
Incursion En continuant notre route, un de ces arbres que ies Anglais apneilent
.1 B.athurst. , . p _ * b 1 r
1819. [eucalyptus mammife r a fut aperçu brûlant dans toute sa lon-
N ov em b re. gueur, et ne formant pius qu’un seui charbon ardent.
Le pays que nous parcourûmes est beau et plat, et la route très-
agréable; les mimosas qui y abondent forment de chaque côté une haie
qui repose la vue par i’élégance du feuiiiage , et dont les fleurs répandent
dans l’air la plus suave odeur.
Cependant le ciel s’étoit coiwert, et tout nous présageoit une bourrasque
prochaine ; le tonnerre, qui ne tarda pas à se faire entendre, se
rapprocha très-vite de nous, et fut bientôt suivi d’une averse qui nous
accompagna jusqu’au premier poste militaire (Penrith) qu’on rencontre
sur la route.
M. Lawson, croyant pouvoir devancer l’orage, partit au grand galop,
après nous avoir fait signe de le suivre; mais au bout de quelques minutes
nous étions déjà traversés par la pluie, et ce ne fut qu’un quart
d’heure après que nous pûmes atteindre l’abri désiré.
De Penrith nous allâmes passer la nuit à Régent-Ville, campagne de
sir John Jamieson, médecin des armées navales de S. M. B . , & c .,
qui possède sur la bande orientale de la Nepean des propriétés considérables
et très-fertiles. La rivière, au bas de sa charmante habitation,
est large de quatre-vingts à cent pieds, et en a quinze à dix-huit
de profondeur : son cours est tranquille; ses eaux pures et fraîches
abondent en excellens poissons.
Jusque-là nous n’avions rencontré qu’un sol peu arrosé, dont une partie
seulement paroissoit .susceptible de culture ; mais, de chaque côté de la
Nepean, nous vîmes se développer un terrain uni, où ies arbres étoient
gigantesques, et, quoique nombreux, assez espacés pour laisser des
intervalles où croissoient une multitude de graminées formant une
magnifique prairie naturelle. La Nepean, dans ses débordemens, augmente
la fertilité des plaines qu’elle arrose en y déposant son iimon,
faveur quelle fait trop souvent payer par d’assez grands ravages.
Après le dîner, servi avec un iuxe d’argenterie que nous nous attendions
peu à rencontrer dans ces lieux naguère sauvages, sir John
Jamieson proposa une partie de promenade en canot, que M. Gaudichaud
LIVRE V. —- D e s S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . ¿39
accepta. Iis allèrent visiter l’embouchure de la rivière Warragamba
(pi. 93 et p6) , qui se jette dans la Nepean à quelque distance
au Sud de Régent-Vilie, et ils y jouirent de la vue ia plus pittoresque.
Le lendemain, notre hôte voulut nous accompagner jusqu’au pied des
Montagnes-Bleues, et nous décida à traverser la rivière en face de
sa maison, tandis que nos chevaux et nos bagages iroient prendre ia
grande route par ie gué d’Emu [Emu fo rd ], où l’on passe ordinairement
la Nepean. Nous fûmes bientôt à l’autre bord, et dans cette belle
plaine des Emus [Emu plains], si renommée par sa fertilité. M. Jamieson
nous proposa d’aller visiter le petit village qu’habitent les convicts chargés
de la culture de cette réserve du gouvernement; il se compose de vingt-
cinq à trente cabanes, où sont réunis cent quarante hommes, sous la
direction d’un intendant des travaux, convict lui-même.
Nos bagages tardoient beaucoup à nous rejoindre : M. Gaudichaud
suivit pendant quelque temps la route du côté du Nord , pour aller au-
devant d’eux; on craignoit que quelque accident ne leur fût arrivé au
passage de ia Nepean. Après un mille environ de marche, il rencontra
notre petit convoi, et vit avec surprise qu’il y manquoit encore un cheval.
On lui apprit que, dès le grand matin, M. Jamieson avoit jugé convenable
d’envoyer un homme à cheval à la recherche du fugitif de la veille , et
que ni i’un ni l’autre n’ayant encore reparu, c’étoit ce qui avoit si fort
retardé le départ de nos gens. M. Jamieson, s’apercevant de loin que sa
trop officieuse sollicitude avoit mal réussi, s’empressa de prendre congé ,
afin d’éviter toute explication.
Ce nouveau contre-temps ajouta beaucoup aux difficultés de notre
position. M. Lawson, pour qui la tâche de nous accompagner étoit, il
faut en convenir, assez désagréable, parut pencher pour la discontinuation
de notre petit voyage : il nous paria des difficultés du chemin, de la longueur
delà route, de ia mauvaise nourriture, de la pluie, et du défaut
de gîtes ; mais quand il nous vit bien décidés à atteindre le but de notre
mission, fût-ce même à pied , notre résolution ébranla la sienne, et il ne
s’occupa plus que des moyens de diminuer les désagrémens auxquels
nous nous trouverions forcément exposés.
M m m m *
1 8 1 9 .
Novembre.