
indépendamment des termes de leurs procurations.
Toutes les délibérations arrêtées & conclues à
la pluralité des fuffrages pris par provinces, doivent
être relues & 'lignées avec le procès-verbal
dans la féance fuivante. Il n’eft cependant pas permis
à ceux qui font préfens à la leéture de l’arrête,
de demander qu’on opine de nouveau fur l’affaire
qui a été décidée , à moins que la délibération n’ait
été faite dans une féance où les députés étoient en
petit nombre, & que Yaffemblée ne jugeât qu il fut
néceffaire d’opiner de nouveau dans une féance,
où il y auroit plus de députés préfens.
Les grandes affemblées qui fe tiennent de dix ans
en dix ans, ont un droit d’infpeétion & de revi-
fion fur Yaffemblée qui a été tenue cinq ans auparavant
, pour tout ce qui concerne les comptes. Elles
peuvent examiner fi les réglemens ont été obfer-
v és; fi l’on a alloué mal-à-propos quelques décharges
; fi l’on a paffé au receveur général des intérêts
pour les décimes, ou quelque fomme qu’il
auroit payée en vertu des arrêts du confeil.
Comme le receveur du clergé eft établi pour
dix ans par chaque contrat pafle avec les grandes
affemblées, celles des comptes ne peuvent recevoir
fa démiflion ; mais s’il a fait quelque faute confi- .
dérable dans l’adminiftration des deniers, elles ont
•droit d’en établir un autre. Pour que le receveur
général foie continué par les affemblées décennales,
il faut qu’il ait en fa faveur les fuffrages de
plus des deux tiers des provinces. On ne peut le j
■ difpenfer, fous quelque prétexte que ce foit, de
donner une caution qui réfide dans Paris.
Les commiflaires nommés par le ro i, vont or-
•dinairement deux fois à YaJJemblée ; la premiers ,
pour donner aux députés un témoignage de l’ef-
time & de la confidération du roi pour le clergé ;
la fécondé, pour demander le don gratuit fuivant
les befoins de l’état. Les agens vont recevoir les
commiflaires à la defeente de leur carroffe, & les
députés nommés par YaJJemblée à la porte de l’églife
qui donne dans le cloître, quand Yaffemblée fe tient
aux grands Auguftins de Paris. Aux grandes affem-
■ blées on choiflt quatre députés , deux de chaque ordre
, pour recevoir chaque commiffaire. Aux affemblées
des comptes, il n’y a que deux députés, l’un
du premier, l’autre du fécond ordre, pour recevoir
chaque commiffaire. Le plus ancien évêque
prend la droite du premier commiffaire qu’il conduit
, & pafle devant à toutes les portes. Le premier
de ceux qui font députés pour conduire le
fécond commiffaire, obferve la même règle. On
fuit le même ordre pour reconduire les commiflaires
quand ils fortent de Yaffemblée.
Pour accorder un don gratuit, ou une autre fub-
vention extraordinaire, il faut, fuivant les réglemens
, que la délibération pafle à la pluralité des
réglement fait en 1646; mais on n’a point eu lieii
jufqu’à préfent d’en faire l’application, le clergé
ayant offert au roi des dons gratuits d’un confen-
tement unanime. Le roi a même modéré en quelques
.fuffrages de plus des deux tiers des provinces ; de
forte que fi un tiers des provinces s’oppofe au don ,
ou eft d’avis de donner moins, la délibération doit-'
être dreffée fuivant cet avis : c’eft ce que porte le
occafions le zèle de Yaffemblée, en acceptant
une fomme moins confidérable que celle qu’elle
lui offroit.
Vaffemblée en corps va rendre deux fois fes reft
peéls au roi. Le fecrétaire, le promoteur & les
deux agens marchent les premiers : après eux les
prélats vont deux à deux félon l’ordre de leur
facre, en camail violet & en rochet ; puis ceux
du fécond ordre en manteau long & en bonnet
quarré, deux à deux, fans diftin&ion. Ils font conduits
dans l’appartement du roi par un des fecré-
taires d’état, par le grand-maître & par le maître
des cérémonies. Quand ils paffent dans la falle,
les gardes font en haie, fous les armes, les officiers
à leur tête, les deux battans font ouverts à
toutes les portes. On obferve les mêmes cérémonies
, quand Yaffemblée fe retir.e après avoir eu
audience.
