
priétaire du fonds : »2°. que les fruits perçus avant
la demande, appartiennent à Vacquéreur, qiii n’eft
point tenu de les; rendre au lignager. La raifon de
décider que l’acquéreur doit rendre cette portion dii
tréfor au retrayant, eft qu’elle n’eft pas un fruit de
l ’héritage, mais une efpèce d’acceffoire acquis au
propriétaire : JT acquéreur, qui n’avoit qurun droit momentané
de propriété dans l’héritage, n’a pu acquérir
qu’un pareil droit dan; l’acceffoire.. C e ft fuivant ce
principe qu’un mari qui, parle droit romain ,étoit
propriétaire du fonds dotal durant le mariage, de-
voit néanmoins, après la difl’olution du mariage,
rendre à'la femme, avec le fonds dotal , le tréfor
qu’il y avoit trouvé lorfque le mariage fubfiftoit,
& par conféquent, tandis qu’il étoit propriétaire.
Ajoutez qu’un tréfor trouvé eft une bonne fortune,
qui provient du marché de l’héritage : or le retrayant
prenant le marché pour fon compte, &
avec tous les rifques, il eft jufte qu’il en ait aufli
tous les bénéfices.
U acquéreur eft tenu de faire raifon des dégradations
furvenues, par fa faute, dans l’héritage, depuis
qu’il en a pris poffeflion, jufqu’au moment ou il
l ’a remis au retrayant.
En cela Y acquéreur, relativement au retrayant,
diffère du poffeffeur de bonne-foi, relativement au
propriétaire. Le poffeffeur de bonne-foi n’eft = tenu
des dégradations par lui faites , avant la demande ,
qu’autant qu’il en a profité ; parce qu’il n’a contracté
envers le propriétaire, aucune .obligation de lui
rendre l’héritage, ni par conféquent de. le lui con-
ferver; & qu’il a pu abufer d’une, chofe dont il croyoit
avoir la propriété incommutable. Mais celui qui
acquiert • un héritage fujet à retrait , fait ou doit
favoir qu’il contracte, en l’acquérant, l’obligation
de le rendre à ceux des lignagers qui voudront
en exercer le retrait, & par conféquent, celle de
le leur conferver.
Le -feigneur auquel font dus les lods Stventes,
ou autres profits, peut bien les demandera Y acquéreur
avant le retrait ; mais aufff-tôt que le,retrait a
eu lieu, il. ne peut plus les demander qu’au, retrayant.
Il n’en eft pas de même de l’amende encourue
par Y acquéreur, faute d’avoir notifié au feigneur fon
acquifition , dans le temps prefcrit par la coutume ;
il ne ceffe pas, malgré le retrait, d’être débiteur,
de l-’amendeo parce que le retrait,. en anéantiffant
dans la perfonrie de Y acquéreur, la yente qui lui a
été faite, ne détruit pas la faute qu’il a commife
envers le feigneur : cette amende ne, peut pas non
plus être à la .charge du retrayant, parce, qu’il ,ne
doit pas fouffrir du délit ou quafi-délit de .l'acquéreur.
S i , avant le retrait, le feigneur fait des pourfuites
contre Y acquéreur pont être payé des profits, & que-
pendant le cours de ces. .pourfuites , l’héritage ait
été retiré, Y acquéreur,, en dénonçant ;ce renaît au
feigneur / ’doit être renvoyé, de ces pourfuites ^fauf
au feigneur à .fe .pourvoir .contre le.retrayant; mais
Y acquéreur doit être condamné enyers le fçigneur,
aux dépens faits avant la dénonciation. ' - -
Il fuit que, fi avant le retrait, les profits ont été
payés au feigneur par Y acquéreur, celui-ci ne peut
pas les repeter au feigneur ; mais il a le droit de
s’en faire rembourfer par le retrayant..
Si le retrait eft exercé par un lignager que fon
office ou fa dignité exempte de payer les profits ou
droits feigneuriaux, pour les acquifitions qu’il fait
dans les mouvances du ro i, Guyot dit, dans fon
traité des fiefs, que ce lignager entre dans tous les
droits de l’acquéreur, & qu’il fubit toutes les charges
auxquelles il étoit fujet, enforte qu’il doit
rembourfer à Y acquéreur les profits par lui payés,
& que fi ces profits n’ont pas été payés, le retrayant
les doit au fermier du domaine, parce que ce n’eft
pas le retrait qui y a donné lieu, c’eft. l’acquifition
faite, par un non-privilégié.
