
appartenoit originairement pour le tout aux ab-
bayes , & que ce n’étoit que des obédiences où
Ion envoyoit des religieux qui rendoient compte
de leur adminiftration, & rapportoient les fruits à
la menfe.
Enfin, pour ce qui eft des penfions fur les titres
des bénéfices, les arrérages en doivent être payés
parles titulaires, a proportion dii temps de la jouif-
fance de chacun d’eux ; enforte que, après la mort
du bénéficier, le penfionnaire doit s’adreffer à fes
heritiers poyr. etre paye des arrérages échus au jour
du deces. Il ne peut s adrefièr au nouveau titulaire
que pour les penfions à venir'. Cette jurifprudence
eft fondée fur ce que les penfions dont il s’agit,
n’ont eu pour objet que l’avantage du bénéficier
prédéceffeur ? & noir celui de fon églife.
S e c t i o n IL
Des arrerages du cens, champart, dixme & rentes
foncières 9 &c.
i° . Les arrérages des cens font des efpèces de
fruits civils, comme tous les autres, arrérages ,■ mais
ils en diffèrent en ce que le cens eft une recori-
noiflance folemnelle, due par le cenfitaire à un certain
jour marqué par le titre ; ainfi il n’eft dû & n’eft
payable au feigneur^ que du jouç porté par la re-
çonnoiflance. —
Par cette raifon, dans le cas delà dîffolution de la
communauté, on ne peut faire entrer dans la maffe
qui la compofe, les arrérages de cens non échus ,
pour le temps qui s’eft écoulé depuis le dernier
terme jufqu’au jour du décès de l’un des conjoints
parce que le cens n’eft pas proprement dû à raifon
de la jouiffance du cenfitaire, mais en figne de fur
jétion : & , , comme cejte reconnoiftànce envers le
feigneur n’eft due qu’à un certain jour fixé & déterminé
, le cenfitaire ne doit rien avant l’échéancv'
de ce jour.
La prefcription de cinq ans n’a pas lieu pour les
arrérages du cens; fuivant le droit commun, ils ne
fe prefcrivent que par trente ans ; il çn eft de même
des^ arrérages du champart. Boniface rapporte un
arrêt du 14 mai 1583 , par lequel le parlement de
Provence a jugé qu’ils ne fe preferivoient que par
quarante ans contre les feigneurs ecclèfiaftiques, &
par trente contre les laïques.
On tient pour maxime au parlement de Bourgogne
, que le feigneyr peut obliger le nouveau
poffeffeur d’un héritage, fur lequel il lui eft dû un
cens, à en payçr vingt-neuf années, quoiqu’elles
foient dues par le poffeffeur antérieur. Et c’eft d’après
ce principe, que, par arrêt du premier août 1639,
ce tribunal condamna la comteffe de Tavannes à
payer onze années d'arrérages, d’une charge fpn?
ciere, établie fur la terre de Corcelles, éçhqes
avant qu’elle poffédât cette terre.
Ce que nous difons ic i, qu’on peut exiger vi’ngt-
neuf années déarrérages du cens, ne doit s’èntendre
?}uç dp droit commun qui a lieu dans les coutumes
qui n ont a cet égard aucune diïpofitîon. Il en eft
quelques-unes qui défendent aux feigneurs de demander
à leurs cenfitaires au-delà d’un certain nombre
d années d arrérages ; telles font la coutume de
Bourbonnois qui n’en accorde que dix, & celle
d Auvergne, qui n’en donne que cinq. Il faut fui-
vre ces difpofitions à la lettre ; & le feigneur qui
voudroit exiger un plus grand nombre d’années
c\arrerages, feroit débouté de fa demande, en lui
oppofant la prefcription coutumière.
20. Lorfque les arrérages de cens ou de rentes foncières
font dus, & fe paient en nature de grains,
vin, foin, huile, &c. on ne peut les exiger en
nature, que dans le courant.de l’année de l’échéance ;
des qu elle eft révolue , le débiteur peut les payer
en argent, fur le pied de ce que vafoient ces denrées
, dans le temps où elles auroient dû être livrées.
