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M. Hervaiid, capitaine de ia goëlette du commerce Ja Dorade, dont les
renseignemens et l’obligeance m’ont été particulièrement utiles. Nous
descendîmes ensuite à terre, et M. Cavaillon voulut bien nous accompagner
pendant les visites d’étiquette que nous avions à faire.
M. ie général gouverneur Lecorre, baron de ia Laguna, et M, 1 amiral
Pinto nous reçurent d’une manière très-gracieuse, et nous offrirent toutes
les facilités nécessaires pour la suite de nos operations scientifiques. Je
demandai tout de suite un local propre à l’établissement de notre observatoire.
Le gouverneur m’offrit ie fort San-José, et il fut convenu que
dès ie iendemain j’irois y faire choix de l’emplacement ie plus convenable
à nos desseins.
De retour chez lui, M. Cavaillon me présenta piusieurs négocians
français établis dans le pays, et particuiièrement M. Moze, i’un des plus
remarquables par son instruction, son affabilité et son obligeance. C ’est
principalement à lui que je dois ies notes sur le commerce de Montévidéo
que je rapporterai plus tard.
On concevra sans peine que nous étions fort avides de nouvelles d’Europe;
aussi reçûmes-nous avec empressement toutes ceiles qu’on nous
fit ie plaisir de nous communiquer. Les plus importantes furent la mort
du roi d’Angleterre, celle du duc de Kent et l’assassinat du duc de Berry.
L’époque de ce dernier événement coïncide d’une manière singulière avec
celle du naufrage de l'Uranie.
Notre navire, en effet, frappa sur ie récif sous-marin, le i 4 février 1820,
à 5'' 46' du soir, selon notre compte; mais étant alors par 60° 7' de longitude
à l’Ouest de Paris, ii était abord de moins que dans cette ville;
et comme, en raison de la route que nous venions de faire autour du
globe, nous avions tin jour de trop dans notre date, il n’étoit donc réellement
à Paris, en tenant compte aussi de la différence des méridiens, que
ie 13 février à f 4 y' du soir, Iors de l’événement des Maiouines; or
ie duc de Berry fut assassiné ie 13 février, à 1 1 ’’ du soir, c’est-à-dire
seulement i*' 13 ' plus tard.
Le curé de Montévidéo, don Damaso Antonio Larraiiaga, homme
d’une instruction variée, s’occupe avec succès de i’étude des sciences, et
particulièrement de l’histoire naturelle, de la météorologie, de i’astro-
LIVRE VI. — D e P o r t - J a c k s o n e n F r a n c e . 1323
nomie; toutes les années il publie un petit almanach, où il donne un 1820.
résumé de ses observations et quelques autres dctaiis curieux. M. le
docteur Chapus, médecin français, plein d’obiigeance aussi, voulut bien
m’accompagner chez cet habile ecclésiastique, et je n’eus qu’à me féliciter
de cette visite intéressante.
Notre observatoire fut décidément établi le 1 1 mai sur le bastion J ' -
méridional du fort S;in-José; j’en nommai M. Duperrey directeur, et
prescrivis qu’un des officiers de l’expédition iroit, à tour de rôle, y observer
journellement sous ses ordres. M. Tournier, chef de timonerie,
en fut appointé ie gardien , et nos montres marines y furent immédiatement
transportées.
Je me trouvois Je matin à bord de la Physicienne, quand le capitaine
Calvin s’y rendit, et me proposa d’un grand sang-froid de me céder à bon
compte les objets qu’ii m’avoit déjà vendus, et qui appartenoient à l’armement
de la corvette, J ’eus, à cet égard, avec lui une conversation
très-vive, à l’issue de laquelle je défendis à i’officier de garde de laisser
débarquer aucun des objets dont ce capitaine venoit de me parier.
Le 12 on illumina la ville en i’honnetir de la naissance du roi de 12.
Portugal, que l’on célébra le lendemain par des salves d’artillerie tirées
tant à terre qu’en rade. A cette occasion nous reçûmes, M. l’abbé de
Quélen et moi, une invitation à dîner chez le -gouverneur, qui s’excusa
de n’avoir pas engagé mes autres officiers, sur i’exiguïté de son local.
Le repas eut lieu de 5’’ à 7" / ; tout fut servi froid, mais ies mets
étoient bien apprêtés et en grand nombre.
Le soir, à 9" Ÿ, on me remit, pour moi et mon état - major, de.s
invitations pour le bal que donnoit la ville à l’occasion de la même
solennité. II étoit bien tard pour en faire usage, puisque la fête devoit
commencer à 10 ", et il me fut même impossible de faire part de cette
invitation âmes officiers, qui, d’ailleurs, n’eussent pu s’y rendre, en
raison de l’heure trop avancée. Je voulus cependant aller faire un tour
à cette réunion pour juger du coup d’oeii. Les dames étoient bien parées
et mises avec goût; mais leurs chaussures ridiculement mal faites ne
répondoient ni à la petitesse, ni à ia jolie forme de leurs pieds. Je vis
peu de pierreries.
Je reçus la visite d’un officier italien, que j’avois déjà remarqué chez 15.