Mais cette opinion n’eft pas fondée , parce qu’au
moyen du retrait, le retrayant eft fubrogé à Yao
quéreur, en telle forte que fi celui-ci n’avoit pas
payé les profits, il n’y auroit, comme nous l’ayons
dit, d’a&ion que contre le retrayant, qui eft
réputé avoir acquis d’abord : le retrait fait paffer les
biens au retrayant, comme s’il avoit acquis immédiatement
du vendeur ; Y acquéreur intermédiaire eft
confédéré comme s’il n’avoit pas acquis ; aufli n’eft-
il fujet à aucune garantie. Concluons donc que fi
l’acquifition refte au privilégié retrayant, l’exemption
des profits a lieu en fa faveur ; c’eft pourquoi,
fi ces profits ont été payés par Y acquéreur évincé,
le fermier du domaine doit les lui rendre, ou au
retrayant privilégié, fi celui-ci les a rembourfés à
Y acquéreur.
Si au contraire Y acquéreur eft privilégié, & qu’il
foit évincé par un retrayant fans privilège, il eft
certain que les profits font dus par ce retrayant :
mais doivent-ils être payés au privilégié , ou au
fermier du domaine ? Il faut, fans difficulté ,-les
payer au fermier du domaine, parce que l’exemption
accordée au privilégié, ne peut être confédérée
comme une aliénation qui l’àiitorife à exiger
les profits appartenans au roi. D ’ailleurs , 'Yacquè-
reur, privilégié, évincé par un retrait lignager, n’a
eu qu’une propriété momentanée , laquelle eft tota?
lement anéantie par l’effet du retrait, qui rend le
retrayant feul véritable acquéreur. Ce privilégié ne
peut donc fe prévaloir de fa poffeflion intermédiaire,
peur exiger autre chofe que le rembourfe-
ment de ce qu’il a été obligé; de payer. L’idée de
l’exemption dont il auroit joui , fi ion acquifition
avoit fubfifté, ne fe réalife .pas au point de. produire
un, privilège aétif.
Il eft vrai que,par un édit de François I , 'donné
à Chenoneeaux en 1 545 , il fut ordonné que les
fecrétaires du roi de la grande chancellerie feroient
francs . & quittes.^des droits ou profits, pour raifon
des biens dopt, ils exerçeroi^nt. le. retrait lignager
fur un Yrtcn ox ^acquèreur, & .que tous les profits
leur, feroient pareillement acquis , foit qu’ils fuffent
vendeurs, acquéreurs , retrayans -, convenus par retrait
lignager, ou autrement, &c„...
Mais cet édit qui excède les bornes d’un privilège
, en accordant une conceffion & un don , étoit
un titre qui concernoit uniquement les lecretaires
du roi du grand collège, & qui ne devoir naturellement
fubfifter que durant le règne de François!.
Néanmoins les difpofitions de cet édit ont donne
lieu à différens privilégiés, de former la prétention
de -s’approprier les profits dus au r o i , loriqu ils
étoient évincés de leurs acquifitions, par un retrait
lignager. ‘■•''■h ' ' ; > » ,
On trouve, au journal des audiences, un arrêt du
parlement de Paris, par lequel le fieur René Parain,
fecrétaire du ro i, adjudicataire dé la terre de Cour-
tabeuf, mouvante du r o i , de laquelle il avoit été
évincé par Jofias de Rouen, ceffionnaire du retrait
féodal, fut débouté cle fa prétention d’exiger les
droits féodaux, comme un profit de fa charge; &
le collège des fecrétaires du roi, qui étoit intervenu,
fut pareillement débouté de fon intervention.
Un autre arrêt du parlement de Paris, du 18 décembre
1663 , obtenu par le marquis d O , & les
princeffes de Carignan, a jugé que les fecrétaires
du roi, acquéreurs de biens dans le domaine du
roi, ne pouvaient prétendre les profits contre le
retrayant lignager , lorfqu’ils étoient dus au roi ou
aux engagiftes. Cet arrêt a été rendu contre le fieur
Truchot , fecrétaire du roi, qui avoit acquis les
terres de Francouville & de Roffai, dans la mouvance
du ro i, defquelles il fut évincé par le retrait
lignager du marquis d’O . Il prétendoit les profits
feigneuriaux, comme lui étant acquis par le privilège
de fa charge ; mais il fut débouté de fa demande
, & condamné aux .dépens.
Différens auteurs., qui ont agité cette queftion,
n’ont fait aucune difficulté de la réfoudre , conformément
aux arrêts dont on vient de parler.
