
s’introduit aufli quelquefois dans les lièges inférieurs
une jurifprudence particulière, fur-tout pour certains
points de .coutume. Quand on eft habitué à
cette jiirifprudence, on nefauroitfouvent s’en écarter
fans inconvénient, fur-tout lorfqu’elle ne renferme
rien d’abufif, & qu’elle eft confiante par l’uniformité
des fentences ou des jugemens qui l’ont établie.
Lorfque dans les cours fupérieures on emploie
cette jurifprudence, les magiflrats, bien loin
de la rejetter, cherchent à s’en aflurer, par un aéte
de notoriété , pour y conformer leur décifion.
Il en eft à-peu-près de même de certains ufages
locaux, qui ne font établis fur aucune lo i , & qui
cependant s’obfervent comme loi dans la pratique.
Il n’y a point de lo i, par exemple, qui détermine
dans chaque pays la manière de percevoir la dîme
ni la quotité de la perception ; qui règle la conduite
que le bailleur & le preneur doivent tenir
l’un envers l’autre, pour les. congés ou pour les
indemnités ;‘qui prefcrive qu’on doive payer , ou
d’avance ou après le temps échu ; fi le, terme doit
être par quartiers, ou tous les fix mois, ou tous
les ans; c’eft l’ufage qui fait la lo i, en pareil cas,
& qui devient autorité : aufli la décifion des premiers
juges doit-elle avoir beaucoup de poids dans
des conteftations de cette efpèce, parce qu’ils font
eenfés mieux connoître les ufages de leur endroit
que les juges étrangers.
Les autorités dont nous venons de parler ne font
pas les feules qu’on puiffe employer. Il y en a
d’autres qu’on peut appeller autorités éloignées, &
qui peuvent ^quelquefois fuppléer à celles qui manquent.
Lorfqu’une coutume, par exemple, garde
le filence à l’égard d’un point, fur lequel une autre
coutume voifine s’eft expliquée, cette explication
peut être propofée comme un guide à fuivre fur
la difficulté qui fe préfènte : fi la coutume voifine
ne dit rien, on peut confulter l’efjprit des autres
coutumes ; fi enfin on ne trouve aucune loi municipale
qui fe foit expliquée , & que le droit romain
préfente une „folution, on peut alors l’employer
comme Xautorité de la raifon écrite ; car il eft de
maxime que le droit romain ne fait pas plus loi
en pays de coutume, que le droit coutumier ne
fait loi en pays de droit écrit : par la même rai-
fon , lorfque le droit écrit ne préfente aucune fo-
îufton, •& qu’on peut la trouver dans le droit coutumier
, il eft tout naturel qu’on puiffe le citer dans
fa caufe.
Pour ce qui eft des réglemens & des préjugés,
ceux qui émanent d’une cour de parlement, n’ont
pas, à la vérité, force de loi dans une autre cour.
Cependant lorfqti’il s’y préfente une queftion à ju.-
ger pour la première fois, & qu’elle a déjà reçu
une décifion dans un autre tribunal fouverain, on
peut s’aider de cette décifion , parce que quand elle
eft jufte, il eft intéreffant qu’elle devienne générale.
Il en eft de même des ufages dont nous avons
parlé : lorfqu’il s’agit de pratiquer une chofe pour
la première fois & qu’on la pratique fuivant l’ufage
des environs ou fufage le plus connu, on ne peut
avoir aucun prétexte pour critiquer la conduite de
celui qui s’y eft conformé, à moins que cet uiage-
ne foit évidemment abufif.
Autorité des auteurs» Lorfque les lo ix , les coutumes
, le droit écrit, les préjugés & les ufages
nous manquent, nous avons encore une reffource
dans l’opinion des jurifconfultes, qui ont traité les
queftions qu’il s’agit de décider.
