
mauvais üfage d’une chofe ; ce qui ne peut arriver
fans caufer du dommage à foi-même ou aux autres.
Dans une fignification plus particulière, abufer s’emploie
pour exprimer l’a&ion de fuborner une femme,
de corrompre une fille, & leur arracher les dernières
faveurs. Voye^ SÉDUCTION.
ABUSIF, adjed., terme de Droite qui fe dit fin-
guliérement des entrejnifes, procédures & jugemens
des eccléfiaftiques, ou il y a eu abus, c’eft-à-dire,
infraCtion des canons ou des ordonnances. Voye^
plus haut le mot Abus.
ABUSIVEMENT, adv. terme de Droit• Voye\[
Abus.
La cour, en prononçant fur l’appel comme d’abus
interjette du jugement d’une cour eccléfiaftique, dit,
s’il y a lieu à l’infirmer , qu’i/ a été mal, nullement
& abujivement jugé. (üf)
A C
ACADÉMIE , f. f. ( Droit public.') ce mot fe
prend ici pour ces compagnies célèbres qui cultivent
les iettres , les fciences & les arts , &
s’affeiàblent pour fe communiquer mutuellement le
fruit de leurs recherches & de leurs méditations.
Le mot académie nous vient des Grecs, qui les
premiers conçurent la néceffité de raffembler, dans
un même lieu , les hommes inftruits , à l’effet de
faciliter entre eux la communication des idées & la
recherche de la vérité. Ce nom fut donné à Socrate
& aux amis ou difciples qu’il faffembloit à Athènes
dans la maifon d’Acaaémus , pour s’entretenir
avec eux fur les principes de la morale, de la juflice &
de l’équité , enveloppés jufqu’alors dans les myflères
de l’initiation. Cette académie, fondée par Socrate &
Platon , fut renouvellée par Arcéfilas , & perfectionnée
par Carnéade, & c’efi aux entretiens familiers
de ces philofophes & de leurs fucceffeurs ,
que nous fommes redevables du petit nombre de
vérités morales qui ont échappé aux ravages des
temps.
Rome, ignorante & guerrière, n’eut point èlacadémie;
Cicéron , feul parmi fes citoyens, voulut en
inflituer une dans fa maifon de Campagne de Cu-
mes , qui n’a duré que le temps de fa vie : c’eft, ■
dans cette retraite, qu’après de longs/& do&es entretiens
avec fes amis, il compofa les traités philo-
fophiques, bien fupérieurs à fes plaidoyers.
Lyon dut l’origine de fon athénée, qui étoit une
véritable académie, à Caligula ; cet établiffement fit
fleurir les lettres & les fciences dans les Gaulés ;
on fe rendoit de toutes parts à L y o n , pour s’éclairer
en latin & en grec, fur la morale , la juflice,
l’hifloire, l’éloquence & la poéfie : on y -eonfacroit
un mois entier à ces difputés littéraires, 8c les vaincus
dévoient fournir le prix décerné aux vainqueurs
, prononcer leur éloge, effacer leurs écrit?,
ou être plongés dans la Saône.
Les barbares , qui détruifirent l’empire romain ,
renversèrent ce temple des beliesrlettres , en brû- |
lèrent les archives & en difperfèrent les favans. Nous
ne trouvons plus, dans l’hifloire , aucune trace
de fociété littéraire jufqu’à Charlemagne, qui, fous
des noms hébreux , grecs & latins, raffembla dans
fon palais les favans de l’Europe , affifloit régulièrement
à leurs conférences, & puifoit, dans leurs
lumières & dans leur commerce, ces notions de
juflice & d’équité, qui fe trouvent dans fes capitulaires
& ceux de fes premiers fucceffeurs, & dont
plufieurs difpofitions ont été renouvellées par les
ordonnances de Louis XIV.
Cette académie difparut bientôt au milieu des fiè-
cles d’ignorance, fuite néceffaire des irruptions des
Normands * des guerres civiles , de la féodalité , des
fervitudes & des croifades. Au milieu de ces ténèbres
, S. Louis efîàya de ramener la lumière des
lettres , il protégea les favans , fit traduire les
loix romaines, pour les adapter à toute la France.
