
Ce font les commiffaires aux biens faifis que les
coutumes autorifent à faire la foi & hommage au
feigneur féodal pour le vaflal, dont les biens fe
trouvent faifis réellement : mais comme les com-
miflàires doivent réfider aux lieux de leur établif-
fement, fuivant les édits de création de leur office,
& que les édits ne leur attribuent aucun droit pour
s’acquitter de cette fonction au profit des créanciers
, il fuffit qu’ils offrent de donner leur procuration
à telle perfonne que les créanciers jugeront
à propos, pour faire la foi & hommage, & pour
obtenir la main-levée de la faifie féodale.
Dans les coutumes où le vaflal doit faire la foi
& hommage en perfonne, le feigneur peut refufer
d’admettre à la foi le procureur du commiflaire aux
faifies-réelles ; mais il ne peut refufer d’accorder
une fouffrance, comme le porte l’article 4 de la
coutume d’Orléans.
S’il eft dû au feigneur des droits, foit de relief,
fort de quint, pourra-t-il refufer d’admettre à la
foi ou de donner la fouffrance jufqu’à ce que ces
droits foient payés ? Il peut le refufer dans la coutume
de Berry, qui veut que celui qui fe préfen-
tera pour faire la to i, paie les droits & devoirs au
nom du vaflal. La coutume d’Orléans dit au contraire
que l’on donnera la fouffrance au commiflaire,
fauf au feigneur à fe pourvoir pour fes profits fur
les deniers de la ferme de l’héritage, ou fur les
deniers qui proviendront de la vente. Il femble
qu’on devroit fuivre la difpofition de la coutume
de Berry, dans les coutumes qui ne décident point
cette quefiion ; car dès que l’on permet au feigneur
de pourfuivre fes droits par la faifie féodale qui
emporte perte des fruits, nonobfiant la faifie-réelle ,
pourquoi l’obligeroit-on d’admettre à la fo i, fans
payer les droits utiles, tandis que dans toute autre
occafion , il peut refufer de recevoir l’hommage ou
de donner fouffrance, quand il n’eft point fatisfait
des droits utiles ? Cependant plufieürs auteurs prétendent
qu’en ce cas les droits utiles ne doivent
être regardés que comme d’autres dettes privilégiées
, pour lefquelles le feigneur fe doit pourvoir
par la voie de l’oppofition, & qu’il lui fuffit d’avoir
l’aflùrance d’être colloqué dans l’ordre, tant
pour le principal de fes profits de fief, que, pour
les intérêts du jour de la demande. Àuzanet, qui
fuit cette dernière opinion, rapporte pour la confirmer
, un arrêt du 7 août 1627, entre dame Efther
de Jamard, & dame Magdelaine Barthelemi, veuve
du fleur Dupleflis-Praflin. Les principes paroiflent
©ppofés à ce préjugé, & on devroit les fuivre dans
la pratique.
S’il arrive, pendant le cours des procédures, que
le vaflal, partie faifie, vienne à décéder, après que
le commiflaire a eu fait la foi & hommage, le feigneur
peut faifir de nouveau féodalement à faute
d’homme, de-droits & devoirs non faits & non payés ;
car tant que le bien faifl réellement n’efl; point adjugé
, les mutations fe règlent du chef de la partie
faifie, ou de fes héritiers, 8c non du chef du cornmiflâîre
ou du fermier, qui, n’étant point propriétaires
du fie f, ne peuvent être regardés comme
vaffaux.
Remifes qu on doit accorder au fermier. Quand il
y a eu uns perte de fruits par la faifie féodale,
fans qu’on puifle imputer aucune négligence au fermier
judiciaire, il eft jufte de lui faire une diminution
fur le prix de fon bail, à proportion de la
perte qu’il a foufferte, puifqu’il n’a pu jouir de ce
qui lui avoit été affermé.