Un reglement général de la cour des grands jours
de Clermont, du 19 janvier i 66ti, fait défenfes aux
feigneurs, & à leurs fermiers où receveurs, d’exiger
pour arrérages de cens, des obligations portant
I plus grande- fomme que la valeur des grains ou
autres denrées. C’eft pourquoi ce réglement veut
qu’on exprime dans ces obligations la qualité, la
quantité & la valeur des denrée^’, année par année ;
il fait aufli défenfes aux notaires de recevoir ces
obligations, fgns y obferver les conditions qu’il
preferit, fous peine de nullité des aftes, de perte
des fommes y contenues, de tous dépens, dommages
& intérêts, contre les parties qui auront fti-
pule à leur profit dans ces obligations, fans fpéci-
fication particulière ; 8c de deux mille livres d’amende
contre les notaires qui les auront paffées.
30. Les droits de .bannalité & de corvées ne
s’arréragent point, ils font preferits dès qu’ils
n’ont point été requis & demandés dans le temps
où ils font dus, foit par les titres, foit par la
coutume. Il en feroit autrement fi ces droits étoient
abonnés, le feigneur peut alors en demander vingt-
neuf années à'arrérages, parce que l’effet de l’abonnement
eft de continuer le droit de bannalité .&
des corvées, en une redevance annuelle, foit en
argent, foit en efpèces fixes.
4 °• Les dixmes qui ne font pas abonnées ne
s’arréragent point ; elles doivent être exigées chaque
année, & le décimateur n’eft plus reçu à les
demander aprçs l’année révolue. C’eft ce qu’ont -
jugé un arrêt du parlement de Paris, du 13 décembre
16 72, rapporté au journal des audiences,;
& un arrêt du parlement de Provertte, du 26 mars
1658, qu’on trouve dans Boniface. Cette jurifprudence
eft fondée fur ce que la dixme n-’a été établie
que pour lafubfiftance des miniftres de l’autel , &
ne leur eft payée que comme alimens annuels,
d’où on conclut que le miniftre, qui ne l’a pas
exigée, n’en avoit aucun befoin : on peut encore
ajouter que la dixme n’eft, pas une rente foncière
due par la terre même, mais feulement une charge
des fruits.
En fuivant ces mêmes principes, on doit conclure
que, fi la dixme tient plus de la nature du champart
& d’une rente foncière, on doit en adjuger les
arrérages ; c’eft le motif des deux arrêts du parlement
de Paris, des 4 février 1723 & 3 feptem-
bre 1726, qui ont condamné les habitans de la
paroiffe d’Ingrê de payer au prévôt d’Ingré, dignitaire
de 1’’églife de Chartres, les arrérages du droit
de dixme & de champart de toutes leurs terres.
ARRÊ T, f. m. ( Droit civil. Procédure.') on
donne le nom Xarrêt aux jugemens des cours fou-
veraines, contre lefquels on ne peut fe pourvoir
par la voie d’appel.
Quelques auteurs prétendent que ce mot eft
tiré du latin fiape, qui fignifie arrêter, rendre une
chofe fiable & fixe, parce que l ’autorité des cours
arrête y finit & détermine les différends 8c les contef-
tations qui s’élèvent entre les citoyens.
D ’autres cherchent l’origine de ce mot dans ces
expreffions du moyen âge, arrefium, arrefiare, qui
fignifioient, fuivant Ducange 8c les autres gloflà-
teurs, fdifir, prendre, détenir quelqu'un, Jaifie, détention
, capture : & ils difent qu’on appeïla arrêts les
décifions, parce quelles arrêtoient le cours de la
procédure, 8c poloient des bornes que la chicane
ne pouvoit plus paffer.
Il nous paroît plus naturel de faire dériver ce
mot du mot grec arefeon, que les latins rendoient
par celui de placitutn, il me plaît. Le recueil de
Jean Luc , l’un des plus anciens atrêtiftes qu’on con-
noiffe, eft intitule placita curia., recueil des déci- |
fions, qu’il a plu à la cour de donner. Il paroît j
même que l’on fe fervoit anciennement du mot
placitum, car le premier préfident, en prononçant j
les arrêts, fe fervoit de cette locution,- placuit
curia.
