
1 8 1 9 .
N ovembre.
Décembre.
une galanterie du gouverneur, qui envoyoit la musique du régiment,
afin de nous rendre ie trajet plus agréable. Les sons mâles de cette
harmonie guerrière, répétés de temps en temps par les échos de ia
rive, vinrent en effet doubler le plaisir que nous prenions à contempler
le paysage vraiment romantique qui se dérouloit à nos regards, et où
de jolies habitations des champs, qui attestoient ies soins assidus du la borieux
cultivateur, succédoient par intervalle à de vastes terrains sur
lesquels la nature encore brute étaioit ses sauvages beautés.
Après trois heures de cette douce navigation, nous abordâmes à un
mille du lieu qu'habite le gouverneur, près d’une ancienne caserne où
nous attendoit un de ses aides-de-camp ; le reste de la route eut lieu par
terre. La réception qu’il nous fit fut des plus polies, et dégagée de cette
froide étiquette de ia ville. Nous ne fûmes pas moins bien accueillis par
M.'’"“ Macquarie, femme d’un mérite éminent, qui nous fit avec autant
de noblesse que de bonté les honneurs de sa maison.
Les deux jours que nous passâmes à Parramatta fiirent très-agréablement
employés à parcourir les alentours jusqu’à Prospect-Hill, à visiter
ies jardins du gouverneur et les édifices publics de la ville les plus remarquables.
Pour varier nos plaisirs, ce fut parterre que nous revînmes à Sydney.
Nous rencontrâmes en chemin ceux de nos amis qui, se rendant
aux Montagnes-Bleues, devoient s’avancer au-delà jusqu’à l’établissement
de Bathurst. Il sera rendu compte plus tard de cette petite
expédition, principalement destinée à des recherches d’histoire naturelle.
Le désir de diriger les travaux de l’observatoire et d’y prendre part moi-
même, m’avoit forcé de revenir à Sydney beaucoup plus tôt que nos aimables
hôtes n’eussent voulu le permettre; mais il me fallut résister à
ieurs instances obligeantes; je ne vis même qu’à la hâte plusieurs anciennes
connoissances qui habitent près de Parramatta, et chez lesquels
j’eusse pris plaisir à m’arrêter quelques instans, si le devoir n’eût
parlé plus haut encore que i’amitié.
Le 6 décembre, MM. Bérard et Gaimard allèrent visiter la petite ville
de Liverpool, bâtie dans un site fort agréable, sur les bords de la rivière
LIVRE V. ■— D e s S a n d w i c h à P o r t - J a c k s o n i n c l u s i v e m e n t . ¿3 1
George; elle leur parut susceptible d’un agrandissement considérable.
La route qui y conduit, moins bien entretenue que celle de Parramatta, est
presque par-tout bordée d’arbres plus beaux et d’une végétation pius
active.
Le 8 , MM. Quoy, Gaudichaud et Peiiion revinrent de leur expédition
aux Montagnes-Bleues. Le lendemain une invitation de M. le juge-
avocat Wylde nous fut adressée pour un dîner et un bal où i’état-
major de l ’Uranie et tous ies notables habitans de Sydney furent également
réunis. Une salle immense avoit été disposée pour cette fête aussi
somptueuse qu’élégamment ordonnée. Les ornemens de ia saile n’étoient
pas seulement des guirlandes de feuillage et de fleurs; par une attention
délicate, les armes de France, d’Angleterre, celies du maître de la maison
et du commandant àe l’Uranie, avoient été peintes dans des cartels;
on avoit aussi représenté sur le plancher, et comme pour servir de
tapis de pied , le vaisseau ï Adventure, de Cook , l ’Uranie et la Mermaid(\).
Des toasts nombreux furent portés pendant le repas, auquel la gaieté
et le bon ton présidèrent à l’envi. Les danses se prolongèrent fort avant
dans la nuit.
Une chasse aux kangaroos , projetée depuis quelque temps, fut enfin
arrêtée pour ie 1 1 décembre. Les chasseurs, au nombre de vingt, se
composoient d’une jeune demoiselle de Sydney, de MM. Bigge, Wylde,
Piper, Parry, de plusieurs autres officiers de ia garnison, et du père de
la demoiselle. «Nous étions tous sans armes, dit M. Gaimard, qui en
faisoit aussi partie, et généralement très-bien montés. M. le capitaine
Parry, chef de la chasse, nous précédoit, suivi de la meute, qui étoit
composée de seize à dix-huit chiens liés deux à deux. Lorsque nous
fûmes arrivés près de Botany-Bay , ces animaux furent découplés, et
s’élancèrent dans les champs, où nous les suivîmes au galop, en ayant
soin de ne jamais les devancer ; plusieurs chasseurs les excitoient par le
son du cor. Bientôt ies aboiements de la meute annoncèrent qu’elle
avoit empaumé la voie, et je vis peu de temps après passer non loin de
moi un kanguroo, qui, par une fuite précipitée, tâchoit de se sous-
( I ) C e dernier n a v ire , avons-nous dit plus h au t , commandé par le capitaine P. P . King ,
étoit employé à l’exploration des côtes de la N o u v e lle -H o llan d e .
L i l l *
S é jo u r
Port-Jackson.
1 8 1 9 .
D é cem b re .