
le vrai feignent* ) la propriété véritable réfidoit toujours
fur la tête de la femme, elle en reprend l’exercice
après le décès de fon mari, & ne peut être
considérée comme un fucceffeur nouveau.
S’il arrive, dans le cours de la même année, plu-
fieurs mutations, par mort, foit* du chef du tenancier,
foit du chef du feigneur, il n’eff du, fuivant la
jurifprudence du parlement de Touloùfe, qu’un
feul droit d'acapte ou d’drrière-àapte. Le parlement
de Bordeaux va même plus loin, on y juge que
le droit d'acapte ne peut être exigé qu’une fois en
dix ans ; ainfi quelque Fréquentes que puiffent être
les mutations de la part des feigneurs ou des em-
phytéotes, - il n’eft toujours du qu’un feul droit
dans l’efpace de dix ans.
Il y a encore une différence entre lés parlemens
de Touloufe 8é«de Bordeaux fur la quantité d’années
d’arrérages que l’on peut demander judiciairement,
en matière d'acapte: le dernier a décidé que
ces arrérages fe prefcrivoient par dix.années de pof-
feflion : dans le premier, au contraire, on peut en
exiger vingt-neuf aimées.
Au furplus, les droits d’acapte &. d'arnére-capte
font fournis aux mêmes loix que les autres profits
de fief. Il faut néanmoins obferver que, fuivant l’avis
de Boutaric, ces droits doivent être acquittés
par l ’iifiiffuitier , lorfqu’ils échoient fortuitement
pendant le cours de fa-jouiffance , par la raifon que
c ’eft une charge réelle du fonds, dont l’ufufrmtier
eft tenu de là même manière que des impofitions
royales. C ’eft la décifion de la loi 7 , § 2. , jf. de
ufufr. & quemadm. & de plufieurs coutumes.
A CA ZEM EN T , f. m. A cazer , v. a. ( Droit \
féodal. ) ces termes font particuliers aux coutumes |
de Bordeaux & de Bayonne. Acazer veut dire pro- j
prement donner en fief, inféoder; de ce mot on
a fait celui de fous-aca^er, qui fignifie bailler à rente. .
Uacaçement eft donc un contrat par lequel le feigneur
direéi & foncier donne à quelqu’un un héritage
fous une rente v iv e , foncière & feigneu-
riale, qui emporte lods & ventes : le fous-acaçement
eft celui par lequel l’emphytéote rétrocède ce même
héritage fous une rente fèehe , qui n’eft qu’un cens
mort, & qui ne produit aucun droit de mutation
en faveur de celui qui fous-acaçe.
Lorfque le titre primordial de Yaca^ement, que
l ’on appelle dans le pays la baiüette ou Yefporle,
porte défenfes au tenancier de fous-aca^er, il ne le
peut faire, ni même louer l’héritage acaçé, ou le
donner à gaudence de neuf ans en neuf ans : c’efl:
la difpofition précife d’un arrêt du parlement de
Bordeaux du 7 mai 15 2 7 , rendu pour fixer le
fens de l’article 101 de la coumme du pays, lors
de fa rédaétion; Cependant les commentateurs de
cette coutume aflurent que le tenancier peut donner
fon héritage défert à faire labourer, quoique
le contrat porte qu’il ne pourra le fous*aca%er, par-
ce que, difent-ils, c’efl plutôt ménagement que détérioration.
Ils ajoutent qu’il peut fous-aca^er, malgré
la prohibition du bail originaire, lorfqu’elle a été I
couverte par une nouvelle inféodation j qui ne cor«
tient pas la même défenfe, & il finit fuivre cet
avis dans la pratique, par la maxime contenue dans
la loi 47 3 Jf- de oblig. & aSl. qui veut que l’on foit
toujours enclin à admettre le titre le moins onéreux
au débiteur.