Lorfque les arrêts fe rendoient en latin, on les
exprimoit par les mots judicia, confilia, mandata :
ce ne fut que dans le treizième fiècle, que l’on
commença à fe fervir du mot arrefium, pour défi-
gner un jugement de cour fouveraine. Ducange
prétend que ces mots avoient chacun une acception
différente : arrefium fignifioit un jugement prononcé
, les parties ouïes contradictoirement ; judi-
cium y un jugement rendu fur procès, par écrit &
fur enquêtes ; confilium, un jugement préparatoire ;
& mandatum, une injonction faite à des juges inférieurs
par le tribunal auquel ils reffortiffoient.
Nous fommes entrés dans ce détail pour faciliter
l’intelligence des anciens auteurs, & praticiens qui
ont écrit en langue latine : aujourd’hui on fe fert
du mot générique arrêt, pour exprimer tous les jugemens
émanés des cours fouveraines, on y joint
différentes qualifications, fuivant leur ufage ou leur
objet : nous les rapporterons dans un des paragraphes
fuivans.
De la forme des arrêts. L’ufage de rendre en latin
le s arrêts, a duré jufqu’en 1539. François I , par un
édit de cette année , ordonna qu’à l’avenir tous arrêts
feroient prononcés, enregiftrés Sc déliYrés aux parties
en langue maternelle : édit plein de fageffe, & digne
d’un prince affez éclairé , 'pour fentir les inconve-
niens, qu’entraînoit l’ufage barbare de juger les
citoyens dans une langue qu’ils n’entendoient pas.
Nous devons encore defirer que la langue du barreau
parvienne à fe perfectionner, comme celle du refte
de la nation, qu’elle proferive entièrement ces anciennes
formules gothiques, dont on furcharge-encore
tous les aCtes, & qui les rendent inintelligibles ,
pour quiconque n’eft pas initié dans les myfteres
de la chicane.
20. Un arrêt doit être fait & écrit d’une manière fi
claire, & fi précife, qu’il ne contienne, ni ambiguité,
ni incertitude.
30. Tout arrêt, de quelque nature qu’il foit,’
doit être daté du jour qu’il a été_ rendu. Dans les
procès par écrit, la date & le diïpofitif de 1 arrêt
doivent être écrits de la main du rapporteur ; & il
doit mettre en marge le nom des juges qui l’ont
rendu : il doit en outre être figné du rapporteur &
du préfident.
Les arrêts prononcés à l’audience, doivent être
vifés & fignés fur le plumitif par le préfident, &
les-greffiers ne peuvent en délivrer aucune expédition
, avant d’être munis de cette fignature, fous
peine de privation de leur office.
En matière criminelle, un a r r ê tportant peine
affiiCtive, doit être figné par tous les juges qui y ont
affifté , à peine d’interdiftion, de dommages & intérêts
des parties, & de cinq cens livres d’amende:
mais le retentum, qu’on y ajoute fouvent, n’eft figne
que par le rapporteur & le préfident.
4°. Le roi eft réputé préfent à tous les arrêts,'
que rendent les cours fupérieures, & c’eft par cette
raifon qu’ils font expédiés fous fon nom, & exécutés
, comme des ordres émanés du fouverain.
50.' Anciennement les arrêts ne coûtoient rien
aux parties; les greffiers, qui les expédioient, étoient
payés fur un fond deftiné pour cet objet. Sous
Charles V IH , le dépôfitaire de ce fond, l’ayant
diftipé & pris la fuite , ce prince ordonna qu’à l’avenir
les parties paieroient les arrêts qu’elles obtien-
droient.
6°. Les arrêts no peuvent s’exécuter qu’après avoir
été fignifiés à la partie adverfe, au domicile de forr
procureur; on réitère cette fignification à la partie
elle-même ou à fon domicile , avec fommation d’y
fatisfaire. Lorfque ces formalités ont été remplies,
on peut mettre à exécution les difpofitions d’un
arrêt.
70. Les ordonnances de 1339, de 1566 & de
16 67, accordent aux arrêts rendus contradi&oire-
ment, l’effet de donner une hypothèque à ceux
qui les obtiennent, fur les biens des condamnés,'
du jour qu’ils ont été prononcés; mais les arrêts
par défaut ne la donnent que du jour de leur fignification.
8°. Aucun arrêt ne peut être imprimé fans une
permiffion expreffe, donnée par Varrêt même : on
ne doit pas excéder le nombre d’exemplaires preir