Charles V & Louis XII appelèrent auprès d’eux
les hommes inftruits, s’occupèrent du foin de ramaf-
fer une bibliothèque ; mais particuliérement Franr
çois I , appellé à jufte titre le restaurateur des lettres
; il encouragea les favans & les retint auprès
de lu i ,& dans le même temps on lui voit fonder
le collège royal , & publier quelques fages
ordonnances : telles que celle de Villers-Coterets ,
8 c celle qui enjoint aux officiers de judicature de
prononcer leurs jugemens en langue françoife.
Henri IV & Sully avoient formé le projet d’établir
en même temps un cabinet d’état & une académie
■ : la mort précipitée du meilleur des rois, en-
févelit avec lui fes vues & fes intentions. Enfin ,
fous Louis XIII, le cardinal de Richelieu exécuta
leur deffein , en donnant une forme confiante &
légale à Y académie françoife.
Louis XIV , dont l’ame grande & noble fai-
fiffoit avidement tout ce qui pouvoit contribuer à
fa gloire & à l’avantage de l’inftruClion & de la
félicité publique , étendit ce projet , le développa
en formant fucceffivement les académies des Sciences
, des Infcriptions & Belles-Lettres , d’Architec-
ture & de Peinture , qui ont été fuivies, fous
Louis X V , de l’établiffement des académies de Gravure
, de Marine , de Chirurgie , & des Sociétés
royales d’Agriculture & de Médecine , tant dans
la capitale que dans les provinces. Voye% Université
, Collège.
Des loix & réglemens qui concernent les académiesi
Tous les hommes peuvent aujourd’hui fe réunir
pour cultiver en paix les fciences , les lettres &
les arts. Les provinces renferment plufieurs affo-
ciations de ce genre , que connoît & n’inquiète
point l’autorité publique , tant qu’elles ne font
rien de contraire à la religion , au gouvernement
& aux moeurs ; mais ces fociétés manquent de con-
fiftance, & elles ne peuvent acquérir un état légal
que par des lettres-patentes d’érection , duement
enregiftrées dans les cours fouveraines.
Les académies , au contraire , font de véritables
corps politique?, comme, les univerfitès , les colléges
, ; elles ont un caraClère diftinâif ; elles
font confiütées par l’adminiftration , le confeil du
roi & les cours ; l’avis qu’elles donnent eft joint
aux pièces, & v^fé dans les loix & les jugemens j
elles font, comme tous les autres corps , capables
de pofféder, d’acquérir , de vendre, de traiter, de
louer , de plaider , de tranfiger, de donner & de
recevoir, en fe conformant aux règles preferites pour
les gens de main-morte, dans la claue defquels les
place leur qualité de corps ou compagnie.
C’eft en vertu de cette exiftence civile , & de
la capacité qu’elle donne aux académies pour toutes ;
les efpèces d’aCles , que le parlement de Paris, par
un arrêt du 6 feptembre 1718 , a adjugé à Yacadémie
des fciences un legs de 1 20000 üv. , qui lui
avoit été fait par M. Roullier-de-Mefley ; fes héritiers
le conteftoient, fous le prétexte des difficultés
qu’ils difoient naître de 1 exécution du tefta-
ment. Par un autre arrêt du 2 juin 1779 j Ie même
tribunal a pareillement adjugé à Y académie de L y on ,
le legs d’une bibliothèque qu’on lui avoit fait.
Les* académies ne peuvent pas changer la deftî-
nation des legs & des dons qui leur ont été faits :
lorfqu’on y a fondé des prix , elles peuvent bien
les partager ou les remettre , lorfqu’elles ne font
pas Contentes des mémoires & des pièces qui leur
ont été adreffés ; mais elles ne peuvent, fans y être
autorifées , en garder le prix , dont elles ne font
que dépofitaires, ni en changer le fiijet, ou en détourner
la valeur à d’autres ufages.
Les regiftres des académies font admis en juflice,
leurs certificats y font preuve ; elles ont un fceau
8 c un cachet, qui leur ont été accordés par le ro i,
pour fceller tout ce qui émane de leur corps ; elles
ont le privilège de faire imprimer leurs ouvrages
par l’imprimeur quelles choififfent ; leur privilège
s’accorde dans l a même forme que les autres , &
fe renouvelle ordinairement tous les vingt-cinq ans.
