nous l’y suivîmes.
•• Le lendemain 3 i mars nous entrâmes dans ie port qui gît à l’Est 3"
de cette île, et mouillâmes par le travers des fourneaux à huile qui
avoient été établis à terre.
» J ’avois un extrême désir d’entamer tout de suite mes conférences avec
le capitaine Orne, et une envie non moins grande de quitter le dégoûtant
navire à bord duquel je me trouvois; déjà je m’en étois expliqué catégoriquement
avec ie patron Hamond; mais celui-ci, au lieu de me conduire
sur-le-champ à bord du Ge'néral Knox, comme je ie demar.dois,
partit furtivement pour aller, ainsi que je l’imagine, faire part au capitaine
Orne de ses idées particulières, relativement à la position de l’é-
quipage naufragé.
» Ce ne fut qu’environ une heure et demie après qu’une embarcation
vint me chercher. Le capitaine du Général Knox me reçut avec beaucoup
de réserve, et lut avec indifférence les papiers que je lui remis, au
nombre desquels se trouvoit cependant notre sauf-conduit du gouvernement
des Etats-Unis, et m’assura qu’il en comprenoit bien ie contenu.
Son devoir, me dit-il, étoit de nous secourir, puisque nous étions dans
une position trcs-misérable ; mais comme ie bâtiment qu’il commandoit
ne lui appartenoit pas, il m’assura ne pouvoir abandonner ies travaux
dont il étoit chargé, sans une compensation convenable. Je répondis
que telle avoit toujours été notre intention, et qu’il avoit dû s’en convaincre
en lisant la lettre que je lui avois remise de la part du commandant
de l’Uranie ; qu’au reste je le priois de vouloir bien encore jeter un
coup d’oeil sur les instructions dont j’étois porteur. A cela il répliqua
{ i ; Le Brooks étoil d» port de 40 tonneaux, et le Pinguin de 30 seulement.
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Mars.