Il y a néanmoins un arrêt du parlement de Par
is , du 14 mai 17 14 , confirmatifji’une fentence
du bureau des finances de Poitiers7 par laquelle le
• fermier du domaine avoit été débouté d’une demande
de lods & ventes, formée contre le fieur
Hallou de la Galinière, qui avoit exercé le retrait
lignager d’un bien mouvant du roi, acquis par le
fieur B’retonnière de Maifon-Neuve, préfident au
même bureau des finances de Poitiers : le retrayant
avoit payé ces profits à Y acquéreur, & l’arrêt a déclaré
ce dernier fondé à les retenir, comme chofe
à lui appartenante.
Cet arrêt eft certainement oppofé aux principes
& aux termes même de la conceffion des privilèges
des tréforiers de France: aufli les auteurs qui en
ont parlé „ .ont-ils tous adopté la maxime contraire."
Au refte, tout ce qu’on vient de dire relativement
aux acquifitions des privilégiés, ne peut plus
recevoir aucune application, tant qu’il ne fera pas
dérogé à l’arrêt du confeil d’état du ro i, du 2.6
mai 1 7 7 1 , lequel révoque tous les privilèges d’e'-.
xemption des droits ou profits dus au roi, pour les
mutations des biens qui font dans les mouvances
de fa majefté.
A CQUÉR IR, v. a. ( Droit naturel & civil. ) c’eft
fe procurer un titre qui donne droit de jouir d’une
chofe en propriété ou en ufufruit.
Il y a différens moyens <Yacquérir ; les uns tirent
leur origine du droit naturel, tels que, l’occupation,
l’acceflion, la tradition: les autres ont été introduits
par le droit civ il, comme les teftamens,
la prefeription , &c. , . . mais tous ont été aftreints
par la loi civile à-des formalités , dont l’obferva-
tion eft abfolument néceffaire, foit pour donner
l’authenticité aux moyens d’acquérir, foit pour leur
donner l’effet de tranfmettre à l’acquéreur le droit
de propriété.
Nous ne ferons pas ici l’énumération de tous les
moyens d'acquérir, il en exifte autant que de
manières de transférer la propriété, la poffemon ou
l’iifiifruit. Nous les traiterons chacun lous leur mot
propre.
Nous obfervercns feulement que l’on peut acquérir
, non-feulement par foi-même, mais encore par
une perfonne étrangère, qui n’eft nullement dans
notre dépendance, telle qu’un fondé de procuration
, ou celui qui, en notre abfence, fe fait fort
pour nous, & que les jurifconfultes romains appellent
negotïorüm gefior:, & 'qu’à leur exemple nous
pourrions nommer géreurs d’affaires. Mais, dans ce
dernier cas, l’acquifition n’a entièrement lieu au
profit du mandant, que lorfqu’il a ratifié ce qui
avoit été fait en fon nom. L’effet de cette ratification
eft rétroa&if, & a lieu à fon profit, du jour
de l’acquifition faite par fon fondé de procuration.
Lesloix romaines accordoient aux maîtres Je droit
d'acquérir par leurs efclaves, & aux pères parleurs
enfans. Ce dernier étoit reftraint par les différentes
efpéces de pécule, introduites en faveur des en-
fans. Voye^ Pécule.
Nous ne connoiffons plus en Europe l’efcla-
vage, il n’exifte que dans les colonies du nouveau
monde, où nous avons pour efclaves les nègres ,
que nous allons acheter fur la côte d’Afrique : les
difpofitions des loix romaines fur l’acquifition des
maîtres par leurs efclaves, y font encore fuivies.
A l’égard de celles qui concernent le droit qu’a le
père, déacquérir par fes enfans ; dans les provinces du
royaume, régies par le droit romain, le père acquiert
, par le fils qu’il a fous fa puiffance , tout ce
que le fils peut acquérir par les moyens que fon
père lui a donnés ; mais il n’a que l’ufufruit de ce
i qui advient à fon fils par fon travail , ou qu’il acquiert
, foit par legs, donation-, ou fucceffion ; &
il ne peut rien prétendre dans ce que le fils acquiert
à l’armée ou dans le barreau-, au fervicedu
prince ou de i ’églife.
Dans les provinces coutumières, la puiffance paternelle
y.1 eft très-bornée; le père n’y acquiert
rien par fes ! enfans. Quelques-unes cependant, lui
accordent rufufruit des chofes, qui font données
aux enfans, qui font fous leur puiffance; mais ils
n’en jouiffent que jufqu’à f émancipation , foit réelle,
foit tacite, de leurs enfans,. •