ACCAPAREMENT, f. m. ( Droit publ, & crimi
Police. ) c’eft l’achat de toutes ou de la majeure
partie des denrées ou des marchandifes d’une certaine
efpèce, dans l’intention de les avoir feul, &
de forcer les acheteurs à en donner à l’accapareur
le prix qu’il voudra. L’accaparement a lieu lorfque
quelqu’un achète les denrées comme le bled, l’huile
, le vin : les matières premières,, telles que les
foies, les laines, bas chanvres, les cires, les fuifs ,
&c. : les marchandifes, comme les toiles, les draps ,
&c. Vaccaparement le plus nuifible à la fociété, &
fur lequel les loix & la police ont la plus grande
atten tion eft celui des grains & des autres fub-
fiflances*
Il ne faut pas confondre Y accaparement Avec l’enhar*
rement. Ce dernier n’eft qu’une convention faite
entre l’acheteur & le vendeur , par laquelle l’un s’af-
fure les marchandifes ou la récolte, au moyen des
arrhes qu’il donne, & l’autre s’oblige de les livrer,
dans un temps pour le prix convenu. La vente n’eft
pas parfaite, l’acheteur peut s’en dédire en perdant
fes arrhes, & le vendeur en les reftituanp ,
ou en payant quelque dédommagement. Uaccapa*
rement, au contraire, eft un marché qui s’exécute à
l ’inftant même, & par lequel l’accapareur qui a
payé, eft propriétaire & pofleffeur des denrées ou
marchandifes. Il eft rare que Y accaparement ne prépare
pas le monopole, & n’en foit pas l’objet 6c
la fin que fe propofe l’accapareur.
L’accaparement èft-il un crime que les loix doivent
punir, eft-il une fuite néceflaire de la liberté
que l’on doit au commerce ? Les moyens qu’on emploie
pour le • détruire, opèrent-ils fûrement le
falut du peuple ? Ces queftions ont été controver-
fées depuis quelques années, & jamais on n’a tant
écrit en faveur de l’une ou l’autre opinion. Les
uns ont prétendu que le plus grand bien de l’état
& des particuliers confiftoit à avoir les denrées &
les marchandifes au plus bas prix poflible ; qu’il ne
pouvait y avoir d’abondance fans ordre, point d’ordre
fans réglemens, point dé réglemens qui ne défendent
Y accaparement & le monopole : lesfeutres
ont répondu que toute gêne étoit un attentat à la
propriété; que le commerce, ne pouvoit fubfifter
fans une liberté abfolue, qui feule pouvoit procurer
la circulation, la concurrence , &par conféquent
l’approvifionnement & l’abondance; que c’étoit l’unique
moyen de foutenir & faire fleurir l’agriculture.
Ce grand problème devant être difcuté dans le
dictionnaire d’économie politique, nous nous bornerons
à faire connoître les loix anciennes & nouvelles
fur Y accaparement & le monopole.
Les loix données par Dieu même aux Hébreux
ne parlent point de Y accaparement, & ne prononèent
aucune peine contre lui ; le fage, dans ^ p r o verbes,
chap. 12 , fe contente de dévouera la malédiction
des peuples, celui qui cache fes bleds pour
ne pas les vendre.
Parmi les républiques grecques , on ne trouve
des loix contre Y accaparement, que dans, celle d A-
thènes, qui avoit une grande population fur un territoire
aride & étroit. Il y étoit défendu d’en exporter
les figues & le bled, d’en faire des-amas,
& de les cacher. On y accordoit au dénonciateur ,
la moitié des biens de l’accapareur, ou de celui
qui exportoit les denrées, & les coupables étoient.
même punis de mort, ainfi que le dit Vinnius dans
fon commentaire fur ie §. n ,tit . 18, liv* 4 , des
Injlituts.
Dans les temps de la république romaine, on ne
trouve aucune loi contre Y accaparement ; le code
Papyrien & la loi des douze tables n’en font aucune
mention. Mais on les voit fe multiplier fous
les empereurs. Le titre du digefte ad leg. jul. de
ann, défend les opérations, les fpéüüations , les af-
fociafions, la retenue' & le retardement des vivres
& condamne les monopoleurs à une amende de 2.0
écus d’or. La loi 6 1 jf. de extraor d. crimin. remet
à l’arbitrage du juge, la prononciation des peines
qu’on doit infliger aux monopoleurs, qui cachent
le s denrées qu’ils ont accaparées, & aux-riches qui
refufent de les vendre à un prix raifonnable : la loi
é\ c. de monop. & conv. negot. ïllic. prononce la
confifcation des vivres ou marchandées accaparés j
& de tous les biens du monopoleur; elle le condamne
en outre à un exil perpétuel..