C ’eft ce qui eft juftifié par les procès-verbaux
des affemblées.
Les députés doivent aflifter à toutes les affemblées ;
tant du matin que de l’après-midi, à moins qu’ils
n’aient quelque raifon légitime de s’en difpenfer.
Leur taxe eft payée pour chaque jour de féance,
de même que pour leur voyage, & pour leur retour
dans la province qui les a députés. Le temps
pour les voyages eft fixé fuivant la diftance des
lieux. Ils font tenus préfens à leurs bénéfices,
non-feulement pendant les féances de Yaffemblée,
mais encore pendant le temps que doit durer leur
voyage.
Les ajjemblées du clergé, ainfi qu’on a dû le voir
par le détail où nous fommes entrés, n’ont ordinairement
lieu que pour les affaires temporelles ; il arrive
quelquefois cependant qu’on y traite, avec la
permiflion du ro i, des affaires de morale & de
difeipline.
Dans le cas où le clergé s’affembîe pour décider
de la fo i, de la morale, ou d’autres points
qui ont rapport à la religion, fes affemblées prennent
le nom de conciles & de Jynodes, Nous en
parlerons fous ces mots.
A ssemblée des états-généraux. On appelle ainfi
Yaffemblée des députés des différons ordres de toute
nation.
Il n’y a guère de nations policées chez lefquelles
il n’y ait eu des affemblées, foit de tout le peuple ou
des principaux de la nation ; mais ces affemblées
ont reçu divers noms, félon les temps & les pays,
& leur forme n’a pas été réglée par-tout de la même
manière.
Il y avoit chez les Romains trois ordres : favoir
les fénateurs, les chevaliers & le bas peuple, ap-
peïlé plebs. Les prêtres formoient bien entre eux
différens collèges, mais ils ne compofoient point
un ordre à part; on les tiroit des trois autres ordres
indifféremment,
indifféremment. Le peuple avoit droit de fuffrage,
de même que les deux autres ordres. Lorfqu on
affembloit les comices , où l’on élifoit les nouveaux
magiftrats, on y propofoit atifli les nouvelles loix,
& l’on y délibéroit de toutes les affaires publiques.
Dans la fuite, les empereurs s’étant attribue le
pouvoir exclufif de faire des lo ix , de créer des
magiftrats, & de faire la paix & la guerre, les
comices ceffèrent d’avoir lieu ; le peuple perdit
par-là fon droit de fufffage, & le fénat fut le feul
Ordre qui confervât une grande autorité.
L’ufage d’affembler les états ou différens ordres
a néanmoins fubfifte dans plufieurs pays, & ces
affemblées y reçoivent différens noms. En Pologne ,
on les appelle diètes; en Angleterre, parlement;
& en d’autres pays , états.
Dans quelques pays, il n’y a que deux ordres
ou états qui foient admis aux affemblées générales,
comme en Pologne où la nobleffe & le clergé
forment feuls les états qu’on appelle diètes , les
payfans y étant tous efclaves.
■ En Suède, au contraire, on diftingue quatre
états oü ordres différens de citoyens; favoir , la
nobleffe, le clergé, les bourgeois & les payfans.
Dans la plupart des autres pays, on diftingue
trois états: le clergé, la nobleffe & le tiers-état
où troifième ordre, compofé des magiftrats municipaux,
des notables bourgeois & du peuple. Telle
eft la divifion qui fubfifte préfentement en France ;
mais les chofes n’ont pas été toujours réglées de
même à cet égard.
Avant la conquête des Gaules par Jules-Céfar,
il n’y avoit que deux ordres; celui' des druides &
celui des chevaliers : le peuple étoit dans une ef-
èce d’efclavage, & n’étoit admis à aucune déli-
ération. Lorfque les Francs jettèrent les fondemens
de la monarchie françoife, ils ne reconnoiffoient
qu’un feul ordre dans l’état, qui étoit celui des
nobles ou libres, en quoi ils confervèrent quelque
temps les moeurs des Germains dont ils tiroient
leur origine. Dans la fuite, le clergé forma un
ordre à part, & obtint même le premier rang dans
les affemblées de la nation. Le tiers-état ne fe. forma
que long-temps après, fous la troifième race.