On accorde aufli une diminution au fermier judiciaire,
quand un oppofant a fait diftraire une partie
confldérable des biens faifis, ou quand quelque
force majeure l ’a empêché de jouir, comme fi la
grêle a gâte tous les fruits, fi un moulin, ayant
été confumé par le feu, fans qu’il y eût de la faute
du fermier ou du fous-fermier, n’a pu produire aucun
profit. C eft avec la partie faifie, le pourfuivant &
les oppofans, que le fermier doit demander ces
diminutions fur le prix de fon bail : on ne les accorde
que difficilement, & feulement dans le cas
où le fermier judiciaire prouve clairement qu’il fait
une perte réelle : car, comme on eft perfuadé que
les baux judiciaires font ordinairement adjugés à
vil prix, on préfume que les accidens, dont les
fermiers fe plaignent, n’ont point eu d’autre effet
que de les priver d’un profit exorbitant qu’ils efpé-,
roient de faire fur le bail.
Paiement du prix du bail judiciaire. Dès que les
termes pour le paiement du bail judiciaire font
échus , le commiflaire aux faifies-réelles doit frire
des diligences pour en être payé ; car fi le fermier
ou les cautions, qui étoient en état de payer dans
le temps de l’échéance du terme, devenoient par
la fuite infolvables, il demeureroit refponfrble, en
fon nom , du prix du bail. Si, par quelque raifon
particulière, la juftice défend de contraindre les
débiteurs des baux judiciaires & les cautions , le
commiflaire dénonce le jugement au pourfuivant,
& certe dénonciation lui fert de décharge valable ,
jufqu’à ce que les défenfes aient, été levées, &
que le jugement lui en ait été fignifié.
Au parlement de Paris, les fermiers judiciaires,'
leurs cautions & leurs certificateurs font obligés de
payer, en deniers ou en quittances valables, les
termes qui font échus, trois jours après la première
fommation qui leur en eft frite , finon ils font tenus
folidairement des frais qui font faits contre l’un
d’eux, pour le recouvrement des loyers, fans que
le commiflaire puifle les employer dans fon compte.
Entre les quittances que le commiflaire doit recevoir
font celles des charges ordinaires des fonds
faifis, comme celles des cenfives, des rentes foncières
, les gages des officiers ; les frais pour la pour-
fuite des affaires criminelles, quand il y a juftice,
& que les frais ri’ont pu être recouvrés fur la con-'
fifeation. Si le fermier étoit tenu par fon bail d’acquitter
ces charges, fans diminution du prix, on ne
prendroit point ces quittances en déduçfion.
B a il pour la levée des tailles & autres importions,
( Finance,') il eft d’ufrge,dans le Languedoc, que
la communauté des habitans d’une ville ou d’une
paroifle pafle un aâe avec un particulier , par lequel
ce dernier fe charge de frire la perception des
deniers impofés fur chaque contribuable, moyennant
un prix ou une rétribution qu’on lui accorde.
Cet aéle eft un véritable bail, qui s’adjuge à celui
qui demande le moins pour les frais de la levée
des impofitions ; il. a tous les caractères des
baux à ferme ; le tarif du contrôle de 1722 lui
donne aufli le nom de b a il, & , par cette raifon ,
l’a aflùjetti au droit de contrôle, quoiqu’il en eût
été déclaré exempt par un- arrêt du confeil du 12
oétobre 1697.
Ce droit de contrôle,fuivant l’article 22 du même
tarif , doit être perçu fur le pied du montant de
la remife accordée au preneur , conformément à
l’article 15.
Lorfque la communauté eft forcée de nommer
un colleCteur pour frire la recette, parce qu’il ne
s’eft préfenté perfonne pour la prendre à bail, la
délibération de cette nomination n’eft pas fujette
au droit de contrôle , ainfi que l’a décidé un arrêt
du confeil du 17 novembre 1733 , par la raifon
que cet aCte n’eft ni bail 3 ni traité.
Bail de mariage , ( terme de Coutume. ) on fe
fervoit anciennement du mot bail , pour fignifier
garde.-&• adminiflration , 8c même pour gardien &
adminiflrateur. C’eft en ce.fens que les anciennes
coutumes appelloient le mari bail de fa femme, &
le tuteur bail du mineur.
Le bail de mariage défigne donc la puifîance du
mari fur fa femme , & Tadminiftration de fa perfonne
& de fes biens. C ’eft la même chofe que
bail & désbail , dont nous avons parlé plus haut.
Voye1 Puissance maritale.
