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Mars.
Su/'/e du séjour
à la baie
F rança ise.
etdes cochons marrons, qu’il est si difficile de se procurer sans un tel
secours. Notre navigation ayant été favorisée par le vent, nous nous
trouvâmes dès ie lendemain à l’entrée de la baie Française. Le temps
étoit beau, la brise légère, mais une longue houle de l’Est faisant
alors briser la mer sur la roche de l'Uranie, nous pûmes apercevoir
sa position.
■> La variation des vents ne nous permit d’atteindre le mouillage que
le 4 dans l’après-midi. La présence du Mercury que nous découvrîmes ne
fit pas à tout le monde à bord autant de plaisir qu’à moi : il est facile
d’en deviner les motifs. Au reste, je ie répète, ce voyage du capitaine
Orne à la baie Française ne pouvoit, de son aveu même, être nuisible
aux intérêts de ses armateurs , ces parages étant alors au nombre de
ceux où les lions marins se montrent avec le plus d’abondance. »
Tei fut le récit de M. Dubaut. J ’avois déjà commencé à entrer en
pourparlers avec le capitaine du Mercury pour les conditions de notre
passage à Rio de Janeiro, mais j’attendois l’arrivée de l’officier que j’avois
envoyé à West-Point, avant de prendre des arrangemens définitifs; les
prétentions exagérées du capitaine Orne éloignèrent entièrement l’idée
que j’avois eue de traiter avec iui; voulant toutefois le dédommager de
la perte de temps que iui avoit occasionnée son voyage au camp de
l’Uranie, je lui offris quelques objets de l’armement de la corvette, inutiles
pour nous, et dont il parut être pleinement satisfait.
Les réparations du Mercury étoient terminées. Son capitaine, voyant
qu’ii étoit en état de reprendre la mer, me demanda de quelle somme
il m’étoit redevable. Je lui répondis que ies officiers de la tparine
française n’avoient point l’habitude de faire payer les services qu’ils
étoient assez heureux pour rendre aux navires en détresse; que je
m’applaudissois d’avoir pu, après mon triste naufrage et malgré la malheureuse
situation dans laquelle je me trouvois, lui être de quelque utilité;
qu’il ne me devoit absolument rien, mais que j’espérois qu’il voudroit
bien se rappeler sa promesse de me conduire moi, mon équipage
LIVRE VI. — D e P o r t - J a c k s o n e n F r a n c e . > 2 5 9
et nos bagages à Rio de Janeiro, puisque des arrangemens avec le capitaine
Orne ne pouvoient avoir lieu; que toutefois, ne voulant pas que
ce service qu’ii nous rendroit devînt onéreux à ses armateurs, je desirois
que nous traitassions à l’amiable des conditions du fret.
Dans les paysan l’on n’est affecté que de l'esprit de commerce, dit Montesquieu
(1), on trafique de toutes les actions humaines ct de toutes les vertus
morales les plus petites choses, celles que l'humanité demande, s’y font et s'y
donnent pour de l’argent. Ces réflexions durent naturellement se présenter
à ma pensée à l’occasion de mes transactions avec le capitaine du Mercury.
Sans égard pour la conduite désintéressée que j’avois tenue avec lui, il ne
craignit pas de me demander une somme qui eût dû paroître excessive
dans tous les cas, mais qui l’étoit bien davantage encore dans ia circonstance
particulière où nous nous étions réciproquement placés.
D’abord il prétendit exiger, pour nous conduire seulement à Buenos-
Ayres, 100 piastres par tête pour notre passage personnel, et 2 jo o
pour le transport de nos bagages et effets , c’est-à-dire en tout 14 500 piastres
[78 735^] pour ce court trajet de 3 50 lieues; et encore étoit-il bien
entendu que nous pourvoirions nous-mêmes à notre subsistance, avec nos
propres ressources.
Cette demande nous parut à tous exorbitante; d’ailleurs Buenos-Ayres
n’étant pas un lieu où nos travaux nous attirassent, j’insistai pour que
nous fussions conduits au Brésil et non ailleurs.
Il seroit aussi long que fastidieux de rapporter en détail toutes les
paroles qui furent dites dans cette circonstance, et d’exprimer tous les déplaisirs
que j’en éprouvai personnellement. La discussion prit parfois de
part et d’autre un caractère assez vif; mais parce que nous avions la force
numérique de notre côté, je voulus me tenir dans les bornes de modération
que nous prescrivoient à la fois la raison et les convenances. Dans
une affaire de cette gravité, et pendant ies contestations qui en furent
la suite, et qui durèrent plusieurs jours, on pense bien que je ne manquai
pas de m’appuyer de l’opinion des officiers de mon état-major, qu’à
cet effet j’avois réunis autour de moi en conseil.
i B 20.
A v r il.