Ces affemblées de la nation, qu’il ne faut pas confondre
avec les affemblées des états du royaume,
commencèrent fous le règne de Pépin à prendre
le nom de parlemens. Ces anciens parlemens, dont
celui de Paris & tous les autres femblent tirer leur
origine, n’étdient pas une fimple affemblée d’états,
dans le fens que ce terme fe prend aujourd’hui ;
c’étoit le confeil du roi, &. le premier tribunal
de la nation où fe traitaient toutes les grandes
affaires. Le roi préfidoit à cette affemblée, ou quelque
autre perfonne par lui commife à cet effet. On
y délibéroit de la paix & de la guerre, de la police
publique & adminiftration du royaume; on y
faifbit les lo ix , on y jugeoit les crimes publics,
& tout ce qui touchoit la dignité & la fureté du
r o i, & la liberté des peuples.
Jurisprudence. Tome /,
Ces parlemens n’étoient d’abord compofés que de
nobles, & ils furent en fuite réduits aux feuls grands
du royaume & aux magiftrats qui leur furent affociés.;;
Le clergé ne formoii: point encore un ordre à part,
de forte que les prélats ne furent admis à ces parlemens
qu’en qualité de grands vaflâux de la couronne.
On ne connoiffoit point encore de tiers-
états ; ainfi ces anciens parlemens ne peuvent être
confidérés comme une affemblée des trois états. Il
s’en faut d’ailleurs beaucoup que les affemblées
d’états aient jamais eu le même objet , ,ni la même
autorité, ainfi qu’on le feconnoîtrà fans peine , en
confidérant la manière dont les états ont été convoqués
& dont les affaires y ont été traitées. -
On ne connut pendant long-temps, dans le royaume
, que deux ordres, la nobleffe & le clergé.
Le tiers-état, compofé du peuple j étoit alors pref-
que tout ferf ; il ne commença à fe former que
fous Louis-le-gros, par l’affranchiffement des ferfs,
lefquels par ce moyen devinrent bourgeois du roi,
ou des feigneurs qui les avoient affranchis.
Le peuple ainfi devenu libre, & admis à pof*
féder propriétairement fes biens, chercha les moyens
de s’élever , & eut bientôt l’ambition d’avoir
quelque part au gouvernement de l’état. Nos rois
l’élevèrent par degrés , en l’admettant aux charges,
& en communiquant la nobleffe à plufieurs roturiers
; ce qu’ils firent, fans doute, pour balancer
le crédit des deux autres ordres qui étoient devenus
trop puiflàns.
Il n’y eut cependant jufqu’au temps de Philippe-
le-bel, point d’autre affemblée repréfentative de la
nation que le parlement, lequel étoit alors compofé
feulement des grands vaffaux de la couronne,
& des magiftrats que l’on ehoififfoit ordinairement
entre les nobles.
Philippe-le-bel fut le premier qui convoqua une
affemblée des trois états ou ordres du royaume en
la forme qui a été ufitée depuis.
La première affemblée d’états-généraux fut convoquée
par dès lettres du 2.3 mars 1301, que l’on
comptoit à Rome 1302. Ces lettres ne fubfiftent
plus, mais on • les connoît par la réponfe qu’y fit
le clergé; elles furent adreffées aux barons, archevêques
, évêques & prélats ; aux églifes cathédrales,
univerfirés, chapitres & collèges, pour y faire
trouver leurs députés ; & aux baillis royaux ,
pour faire élire par les villes des fyndiçs ou procureurs.
Ce fut à la perfuafion d’Engnerrand de Ma-
rigny, fon miniftre, que Philippe-le-bel affembla
de cette manière les trois états, afin de parvenir
plus facilement à lever fur les peuples une impo-
fition pour foutenir la guerre de Flandres qui
continuoit toujours, & pour fournir à fes autres
dépenfes, qui étoient exceflives. Le roi cherchcit
encore par-là à appaifer le peuple & à gagner les
efprits, fur-tout à caufe de fes démêlés avec Boni-
face V III, qui commençoient à éclater.
Ces états fuirent plufieurs féancès depuis la ml*
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