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Le temps étoit trop mauvais pour que nous essayassions de réparer,
autant du moins qu’on pouvoit le faire en mer, une aussi, forte avarie.
Mais comme le vent étoit favorable à notre route, et que par conséquent
il n’étoit pas nécessaire de louvoyer, nous remerciâmes de grand coeur-
la Providence de ia protection évidente qu’elle nous accordoit. Trop
heureux d’être quitte à si bon marché de la fureur des vagues, nous ne
fîmes pour ainsi dire pas attention à la perte de notre canot de poupe,
qu’un coup de mer avoit enlevé comme une plume, malgré toutes ies
saisines et palans dont il étoit entouré; encore moins pûmes-nous regretter
ia perte de queiques-unes de nos provisions particulières cjue , faute
de place, on avoit logées dans cette embarcation.
Sur le soir M. Lamarche fit une chute assez grave, mais qui n’eut heureusement
pas de suite dangereuse; un clou cependant ie blessa à la tempe
et le laissa longtemps sans connoissance, mais cet officier se remit
promptement.
II- Le temps, un peu moins mauvais le lendemain, nous permit de réparer
nos avaries; le petit mât de hune fut installé en beaupré, et nous remplaçâmes
celui-là par un mât de petit perroquet. Notre gréement fut
assujetti à cette disposition nouvelle, et nous continuâmes, sans de
nouveaux accidens, notre course jusqu’à Rio de Janeiro. Nous nous pré-
•7- sentâmes le 17 à l’entrée de la baie; mais, un calme ennuyeux ayant
-o- succédé à la bourrasque, il ne fut pas possible d’y pénétrer avant ie 20
dans ia soirée; nous allâmes tout de suite mouiller en dedans de l’îie
das Cobras.
Il faut l’avouer, la Physicienne n’avoit pas une tournure très-guerrière,
et ses avaries récentes ajoutoient encore à sa mauvaise mine; les douaniers
y furent trompés, et accostèrent le bord, croyant s’adresser à un
bâtiment du commerce, en dépit même de ia flamme de guerre qui
étoit en tête de mât ; nous fûmes donc obligé de montrer ce signe à ces
messieurs, en ieur donnant l’avertissement positif qu’ils n’avoient rien à
voir ni à faire sur notre vaisseau.
C H A P I T R E XEVI II.
Seconde station an Brésil.
§. !."■
Séjour à Rio de Janeiro.
A peine la Physicienne étoit-elie rendue au mouillage, que j’envoyai
un officier complimenter l’amiral portugais, qui à son tour se hâta de
remplir à mon égard le même acte de politesse. Le commandant d’une
division anglaise, composée de plusieurs navires de guerre, m’envoya
aussi offrir ses services; enfin un officier portugais attaché à la maison
du roi (!e capitaine de vaisseau Pio) vint s’informer de la nature de ma
mission et de l’objet spécial de ma relâche.
Le 2 [, au lever du soleil, nous saluâmes la place de 2 1 coups de canon,
et le lendemain le paviilon amiral de 19 , qui nous furent exactement
rendus. J ’avois déjà informé notre consul générai, M. Maller, de
nos besoins et des réparations indispensables qui devoient être faites
au navire. Je me rendis en conséquence avec lui chez M. ie comte dos
Arcos, ministre de ia marine, homme aussi aimable que spirituel,
qui accueillit avec intérêt ia demande que je lui adressois pour le radoub
de la Physicienne. « Tout ce quei’arsenal du roi renferme, me dit-il, est à
votre service, et vous pouvez en disposer. »
Fixé sur ie principe, il ne nous restoit plus qu’à nous occuper des
détails. II fut convenu avec M. l’amiral commandant du port que le
lendemain on viendroit conduire la corvette le long d’un vieux vaisseau,
où nous aurions toute facilité pour transborder les divers objets
de notre armement, et qu’on iroit l’amarrer ensuite à côté du ponton de
carène, où elle devoit être abattue et recevoir un radoub complet.
Débarrassé de cet objet essentiel, je m’empressai d’aller revoir les personnes
bienveillantes et chères qui, Iors de ma première relâche, m’avoient
témoigné tant de bonté et d’amitié. Je revis surtout avec plaisir l’excellente
Voyage de l’ Uranie. — Historique. T . II. I i î i Î î î î