Quand l’ouvrage eft de Y académie en corps , il ne
paffe pas à la cenfure ; s’il eft d’un académicien particulier
, l’approbation de Y académie , donnée par
fon fecrétaire , eft fuffifante ; elle devient même
néceflàire, fi l’auteur, dans le titre de fon ouvrage,
.veut prendre le titre d’académicien.
Tous les ftatuts & réglemens des académies leur
ont été donnés par le roi , & ont été enregiftrés
dans les cours fouveraines ; ils ont en conféquence
force de lo i , & s’il furvenoit quelque difficulté fur
leur interprétation ou fur leur exécution, elles fe-
roient portées dans les tribunaux ordinaires , à
l ’exception de Yacadémie françoife , dont les membres
jouiffent du droit de comm\tùmus aux requêtes
de l’hôtel ou du palais. Il eft à remarquer que
jufqu’à prêtent l’exécution ou l’inteiprétation des
réglemens des académies n’ont été le fujet d’aucune
conteftation , ce qu’on ne peut dire des autres
corps, même religieux.
Les membres des académies jouiffent de l’exemption
du logement des gens de guerre , de guet 8c
de garde, de tutelle 8c de curatelle. Elles ont toutes
!, pour protecteurs , le r o i, ou un fecrétaire
d’état, ou un grand feigneur : leurs travaux ne font
pas les mêmes, mais elles ont toutes le même but,
futilité publique.
Toutes les académies jouiffent du droit d’élire
leurs membres affoçiés ou honoraires , au ferutin
& à la pluralité des voix ; elles élifent de même leur
préfident, leur directeur , leur chancelier 8c leur
fecrétaire , à moins que , dans quelques-unes , le
roi ne fe foit réfervé le choix du préfident. Les
académies de Paris doivent de plus obtenir fon agrément
, pour les fujets qu’elles ont élus.
A cadémie Françoise. C ’eft la plus ancienne
de toutes celles qui exiftent à Paris , oc la feule de
tous ces corps littéraires qui n’ait point d’affociés ,
ni d’honoraires. Elle eft admife , comme les
cours fouveraines, à haranguer le roi dans lescir-
conftances, telles que l’avénement au trône , les
mariages, la naiflànce d’un dauphin, & autres évé-
nemens remarquables : diftinCtion qu elle mérite par
l’éclat de fes lumières, par l’émulation qu’elle a donnée
aux autres académies, par fon zèle pour la deftruc-
tion de l’intolérance, 8c par les moyens qu’elle a
fu mettre en oeuvre depuis quelques années, pour
diriger l’opinion publique , & fur-tout la génération
naiffante vers les objets les plus utiles à la
fociété : elle a pour bafe les lettres-patentes de 1635,
celles de 1752 , & quelques délibérations imprimées.
Le but principal de fon établiffement eft de perfectionner
la langue nationale. Ses travaux tendent
à tout ce qui peut contribuer aux progrès de la
grammaire , de l’éloquence & de la poéfie françoife,
& au maintien de la .pureté de la langue &
du bon goût. Elle a été inftituée en l’année 16 3 5 ,
par le cardinal de Richelieu, fon fondateur & fon
proteCleur.
L 'académie françoife eft compofée de quarante
membres , elle fe choifit parmi eux trois officiers
principaux, un directeur, un chancelier & un fecrétaire
, qui eft , en même temps , le tréforier de la
compagnie. Le directeur 8c le chancelier font renouvelés
8 c tirés au fort tous les trois mois ; le
fecrétaire-tréforier eft perpétuel, & en cette qualité,
il jouit d’un logement, que le roi lui affigne au louvre.
Le directeur préfide toutes les affemblées qui
fe tiennent pendant fon trimeftre. En fon abfence,
c’eft le chancelier ; en l’abfence de celui-ci , c’eft
le doyen , & au défaut du doyen , c’eft le fecrétaire.
Lorfque. tous les.quatre manquent à la fois,
c’eft alors au plus ancien de l’affemblée que le droit
de préfider eft dévolu.
Si quelque circonftance paroît exiger que le directeur
foit continué, il peut l’être, mais jamais contre
fon gré , ni pour plus de trois mois, & encore
faut-il que l’affemblée , où cette continuation eft
arrêtée, foit au moins de douze académiciens. Le
même nombre eft requis dans toutes les délibérations
qui forment quelque engagement pour le
corps entier de Y académie.