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au N ouveau-
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nomme Mono dos Canudos, et au seul passage par lequel on puisse se
rendre à Minas-Geraes. C ’est là aussi que prennent leur source une foule
de rivières et de ruisseaux qui arrosent la contrée.
« Dès que nous fûmes au sommet de cette montagne, nous nous trouvâmes
enveloppés de nuages qui mouillèrent à moitié nos vêtemens; et
dans cet état nous éprouvions un v if sentiment de froid. On nous donna
du café, au poste militaire, et bientôt nous en partîmes. Après avoir
monté quelque temps encore, nous nous trouvâmes sur ie revers de ia
chaîne qui fait face au Nord; une heure plus tard les nuages disparurent,
et nous permirent de jouir de l’aspect du soleii, et de la fin d’une belle
soirée. Un jeune Suisse, qui s’étoit joint à nous pendant la route, nous
accompagna.
» Du haut d’une coiline nous découvrons enfin les jolies maisons
blanches et bien alignées qui composent le Nouveau-Fribourg. Nous
traversons, en y arrivant, une grande place; de tous côtés nous entendons
parler français; nous ne sommes plus étrangers ici : des femmes,
des enfans nous entourent et nous questionnent dans notre langue. Si
j’ajoute à cela le contraste de ces figures blanches avec celles que nous
étions habitués à voir depuis quelque temps, on concevra l’illusion qui
dut nous faire croire que nous étions dans un village français.
» Comme chaque habitation étoit remplie par un nombre d’individus
déterminé, il nous fut difficile de trouver nn logement. Nous fûmes reçus
cependant à l’enseigne du Cheval blanc, dans une espèce de cabaret,
ou, faute de lit, ii nous fallut coucher par terre.
>• Le soir j allai saluer l’inspecteur de la colonie; je trouvai dans M®' de
Miranda(i), grand chancelier de Portugal, un homme très-respectable,
qui, après m’avoir comblé de politesses, me fit voir les travaux qu’on
avoit faits, ceux dont on alloit s’occuper encore, et me témoigna enfin
le désir que je vinsse loger dans sa maison; je ie refusai, par discrétion,
en raison du grand nombre d’étrangers qui étoient déjà chez lui;
mais il exigea que, pendant mon séjour, je vinsse, ainsi quemón compagnon
de voyage, prendre au moins mes repas chez lui.
( i) P ie r re M a ch a d o de M ir a n d a M a lh e ir o , grand chancelier du ro y aum e , directeur et
inspecteur de la colonie des Suisses, etc.
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» Le lendemain je m’empressai d’aller voir M. Bazet, qui est Français
et médecin de la colonie; il m’offrit un logement, que j’acceptai. Je
vis aussi M. le curé, homme encore jeune et très-aimable; M. Castillo,
professeur de médecine à i’université de Coïmbre, et qui, venu au
Brésil pour des affaires particulières, avoit accompagné M®' de Miranda,
auquel ses conseils avoient été très-utiies ; enfin piusieurs colons et
autres personnes attachées à l’administration de ia colonie.
» Mais avant de parler de l’état présent de cet établissement, je dois
entrer dans quelques détails sur les circonstances qui se rattachent à sa
fondation.
» Le gouvernement du canton de Fribourg sollicita du roi de Portugal,
en 18 18 , l’établissement d’une colonie de Suisses au Brésil; et des capitalistes
se chargèrent de transporter jusque dans la baie de Rio de Ja neiro
cent familles, hommes, femmes et enfans, avec tous ieurs effets et
outils. Le roi, désirant à la fois encourager la culture et augmenter le
nombre des habitans du Brésil, crut ne pouvoir mieux faire que d’accéder
aux propositions qui lui étoient adressées. Des marchés furent passés,
et une somme d’un peu pius de 500* (i) fut accordée pour les frais de
passage et la nourriture de chaque individu des deux sexes, de leurs effets
et instrumens aratoires. Toutefois je ne sais si l’on prit tous les soins
convenables de ces passagers, mais les funestes résultats qui ont suivi
pourroient en faire douter (2). Queiques navires partirent, alors que la
saison étoit très-avancée, et éprouvèrent des mauvais temps. L’un d’eux
échoua sur la côte d’Angleterre, mais fut assez heureux pour s’en retirer;
un autre, par l’impéritie de son capitaine, se présenta plusieurs fois devant
Rio de Janeiro sans pouvoir y entrer, et, ayant repris ie large, fit
une traversée de plus de quatre mois, exposant ses malheureux passagers
à mourir de faim. Enfin, il n’y eut guère que deux bâtimens qui arrivèrent
sans malencontre, tandis que ceux où les fièvres se déclarèrent avec le plus
( 1) C ’étoit exactement la somme de lO O piastres d’ Espagne [ 543 étoit le prix conv
en u ; mais les enfans âgés de moins de trois ans devoient être transportés gratis.
(2) D e s émigrans ayant passé par la H o llan d e y contractèrent une fièvre contagieuse er
épidémique, dont plusieurs d’entre eux furent v ic tim e s ; tou te fois , après un certain séjour en
Am é riq u e , ils virent disparoître toute espèce de trace de ce fléau. (E x tra it d’une lettre écrite par
un Suisse ém igré , en date du 28 jan v ie r 1 8 2 1 , et insérée dans la Revue encyclopédique, t. X I I . )
C o u rse
au N o u v e a u -
Fribou rg.