En fait d’opinions nous devons favoir gré à ceux
qui, en prévenant nos difficultés, ont cherché à les
, réfoudre. Quoique l-’avis d’un jurifconfulte ne foit
pas une loi écrite, fon fentiment ne laiffe pourtant pas
d’être fouvent d’un grand poids. Ce qui eft médité
& approfondi par un auteur qui "ne s’attache qu’à
connoître le jufte & le vrai,. mérite une attention
particulière. Il faut être bien fur de fes lumières
pour fe perfuader que ce que l’on penfe foit meilleur
que ce qu’il a cru. Souvent c’eft une préfomption
de foi-même dont il eft fage de fe défier r
préfomption qui ne devient aujourd’hui que trop
commune. A peine eft-on initié dans les myftères
de' la jurifprudence, qu’on s’imagine être en droit
d’avoir une façon de penfer particulière. Qu’importe
, dit-on, que Cujas, Barthole ou Dumoulin
aient penfé de telle ou de telle façon? ce font des
hommes qui àvoient leur opinion, & il nous eft
permis d’avoir la nôtre. Voilà ce qui fût qu’au-
jourd’hui on voit s’élever au palais des paradoxes
qu’on auroit rougi de propofer dans le fiècle paffé ;
& tout cela n’eft que l’effet du peu de goût que
l’on a pour l’étude. On voudroit que la jurifpru-
dence ne fût autre chofe que la fcience du raifon-
nement, & que chacun pût l’apprendre dans les
romans ou dans les écrits philofophiques. Mais on
fe trompe, elle eft fubordonnée à des loix & à
des principes que l’on ne peut connoître que par
une étude . particulière. Le plus inftruit eft celui
qui raifonne le mieux y en fuivant ces loix & ces
principes. Ceux qui en ont fait l’objet de leur application
, méritent donc , fans- contredit, une eftime
& une confiance à quoi n’ont pas droit de prétendre
ceux qui ne font connus que par des difeuf-
fions, auxquelles ils ne fe font livrés le plus fou-
vent que par intérêt ou par prévention.-
Il eft vrai que les auteurs ne font pas infaillibles
, puifque nous les voyons fouvent oppofés les
uns aux autres ; mais aufli faut-il convenir que juf-
qu’à ce que leurs opinions foient combattues par
d’autres auteurs également accrédités , il eft toujours
plus fûr de fe ranger de leur avis, que de s’èn
rapporter à fon propre jugement. On doit préfumer
qu’ils ont apperçu les raifons qui nous frappent
, & que d’autres raifons plus folides que nous
ne connoiffons pas les ont déterminés.
Ce n’eft pas qu’il foit défendu à un avocat de
combattre ouvertement- les opinions des jurifconfultes
même les plus célèbres ,-iorfqu’il eft en état
de démontrer qu’ils ont donné dans Terreur. Mais il
faut que cette démonftration foit bien claire & bien
établie : la préfomption eft toujours pour ceux qui
ont traité la matière à fond. Les juges qui voient
' les chofes fans partialité fe décident avec bien plus
de confiance , en fuivant le fentiment d’un homme
qui a les fuffrages publics, qu’en fuivant celui d’un
avocat prévenu pour l’intérêt de foii client.
Lorfque les auteurs feN contrarient, ce n’eft pas
toujours l’opinion du plus grand nombre qu’il convient
d’adopter. Les opinions, en pareil cas, s’apprécient
& ne fe comptent pas. Il peut fe faire
qu’un feul ait raifon , pendant que dix autres auront
erré. C’eft alors, qu’aidé du favoir & de l’érudition
, l’efprit peut montrer tout ce que peut la
fagacité & la jufteffe du raifonnement : mais lorfque
les auteürs font unanimes, il faut être bien
fûr de fes talens pour fe flatter qu’on fera juger
contre leur fentiment. Leurs fuffrages accumulés
font comme un contrepoids. qui l’emporte nécef-
fairement. C’eft fouvent même fur leur l’opinion
que repofe la tranquillité des familles. Si leur fuf-
frage n’étoit d’aucune confédération, il feroit inutile
de les étudier. C ’eft cependant auprès d’eux que
l’on s’inftruit tous les jours & que les magiftrats
eux-mêmes cherchent un fondement à leurs dédiions.
Mais, en parlant des opinions, d’où vient qu’elles
font fi diverfes pendant que la vérité n’eft qu’une ?
L’orateur romain nous affure que le droit eft l’ouvrage
de la nature & non celui de l’opinion. Les
caufes de cette diverfité viennent, comme nous le
fait appercevoir un grand magiftrat, de Fefprit qui
fe trompe, & du coéur qui fe perfuade ce qu’il
defire : « l’efprit, dit-il, n’a pas toujours affez de
n lumières pour difeerner le vrai ; fouvent celles
» qu’il à acquifes ne fervent qu’à l’en éloigner ; la
» vivacité de l’appréhenfion l’emporte à la fubti-
» lité , ou le défaut de pénétration l’arrête à la pre-
» mière lueur qui le frappe : ceux même qui font
» d’égale force n’envifagent pas toujours les objets
» des mêmes côtés : la conformité d’avis réfulte
» quelquefois des motifs oppofés : l’un s’affeâe de
» ce que l’autre ne voit qu’avec indifférence; ce-
« lui-ci s’occupe de l’enfemble, celui-là s’attache
» aux détails ; un troifième croit entrevoir de nou-
» veaux rapports, & tous abondent dans leur fens ».