Je ne peux m’empêcher d’obferver, fur la difpofition
de ces loix romaines, que le parlement de
Provence écrivoit au roi en 1768, qu’elles ne doivent
pas être regardées comme des règles de politique
, mais plutôt comme une économie forcée,
néceflaire à un gouvernement foible & épuifé, qui
d’abord ayant introduit les. diftributions de pain
pour corrompre & féduire le peuple, fe trouvoit
contraint de les continuer, & d’y employer non-
feulement le tribut en grains dès provinces les plus
fertiles, mais encore une partie des revenus publics
; Ôt qui pour éviter la concurrence dans les
achats, avoit gêné la liberté du commerce.
Nous ne trouvons, fous la première race de nos
rois, aucune loi contre les accapareniens & le monopole
; ce n’eft qu’en. 806, qu’on voit un capitulaire
de Charlemagne, par lequel il taxe de gain
honteux & illégitime, celui que fe - procure un
homme qui, auterns de la vendange ou de la moif-
fon , acheteroit des denrées pour la valeur de deux
deniers, pour les revendre enfuite quatre,, fix ou
davantage.
Le recueil fait par M. Houard, avocat, des loix
angîo- faxonnes, auxquelles on donne communément
le. titre de Statuta Gildtz, contient plufieurs
difpofitions .pour prévenir Y accaparement. Elles dé-
fendent aux étrangers d’acheter par ' eux-mêmes ,
ou par perfonnes interpofées des marchandifes ou ,
denrées dans les marchés publics, au-delà de leur
confommation néceflaire, & aux habitans d’un même
lieu , de prêter leur nom à des étrangers pour
faire le commerce , & d’en acheter eux-mêmes plus
qu’ils n’en ont befoin, pour le revendre enfuite.
Elles ne permettent pas d’aller au-devant des denrées
qu’on apporte au marché, & de les acheter.
Elles condamnent les délinquans en différentes
amendes, & à la perte des denrées & marchandifes.
N’eft-ce pas là la fource de tous nos réglemens
de police fur les accaparemens, les jurandes,
les marchés, & les regratiers ou revendeurs ?
En effet, ouvrons les ordonnances depuis le roi
Jean, jufqu’à la fin du régne de François I. Une
de 13 43 , défend aux marchands de faire des maga-
fins de bled, & de s’aflembler, fous prétexte de
confrairie, pour exercer le monopole. Celle de
1482 dit que nul ne pourra faire amas & provifions
de bled, finon en plein marché. Celles de 13 56,
; i'5o8 & 1517 défendent à tous les officiers de
judicature & de finances, de faire ou exercer la
marchandifë, foit par eux-mêmes, foit par perfon-
nes interpofées, fous peine de privation de leur
office, de reffitution des gages qu’ils auroient reçus
, *8c d’amende arbitraire. Enfin l’ordonnance de
1539 défend de commettre fur les denrées aucwx
monopole, & aux maîtres, compagnons & fervi-
teurs de métiers, de faire entre eux des convenu
tions, & d’avoir intelligence les uns avec les autres
pour faire aucuns monopoles,, à peine de confifcation
de corps & de bien.
Toutes ces loix prohibitives difparoiflent fous le
règne de Henri IV ; Sulli ne v o it, pour réparer les
pertes de la France , que la liberté du commerce
des denrées; il fait ceffer en eonféquence toutes
les prohibitions, il ouvre les p.orts, établit la circulation
dans l’intérieurarrête les entreprifes des
juges, qui fe croyoient encore autorifés à arrêter
i’exportation des bleds, & par ce moyen il ranime
l’agriculture»
Sous Louis XHI & Louis XIV les loix prohibitives
reprennent leur vigueur, les parlemens or*
donnent qu’on rafle le procès à ceux qui feront ou
auront fait des approvifionnemens de bled; une déclaration
de 1699 ordonne que ceux qui voudront
entreprendre le commerce des grains, feront tenus
de fe faire enregiftrer, 6 c de prêter ferment ; on
leur défend de contraâer avec d’autres des fociétés *
d’enharrer ni acheter les bleds & autres grains en
verd, fur pied, & avant la récolte : défend pareillement
le commerce des grains à tous officiers,
gentilshommes , juges , laboureurs , fermiersreceveurs
& autres, toit«direélement, foit indirectement.
Enfin, une déclaration de 172.3 ajoute encore
que les bleds, farines & grains né pourront:
ê,tre vendus, achetés ni mefurés ailleurs,, que. dans;
les halles & marchés, ou furies ports.
Ces lo ix , & les recherches, ordonnées par les
cours dans tous les temps de cherté, les peines prononcées
contre »plufieurs marchands.x foupçonnés, ,