Bail des biens des mineurs, ( Droit civil. ) lorfque
le tuteur a frit procéder à l’inventaire des meubles
8c effets de fes mineurs, il doit s’occuper du
foin de louer leurs biens. Généralement ce foin
eft regardé comme un fimple aCte d’adminiftration ,
que le tuteur peut faire fans demander l’avis des
parens & fans aucune proclamation ; mais la coutume
de Clermont preicrit, à cet égard , une forme
qu’il feroit bon de fuivre : voici ce que porte
l’article 196.
« Seront tenus les tuteurs bailler à ferme les
j> héritages des mineurs , pour les années que la
« tutèle durera, au plus offrant & dernier enché-
» rifleur , à l’ifl'ue de la grand’meffe , après l’a-voir
jj frit publier par deux ou trois dimanches aupa-
» ravant, à même heure & ifl’ue de la grand’meffe ,
” en la paroifle où les héritages font fitués & aflis ;
» & ne fe pourra frire ledit bail que pour fix ans
pour le plus , fi tant la tutèle dure , & à la charge
» que le preneur fera tenu de bailler bonne & fum-
» frnte caution , comme acheteur des biens de
» juftice jj.
Dans plufieurs endroits il eft d’ufage que ,pour
pour parvenu; au bail des biens d’un mineur, le
tuteur frfle publier , en vertu d’une ordonnance
du juge , qu’ils feront adjugés en l’auditoire , au
plus offrant & dernier enché.riffeur, dans le délai
fixé par cette ordonnance , lequel doit être affez
long pour que le bail à donner puifle être publié
par trois dimanches confécutifs, à l’iffue de la meffe
de paroifle. Les publications, faites par un huiflier
ou fergent, fe rapportent , à l’audience indiquée, &
l’on y adjuge le bail fur les conclufions de la partie
publique : c’eft ainfi que cela fe pratique en
Normandie.
Bail naturel, ( terme de Coutume. ) celles d’Anjou
& du Maine fe fervent de cette expreflion ,
pour défigner la tutèle que la loi naturelle défère
au furvivant des père ou mère fur leurs enfans.
On voit encore , par cette expreflion , ce que
nous avons déjà dit, qu’en terme de coutume , bail
eft la même chofe que garde & adminiflration.
Bail à nourriture des mineurs , ( Jurifprudence. )
c’efl: ainfi qu’on appelle un'e convention, par laquelle
le preneur fe charge de nourrir & entretenir
un mineur moyennant une certaine fortune.
Ge bail eft fait, par le tuteur , fur un avis de parens
, fans qu’il foit néceffaire de le faire homologuer
par l’autorité du juge.
Ces fortes de baux font particuliérement ufités
dans les provinces de Brie, de Champagne , de
Gâtinois , de Bourgogne & de Lorraine.
Le Grand prétend que le mineur, devenu majeur
, peut rendre fans effet un pareil bail, en tenant
compte de toutes fes penfions.
Cependant, par arrêt du 27 mai 1724 , le parlement
de Paris a confirmé une fentence du bailliage
de Sens , par laquelle des enfrns , âgés de
trente-cinq ans , avoient été déclarés non-recevables
dans leur appel d’un bail à nourriture.
Il y a un autre arrêt, rendu par la même cour
le 17 aeût 1696, qui confirme un pareil bail.
Un autre arrêt, rendu le 15 février 1732, fur les
conclufions de M. Chauvelin , avocat-général , a
confirmé une fentence du bailli de Langres , qui
condamnoit un père à rendre compte, nonobftant
le délaiffement porté au bail à nourriture.
Enfin , le 14 décembre 1745 , la cour a confirmé
un bail à nourriture , par lequel on avoit
abandonné à un père, des immeubles apparte-
nans à fon fils , pour le nourrir, élever & entretenir
jufqu’à l’âge de dix-huit ans.
Dans l’efpèce de cet arrêt, rapportée, ainfi que
les précédentes, par l’auteur de la ColleÜion de jurifprudence
, le mineur , fils d’un premier l i t , qui xk-
clamoit, allégua qu’on ne pouvoit aliéner les biens
des mineurs , fans toutes les formalités preferites;
mais l’ufage l’emporta fur ce moyen.
Il faut tirer de ces préjugés la conféquence que ,
quand il paroît que les baux à nourriture ont été
faits de bonne foi & fans aucun deffein de tromper
les mineurs , ils doivent être confirmés ; mais
que s’il y a lieu.de préfumer du do! 8c de la fraude ,