C ’eft au barreau fur-tout que fe fait remarquer
particuliérement cette diverfité d’opinions. On commence
par s’y permettre des doutes : un doute en
•fait naître un autre : les exceptions font une reffource
adroite pour combattre les règles; & quand
une fois on s’eft ainfi accoutumé à ne fuivre que
fes idées, il n’eft: prefque point de caufe que l’on
ne trouve foutenâble, en rejettant toujours fur
l’ignorance ou la prévention des juges, les malheureux
fuccès que l’on ne doit qu’à fa fauffe préfomption.
Comme les erreurs, en jurifprudence, font dan-
gereufes & fouvent irréparables, ôn ne fauroit donc
trop prendre foin de confulter les autorités qui
peuvent conduire à une décifion. Les lo ix , les arrets,
les coutumes & les ufages doivent être notre
première bouffole : lorfque ce fecours nous manque
& que nous .fommes obligés de recourir à
l’opinion, préférons toujours celle de ces favans,
de ces hommes laborieux, qui nous ont laiffé le
fruit de leurs recherches & de leurs méditations:
leur fuffrage eft toujours le moins fufped. Au refte,
erreur pour erreur, il eft toujours moins fâcheux
de s’être trompé fur la foi d’autrui, que d’après fes
propres .lumières : il y a même un grand nombre
de jurifconfultes françois dont les opinions ont
acquis une telle autorité, qu’on peut dire qu’elles
ont force de loi ; telles font entre autres celles de
Dumoulin, dû chancelier d’Agueffeau, du P. P. de
Lamoignon, & de Pothier, confeiller au préfidial
d’Orléans.
AUTOGRAPHE, adj. ( terme de Pratique.') c’eft
un écrit fait de la main de celui qui en eft l’auteur :
ce mot eft fyrionyme à celui d'olographe. Ce dernier
cependant fe dit plus particuliérement d’une
difpofition teftam en taire, & le premier de toute autre
écriture privée. On appelle aufli autographe le ma-
nuferit d’un ouvrage , entièrement écrit de la main
de l’auteur.
AUTUN , ( Droit public. ) ville de la province
de Bourgogne, capitale de l’Autunois : c’eft la fécondé
des états de Bourgogne. C ’eft le fécond bail-
liage du parlement auquel font unis une ohancel- *
lerie & un préfidial. £,a mairie y exerce la juftice
fur la plus grande partie de la v ille , & la police
fur le total : il y a une maîtrife des eaux & forêts
fous le reflort de la table de marbre de Bourgogne,
& un grenier à fe l, dépendant de la direâion &
généralité de Dijon.
L’évêque d'Autun a le droit de porter le pallium ,
eft préfident-né des états de Bourgogne, & , par
ces motifs, précède tous les évêques de la province,
& les autres fuf&agans de l’archevêché de Lyon dont
il fait partie. Pendant la vacance dp fiège de Lyon ,
il en a l’adminiftration; il en eft de même de l’archevêque
de Lyon fur le fiège. d'Autun, lorfqu’il
n’eft pas rempli.
Le chapitre de cette ville a l’adminiftration de la
juftice pendant feize jours, à commencer de la veille
de la fête de S. Lazare.
AU V EN T , f. m. ( Police. ) c’eft un petit toit
en faillie , qu’on place au-deffus des boutiques pour
empêcher le foleil ou la pluie d’y pénétrer. A Paris ,
la hauteur des auvens eft réglée à dix pieds au-deffus
du rez-de-chauffée, & leur largeur, dans les grandes
rues, à trois pieds, & à deux & demi dans les
petites. Dans les autres villes, il faut fe conformer
aux dîfpofitions de la coutume, s’il y en a , & , à
leur défaut, aux réglemens de la police ..ou de la
voirie.
AUVERGNE, ( Droit public. ) province de
France qu’on divife en haute & baffe. Elles font
toutes les deux du reffort du parlement de Paris.
La haute Auvergne eft régie par le' droit romain;
la .baffe fe fert d’une coutume particulière qu’on
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